mercredi 3 février 2010

Clearstream, page 77 et ss.

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Jean-Louis SZUBA, directeur de la sécurité de l'information
d'EADS France, était également entendu. Il précisait qu'il avait eu des contactsavec Philippe LAFLANDRE et qu'à partir du mois de janvier 2005, il avaitmanifesté son étonnement de voir confier des responsabilités à Imad LAHOUDqu'il décrivait comme un hacker "incontrôlable et immature au regard des
enjeux" (D4471/5).

Entendu à son tour le 14 octobre 2005, PhilippeLAFLANDRE expliquait avoir eu un premier entretien avec Imad LAHOUD enjanvier précédent au cours duquel celui-ci lui avait fait part de ses inquiétudes parrapport à son avenir chez EADS. Il ajoutait que, sur l'affaire du corbeau, ImadLAHOUD lui avait très rapidement confié, de façon spontanée, "ne pas avoir deresponsabilité car, à la demande de M. GERGORIN, il n'avait que chercher unlisting en utilisant ses compétences de hacker sur Internet et a remis le listing à

M. GERGORIN" (D476/2). Lors de leur rencontre du 23 mars 2005, PhilippeLAFLANDRE n'avait pu que conseiller de dire la vérité sur cette affaire à ImadLAHOUD qui lui faisait de nouveau part de ses craintes quant à son avenirprofessionnel. Philippe DELMAS avait d'ailleurs demandé à PhilippeLAFLANDRE de le rassurer. Il contestait avoir exercé la moindre pression surImad LAHOUD. Il niait également avoir parlé à Imad LAHOUD du GénéralRONDOT dont il avait découvert le nom par la presse.
b) La lettre adressée par Denis ROBERT à Imad LAHOUD le 16 janvier 2006

Par lettre du 23 janvier 2006, le conseil d'Imad LAHOUDavait informé le magistrat instructeur de la réception par son client d'un courrierde la part de Denis ROBERT, auquel était joint un exemplaire de l'ouvrageintitulé "La domination du monde" du même auteur (D519), ce qui provoquaitl'audition en qualité de témoin de Denis ROBERT par les juges d'instruction le15 mars 2006 (D585), ce dernier ayant déjà été entendu le 21 octobre 2005 par lesenquêteurs dans le cadre de la commission rogatoire.

Denis ROBERT précisait les circonstances dans lesquelles ilavait fait la connaissance d'Imad LAHOUD en février ou mars 2003, à la sortie
de prison de ce dernier. Imad LAHOUD prétendait connaître parfaitement lesystème de clearing, en tant qu'ancien broker et lui offrait son aide dans ses
recherches sur CLEARSTREAM et à l'occasion de ses procès en diffamation.

A cette occasion, Denis ROBERT affirmait qu'il avait étéamené à remettre à Imad LAHOUD, en présence de Pascal LORENT, à Metz, un
CD-rom et d'autres documents internes CLEARSTREAM, ainsi que desphotocopies de microfiches.

Par la suite, devant lui, Imad LAHOUD avait toujours nié êtrel'auteur des listings CLEARSTREAM, évoquant de façon persistante l'hypothèsed'un hackeur. Il indiquait qu'Imad LAHOUD, responsable sécurité informatiquechez EADS, se situait sous l'autorité de Jean-Louis GERGORIN et se montrait
fuyant dès que le sujet de ses relations avec ce dernier était abordé.

Entre septembre et décembre 2003, Imad LAHOUD lui avaitdit travailler pour la DGSE, et plus particulièrement pour Alain JUILLET et le

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Général RONDOT, revendiquant alors les éminents services rendus en matière delutte contre le terrorisme notamment contre la mouvance AL QAIDA.

En septembre-novembre 2004, Imad LAHOUD s'était ditmenacé, mais protégé par le Général RONDOT qui, par ailleurs, lui avait intimél'ordre de cesser toute relation avec le journaliste.

Denis ROBERT expliquait enfin que le courrier du 16 janvierétait destiné, à la faveur du départ à la retraite du Général RONDOT repris dansla presse, à renouer avec Imad LAHOUD et l'inciter à lui faire des révélations ausujet de l'affaire du corbeau que lui-même envisageait d'utiliser ensuite dans lecadre d'une fiction.

Denis ROBERT indiquait que son ordinateur avait fait l'objetd'une attaque informatique en juin 2005 et soupçonnait Imad LAHOUD d'enavoir été l'auteur.

2- les investigations auprès du Général Philippe RONDOT

a) la découverte des documents, supports de la dénonciation

Compte tenu de cette mise en lumière du rôle du GénéralRONDOT, il était procédé par les deux juges d'instruction à de multiplestransports et perquisitions au cours des mois de mars et avril 2006, et notammentaux domiciles du Général RONDOT, à Meudon (92), le 24 mars, et à Fléty (58),
le 27 mars (D603 et 607).

Au cours de la perquisition effectuée à Meudon, les magistratsinstructeurs découvraient :

- de nombreuses notes manuscrites, dites "verbatim" dans
lesquelles celui-ci retranscrivait le contenu de ses échanges et réunions avecdifférents interlocuteurs (notamment Philippe MARLAND, Michèle ALLIOTMARIE,
Jean-Louis GERGORIN, Dominique de VILLEPIN, Imad LAHOUD etdes fonctionnaires en poste à la DGSE) accompagné de ses observations etcommentaires (scellés RONDOT MEUDON et RONDOT CHANAUX). Il
s'agissait de pages de format A 4, toutes numérotées, sur lesquelles était collée
la reproduction en format réduit de pages extraites de son journal de marchequotidien qui reprenait quotidiennement, heure par heure, les réunions ou faitsqu'il avait vécus et qu'il voulait garder en mémoire. La réalité de ces réunions etentretiens téléphoniques était corroborée par les mentions figurant dans lesagendas de l'intéressé. Selon leur auteur, tous ces verbatim avaient été établis "en
temps légèrement décalé sur [ son] journal de marche, c'est-à-dire dans lesheures qui suivent l'événement" qu'ils relatent (D266617 et D2666/8) (D2714/11).
- diverses notes personnelles référencées "DEF/CROS" àdestination de Philippe MARLAND et de Michèle ALLIOT-MARIE, relatives àses investigations dans l'affaire CLEARSTREAM (désignée sous le nom de code
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"REFLUX") et au traitement des informations fournies par Imad LAHOUD autitre de la lutte anti-terroriste ("opération MADHI").

- quatre notes internes, notes d'étapes, intitulées "opérationREFLUX" retrouvées à l'occasion des opérations d'expertise de la carte mémoiredu disque dur de son ordinateur de marque HP type "iPaq" (D2698).
Parmi les très nombreux documents ainsi appréhendésfiguraient des documents relatifs à la chambre de compensation CLEARSTREAMremis au Général RONDOT ainsi qu'en attestaient ses notes de ce dernier et cecià compter du 1er octobre 2003 (scellé Rondot Meudon 6 : note sur la chronologiede l'affaire CLEARSTREAM comportant la mention: "01.10.03 JLG m'informe"
-D2566/2).

L'une de ces notes, sur laquelle le Général RONDOT avait
inscrit la mention "Remise par JLG le 23.11.03" comportait un texte similaire àcelui parvenu à la connaissance du magistrat Renaud VAN RUYMBEKE en mai
2004 (D859/30).

Ce document était ainsi rédigé :

"En 1989 WANG CHUAN POO découvre les bienfaits de la chambre de
compensation Cedel,
Il y ouvre, en tant que bénéficiaire ultime, deux comptes non publiés(2) le
12/07/1989."


Il s'agissait des comptes :

- C0043 de type "Reserved Mailbox Account",
- C0044 de type "Dual" ayant correspondant bancaire laBank of Overseas Chinese à Taïwan (ce compte n° 32-704623 à la même banqueavait été clôturé le 13 octobre 1993).
"Après 1989, WANG CHUAN POO ouvre une série de comptes "dual" chezCedel avec des correspondants bancaires dans des paradis fiscaux et financiers(5). En 1991, WANG CHUAN POO développe des liens avec des narco-traficantsen Colombie comme le démontre ses liens financiers avec le milieu par le biais ducompte "dual" n° 82313 ayant pour banque correspondante Citibank (Cititrust)
à Bogota en Colombie.

En 1992, Alain GOMEZ est initié à ce système financier parWang Chuan Poo. Il s'agit pour Alain GOMEZ d'un excellent moyen de blanchirses rétro-commissions. Le 14/10/1992, Wang Chuan Poo ouvre pour AlainGOMEZ un compte "dual" n°83656 chez Cedel (...) A son ouverture, ce compteétait crédité par le compte C0043 d'un montant de 1.000.000 $US. Jusqu'en 1994crédits parWang Chuan Poo d'environ 125 000 000 USD.

En 1994, Alain GOMEZ ouvre une série de comptes chezCedel. Il en garde une partie pour son usage personnel et dans le cadre d'unegrande cooptation à la fois mafieuse et affairiste, attribue plusieurs d'entre euxà des parrains du milieu (voir tableau 1).Les comptes de ces personnes sontsystématiquement crédités par les comptes d'Alain GOMEZ ou, à la demande dece dernier, par les comptes de son proche, Pierre MARTINEZ. On remarqueraque la Banque Julius Baer apparaît au coeur du dispositif. Les crédits sur les

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comptes d'Alain GOMEZ sont d'origines diverses à la fois en provenance descomptes de Wang Chuan Poo et de différentes sociétés offshore très
vraisemblablement utilisées comme coquilles dans le cadre d'opérations de rétro-
commissions."

Il ressortait du tableau n°1, à titre des "beneficial owner", les
noms suivants auxquels était affecté un compte numéroté CLEARSTREAM :

- Pierre MARTINEZ,
- Karel SCHMITT,
- Arkadi GAYDAMAK
- Pierre FALCONE
- EURO RSCG
- Alain de WULF
- Georges KIEJMAN
- Jean-Charles MARCHIANI
- Nadhmi AUCHI
- Marc RICH
- Alain MADELIN
"En 1996, Alain GOMEZ opère une deuxième grande cooptation en initiantplusieurs oligarques aux bienfaits des comptes dans des chambres decompensations (voir tableau 2). Clairement, il s'agit d'une initiation de ces
jeunes hommes d'affaires. Ils n'apparaissaient pas avant cette date dans ce
système financier. Les oligarques ouvriront à leurs tours des comptes de ce typepour la gestion de leurs affaires en russie. En échange de cette initiation, lesoligarques agiront plus tard comme banquiers et financiers permanents d'AlainGOMEZ et de ses troupes".

On dénombrait trois personnes dans le tableau n°2 :

- Roman ABRAMOVITCH,
- Mikhaïl KHODORKOVSKI,
- Oleg DERIPASKA.
"En 1999, Alain GOMEZ opère une troisième cooptation qui se traduit parl'arrivée d'un cadre dirigeant d'AIRBUS. Il s'agit de Philippe DELMAS.
Plusieurs autres personnages apparaissent dans ce qui semble ressembler à unegrande entreprise de corruption à dérive maffieuse (voir tableau 3).
Philippe DELMAS prend une importance particulière dans ce dispositif dans lamesure où tout versement venant d'Alain GOMEZ ou des oligarques au bénéficedes lieutenants initiés en 1999 passe quasi systématiquement par ses comptes àlui".

Apparaissaient dans ce tableau n°3 les noms suivants :

- Philippe DELMAS,
- Edin CAYBAN CAYKARA,
- Serge de KLEBNIKOFF,
- Fabien BOSSART,
- Petar MAJOUKOW.
"En 2000, Philippe DELMAS coopte à son tour plusieurs personnes travaillantpour le compte de la nation. Il s'agit essentiellement de hauts fonctionnaires del'administration Française dont une partie jouera un rôle crucial dans la tentative

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de déstabilisation du chef de l'Etat Jacques CHIRAC (voir tableau 4 et 4bis)".

Apparaissaient dans le tableau n°4 les noms suivants :

- Bernard SQUARCINI,
- Gilbert FLAM,
- Jean-Jacques MARTINI,
- Alain CHOUET,
- Edouard ULMO,
-PRETORY SA,
- Jean-Pierre JOULIN.
tandis que le tableau 4bis regroupait un certain nombre de transactions.
"Par la suite, Philippe DELMAS coopte plusieurs personnes de divers horizonstrès divers dans l'administration, l'industrie et la presse. Il rémunère certainesd'entre elles de manière périodique ou par des primes dans le cadre d'opérationssur commandes (voir tableau 5 et 5bis)".

Apparaissaient dans ce tableau n°5 les personnes suivantes :

- Philippe DELMAS,
- Dov YOFFE,
- le fonds CARLYLE,
- Gérald de ROQUEMAUREL,
- Alain LEMARCHAND,
- Jean-Pierre JOULIN,
- AlimjanTOCHTAKHOUNOV,
- Dominique BAUDIS,
- Laurence DORS,
- Oan OHAD,
- Irène STOLLER,
- Jean-François DUBOS,
- Alexandre JEVAKOFF,
- Thierry DANA,
- Edwy PLENEL,
- Dominique AMBIEL,
- Bernard MAINFROY,
- Jean VEIL.
tandis que le tableau 5bis regroupait un certain nombre de transactions.
"Si la masse financière injectée dans le circuit par les oligarques s'élève à 3Milliards d'euros, on estime à 4 Milliards d'Euros le montant hors oligarquesinjectée dans ce circuit. C'est le fruit de rétro-commissions sur l'attribution demarché dans l'industrie de l'armement et le Narco-Trafic.
Alain GOMEZ reçoit le 9 octobre 2003 sur son compte 83656 un virement de

1.200 Millions de USD de Mikhaïl KHODORKOVSKI (compte numéro :84601).
Alain GOMEZ transfert 225.000.000 Euros au compte 03778 de PhilippeDELMAS. Par le biais du compte 73067, ces 225 Millions sont nantis au profitd'un compte maison chez Julius Baer qui souscrit au nom de la banque dans lefond offshore "Highfields Capital Limited" qui s'est manifesté depuis deux ans parune montée régulière dans le capital de Lagardère dont il était le plus grosactionnaire avec 7% du capital au 30-8-2003."
Etaient joints à cette note, outre les 7 tableaux déjà cités,

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L 5 annexes ayant trait :
- à l'activité de CLEARSTREAM, chambre de compensation, au regard de ses
statuts,
- aux comptes "RMBA",
- aux comptes "dual",
- aux paradis fiscaux;
L un document manuscrit intitulé "ANNUAIRE CATEGORIEL" (D859/31 etscellé RONDOT MEUDON 7),
L un document intitulé "SYNTHESE (OUTRE LES DEUX FONDATEURS)",
(D859/33
scellé RONDOT MEUDON 7),
L deux pages de listings identifiant une centaine de comptes ouverts chezCLEARSTREAM.
b) la révélation du contexte de cette dénonciation

Il était ensuite procédé à l'audition du Général PhilippeRONDOT en qualité de témoin le 28 mars 2006, celui-ci expliquant avoir reçu cesdocuments des mains de Jean-Louis GERGORIN au cours des mois d'octobre et
novembre 2003.

Il ressortait de cette audition les éléments suivants :

•sur ses relations avec Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD :
- il entretenait depuis les années 70-80 des relations avec Jean-
Louis GERGORIN au Centre d'Etudes de Politique Etrangère où il avait étéappelé comme consultant par celui-ci, dirigeant le Centre d'Analyse et dePrévision du ministère des Affaires Etrangères, sur les problèmes avec le mondearabe et musulman ainsi que les organisations radicales palestiniennes ;
- il avait fait la connaissance d'Imad LAHOUD parl'intermédiaire de Jean-Louis GERGORIN à l'époque où lui-même occupait lesfonctions de CROS auprès du Ministre de la Défense en novembre 2002 et aveclequel il avait intensifié ses relations depuis janvier 2003 ;
- à ses yeux Imad LAHOUD pouvait présenter un intérêt dansla lutte anti-terroriste et semblait avoir des connaissances sur les financements des
mouvements radicaux parmi lesquels ceux d'Oussama Ben Laden ;
- l'ayant mis en relation avec la DGSE qui l'avait "traité"
pendant 6 mois, il demeurait toutefois informé des résultats de ses opérations parle biais d'Alain JUILLET devenu depuis Haut responsable au Secrétariat Généralde la Défense Nationale (SGDN) ;
- à l'issue, il avait continué à utiliser les compétences d'ImadLAHOUD et sa connaissance du réseau BEN LADEN, en lui confiant des
recherches sur les financements des réseaux de criminels de guerre en Bosnie enseptembre octobre 2003, alors qu'Imad LAHOUD poursuivait ses activités deconsultant d'EADS.
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• sur la dénonciation:
Le Général RONDOT exposait qu'au début novembre 2003,
une rumeur circulait au sujet d'une liste de personnalités et de fonctionnaires ayantbénéficié de rétro-commissions dans l'affaire des Frégates. Au cours d'uneconversation dans son bureau au ministère de la Défense, le sujet était évoqué parJean-Louis GERGORIN qui lui confirmait cette rumeur et lui remettait un listinginformatisé comportant des numéros de comptes, des noms de titulaires, lamention d'entrée et de sortie de fonds et de mouvements. Ce listing faisait 2 ou3 pages (D610-4).

Ayant eu ce document en mains, il avait pu constater qu'yfiguraient une centaine de noms parmi lesquels des hommes politiques(Dominique STRAUSS-KAHN, Laurent FABIUS, Alain MADELIN), des hautsfonctionnaires (le Général HEINRICH, Jean-Jacques MARTINI, BernardSQUARCINI, Gilbert FLAM, Alain CHOUET, Serge de KLEBNIKOFF), desindustriels (Alain GOMEZ, Philippe DELMAS et Pierre MARTINEZ, Jean-PierreJOULIN) et des personnalités diverses ( Alizée JACOTET et Laetitia CASTA).

Il avait également constaté qu'étaient mentionnés des nomsde personnes russes, suisses, italiennes, ou des noms de sociétés étrangères.

Si le nom de CLEARSTREAM n'apparaissait pas sur ledocument, Jean-Louis GERGORIN lui avait alors précisé qu'il s'agissait decomptes ouverts chez CLEARSTREAM aux noms d'Alain GOMEZ, ancienprésident de THOMSON et, principalement, de Philippe DELMAS, n°2
d'AIRBUS.

Le listing contenait une liste de mouvements financiers venantcréditer ou débiter ces comptes pour ensuite en créditer divers autres ouverts dansdifférentes banques françaises, suisses ou italiennes.

Il avait rendu compte à Philippe MARLAND de la teneur deces informations livrées par Jean-Louis GERGORIN et des documents que celui-
ci lui avait remis. Le Général RONDOT avait obtenu l'autorisation d'en vérifier
l'exactitude en ce qui concernait le personnel de défense et Jean-Jacques
MARTINI.

Par ailleurs, Imad LAHOUD lui avait fourni dans son bureau
les listes de transactions sur lesquelles apparaissaient les noms de Gilbert FLAMet Jean-Jacques MARTINI.

Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN avaient poursuivile processus d'information mais le principal informateur était LAHOUD(D2666/10). Il semblait très informé de "l'affaire japonaise", connaissantl'implication de Gilbert FLAM et Alain CHOUET. Quant à Jean-Louis
GERGORIN, il en avait eu connaissance par Jean-Louis COUSSSERAN (anciendirecteur de la DGSE).

Selon le Général RONDOT, Jean-Louis GERGORIN
paraissait persuadé de l'authenticité des informations remises par sa source ImadLAHOUD qui les avait obtenues par pénétration du système informatique de

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CLEARSTREAM. Il avait pris conscience que cela devenait important quand ilavait été convoqué par Dominique de VILLEPIN, le 4 ou 5 janvier suivant.

C - L'analyse des données fondant les dénonciations

1-Les constatations d'Yves BAGUET

Agissant sur commission rogatoire, les enquêteurs de la DNIFprocédaient le 29 mai 2006 à l'audition d'Yves BAGUET, Managing DirectorInformatique de la société CLEARSTREAM à Luxembourg (D938).

Lui étaient présentés :

-le listing placé sous la cote D119 (dénonciation du 3 mai 2004),
-le listing placé sous la cote D123 (dénonciation du 14 juin 2004),
- un fichier informatique intitulé "DS_PROD_ACCOUNT" , supportant ladernière date de modification du 27 juillet 2004 sous les versions "access" et"excel"(scellé n°1 du PV du 26 août 2004),
- un fichier informatique contenu dans un répertoire"envoi simple" créé le 15septembre 2004 intitulé "extrait-03778", extrait-90762", avec une dernière
modification le 30 septembre 2004 (scellé unique du PV du 5 octobre 2004).
Il ressortait de cette audition que, selon le témoin, les listings,
supports des dénonciations incriminées, étaient issus des données
CLEARSTREAM mais avaient été altérés ou modifiés.

A cette occasion, diverses incohérences étaient relevées :

- les identifiants des sociétés clientes ou de contreparties ou de comptes internescommençaient par un "9" pour la société Euroclear, par un "E" pour la sociétéIbeclear, le dépositaire central espagnol, le "7" et le "5" pouvant être des clientsCLEARSTREAM.
- le compte C0043 était un compte client participant du dépositaire italien et nond'un client de CLEARSTREAM /RMBA ;
- le compte 82313 était attribué à Cititrust Bogota Colombia sans aucune référenceà Alain GOMEZ ;
- le compte 83656 ouvert en 1999 n'avait pas davantage de lien avec cette
personne.
Il était en outre précisé que la "code-list" (comprenant la listedes banques dépositaires, des clients, des participants en Euroclear, les clients dudépositaire central allemand, et les codes de contreparties domestiques, soit lesparticipants auprès de tous les dépositaires centraux de tous les pays avec lesquelsCLEARSTREAM avait un compte correspondant) était envoyée aux clients deCLEARSTREAM, puis était consultable par eux sur le site et cela jusqu'enjanvier 2005, quand un code d'accès fut institué.

Sur le 2ème listing (du 14 juin), Monsieur BAGUET relevait
que :

- pour le compte N0055, dont le statut "n" signifiait qu'iln'était pas publié alors que par sa nature de contrepartie domestique hollandaiseil devait être publié et avoir le statut "y";
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- pour les comptes 03638, 03637 et 03639, figurant en page13 du listing, les comptes commençant par "0" correspondaient à une techniquede contrôle interne (technique de l'"Umbrella crédit") mise en place en août 2003et demeurée confidentielle ; l'utilisation de ce "0" étant incompatible avec lamention d'un nom de personne en regard de l'intitulé du compte ;
- les comptes C0723 et C0724 correspondaient à descontreparties du dépositaire central italien alors qu'ils étaient situés en Turquie ;
- la clôture de tous les comptes à une même date (le 12 mai2004) apparaissait très improbable ;
- un compte (D123/20) était référencé sur quatre caractères(3881) au lieu de cinq.
2 - la communication au procureur de la République et l'enquêtepréliminaire qui a suivie

Le 13 juillet 2004, Renaud VAN RUYMBEKE communiquait auProcureur de la République les premiers éléments parvenus en sa possessionsusceptibles d'être inclus dans les dénonciations anonymes :

- le premier courrier du 3 mai 2004,
- le second courrier anonyme arrivé le 14 juin 2004 avec une liste de comptesCLEARSTREAM, et diverses auditions et transports.
Le procureur de la République adressait le même jour aux autoritésluxembourgeoises une demande d'entraide judiciaire afin de vérifier la crédibilitéet l'authenticité des données communiquées par le magistrat instructeur, dans lapartie échappant à la saisine de ce dernier :

- faits de 1994 et au-delà dénoncés dans le premier écrit,
- un deuxième envoi reçu par le juge d'instruction le 9 juin 2004 sous laforme d'un CD-Rom qui lui avait été adressé sous la forme anonyme depuis Lyon,
- un troisième envoi anonyme reçu le 14 juin 2004 composé d'une lettresignée "DT" et d'une liste exhaustive de 895 comptes prétendument clôturés à lasuite des premières investigations lancées par le magistrat instructeur.
Cette demande était complétée les 12 août, 28 septembre et 4 novembresuivants Il était alors mentionné la réception par le juge d'instruction, le 20 août2004, d'un nouvel envoi anonyme sous la forme d'un CD-Rom.

Les autorités luxembourgeoises portaient ainsi à la connaissance duprocureur de la République de Paris les éléments suivants :

L les comptes 03637 (Jean-Pierre CHEVENEMENT), 03639 (Philippe DOURY),
37034 (Gérald de ROQUEMAUREL),37035 (Alain LEMARCHAND), 37067(Jean Pierre JOULIN) et 37070 (Mme HOMA K ZAND), de même que laréférence 9DTVE (attribuée à Gilbert FLAM) n'avaient pas existé chezCLEARSTREAM au cours des 10 dernières années.
L le format du document du 20 août correspondait au format d'informationsstockées dans le système DATASERVER de CLEARSTREAM BANKING, dontl'accès était restreint à un nombre limité d'employés, mais laissait apparaîtreplusieurs modifications externes :
• les intitulés (zone "ACCT_NM") avaient été modifiés pour 5 comptes ;
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• la colonne intitulée "ACCT_STATUS_ FLG" indiquait pour certainscomptes une lettre "N" ou "E" alors que les seuls paramètres possibles étaient leschiffres "0" et "1" ;
• les dates de création (zone "CREATION_ DT") étaient antérieures au 31octobre 1994 ce qui ne correspondaient pas aux dates figurant dans les donnéesinformatiques de la banque ;
• les dates des dernières mises à jour (zone "LST_UPDATE") de plusieurscomptes étaient postérieures pour plusieurs d'entre elles à la date de clôture (zone"END_DATE").
Il était également confirmé que les comptes CLEARSTREAM nepouvaient être ouverts au nom d'une personne physique mais uniquement au nomd'un client de la chambre de compensation ne pouvant être qu'une banque ouorganisme financier.

De plus, il était indiqué que la pratique des "Reserved Mail Box Account"
correspondait à des comptes normaux répondant à des besoins précis de clientsbelges et n'avait aucun rapport avec les "holdmail Account".

Le procureur de la République décidait de classer sans suite la diteprocédure le 29 août 2005 au motif de "l'absence d'infraction".

Les pièces d'exécution étaient versées au présent dossier d'information le18 mai 2006.

L'ensemble des éléments précités provoquait l'extension, par réquisitoiresupplétif du 31 mai 2006, de la saisine des magistrats instructeurs aux faits de fauxet usage de faux (D933).

3 - les investigations réalisées par le juge d'instruction dans le cadrede l'information des Frégates de Taïwan

Alors que les éléments rassemblés jusque- là dans le dossier des Frégatesde Taïwan conduisaient à penser que CLEARSTREAM pouvait héberger descomptes dans l'intérêt du dénommé WANG et était susceptible d'être utiliséepour le blanchiment d'opérations illicites, Renaud VAN RUYMBEKE avait lui-
même fait procéder à diverses vérifications auprès de la chambre de compensationluxembourgeoise ainsi que des banques étrangères en Suisse, en Italie, à Chypre,
en Colombie et en France, notamment auprès de BNP PARIBAS, afin de vérifierl'exactitude des données reçues en ce qu'elles étaient en rapport avec l'objet deson information.

a) auprès des autorités luxembourgeoises chez CLEARSTREAM

Dès le 3 mai 2004, le juge Renaud VAN RUYMBEKE délivrait auxautorités luxembourgeoises une première commission rogatoire internationale auxfins de rechercher et d'identifier les comptes dont les dénommés Chuan Pu

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Andrew WANG et ses "proches", ainsi que Alain GOMEZ, Pierre MARTINEZet Philippe DELMAS, avaient été les ayants droit économiques, les titulaires oumandataires de comptes auprès de CLEARSTREAM et qui auraient étédestinataires des commissions versées par Thomson ayant le cas échéant transité
par ces comptes :

- comptes C0043, C0044 et 82313 attribués à Chuan Poo WANG,
- comptes 83656 et 73067 attribués à Alain GOMEZ,
- compte 03778 attribué à Philippe DELMAS (compte correspondant chezJULIUS BAER à Genève prétendument lié à un compte Highfields Capital
Limited).
Le même jour, un courrier complémentaire élargissait les investigations àcertains comptes nommément cités :

- compte E3521, 73067 au nom de Pierre MARTINEZ,
- comptes 87032 , C2059, 9DTVU, 9DTVE et C2071 au nom d'Alain GOMEZ.
Le 7 mai 2004 (D2845), il ressortait des perquisitions et auditionsdiligentées au Luxembourg, dont le résultat n'était communiqué aux jugesd'instruction saisis de la présente procédure, sur demande de leur part, qu'enfévrier 2006 (D527), les éléments suivants :

• sur la définition du clearing-settlement :
Il ressortait de ces éléments d'information que CLEARSTREAMBANKING cumulait les fonctions de dépositaire central et d'organisme declearing. L'interconnexion informatique de ces deux types d'organismesconstituait un système de règlement-livraison (clearing-settlement). Ce systèmeprocédait au dénouement des transactions boursières suite aux instructions de sesparticipants (banques, courtiers).

Ainsi, comme dépositaire central, elle conservait des valeurs mobilièrespour le compte de ses clients et exécutait les livraisons sur instruction de cesderniers ou bien d'organismes de compensation (par exemple "MONTE TITOLI"
en Italie). Comme organisme de clearing, elle rapprochait les instructions d'achatet de vente des intermédiaires financiers pour déterminer valeur par valeur lessoldes nets des titres et espèces, procédant ainsi à la compensation desmouvements sur lesdites valeurs.

Il était indiqué que la société CLEARSTREAM BANKING ne faisait pasde transfert de fonds (cash) entre personnes physiques.

En ce qui concerne les personnes morales, CLEARSTREAM BANKINGn'effectuait pas en général de transfert de fonds entre ces personnes morales sanscontreparties sous forme de titres.

Il était noté que CLEARSTREAM n'était pas en possession des documentstraditionnels identifiant le bénéficiaire économique mais détenait les procurationsaccordées uniquement à des personnes morales.

• sur les publications de CLEARSTREAM :
CLEARSTREAM publiait régulièrement une sorte d'annuaire (directory)
reprenant l'ensemble des comptes de ses clients et des contreparties dans lesystème de compensation (comptes publiés). Cet annuaire permettait aux banquesdu monde entier de savoir si une banque correspondante détenait un compteauprès de CLEARSTREAM.

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Une banque pouvait avoir plusieurs comptes ouverts auprès deCLEARSTREAM et dont certains pouvaient être des comptes non publiés. Ainsi
une banque pouvait-elle détenir un compte publié par lequel passait l'ensembledes transactions avec les contreparties qui utilisaient ce compte, mais égalementdes comptes non publiés correspondant par exemple aux différents fondsd'investissement qu'elle gérait ou encore aux différentes agences faisant partie deson réseau.

Il s'en déduisait qu'un compte non-publié n'était pas synonyme de compteocculte.

Les comptes faisant le lien entre CLEARSTREAM et EUROCLEAR, les"bridge-account", ne pouvaient pas être mouvementés mais permettaient à chaquepartie de faire le lien avec les clients respectifs de sa contrepartie (d'où la nécessitéde disposer de deux comptes "bridge" par opération).

L'organisme de contrepartie au système de compensation de
CLEARSTREAM faisait écran devant sa propre clientèle qui est cependant lebénéficiaire économique ultime d'une transaction sur titre.

En résumé, au terme des investigations luxembourgeoises,
CLEARSTREAM pouvait être perçue comme mettant à disposition de cesparticipants un contenant, sans être en mesure d'exercer un contrôle du contenu.

• sur les modalités d'enregistrement des données chez CLEARSTREAM :
Les numéros de comptes CLEARSTREAM BANKING étaient composésde cinq caractères (chiffres ou lettres), les comptes débutant par 1,2,3,5,7 ou 8étaient des comptes de clients de la société enregistrant les mouvements des titresou avoirs.

Les comptes débutant par une lettre étaient des comptes de contrepartiesdomestiques c'est-à-dire provenant de maison de compensation telles queEURONEXT (France), NECIGEF(Pays-Bas) et MONTE TITOLI (Italie); cesdonnées sont uniquement enregistrées dans la "database" pour information mais
ne constituaient pas des comptes valides de clearing et settlement.

Les comptes débutant par "0" contenaient des informations relatives à deslignes de crédit et ne constituent pas des comptes valides.

• sur la réalité des comptes visés :
Les autorités luxembourgeoises apportaient les réponses suivantes sur laréalité des comptes visés :

- le compte C0043 ressortait comme le compte d'un opérateur domestiqueitalien(lettre C) probablement fermé le 18 février 1993. Ce compte de contrepartieavait été ouvert sous l'intitulé "ADORNO GIOVANNI-STOCKBROKER-
Milan" ;
- le compte C0044 ressortait comme le compte d'un opérateur domestique italien(lettre C), clôturé à une date inconnue (probablement le 6 avril 1993) sousl'intitulé "SOFIR'S-Commissionaria di Borsa -Milan", un nouveau compte ayantété créé sous ce numéro le 9 septembre 2003 sous l'intitulé "BNP PARIBASARBITRAGE" et clôturé le 29 janvier 2004 ;
- le compte C2059, compte d'opérateur domestique italien fermé en 1997 dontl'intitulé était apparemment "Ag.Cambio Pucccini Fabrizio", avait dû être effacéavant 1994 ;
- le compte C 2071 initialement ouvert sous l'intitulé "Ag.Cambio ColombaNicola" n'avait pas existé au cours des dix dernières années ;
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- le compte 82313 ouvert le 1er décembre 1997 au nom de "CITITRUST
COLOMBIA SA à BOGOTA" paraissait toujours actif ;
- le compte 83656 (non publié, rattaché au précédent) était ouvert depuis le 14octobre 1999 au nom de "CITITRUST SA- HUGO CARCERES GOMEZ" et
clôturé le 17 mai 2001 ;
- le compte 87032 (non publié, rattaché au 82313) ouvert au nom de CITITRUSTSA CARLOS EDUARDO GOMEZ avait été clôturé à une date inconnue et
n'avait pas enregistré de transactions supérieures à 15.000 $US;
- le compte E3521, compte opérateur domestique espagnol IBERCLEAR (ouvertle 18 juillet 1989 sous le n° EB040 puis changé en E3521 en 1994 et clôturé le 25mai 1995), réouvert depuis 2003 au nom de BBVA Banca Bilbao ViscayaArgentaria, apparaissait dans le système CLEARSTREAM sous l'intitulé
"MARTINEZ GIL Y ASSOCIA AVB SA" ;
- le compte 73067 ouvert le 8 août 1992 au nom de la société Banque JULIUSBAER-PLEDGE AC était clôturé le 14 décembre 1995; il s'agissait d'un comptenon publié du compte principal 11622 ;
- le compte 03778 attribué à Philippe DELMAS dès la première lettre anonyme,
était détenu par la société bancaire JULIUS BAER PL AC 73067, relié à un sous-
compte non publié 73067 attribué au même titulaire ; le compte 03778 était encoreouvert tandis que le compte 73067 était clôturé depuis le 14 décembre 1995 ;
- les comptes 9 DTVE et 9 DTVU n'avaient pas existé pendant les 10 dernièresannées, les voyelles étant proscrites depuis 1997 ; il s'agissait d'un compte decontrepartie EUROCLEAR (bridge account); ce compte était attribué à GilbertFLAM dans le CD-ROM du 20 août ;
- le compte C2059 avait dû être effacé dès avant 1994. Il existait un doute sur
l'exactitude de l'information provenant de MONTE TITOLI relatant que cecompte aurait été clôturé en 1997.
b) les investigations réalisées auprès des clients de CLEARSTREAM

En France, le juge d'instruction procédait à l'audition des responsables deBNP PARIBAS sur l'existence des comptes 80501, 81460, 89463, 89471, 89472,89473, 80455, 81535 et 81781 dont l'existence n'était pas confirmée, précisant
que BNP PARIBAS SECURITIES disposait de 44 comptes chez
CLEARSTREAM mais qu'aucun de ceux qui étaient cités n'en faisait partie.

 Le 4 mai 2004, une commission rogatoire internationale avait par ailleursété adressée aux autorités suisses afin d'identifier les comptes auprès de la banqueJULIUS BAER et de la Banque Cantonale Vaudoise à Lausanne, correspondantesde CLEARSTREAM.

Les réponses obtenues des autorités luxembourgeoises permettaient depoursuivre par ailleurs les investigations auprès des banques clientes deCLEARSTREAM et des chambres de compensation domestiques.

C'est ainsi qu'un complément de mission était adressé aux autoritéssuisses le 12 août 2004 en vue d'identifier les comptes suivants enregistrés le 31octobre 1994 chez CLEARSTREAM :

- 03637 attribué à Jean-Pierre CHEVENNEMENT,
- 03638 attribué à Bernard DELAFAYE,
- 00639 attribué à Philippe DOURY,
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ainsi que, plus généralement, tous comptes ouverts à la Banque CantonaleVaudoise à Lausanne.

Une commission rogatoire internationale était établie à destination de laColombie (en date du 26 juin 2004, exécutée le 14 octobre 2005) afin d'identifierles comptes dont Chuan Pu Andrew WANG et ses proches auraient été lesbénéficiaires économiques auprès de la Citibank (en particulier le compte 82313au nom de "Cititrust"), ainsi que les comptes dont Alain GOMEZ aurait été lebénéficiaire économique :

- le compte n° 83656 (au nom de "Cititrust -Hugo Caceres Gomez"),
- le compte n° 87032 (au nom de "Cititrust-Carlos Eduardo Gomez"),
ces comptes figurant parmi ceux qui selon le second courrier anonyme auraient étéclôturés le 12 mai 2004 (D1046).
Il en résultait que le nommé Hugo CACERES GOMEZ disposait decomptes à la Citibank de Bogota et avait des liens avec la société fiduciaire de laCitibank dénommée "Cititrust".

La perquisition effectuée dans cet établissement permettait d'y découvrirle compte 82313. Les sous-comptes 83656 (ouvert le 14.11.89 et fermé le17.05.01) et 87032 (ouvert le 19.01.00 et fermé le 17.05.01) avaient pour titulairesrespectifs Hugo Enrique GOMEZ CACERES et Carlos Eduardo GOMEZVARGAS, tous deux étant identifiés et l'un d'eux étant commerçant. L'un et
l'autre déclaraient avoir tout ignorer de l'existence de CLEARSTREAM enouvrant le compte 82313 et des sous-comptes à leurs noms, n'avoir souscrit aucuncontrat avec Cititrust et ne pas connaître les dénommés WANG et GOMEZ.

Un accord global avait réellement existé entre Citibank de Colombia etCititrust Colombia. Le 14 avril 1997 des liens avaient bien été établis avec
CEDEL Bank par l'ouverture d'un compte 82313.

Une autre commission rogatoire était adressée aux autorités italiennes (en
date du 13 août 2004, exécutée le 28 septembre 2004) destinée à vérifier auprèsde la Banca Intesa et de MONTE TITOLI l'existence et la correspondance descomptes C0043, C0044, C2059 (intitulé "Ag.Cambio Puccini Fabrizio") et C2071(intitulé "Ag. Cambio Colomba Nicola"), ainsi que les comptes ouverts à la BancoPopulare di Sondrio, et correspondant à des comptes n°16438, 16439 ouverts chezCLEARSTREAM et attribués respectivement à Paul de NAGY (R6439) etStéphane BOCSA (R6440), et d'en vérifier les intitulés tels qu'ils ressortaient desrenseignements fournis par CLEARSTREAM Banking (D 1045).

Cette commission rogatoire internationale n'était retournée au magistratmandant qu'en octobre 2005.

Il en ressortait que selon la Banca Populare di Sondrio les comptes 16439,
R6439 et R6440 ne se rapportaient pas à cet établissement. Seul le compte 16438en relevait.

MONTE TITOLI indiquait qu'elle ne disposait pas de trace des comptesC0043,C0044,C2059 et C2071. Cet établissement identifiait Adorno GIOVANNI,
SOFIR'S commissionaria di Borsa et Nicola COLOMBA comme étant des agentsde change.

Une commission rogatoire internationale était adressée aux autoritésjudiciaires de Chypre le 26 juin 2004 afin de procéder aux vérifications relativesaux comptes n° 83025 et 32516 ouverts au nom de la Russian Com Bank àLimassol mais dont le véritable titulaire aurait été Dominique STRAUSS-KAHNselon la correspondance du 14 juin. Ces comptes ressortaient inconnus dans cet

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établissement.

Le 13 août 2004, le magistrat instructeur complétait sa demande d'entraideadressée au autorités luxembourgeoises en étendant les recherches au compteréférencé chez CLEARSTREAM sous le n° 80807 ouvert le 19 décembre 1994
par la Citibank de Luxembourg chez CLEARSTREAM et qui aurait été utilisé parAlain MADELIN, ministre des Entreprises du 30 mars 1993 au 11 mai 1995. Lemagistrat instructeur s'intéressait au lien pouvant existé entre ce compte etl'avenant du contrat des frégates, signé le 4 juin 1993, ayant généré uncomplément de prix de plus de 1 milliard de francs, et une majoration descommissions versées (D2918).

Une extension visait, aux termes de la commission rogatoire internationaledu 26 août 2004 adressée aux mêmes autorités, les comptes dont CITITRUST SA(de la Citibank de Bogota) avait disposé chez CLEARSTREAM depuis 1991,
notamment :

- un compte n°82313 ouvert antérieurement au 1er décembre 1997,
- un compte n°83656 ouvert le 14 octobre 1992,
et la recherche des opérations ayant pu affecter particulièrement les comptes :
- n°87032(CITITRUST SA - Carlos Eduardo Gomez) ,
- n°87127 (CITITRUST SA- Eduardio Gomez Orduz).
Une dernière demande à destination du Luxembourg, aux termes d'unecommission rogatoire internationale du 30 août 2004, tendait à vérifier la réalitédu compte ouvert chez CLEARSTREAM sous le n°73071 qui aurait fonctionnépour le compte d'Alain de WULF (D2920).

Au terme de son instruction, Renaud VAN RUYMBEKE rendait une
ordonnance de non lieu en date du 1er octobre 2008, décision devenue définitive.

4 - les investigations réalisées dans le cadre de la présente information

a) les déclarations faites par Florian BOURGES

Les juges d'instruction apprenaient le 7 juin 2006, à l'occasion del'audition de Florian BOURGES, qui s'était manifesté spontanément auprèsd'eux, que celui-ci avait participé courant juillet à septembre 2001, alors qu'il étaitélève de l'EDHEC, stagiaire au sein du cabinet d'avocats BARBIER FRINAULT& ASSOCIES, membre du réseau ARTHUR ANDERSEN en soutien du cabinet
ARTHUR ANDERSEN Luxembourg, à une mission d'audit de la chambre decompensation CLEARSTREAM. Il avait, à l'issue de cette mission, conservé pardevers lui les documents de travail et les données qu'il avait eu en sa possession
pour ce travail, dont celles qu'il avait extraites des bases de données
CLEARSTREAM.

• sur la provenance des données :
Pour les besoins de sa mission, il avait eu accès à deux bases internes :

- une base clients dénommée "DS_PROD-ACCOUNT" qui regroupait tous lesclients et tous les comptes disponibles au sein de CLEARSTREAM,
- une autre base qui regroupait toutes les transactions réalisées.
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Florian BOURGES indiquait qu'il avait fourni ces données sous forme deCD-ROM dans un premier temps à Denis ROBERT courant 2002, puis à ImadLAHOUD en septembre 2003.

Pour attester de ses dires, il remettait aux enquêteurs le CD-ROM surlequel figuraient selon lui :

- l'ensemble des données clients CLEARSTREAM extraites le 3
septembre 2001 et regroupées sous un même fichier "Db3.zip", remises à DenisROBERT puis à Imad LAHOUD ;
-plusieurs milliers de transactions regroupées dans un fichier
"Clearstream.zip. parmi lesquels Imad LAHOUD avait copié lors de leur dernièrerencontre celles qui l'intéressaient.
Il précisait que la mission d'audit de CLEARSTREAM (CS) avait
mobilisé une trentaine de collaborateurs des bureaux de Paris, New-York,
Londres, Francfort, Luxembourg et Bruxelles. Le bureau parisien avait été plusparticulièrement chargé de l'audit du système informatique auquel il avait eu accèspendant les trois mois qu'avait duré la mission. Son travail avait consisté àrécupérer des informations à la demande de ses collègues, notamment destransactions, concernant des comptes au sein de CLEARSTREAM, de fouillerlibrement dans le système informatique et de relever toutes les incohérences ouanomalies, ce qui donnait lieu à l'établissement de "mémos" adressés à sessupérieurs.

Il était allé chercher ces informations sur une base de données dénommée
DATA SERVER, qui elle-même était une extraction du système au sein duquelétaient enregistrées les opérations de compensation. Cette base de 200 Go de
données incluait en fait plusieurs milliers de bases au sein desquelles étaientsélectionnées celles relatives aux opérations de l'année 2001, mais pouvantremonter jusqu'en 1998 ou 1999.

Il avait conservé des mémos, des copies de l'ensemble de son travail, dedocuments qu'ARTHUR ANDERSEN Luxembourg ne lui avait jamais réclamés,
ce cabinet ayant disparu après l'affaire ENRON).

• sur les transmissions des données à Denis ROBERT et Imad LAHOUD :
A l'occasion de leurs échanges de mails, Florian BOURGES avait transmiscourant 2002 à Denis ROBERT la base clients de CLEARSTREAM extraite le
3 septembre 2001 et qui comportait 33.430 comptes clients, sous format Excel.

Pendant l'été 2003, Denis ROBERT comparaissait devant le tribunalcorrectionnel de Paris pour diffamation à la requête de la société
CLEARSTREAM. Denis ROBERT lui annonçait que quelqu'un voulait lerencontrer, il s'agissait d'un certain "Imad", ancien trader licencié d'une banqueanglaise, qui pensait qu'en utilisant les fichiers CLEARSTREAM, il pourrait nuireà la réputation de son ancien employeur. Il avait ensuite rencontré Imad LAHOUDà deux reprises.

Ils se rencontraient au Bistrot d'Edouard à Courbevoie, la première fois finaoût-début septembre 2003. Imad LAHOUD l'avait interrogé sur
CLEARSTREAM, notamment sur le fonctionnement des bases de données. Imad
LAHOUD lui était vite apparu incompétent en informatique (alors qu'il était décrit

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par Denis ROBERT comme un "pro", capable de pirater CLEARSTREAM), ImadLAHOUD avait alors changé de discours en révélant qu'il travaillait pour laDGSE pour une mission de lutte anti-terroriste liée à AL QAIDA et pensaitpouvoir utiliser CLEARSTREAM pour repérer des flux de transactions liés à cesréseaux terroristes.

Le discours d'Imad LAHOUD lui avait paru crédible. Celui-ci avait exhibéune carte de visite avec le logo "République Française" et l'adresse du 16, rueSaint Dominique. Il lui avait demandé de ne pas révéler à Denis ROBERT sonactivité auprès de la DGSE.

C'était en septembre 2003, qu'avait eu lieu au même endroit la remise desfichiers, par transfert sur une clé USB biométrique, à la demande d'ImadLAHOUD.

Les données copiées provenaient des fichiers clients, des fichierstransactions ainsi que des mémos. Imad LAHOUD lui avait proposé uneindemnisation sous la forme d'une aide pouvant émaner de l'unité d'EADS dirigéepar son frère Marwan LAHOUD.

Imad LAHOUD était apparu très intéressé par les comptes non enregistrésfigurant dans les fichiers transactions ("UNK_ACCOUNT" appelés "comptesfantômes" par Denis ROBERT ) et non pas dans les fichiers clients.

• sur la révélation de la falsification des données :
Florian BOURGES ajoutait qu'en juin 2004, il avait été sollicité par DenisROBERT afin d'aider le juge VAN RUYMBEKE dans l'analyse des donnéescontenues dans les documents.

Il avait pu constater que les fichiers de transaction présentaient les mêmescaractéristiques que les documents qu'il avait établis lors de sa mission d'auditnotamment l'existence des 4 colonnes ajoutées aux données CLEARSTREAM,
caractéristique des techniques qu'il employait chez ARTHUR ANDERSEN :
"BID" (prix demandé), "OFFER" (prix proposé), "SPREAD" (écart entre lesdeux), "OVER/UNDER" (prix de la transaction par rapport au cours de bourse).

Il avait également relevé que les documents avaient été créés par "NEO",
alors qu'il savait qu'Imad LAHOUD, seule personne à laquelle il avait remis desfichiers de transaction, communiquait par mails sous le pseudonyme "MATRIXNEO".

De plus, il indiquait qu'au cours de l'été 2005, Denis ROBERT lui avaitenvoyé plusieurs fichiers que lui avait transmis Imad LAHOUD :

-"EXPLICATIONS.doc" (copier-coller d'un guide d'utilisation des messagesSWIFT de CLEARSTREAM en une ou deux pages pris depuis son ordinateur parImad LAHOUD),
- "NOTE WSP.doc" (document sur le fonctionnement de CLEARSTREAM),
- "NOTE DDV.doc" (fonctionnement de CLEARSTREAM qui comprenait untexte et des annexes, tableaux représentant des transactions qui ne venaient pas deson ordinateur).
Il avait découvert les noms "Imad", "GERGORIN" et "EADS
Headquarters" soit en tant que créateurs des fichiers soit comme ayant effectué

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leur dernier enregistrement. Ainsi la note "DDV.doc" avait-elle été créée le 4janvier 2004 avec pour dernier enregistrement "GERGORIN".

Sur présentation du listing contenu dans l'envoi du 20 août 2004, FlorianBOURGES reconnaissait la copie du fichier client figurant dans la base dedonnées DATASERVER de CLEARSTREAM.

Il remettait aux enquêteurs l'ensemble de ses données qui incluaient cellesqu'il avait transmises à Imad LAHOUD et à Denis ROBERT.

Denis ROBERT devait confirmer avoir personnellement obtenu desdonnées CLEARSTREAM de la part de Florian BOURGES fin 2001. Il était àcette occasion procédé à la saisie des données informatiques ainsi conservées parDenis ROBERT dont celui-ci indiquait qu'elles avaient été par la suite transmisesà Imad LAHOUD sous forme de CD-ROM en février 2003.

Imad LAHOUD précisait qu'il avait remis ce CD-ROM à son officiertraitant de la DGSE (Antoine). En revanche, il contestait avoir récupéré auprès deFlorian BOURGES d'autres fichiers.

b) les investigations complémentaires réalisées au Luxembourg auprès deCLEARSTREAM

Une commission rogatoire internationale était délivrée aux autoritésluxembourgeoises le 5 mars 2007.

Le directeur général de CLEARSTREAM BANKING, Godefroid
LAMBORAY, notait que la plupart des éléments de la structure des fichiers detransactions (contenus dans le CD-ROM parvenu à Renaud VAN RUYMBEKEle 5 octobre 2004) provenaient d'une extraction de trois tables du DATAWAREHOUSE de CLEARSTREAM, notamment les tables "ACCOUNT",
"SECURITY" et "INSD_RTSMF", à l'exception des colonnes "BID", "OFFER
, "SPREAD" et "OVER/UNDER".

Il était en outre mis en évidence :

- que 9 des 24 comptes cités dans la lettre anonyme du 3 mai 2004 n'existaient pasdans la base DATA WAREHOUSE ;
- que le compte 84601 (attribué à Mikhaïl KHODORKOVSKI) n'avait jamaisexisté ;
- que le compte 87032 attribué à Alain GOMEZ n'avait connu aucun mouvementpour la période du 1er au 31 octobre 2003 ;
- que 36 numéros de comptes avaient été ajoutés dans la base de données "DSPRODUCTION ACCT.mdb" contenue dans l'envoi reçu le 20 août 2004 parRenaud VAN RUYMBEKE par rapport à la base DATA-WAREHOUSE ;
- que dans ce même document 30 libellés de comptes existant dans la baseWAREHOUSE avaient été modifiés ;
- que de multiples erreurs entachaient les fichiers de transactions contenus dansl'envoi du 4 octobre 2004 (dates d'exécution, montants, donneurs d'ordre), aucunede ces transactions ne correspondant à celles qui avaient été enregistrées dans labase DATA WAREHOUSE ;
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- que sur les 165 numéros de comptes figurant dans les documents remis augénéral RONDOT, seuls 111 numéros de comptes étaient retrouvés dans la baseDATA WAREHOUSE de CLEARSTREAM et sur ces 111 numéros, seuls 41
présentaient un numéro de compte et un libellé identique à l'enregistrement dansla base DATA WAREHOUSE ;
- qu'aucune des personnes dénoncées n'était retrouvée dans ces comptesauthentiques ;
- que le compte 80082 à la Banca Populare di Bergamo au nom de "BPB HOR",
susceptible de correspondre à Brice HORTEFEUX, n'existait tout simplement paschez CLEARSTREAM ;
- que le compte 73701 attribué à Alain de WULF notamment dans l'annuaire des895 comptes clôturés le 12 mai 2004, n'avait existé dans les livres de
CLEARSTREAM qu'à compter du 4 avril 2005 et à un nom différent.
c) l'analyse des supports informatiques

Il s'agissait de comparaison des données figurant sur les supports
informatiques ayant servi aux dénonciations ( CD-ROM des 20 août 2004 - 4ème
envoi- et 4 octobre 2004 - 5ème envoi) avec celles retrouvées sur les CD-ROMfournis par Florian BOURGES ("données BOURGES").

-en ce qui concerne la base de donnée "Db3.zip":
Il ressortait de l'étude réalisée les éléments suivants :

• le nom, la structure et l'architecture de la base de donnée Db3 étaient
identiques à la table de la base de données du CD-ROM reçu par le juged'instruction Renaud VAN RUYMBEKE le 20 août 2004 ;
• la table Db3 contenait 33.340 enregistrements, alors que la table du CDROM
reçu par le juge d'instruction Renaud VAN RUYMBEKE le 20 août 2004en contenait 33.382 ;
• la différence de 42 enregistrements supplémentaires s'expliquait par :
± la présence de 36 enregistrements correspondant à desnouveaux noms créés dans la base d'août 2004,
± la présence de 30 enregistrements correspondant à des nouveauxnoms créés à partir de numéros de comptes existants dans la base Db3 mais avecde nouveaux libellés dans la base d'août 2004 parmi lesquels ont été identifiés 8enregistrements en doubles,
± la présence de 81 enregistrements vides dans la base d'août 2004tandis que sont absents de cette même base 83 enregistrements qui existent dansles données BOURGES ;
• les 36 enregistrements créés dans la base d'août 2004 avaient dans lechamp "ACCT STATUS FLAG" non pas un "1" ou un "0", mais un "E" ou un"N";
- en ce qui concerne les fichiers de transactions :
Il était relevé des indices permettant d'en retracer la provenance :

On retrouvait dans les fichiers "excel" contenus dans l'envoi du 5 octobre
2004 :

± une dénomination "T_TRANSACTION" qui apparaissait dansles onglets des fichiers "excel" remis par BOURGES ,
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± quatre colonnes créées et nommées par Florian BOURGES"BID", "OFFER", "SPREAD" et "OVER UNDER" (cote D972/9).
Cependant, si 300 fichiers "excel" ressemblaient aux fichiers transactionsde l'envoi du 5 octobre 2004, les données fournies par Florian BOURGES (issuesde "CLEARSTREAM.zip") n'étaient que partiellement identiques aux donnéesressortant sur l'envoi du 4 octobre quant à la datation. Dans les donnéesBOURGES, les transactions étaient antérieures à septembre 2001 tandis que, dansles données du 5 octobre 2004, les transactions s'échelonnent entre 2002 et 2004.

- Sur les libellés des comptes et des transactions :
Il était enfin constaté qu'aucun des noms ajoutés dans les 4ème et 5ème
envois anonymes (août et octobre 2004) ne se retrouvait dans les donnéesBOURGES.

Les 9 fichiers "excel" du 5ème envoi concernaient des transactions
financières et chaque fichier était lié à un unique numéro de compte, soit 9numéros de comptes (appelés "comptes origine") au total dépourvus de libellés.

Les "comptes destinataires" étaient en réalité les "contrepartistes" destransactions, ils comportaient tous un numéro et un nom de titulaire de compte.

Il était relevé à leur sujet :

± que le libellé de onze numéros de comptes destinataires contenusdans la base BOURGES avait été modifié dans le 5ème envoi,
± une quinzaine de comptes destinataires avaient été entièrementcréés (tant le numéro que le libellé) dans le 5ème envoi (dont quatre ne figuraient
pas dans le 4ème envoi),
± les noms de PLENEL, de LASTEYRIE du SAILLANT,
FRANQUET, SIMPSON et WILSON ne figuraient pas dans le 4ème envoi (août
2004),
± quatre numéros de comptes destinataires dépourvus de libellésdans les fichiers transactions du 5ème envoi n'existaient pas dans les données
BOURGES.
Il subsistait une douzaine d'incohérences entre les données contenues dans

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les 4 et 5 envois ce qui démontrait qu'il s'agissait d'un travail peu rigoureux,
voire approximatif. Ainsi, un même numéro de compte rajouté renvoyait àplusieurs libellés distincts (ex: C0826 attribué tout à la fois à Jean-Claude deLASTEYRIE du SAILLANT, Serge de KLEBNIKOFF, Dominique SIMPSON).

d) la comparaison des "données BOURGES" avec les envoisparvenus au magistrat instructeur et le contenu de la clef USB de Jean-LouisGERGORIN

Le 14 juin 2006, Jean-Louis GERGORIN remettait aux juges d'instructionune clef USB contenant selon lui :

- les transactions remises par la source courant janvier et février 2004 etse limitant aux comptes suivis par l'enquête du général RONDOT,
- 8.000 transactions réalisées en mars et début avril 2004,
- le "super-annuaire" de 33.000 comptes obtenu en avril 2004,
ainsi qu'une extraction- papier d'une note sur le système CLEARSTREAM et unenote sur la possibilité d'avoir de comptes individuels et de gérer ceux-ci sanspasser par la banque officiellement titulaire (D1090).
L'analyse faite par l'OCLCTIC des données informatiques contenues dansla clef USB de Jean-Louis GERGORIN confirmait leur parenté avec les "données

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BOURGES" d'une part et les données contenues dans les envois parvenus à

ème ème

Renaud VAN RUYMBEKE les 20 août (4 envoi) et 4 octobre 2004 (5 envoi)
d'autre part.

Cette clef comportait 3 fichiers de type access : "original avril 2004.mdb",
"recent.mdb" et "transactions janvier février 2004.mdb".

-la base "original avril 2004.mdb"
Son titre est "DS PRODUCTION ACCOUNT". Elle est composée de deux
tables "copy of DS_PROD_ACCOUNT" et "DS_PROD ACCOUNT" identiquesquant à leur contenu.

La base "Original avril 2004.mdb" et le CD-ROM du 20 août
apparaissaient rigoureusement identiques quant à leur contenu (à l'exception ducompte 88288), les deux bases présentant des similitudes quant à leurs propriétés("Albert" et "CIA").

Il était par ailleurs relevé une identité de structure entre, d'une part, cesdeux bases et, d'autre part, la base contenue dans les données BOURGES mais desdifférences dans leurs contenus. Ainsi, sur les 33.381 enregistrements, 81apparaissaient vides, comme dans le 4ème envoi, avec un horodatage identique.

On pouvait dénombrer :

• 30 numéros de comptes présents dans les données BOURGES mais dontle libellé avait été modifié et 36 enregistrements dans clé USB qui ne figuraientpas dans les données BOURGES ;
• ces 66 enregistrements ajoutés aux données BOURGES, figuraientégalement sur le 4ème envoi ;
• 8 doublons.
-la base "RECENT.MDB"
La structure de cette base était identique à celle retrouvée dans les donnéesBOURGES, avec les 4 colonnes supplémentaires. Elle contenait 8.236
enregistrements relatifs à 95 numéros de "comptes origine" différents et 269numéros de "comptes destinataires".


comparaison avec les données BOURGES et le CD-ROM du 20
août 2004 :
-9 numéros de comptes sont communs avec les données BOURGES et
le 4ème envoi, mais les libellés sont modifiés ;
- 10 enregistrements différents existent dans RECENT mais ne se
retrouvent pas dans les données BOURGES.

comparaison avec le CD-ROM du 4 octobre 2004 :
- 4 enregistrements étaient identiques aux deux bases sur les 9 "comptesorigines" figurant dans l'envoi du 4 octobre (sans libellés associé),
- 41 "comptes destinataires" étaient identiques à ceux figurant dans ce CDROM.
- la base "Transactions janvier-février 2004 :
La structure de cette base est identique à la base RECENT. Les 4 colonnessupplémentaires s'y retrouvaient. Elle comprenait 360 enregistrements relatifs à8 "comptes origines" et 45 "comptes destinataires".


comparaison avec le CD-ROM du 20 août 2004 :
-sur 16 numéros destinataires communs, 14 libellés étaient différents,
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-15 numéros et libellés de comptes se retrouvaient dans les deux bases,

-3 numéros de comptes communs aux deux bases avaient un libellépartiellement modifié;


comparaison avec le CD-ROM du 4 octobre 2004 :
- 29 enregistrements avec numéros identiques mais libellés modifiés;
- 26 enregistrements ont des numéros de comptes et des libellés identiques.
D - La mise en évidence d'une chaîne de transmission des données originelles

L'ensemble des données qui viennent d'être rappelées permettait
d'envisager l'existence d'une chaîne de transmission des données
CLEARSTREAM avec leurs supports depuis Florian BOURGES jusqu'auxdestinataires ultimes en passant par Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN.

Le 13 septembre 2006, était jointe l'information ouverte séparément contreX des chefs de dénonciation calomnieuse, faux et usage de faux, vol et recel devol, à la suite de la plainte avec constitution de partie civile de la sociétéCLEARSTREAM BANKING , société de droit luxembourgeois, déposée le 28avril 2006 (D1312).

Aux termes de cette plainte, il était reproché à Florian BOURGES d'avoirdétourné les documents qu'il avait utilisés pendant la mission d'audit et quiavaient été extraits des bases de données internes de CLEARSTREAM, alors qu'ilétait tenu par l'obligation de confidentialité incluse dans la lettre de missionengageant ARTHUR ANDERSEN Luxembourg.

Le 26 octobre 2006 était jointe l'information ouverte contre X à la suite dudépôt de plainte et constitution de partie civile de la société BARBIERFRINAULT et ASSOCIES auprès du doyen des juges d'instruction du chef d'abusde confiance le 28 juin 2006 (D1553).

Florian BOURGES était mis en examen du chef de vol commis au
préjudice de la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES et d'abus deconfiance au préjudice des sociétés CLEARSTREAM BANKING et
CLEARSTREAM INTERNATIONAL.

Il est par ailleurs reproché à Denis ROBERT d'avoir accepté et conservédes documents de travail dont il n'ignorait pas qu'ils provenaient de l'achèvementpar Florian BOURGES de sa mission d'audit et dans ces conditions commis ledélit de recel de vol et d'abus de confiance.

Ces mêmes faits de recel sont reprochés à Jean-Louis GERGORIN, ImadLAHOUD ainsi que Dominique de VILLEPIN.

***

Les magistrats procédaient également à divers transports et perquisitionscourant mars et avril 2006 :

- le 23 mars 2006, dans les locaux EADS à Suresnes, et plusparticulièrement dans le bureau occupé par Imad LAHOUD où il était notammentsaisi 16 documents provenant d'un sous-répertoire RONDOT issu du disque dur
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"D" de l'ordinateur Helwett Packard (scellé EADS SURESNES 9) et les disquesdurs "C" et "D" équipant les ordinateurs utilisés par Imad LAHOUD (scellés 10à 13) ;

- le 30 mars 2006 dans les locaux de la DGSE (D617) où ont été saisisdans des boîtes d'archives remises aux magistrats instructeurs dans lesquelles setrouvaient 6 CD-ROM, sur deux d'entre eux figurait la mention confidentieldéfense (placés sous scellé fermé DGSE1, les quatre autres étant placés sous scelléDGSE 2), et sur la jaquette de l'un de ces quatre CD était collé un post-itmentionnant "les tableaux les + complets sont : •Bombe => liste oct 2001
•Totalité comptes av 2000 idem CORBEAU" (scellé DGSE 3) ; le même jour, uneperquisition était pratiquée dans les locaux du SGDN (D621) ;
- le 3 avril 2006, dans les locaux EADS sis Boulevard de Montmorency,
et plus particulièrement les bureaux de Noël FORGEARD et de Jean-LouisGERGORIN et de leurs secrétariats respectifs (D631) ;
- le 4 avril 2006, au domicile de Jean-Louis GERGORIN (D633) où il étaitnotamment saisi un document de 2 feuillets intitulé "Karel SCHMIDT" (scelléGERGORIN 1) ainsi qu'un ensemble de documents concernant Imad LAHOUD,
son frère Marwan, son épouse Anne Gabriel HEILBRONNER, et Pierre GeorgesSAVA (scellé GERGORIN 5) ;
- le 5 avril 2006, dans les locaux d'AIRBUS SAS à Toulouse (D637), oùil était découvert dans le coffre-fort équipant le bureau de Marc DEPARIS,
responsable de la sécurité des sites et personnes sous la responsabilité de MonsieurLAFLANDRE, quatre fiches cartonnées à en-tête de Marc de PARIS portant desmentions manuscrites (scellé AIRBUS SAS 14) ;
- le 13 avril 2006, au Ministère de la Défense (D647) où seront trouvéesdans le bureau de la ministre une note intitulée "Dossier CLEARSTREAM" et une
note intitulée "Note sur l'organisation d'une communication économique" datée
du 21 septembre 2004 (scellé MD1), dans l'armoire forte située dans le bureau dePhilippe MARLAND une note à l'attention du directeur de cabinet civil etmilitaire en date du 29 mars 2004 et ayant pour objet "opération MADHI" (7)
incident survenu le 25 mars 2004"(scellé MD5) ;
- le 19 avril 2006, au Service Historique de la Défense (SHD) au Fort deVincennes (D662), où il était saisi les boites d'archives contenant les notes CROS2002 à 2005 (scelléSHD2 à 5) ;
- le12 mai 2006, au domicile d'Imad LAHOUD (D740).
Parmi les multiples auditions réalisées par les magistrats instructeurs,
Michèle ALLIOT-MARIE, ministre de la Défense, était entendue le 10 novembre
2006 (D1671). Elle était réentendue le 21 décembre 2007 (D3395).

Son directeur de cabinet civil et militaire, Philippe MARLAND, étaitentendu le 23 mai 2006 (D859).

Le Général RONDOT était par la suite entendu en qualité de témoin assistéà 6 reprises entre le 22 mai et le 9 novembre 2007. Il était également confrontéà Philippe MARLAND le 16 novembre (D3265), à Imad LAHOUD le 5 décembre(D3314), à Jean-Louis GERGORIN et Dominique de VILLEPIN le 11 décembre( D3325) puis à Dominique de VILLEPIN le 12 décembre (D3332).

Le 21 décembre 2006, il était procédé à l'audition de Dominique deVILLEPIN en qualité de témoin. C'est le 5 juillet 2007 que son domicile était

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perquisitionné (D2723) ainsi que, le lendemain, le bureau qu'il occupait au Centrede conférences internationales sis rue Lapérouse.

***

Il convient à ce stade de l'exposé de rappeler qu'aux termes de
l'ordonnance de renvoi les faits sont poursuivis sous les qualifications de vol etd'abus de confiance à l'endroit de Florian BOURGES, de recel de vol et de recel
d'abus de confiance et à l'égard de Denis ROBERT, de dénonciation calomnieuse,
de faux et usage de faux, de recel de vol et de recel d'abus de confiance àl'encontre de Jean-Louis GERGORIN et d'Imad LAHOUD et enfin sous la
qualification de complicité de dénonciation calomnieuse, de complicité d'usagede faux, de recel de vol et de recel d'abus de confiance à l'endroit de Dominiquede VILLEPIN.

Lors une première communication pour règlement, le parquet avait requisdes juges d'instruction la poursuite de leurs investigations, selon réquisitoiresupplétif du 3 juin 2008, notamment aux fins de réentendre Dominique deVILLEPIN sur les informations dont il aurait pu disposer sur le passé judiciaired'Imad LAHOUD et sa personnalité, soit de la part du service des RenseignementsGénéraux soit par le biais de connaissances professionnelles ou privées, et sur les
démarches qu'il avait entreprises, notamment auprès de Jean-Louis GERGORIN,
à la suite de la connaissance même tardive qu'il avait pu avoir du caractèremensonger des informations transmises à l'autorité judiciaire.

Dans son réquisitoire définitif du 6 octobre 2008, le Procureur de laRépublique avait finalement requis :

-le non-lieu au bénéfice de Dominique de VILLEPIN sur les qualifications decomplicité d'usage de faux, de recel d'abus de confiance,
- la requalification des faits reprochés à Florian BOURGES sous la qualificationde vol au préjudice de la société BFA en abus de confiance,
- la requalification des faits reprochés Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORINsous la qualification de recel d'abus de confiance et de vol en recels d'abus desconfiance ;
- la requalification des faits reprochés à Imad LAHOUD, s'agissant des documentsremis et envoyés au général RONDOT et à Renaud VAN RUYMBEKE sous laqualification de dénonciation calomnieuse, en complicité de ce délit par aide ouassistance,
- la requalification des faits reprochés à Jean-Louis GERGORIN sous la
qualification de faux en complicité de faux.
Il était proposé de retenir à l'endroit de Dominique de VILLEPIN une
qualification de complicité de dénonciation calomnieuse pour s'être abstenu, alorsqu'il connaissait, au moins depuis le mois de juillet 2004, le caractère mensongerdes pièces transmises à l'autorité judiciaire et alors qu'il avait les moyens de faire
cesser l'infraction, de toute action de nature à empêcher la poursuite des
infractions.

II - Le processus de dénonciation selon les divers protagonistes

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Au cours de l'instruction, les déclarations des autorités destinataires des
dénonciations et des mis en examen ont été recueillies. Elles ont permis d'une partde préciser le mode opératoire adopté pour chacune des dénonciations, d'autre partde connaître le positionnement de chacun dans ce processus.

A- Le processus de dénonciation selon les autorités destinataires

1 - Les suites données à la dénonciation selon le Général RONDOT : de
l'Opération "MADHI" à l'Opération "REFLUX"

Il résultait des explications fournies par le Général RONDOT, étayées parses verbatim, que l'opération "REFLUX", telle que l'avait lui-même baptisée legénéral, avait débuté en octobre 2003 avec les premières révélations de Jean-LouisGERGORIN sur le réseau de corruption internationale dans lequel apparaissaientdes personnalités politiques et économiques et mis à jour par Imad LAHOUD, ceque ce dernier devait contester.

Jusque-là, Imad LAHOUD intervenait au service du CROS dans le cadrede ce que celui-ci avait nommé l'opération "MADHI" dont l'objectif étaitd'obtenir les éléments permettant de localiser et mettre hors d'état de nuire lamouvance AL QAIDA. A ce titre il fournissait des renseignements. Ce statut de
"source" lui était alors reconnu par le ministère de la Défense.

Le 5 novembre 2003, Jean-Louis GERGORIN avait remis au généralRONDOT un listing de deux pages comportant la mention de comptes sur lesquelsapparaissaient les noms de DELMAS, GOMEZ, WANG , MARTINEZ, FLAM,
MARTINI, CHEVENEMENT et STRAUSS KHAN, document appelé
"annuaire" par Jean-Louis GERGORIN qui indiquait au Général que ces
informations provenaient d'une pénétration du système informatique deCLEARSTREAM réalisée par Imad LAHOUD (D610/9).

Ayant rendu compte de ces premiers éléments à la mi-novembre audirecteur de cabinet du Ministre de la défense, Philippe MARLAND, le GénéralRONDOT se voyait confier la mission de vérifier la vraisemblance des
accusations concernant uniquement les personnels du ministère de la défense.
Etaient alors cités les noms de Gilbert FLAM, du Général HEINRICH, de Sergede KLEBNIKOFF, d'Alain CHOUET, de Jean-Jacques MARTINI, de BernardSQUARCINI et d'Alexandre JEVAKHOFF.

Le 23 novembre 2003, le général recevait de Jean-Louis GERGORIN lanote de synthèse sur le fonctionnement de CLEARSTREAM avec des tableaux surlesquels apparaissaient notamment les noms de Gilbert FLAM et d'Alain
CHOUET, tous deux anciens membres de la DGSE et susceptibles d'êtreconcernés par "l'affaire japonaise", des annexes et des notes manuscrites rédigéespar Jean-Louis GERGORIN lui-même, explicitant l'organisation de ce systèmede corruption et le rôle de chacun des participants était défini par catégorie.

Sur cette base, le Général RONDOT poursuivait ses investigations pendantla fin de l'année 2003, conformément à la mission confiée par le ministre de laDéfense.

Le 9 janvier 2004, il participait dans le bureau de Dominique de

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VILLEPIN au ministère des Affaires Etrangères en compagnie de Jean-LouisGERGORIN, à une réunion que ce dernier avait provoquée sans l'en avoirpréalablement informé, ayant pris l'initiative d'aviser Dominique de VILLEPINlors d'une courte entrevue dans son bureau au quai d'Orsay le 1er janvier 2004.

Cette réunion du 9 janvier s'était tenue à l'insu de Philippe MARLAND,
du ministre de la Défense, Michèle ALLIOT MARIE, et du directeur de cabinet
du ministre des Affaires Etrangères, Pierre VIMONT.

Le Général RONDOT affirmait avoir appris au cours de cette réunion queDominique de VILLEPIN aurait préalablement informé le Président de la
République et que ce dernier aurait chargé son ministre de lui donner pourinstruction de procéder à des vérifications discrètes afin de s'assurer de la véracitédes informations figurant dans les listings CLEARSTREAM concernant lespersonnalités qui y étaient mentionnées.

Il affirmait également, reprenant en cela les termes de son verbatim relatifà cette réunion du 9 janvier, qu'avait été évoquée au cours de cette réunionl'existence de "comptes couplés" aux noms "de NAGY" et "BOCSA" et qu'unrapprochement avait été fait avec la personne de Nicolas SARKOZY.

Selon le Général RONDOT, Dominique de VILLEPIN avait fait état desinstructions du Président de la République demandant de mettre les moyens de laDGSE à sa disposition dans le cadre de ses investigations sur les listingsCLEARSTREAM,. ce que Dominique de VILLEPIN contestait.

Le Général RONDOT, ayant eu par la suite connaissance de la viveréaction de la ministre de la Défense qui n'avait pas admis qu'il ait pu recevoirune telle mission sans en avoir été elle-même tenue préalablement informée, avaitdonc décidé de poursuivre ses investigations dans la ligne fixée par son ministrede tutelle.

En mars 2004, Imad LAHOUD était interpellé dans une procéduredistincte et placé en garde à vue. Le Général RONDOT en était avisé parl'enquêteur auprès duquel Imad LAHOUD avait fait état d'un document écrit dela main de Jean-Louis GERGORIN selon lequel celui-ci se disait investi d'unemission dans le cadre de la lutte anti-terroriste au profit du général et qu'on devaitlaisser Imad LAHOUD travailler sur ce sujet dans les locaux d'EADS. Cedocument indiquait précisément les coordonnées du général RONDOT, à appeleren cas de difficulté. Mécontent de découvrir que ce genre de document, l'exposantvis-à-vis des tiers, pouvait être en circulation, le Général RONDOT avait
immédiatement téléphoné à Jean-Louis GERGORIN pour lui en faire le reproche.
Selon le général, dans les minutes qui suivaient Dominique de VILLEPIN l'avait
appelé et lui avait demandé de faire libérer Imad LAHOUD.

Le 13 avril, Philippe MARLAND ordonnait au Général RONDOT destopper son enquête si rien ne tenait, d'en prévenir Dominique de VILLEPIN et
d'établir une note d'étape pour informer la ministre.

Le 14 avril au matin, une réunion de "mise au point" se tenait dans lebureau du général entre celui-ci, Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD aucours de laquelle il était fait état de ses instructions de cesser ses vérifications si

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aucun élément nouveau ne venait corroborer les premières révélations.

Ce même jour, dans l'après-midi, Jean-Louis GERGORIN rencontraitMaître Thibault de MONTBRIAL et lui demandait de contacter le juge RenaudVAN RUYMBEKE. En fin d'après-midi, Place Beauvau, Dominique deVILLEPIN remettait les insignes d'officier de l'Ordre National du Mérite à Jean-
Louis GERGORIN. Au cours d'un aparté, celui-ci tentait de s'entretenir du dossierdes listings avec Dominique de VILLEPIN qui l'avait renvoyé immédiatementvers le Général RONDOT.

Lors de sa première audition en mars 2006, le Général RONDOT indiquaitqu'il avait fait part de ses doutes à Dominique de VILLEPIN à son retour de
mission courant avril 2004 (D610/10), ce que Dominique de VILLEPIN contestait.
Dans ses auditions ultérieures, le Général RONDOT est revenu sur cette
déclaration (D3325/25).

A la mi-mai 2004, le Général RONDOT obtenait par l'intermédiaire dePhilippe MARLAND, auquel il avait transmis sa note du 21 avril 2004 faisant lepoint de ses investigations (D701/12 à14), un entretien avec la ministre de la
Défense à laquelle il indiquait qu'il n'y avait aucun élément probant pouvantaccréditer la mise en cause des personnels de la défense.

Ses investigations devaient néanmoins se poursuivre jusqu'en juillet 2004,
tandis qu'il demandait à Jean-Louis GERGORIN d'affiner ses recherches.

En juin 2004, le Général RONDOT rencontrait successivement Jean-
Jacques MARTINI et Serge de KLEBNIKOFF. Vers la mi-juillet, il se rendait àBerne pour procéder à des vérifications sur les comptes de SQUARCINI,
MARCHIANI et SCHMITT, à l'issue desquelles les services suisses devaientréfuter l'existence des comptes liés à l'affaire CLEARSTREAM.

Le 19 juillet 2004, le général rendait compte à Dominique de VILLEPIN.

Le 2 septembre 2004, il avait un nouvel entretien avec Dominique de
VILLEPIN qui confiait : "il ya quelque chose car tout ce beau monde s'agite et
s'inquiète".

Il avait un dernier entretien sur cette affaire avec Dominique de VILLEPINen octobre 2004, alors que le dernier envoi au juge VAN RUYMBEKE avait déjàeu lieu.

2 -Le processus mis en oeuvre auprès du juge VAN RUYMBEKE

a) les déclarations de Renaud VAN RUYMBEKE

Ce n'est que le 1er mai 2006, lors d'une entrevue fortuite dans le bureaude l'un des magistrats instructeurs (D719), que Renaud VAN RUYMBEKE s'était
ouvert des circonstances de la dénonciation. Il était entendu officiellement par les

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deux juges d'instruction le 10 mai suivant, jour de la parution dans les colonnesdu "Canard enchaîné" d'un article reprenant les déclarations de Maître deMONTBRIAL révélant son rôle d'intermédiaire et l'identité du corbeau en la
personne de Jean-Louis GERGORIN, et une courte interview de Renaud VANRUYMBEKE confirmant les propos de l'avocat et concluant : " Je comprends àquel point j'ai été instrumentalisé. Fort heureusement, j'ai déjoué le piège quim'était tendu" (D721/2).

Devant les magistrats, il exposait alors les circonstances dans lesquelleslui étaient parvenus les 4 documents précités. Il déclarait que, courant avril 2004,
Maître de MONTBRIAL avocat du barreau de Paris avec lequel il était en relationnotamment dans le cadre de l'affaire des Frégates de Taïwan lui avait fait partqu'un très haut responsable d'une société d'armement, se disant menacé de mortet prochain sur la liste des "morts des frégates", avait des révélations urgentes àlui faire dans cette affaire sous le sceau de l'anonymat.

A l'occasion de ses rencontres, son interlocuteur, qui s'était clairementidentifié comme étant Jean-Louis GERGORIN, avait manifesté un état d'anxiété
et de fébrilité, paraissant terrorisé et craignant pour sa vie, et lui avait fait part desa conviction relative à l'assassinat de Jean-Luc LAGARDERE par des mafieux
russes.

L'homme lui avait indiqué que la direction de son groupe préférait ne pasfaire de vagues en déposant plainte, ajoutant que les oligarques russesenvisageaient de prendre très prochainement le contrôle du groupe LAGARDEREgrâce à l'appui d'un de ses dirigeants, Philippe DELMAS, et d'Alain GOMEZ.
Jean-Louis GERGORIN lui avait dit détenir des informations sur les comptesoccultes de Monsieur WANG et sur les bénéficiaires d'importantes rétro-
commissions et cela grâce à un informaticien, Imad LAHOUD, qui disposait descomptes CLEARSTREAM. Jean-Louis GERGORIN lui avait montré des listingsmais sans jamais les lui remettre. Il avait cité les noms de WANG, GOMEZ,
MARTINEZ, DELMAS, KHODORKOVSKI, SQUARCINI, MARTINI,
STRAUSS-KAHN, CHEVENEMENT et MADELIN.

Le 3 mai 2004, l'avocat Thibault de MONTBRIAL lui avait remis en
mains propres la première lettre. Cette lettre reprenait plusieurs des thèmes queJean-Louis GERGORIN avait abordés au cours de leurs entretiens :

- les comptes "RMBA",
- les comptes jumeaux CLEARSTREAM,
- le système de blanchiment,
- l'ouverture par WANG en 1989 des comptes C0043 et C0044,
- l'ouverture en 1991 par WANG d'un trust Citibank-Cititrust à Bogota,
- l'ouverture en 1992 d'un compte 83656 par le même WANG pour le compted'Alain GOMEZ,
- le compte73067 à la Banque Julius Baer attribué à Pierre MARTINEZ,
- la mention des oligarques russes,
- le compte 03778 jumelé à la Julius Baer de Genève pour le compte de PhilippeDELMAS.
Le 14 juin, par la Poste, il avait reçu un listing sur lequel apparaissaitnotamment les noms des membres du groupe EADS, des membres des servicessecrets et d'hommes politiques. C'est en étudiant ce listing qu'il avait vuapparaître les noms de "BOCSA" et "de NAGY" et avait appris par les enquêteurs

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que ces noms correspondaient à l'identité de Nicolas SARKOZY et à celle de sonpère. Ces noms apparaissaient pour la première fois.

Selon Renaud VAN RUYMBEKE, le mode de transmission des envois
anonymes avait été convenu entre l'avocat et son client.

b) Les déclarations de Thibault de MONTBRIAL

Les éléments apportés par Renaud VAN RUYMBEKE étaient confirméspar l'avocat, Maître de MONTBRIAL, qui, dans sa déposition du 16 mai 2006,
apportait quelques précisions au déroulement des faits.

Il expliquait que, le 7 avril 2004, Jean-Louis GERGORIN avait priscontact avec lui en vue d'une consultation sur une question relative au risque deprise de contrôle dans une société commerciale par des porteurs quiinterviendraient au nom de tiers mal intentionnés dans le but de la déstabiliser.
Cette question s'inscrivait dans un cadre plus large de lutte contre des pratiquesmafieuses se déroulant dans le monde de l'industrie de l'armement. Une deuxième
rencontre était intervenue très vite après, avant-même la finalisation de cetteconsultation, le 14 avril 2004. C'est à cette occasion que Jean-Louis GERGORIN,
sur un ton solennel, lui avait demandé d'aller voir Renaud VAN RUYMBEKE
afin de lui dire qu'il souhaitait lui faire part d'un certain nombre d'élémentsrelatifs aux rétro-commissions dans l'affaire des frégates de Taïwan, présentantsa démarche comme ultra-confidentielle, sa vie étant menacée. Il s'agissait depermettre au juge d'établir des liens financiers entre M. WANG et un certainnombre d'industriels français. L'avocat s'était rendu au cabinet du juged'instruction le 15 avril. Le magistrat proposait alors de recevoir son interlocuteurau palais de justice, ce qui était refusé, ou bien dans une brasserie, ce qui étaitexclu. Jean-Louis GERGORIN avait finalement opté pour que les rendez-vous setiennent au domicile de l'avocat.

C'est dans ces circonstances que, selon le témoin, s'était tenu le 1er rendez-
vous qui s'est déroulé entre 3 heures et 7 heures du matin. Il s'agissait d'uneséance de présentation par Jean-Louis GERGORIN de ce qu'il en était et desraisons pour lesquelles il détenait des informations au sujet de l'affaire desfrégates. Il avait montré quelques documents, des feuilles de papier sur lesquellesapparaissaient des mouvements de fonds sur des comptes. Les noms cités étaientceux de Messieurs WANG, GOMEZ, MARTINEZ et d'un ressortissant russe. Un
deuxième rendez-vous avait eu lieu cette fois-ci un matin, à partir de 7h30. Jean-
Louis GERGORIN avait à cette occasion sorti des papiers sur lesquels étaientportés des noms et des numéros de comptes. Il les avait montrés à Renaud VANRUYMBEKE qui les avait pris en mains. Une longue discussion avait suivi entreles deux hommes. A ce stade, Renaud VAN RUYMBEKE n'avait pas insisté
pour connaître la source de ses renseignements.

 Maître de MONTBRIAL ajoutait : "M. GERGORIN lui a indiqué qu'ilavait une source dont, pour notre sécurité à tous les deux, Renaud VANRUYMBEKE et moi-même, ainsi que celle de la source, il ne souhaitait pasdonner le nom. M. GERGORIN nous a dit que cette source avait pénétré lessystèmes de transactions bancaires et notamment il me semble que c'était lapremière fois que le nom de CLEARSTREAM était prononcé". Jean-Louis

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GERGORIN avait toutefois indiqué au magistrat qu'il était en mesure, parl'intermédiaire de sa source, de "pénétrer en temps réel ou quasi réel dans lessystèmes de transactions bancaires évoqués, dont celui de CLEARSTREAM".

Le troisième rendez-vous s'était tenu 24 ou 48 heures après, en tout cas le29 avril 2004, au cabinet de l'avocat, à partir de minuit, et devait durer moinsd'une heure. Renaud VAN RUYMBEKE avait dit à Jean-Louis GERGORIN qu'ilétait intéressé de faire rentrer ces éléments en procédure afin de les faire vérifierofficiellement et insisté pour que Jean-Louis GERGORIN soit entendu commetémoin, le cas échéant sous le régime du témoin anonyme. Celui-ci avaitcatégoriquement refusé. A la question du magistrat "Comment on fait ?", Jean-
Louis GERGORIN avait répondu, après un silence : "Ca va, j'ai compris" et
Renaud VAN RUYMBEKE était parti. Il n'avait pas été convenu que la
transmission se ferait par voie anonyme.

Le témoin indiquait que Jean-Louis GERGORIN avait cependant indiquéqu'il avait des raisons de penser que, par la suite, il pourrait prouver que deshommes politiques étaient impliqués dans les rétro-commissions. Le lundi suivant,
soit le 3 mai, au matin, Jean-Louis GERGORIN était venu au cabinet de l'avocat
à l'improviste et lui avait remis une enveloppe fermée pour la passer à leur "ami".
Maître de MONTBRIAL admettait, sans s'en souvenir, avoir remis la lettre à
Renaud VAN RUYMBEKE sans en avoir lu préalablement le contenu.

Quelques semaines plus tard, Jean-Louis GERGORIN lui avait indiquéavoir avancé dans ses recherches et disposer d'autres éléments à transmettre à leur"ami". Aussi, dans le courant du mois de juin, lui avait-il remis, à son cabinet,
successivement, une lettre et deux CD-ROM. Il avait envoyé ces pièces par voiepostale au juge d'instruction entre le 3 mai et le début du mois de juillet 2004. Lemagistrat n'avait pas reçu l'un des CD-ROM, alors qu'il en avait reçu un de façonanonyme, pensant que Jean-Louis GERGORIN en avait été à l'origine.

Maître de MONTBRIAL reconnaissait son écriture sur l'enveloppecontenant le CD-ROM reçu au cabinet de Renaud VAN RUYMBEKE le 14 juin2004. Il n'en avait cependant pas vu le contenu. Jean-Louis GERGORIN lui avaitdit qu'il contenait des transactions de compte à compte devant permettre aumagistrat d'y retrouver des rétro-commissions. Il ajoutait que Jean-Louis
GERGORIN était revenu le voir, très enthousiaste, en lui disant que ça bougeait,
que la première lettre avait eu pour effet de "les affoler", de "les amener à
clôturer des comptes" le même jour du début mai, que c'était "pire que ce qu'il
pensait", qu'étaient mis en cause des mafieux, des industriels et aussi des hommespolitiques et des gens des services.

3 - l'apparition en cours d'information des compléments d'archives duGénéral RONDOT

Ces informations étaient confirmées le 17 mai 2006 sur le site
"nouvelobs.com" qui publiait diverses notes qui n'avaient pas été découvertes enperquisition chez Philippe RONDOT concernant la période du 27 mai et 29 juin2004 (D911). Ces documents comportaient, outre la confirmation des contactsentre Jean-Louis GERGORIN et le juge Renaud VAN RUYMBEKE, la mentionque la ministre de la Défense en avait été informée dès le 11 mai 2004.

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Ces notes étaient authentifiées par une expertise en écritures et le GénéralRONDOT confirmait en être l'auteur.

Le 16 mai 2006, le site internet "France Info" publiait la copie d'un extrait
d'une note interne datée du 17 mars 2004 "Opération REFLUX" mentionnant "
l'apparition de quelques homme politiques de gauche et, plus récemment, dedroite, dont -en ce qui concerne celle-ci-certains qui tiennent en ce moment "lavedette" et, de ce fait, pourraient susciter l'intérêt de la magistrature suprême"
datée du 17 mars 2004 (D892/2). Cette note se retrouvera, effacée, en intégralitédans la mémoire de la carte de l'Ipaq du Général RONDOT.

Le 5 juin 2007, à la suite de l'expertise de l'ordinateur Ipaq du généralRONDOT, l'analyse de la carte mémoire de l'ordinateur (scellé Rondot Meudon4), ayant permis l'analyse du contenu des fichiers "REFLUX.psw" et "REFLUX2.psw", l'assistant spécialisé, M. PIOT, adressait aux juges d'instruction une notefaisant ressortir les divers documents contenus (D2701) parmi lesquels :

- une note interne "ops Reflux (source Madhi)" du 23.11.03,
- une lettre adressée à DDV le 12 janvier 2004,
- un courrier destiné à M. SAVA du 29 mars 2004,
- une note au directeur de cabinet du ministre (au sujet d'un incident du 25 mars2004),
-4 notes intitulées "ops Reflux" (1) à (4) des 2 février, 17 mars, 26 mai, et 30 juin2004,
- 2 notes au ministre de la défense sous le même numéro 487 et portant la date du19 octobre 2004,
- ainsi qu'une chronologie des événements à compter du 9 novembre 2004.
Selon le Général RONDOT, celui-ci avait détruit les "Notes Reflux" le 19
juillet 2004, après avoir obtenu l'accord de Dominique de VILLEPIN.

B -Les explications fournies par Jean-Louis GERGORIN

Le 19 mai 2006, soit un mois et demi après la seconde perquisitioneffectuée à son domicile et au siège d'EADS, le journal "Libération" publiait uneinterview de Jean-Louis GERGORIN dans laquelle celui-ci, qui jusque-là avaittoujours affirmé et proclamé notamment dans la presse, qu'il était étranger à cettedénonciation, faisait volte-face en reconnaissant publiquement son implicationdans les dénonciations parvenues au juge Renaud VAN RUYMBEKE ainsi qu'auGénéral RONDOT (D934). Ces éléments nouveaux étaient confirmés devant lesenquêteurs puis les juges d'instruction, sans que Jean-Louis GERGORIN aillejusqu'à révéler le nom de sa source. Il fournissait des éléments qu'il estimait utilesà l'enquête sous forme de clefs USB qui seront soumises à expertise commel'ensemble des autres éléments appréhendés au cours de l'enquête.

C'est sur la base des éléments nouveaux recueillis(conclusions desexpertises à partir des données Bourges et les éléments apparus dans le scelléRONDOT MEUDON 4) jusqu'alors portés à la connaissance des jugesd'instruction que Jean-Louis GERGORIN était de nouveau interrogé le 8 juillet2007 et complétait sa version des faits d'une part en identifiant sa source commeétant Imad LAHOUD (D2447) et d'autre part en impliquant davantage Dominique

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de VILLEPIN dans le processus de la dénonciation auprès de Renaud VANRUYMBEKE (D2732).

1- des aveux initiaux de Jean-Louis GERGORIN en garde à vue jusqu'àl'identification de sa source

a) les auditions en garde à vue

Les 30 et 31 mai 2006, il était procédé, sous le régime de la garde à vue,
à une nouvelle audition de Jean-Louis GERGORIN (D943 à 957), au cours delaquelle il reconnaissait avoir été à l'origine de la remise des documents au jugeVAN RUYMBEKE par l'intermédiaire de l'avocat Maître de MONTBRIAL. Ilreconnaissait également avoir remis au Général RONDOT la note du 23 novembre2003 et avoir lui-même rédigé les documents manuscrits qui y étaient joints.

Jean-Louis GERGORIN indiquait que, dès la fin de l'année 2002, il avaitappris, d'une source qu'il ne souhaitait pas nommer, qu'un certain Karel
SCHMITT avait organisé différentes missions de surveillance des groupesLAGARDERE et EADS (D 944). Il ajoutait que le décès de Jean-LucLAGARDERE, survenu en mars 2003, l'avait beaucoup choqué et qu'il étaitarrivé à la conclusion que l'on pouvait légitimement se poser des questions sur lescauses de ce décès, en raison de l'extrême rareté de la maladie du défunt et eu
égard aux techniques parfois employées par les militaires russes dans certainesopérations. Fin avril, il avait interrogé toutes sortes de sources pouvant analyserles mouvements des titres LAGARDERE dans les mois qui avaient précédél'hospitalisation de Jean-Luc LAGARDERE. A partir de fin mai ou début juin2003, des informations d'abord parcellaires puis de plus en plus précises, maisorales, lui étaient parvenues sur des transactions financières dans le systèmeCLEARSTREAM. Cette autre source, dont il taisait également le nom, lui avaitalors indiqué qu'elle avait pu pénétrer informatiquement CLEARSTREAM. Enjuin et juillet 2003, il avait été fortement impressionné par la présence dans lesschémas manuscrits de flux financiers que la source lui avait montré, de KarelSCHMITT et Petar MANDJOUKOV et d'un certain Edin CAYBAN, ainsi que,
dès ce moment-là, de Philippe DELMAS. Dans les flux financiers identifiésfiguraient aussi Alain GOMEZ et Gafur RAKHIMOV. La source était parvenueà identifier les comptes 83656 CITITRUST BOGOTA avec comme ayant droitéconomique Alain GOMEZ, et 03778 JULIUS BAER avec comme ayant droitéconomique Philippe DELMAS. Il avait alors demandé les flux financiersaffectant les comptes SCHMITT, RAKHIMOV, MANDJOUKOVet CAYBAN.

Ainsi, jusqu'en août 2003, avait-il reçu des données brutes. La source étaitrevenue avec des informations de la Banque JULIUS BAER de Genève et deCLEARSTREAM. Les éléments recueillis alors ne lui étaient pas apparussuffisamment probants pour être communiqués à Jean-Pierre JOULIN ni àquiconque au sein du groupe LAGARDERE.

Jean-Louis GERGORIN expliquait qu'il n'avait décidé de contacter leGénéral RONDOT qu'à la suite d'une longue phase d'évaluation personnelle dela fiabilité de ces informations. Il avait néanmoins pris la précaution de rédiger dèsla fin juillet un document destiné, en cas de disparition physique, à être transmis

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au juge Renaud VAN RUYMBEKE pour lui présenter les informations, documentqu'il disait avoir détruit quand il avait choisi d'informer le CROS (D944/4).

A la mi-septembre, la source lui avait montré un tableau "excel" detransactions en cash de plus en plus dense et complexe, ainsi que des "target"
consistant en des tableaux représentant l'ensemble des mouvements. Dès octobre,
la source lui avait présenté ce qu'elle appelait un "annuaire" mis au point avec unlogiciel de recherche permettant d'identifier dans la mémoire de
CLEARSTREAM qui couvrait au moins 10 ans de transactions, l'ensemble descomptes qui avaient eu un lien financier avec les "comptes source"de WANGCHUAN POO, Alain GOMEZ et Philippe DELMAS.

Il avait alors estimé que le tableau était suffisamment cohérent pour êtrepris au sérieux mais nécessitait une vérification par une autorité disposant desmoyens d'investigation technique importants Il avait alors pensé à la DGSE. Iln'avait cependant rien communiqué à la Justice car les informations étaient à sesyeux trop légères et avaient une provenance illégale concernant les fichiersCLEARSTREAM.

Jean-Louis GERGORIN déclarait avoir remis au Général RONDOT, le 5
novembre 2003, l'annuaire et des spécimens de "targets" (scellé RONDOTMEUDON
7 cotes 17,18 et 19). Il ne s'agissait-là que de l'annuaire. Les
commentaires explicatifs inclus émanaient de la source et de lui-même. Il
reconnaissait, sous scellé RONDOT-MEUDON 7, cotes 18 et 19, des tableaux
réalisés à la demande du Général s'agissant d'une sorte de biographie sommairedes personnes citées dans l'annuaire. Il se souvenait avoir rédigé ce documentdans un bureau du ministère de la Défense. Il identifiait sous le même scellé un
extrait de la liste de 895 comptes CLEARSTREAM qui selon la source avaient étéfermés le 12 mai 2004. Il contestait cependant l'avoir personnellement transmisau Général RONDOT (D 946).

Sur la réunion du 9 janvier 2004 évoquée par le général dans sa premièredéposition, Jean-Louis GERGORIN expliquait qu'elle faisait suite à une

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rencontre impromptue du 1 janvier avec Dominique de VILLEPIN au ministèredes Affaires Etrangères au cours de laquelle il n'avait pas pu s'empêcherd'évoquer cette affaire. Il admettait avoir indiqué dès cet instant à soninterlocuteur que sa source était parvenue à pénétrer le système CLEARSTREAM.
Il n'avait eu aucun contact avec Philippe RONDOT préalable à cette rencontre.
Dominique de VILLEPIN s'était montré intéressé par l'aspect international deblanchiment ainsi mis à jour et lui avait indiqué qu'il en parlerait au général, cequi avait entraîné leur convocation quelques jours après. Il s'était rendu à cetteconvocation en possession de "l'annuaire" et des "targets". Il précisait que sapréoccupation était alors d'obtenir la mobilisation des moyens de la DGSE.

Il déclarait ne pas se souvenir d'une déclaration liminaire de Dominiquede VILLEPIN, ni que l'on ait parlé au cours de cette réunion de Jacques CHIRAC,
alors Président de la République . Lui-même avait pris la parole pour exposer defaçon synthétique les données dont il disposait.

Il expliquait que dans les flux analysés avec le Général RONDOT figuraitun transfert d'un milliard de dollars depuis un compte CLEARSTREAM émanantd'un compte CITITRUST, avec comme ayant droit économique Mikhaïl

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KHODORKOVSKI, vers un autre compte CITITRUST - Alain GOMEZ, transfertsurvenu une dizaine de jours après l'arrestation d'oligarques par la police russe.
Quant à Jean-Pierre JOULIN, il était apparu également avec deux comptesdifférents. Il avait lui-même fait une vérification sur les déplacements del'intéressé au Luxembourg à partir des bornes de téléphonie qui s'était révéléepositive. Les noms de "BOCSA" et "de NAGY" n'avaient pas été abordés, nil'existence de comptes couplés. Quant à MM PASQUA, MARCHIANI etSTRAUSS KAHN, ils figuraient bien dans la liste. Il confirmait que le nom deJean-Jacques MARTINI avait été évoqué (D950). La société CARLYLE, situéeà Vanuatu, avait été présentée comme une filiale off-shore du fonds
d'investissement américain CARLYLE.

Il précisait qu'à la fin de cette réunion, il avait eu un aparté avec PhilippeRONDOT au sujet d'Imad LAHOUD qui accomplissait pour lui des missionsdepuis juin 2003 et qui avait manifesté une grande inquiétude pour sa sécurité.

Jean-Louis GERGORIN expliquait que, dès après le 11 septembre 2001,
Marwan LAHOUD lui avait fait part que son frère, sans le nommer, avait euconnaissance d'achats de titres importants à partir de Beyrouth et de Dubaï par desinvestisseurs moyen-orientaux susceptibles de constituer des délits d'initiés. C'esten juin-juillet 2002, que Marwan LAHOUD, effondré, lui avait fait part del'incarcération de son frère Imad. Il avait appris en octobre suivant que celui-ciavait été libéré. Il avait conseillé de se retourner vers la DST ou la DGSE, et d'aller
exposer le cas à Philippe RONDOT. Puis était intervenue la rencontre avec ImadLAHOUD et son frère au restaurant EADS. Quelques temps après, il en avaitparlé avec Philippe RONDOT qui, ayant souhaité rencontrer Imad LAHOUD,
l'avait orienté vers la DGSE. C'est ainsi qu'en février 2003, Jean-Louis
GERGORIN avait été informé par le Général RONDOT qu'Imad LAHOUD avaitcommencé à rendre des services, mais se trouvait déstabilisé par son absenced'activité professionnelle et une situation financière délicate. Il lui avait demandéde faire quelque chose. C'est dans ce contexte qu'un premier contrat de consultanten date du 1er mars 2003 avait été signé pour une durée de 6 mois. Dans ce cadre,
Imad LAHOUD avait été chargé d'étudier les capacités de financement d'EADSdans des start-up françaises dans le secteur de la sécurité informatique.

Jean-Louis GERGORIN confirmait par ailleurs qu'il avait essuyé une
"engueulade" au téléphone de la part de Philippe RONDOT au sujet de la notequ'il avait rédigée quelques semaines auparavant à l'intention de Pierre-GeorgesSAVA et qu'Imad LAHOUD avait présentée lors d'un placement en garde à vueen mars 2004 pour les besoins d'une enquête distincte. Ce document avait étéretrouvé dans les archives du général (scellé RONDOT CHANAUX 2, cote 29).
Il expliquait qu'Imad LAHOUD s'étant dit menacé ou harcelé, il avait estimé deson devoir d'informer le directeur du site, Pierre Georges SAVA, de son activitépour le Général RONDOT, en parallèle de son activité de consultant. Pendant cetemps, Imad LAHOUD avait continué à suivre les flux financiers sur
CLEARSTREAM en temps réel. Philippe RONDOT avait même voulu qu'ilintensifie son suivi concernant les principaux membres cités dans l'annuaire. Jean-
Louis GERGORIN avait transmis cette instruction à Imad LAHOUD (D952).

Jean-Louis GERGORIN déclarait qu'il n'avait eu de cesse de demanderà Philippe RONDOT de faire la seule vérification qui eût valu : faire procéder àune tentative de pénétration de CLEARSTREAM par la direction technique de

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la DGSE en utilisant l'algorithme de la source. Il n'avait pas entendu parler d'unequelconque tentative de démonstration. Il précisait que dans aucune des réunionsqu'il avait eues avec Philippe RONDOT, celui-ci n'avait exprimé le moindredoute le concernant, alors que lui-même s'était souvent posé des questions sur ledegré de fiabilité de la source. Il indiquait que, début avril 2004, PhilippeRONDOT et lui-même avaient disposé de 8.200 transactions pour le mois de marset quelques jours d'avril concernant les comptes de l'annuaire mais égalementd'un certain nombre de comptes aléatoires destinés, selon la source, à "noyer le
poisson". Enfin, c'est en avril 2004 que la source avait produit un "superannuaire"
de plus de 33.000 comptes.

Jean-Louis GERGORIN reconnaissait avoir été à l'origine de quatre desenvois destinés à Renaud VAN RUYMBEKE.

Il expliquait que la lettre anonyme du 3 mai avait été établie à la suite dela découverte de la contestation du management de LAGARDERE par lettreenvoyée en mars 2004 par le fonds "HIGHFIELDS Capital Ltd", apparaissant parailleurs comme bénéficiaire d'une partie des fonds ayant transité sur les comptesCLEARSTREAM libellés aux noms de GOMEZ et DELMAS. Cette premièrelettre anonyme était parvenue au juge VAN RUYMBEKE après avoir transitéentre les mains de l'avocat, Maître Thibault de MONTBRIAL. Lors de ses
entretiens avec le juge Renaud VAN RUYMBEKE, s'étant muni d'un ordinateuret d'une clef USB, il avait pu montrer au juge un certain nombre de transactionset un fragment d'annuaire. Il avait refusé de déposer officiellement en raison dela provenance illégale des informations et de sa position dans EADS. Il affirmaitqu'il s'était réalisé un consensus sur la confection d'envois anonymes.

Il reconnaissait l'envoi de la 2ème lettre anonyme avec listing. RenaudVAN RUYMBEKE avait voulu plus d'informations alors que sa source l'avaitinformé de la clôture simultanée des 895 comptes dont la plupart étaientsensibles. Il avait obtenu cette liste de sa source. Il avait personnellement rédigéla lettre d'accompagnement.

Il reconnaissait quasi-certainement l'envoi du CD-ROM du mois d'août.
Il s'agissait, disait-il, du "super-annuaire" d'avril 2004, déjà transmis au Général
RONDOT.

Il indiquait que s'il avait effectivement informé Philippe RONDOT, débutmai 2004, de ses démarches auprès de Renaud VAN RUYMBEKE, il n'en avaitpas averti Dominique de VILLEPIN (D954).

Au cours des multiples rencontres avec Philippe RONDOT entre juillet2004 et avril 2005, celui-ci n'avait jamais émis le moindre doute sur son intégrité,
ni sur sa bonne foi.

Il indiquait que lors de sa remise de décoration de l'ordre national duMérite par Dominique de VILLEPIN au ministère de l'Intérieur, qu'il situait alorsle mardi 1 er avril, il avait tenté de parler au ministre de ses frustrations sur le
travail de Philippe RONDOT. A cette occasion, Dominique de VILLEPIN l'avaitrenvoyé vers le général, seul en charge de cette affaire.

Quant au nouveau comité exécutif d'EADS, il s'était effectivement réuni

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en juillet 2005 (D956).

b) la mise en examen de Jean-Louis GERGORIN (D958)

Jean-Louis GERGORIN était mis en examen par les juges d'instruction le
1er juin 2006. Il confirmait les déclarations faites au cours de sa garde à vue et
persistait à ne pas vouloir dévoiler le nom de sa source qui lui avait fourni lesinformations notamment sous forme de documents informatiques, informationscensées provenir de pénétrations du système CLEARSTREAM. Il affirmait avoirété convaincu de l'authenticité de ces informations.

Il se disait toujours persuadé de la véracité de l'essentiel sinon de la totalitédes informations transmises et de la provenance par pénétration du systèmeinformatique CLEARSTREAM réalisée pendant plusieurs mois en liaison avecdes responsables du ministère de la Défense.

Il contestait toute participation à une quelconque altération des donnéesinformatiques. Sa source lui avait fourni des informations CLEARSTREAM dela fin juin 2003 au début juin 2004 et, ultérieurement, de nouvelles informationsrésultant de pénétrations antérieures à juin 2004.

c) les interrogatoires ultérieurs

Lors de l'interrogatoire du 14 juin 2006 (D1090), Jean-Louis GERGORIN
expliquait avoir mis sa clef USB, dès le début du mois de mai 2004, en lieu sûrhors de Paris sans être plus précis, aux fins de remise aux autorités judiciaires s'ilvenait à disparaître.

Jean-Louis GERGORIN ne révélait toujours pas le nom de sa source,
disant attendre les résultats de l'analyse comparative de sa clef USB et desdonnées BOURGES car il persistait à affirmer qu'il croyait encore à la réalité dela pénétration du système CLEARSTREAM par sa source qui était elle-mêmecouverte par le ministère de la Défense. Il expliquait avoir donné sa paroled'honneur à sa source qui pouvait faire l'objet de menaces.

Il contestait avoir donné le nom de sa source au juge Renaud VANRUYMBEKE auquel il s'était borné à mentionner l'existence d'une source ayantpénétré le système informatique CLEARSTREAM pour les besoins d'uneopération de renseignement visant AL QAIDA. Il ajoutait enfin que la totalité desdocuments reçus de sa source avaient été également remis au Général RONDOTet se trouvaient sur sa clef USB.

Au cours de cet interrogatoire, Jean-Louis GERGORIN reconnaissait êtrele rédacteur de la "note DDV", dont un exemplaire avait été publié dans l'ouvragede Denis ROBERT "Clearstream l'enquête" (D969/263à 265 et D969/266), maisà partir d'une trame antérieurement rédigée par la source. Il s'agissait d'undocument destiné à servir de guide en vue de la réunion du 9 janvier. Il disait ne
pas l'avoir envoyée à Dominique de VILLEPIN mais l'avoir eue sur lui le 9janvier, ainsi que l'annuaire contenant les 97 comptes remis auparavant auGénéral Philippe RONDOT en novembre. Son espoir était alors que Dominique

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de VILLEPIN use de toute son influence sur Philippe RONDOT pour que celui-cise montre plus actif et surtout obtienne la mobilisation des moyens de la DGSE.

Jean-Louis GERGORIN indiquait qu'il ne se souvenait pas de l'exposéintroductif de Dominique de VILLEPIN lors de la réunion du 9 janvier 2004. Ilavait pour sa part fait un exposé qu'il qualifiait de synthétique et de précis avecen main le listing des 97 comptes. Il n'avait cependant de document à quiconque.
Il se souvenait de l'émergence d'un consensus entre les participants pour mettretous les moyens en oeuvre afin de vérifier de façon approfondie les données de lasource. Ils étaient d'accord sur la gravité des informations et l'absence decertitude. Ils avaient à cette occasion, évoqué les noms de MADELIN,
CHEVENEMENT, STRAUSS KAHN, PLENEL, MARTINI et FLAM. En
revanche, le nom de Nicolas SARKOZY n'avait pas été évoqué en rapport avecl'existence de "comptes bloqués", mais uniquement au sujet du voyage duministre de l'Intérieur en Inde et le refus d'impliquer la DST dans l'enquête. Lesnoms "de NAGY" et "BOCSA" ou "Nicolas SARKOZY" ne figuraient pas dansle listing des 97 comptes. Il se disait stupéfait des mentions portées à ce sujet surla note du Général RONDOT relative au déroulement de cette réunion.

A la fin mars 2004, la source lui avait indiqué avoir découvert un circuitfinancier distinct mais en lien avec le précédent (celui d'Alain GOMEZ et deWANG CHUAN POO) via des comptes CLEARSTREAM 80082 et 80085 créés
en 1995 et deux comptes Société Générale ("SG Paris Optimisation de Taux5600" et "Soc Générale MILAN 53000"), eux-mêmes en relation avec la BanquePopulaire de SONDRIO par le biais de nantissements mutuels. Cette série decomptes incluait ceux libellés aux noms "Paul de NAGY" et " StéphaneBOCSA". Cette information avait été également transmise par la même source àPhilippe RONDOT. Un rapprochement avait été fait avec la famille de NicolasSARKOZY. Philippe RONDOT était, selon Jean-Louis GERGORIN, persuadé
qu'il s'agissait de comptes du père de Nicolas SARKOZY.

Jean-Louis GERGORIN affirmait ne pas en avoir informé Dominique deVILLEPIN.

Il précisait que le ministre avait exprimé le souhait que Philippe RONDOTutilise dans son enquête tous les moyens à sa disposition relevant du ministère dela Défense.

Il n'avait aucun souvenir d'une quelconque mention du Président de laRépublique.

Il déclarait toutefois :"Je pense qu'il y a toute une partie d'échanges après laréunion du 9 janvier entre le Général RONDOT et Monsieur de VILLEPIN dontj'ignore tout et qui d'ailleurs ne me concerne pas" (page 23).

De nouveau interrogé le 26 juin 2006 (D1158), Jean-Louis GERGORINexpliquait qu'à la suite de la réunion du 9 janvier 2004, le Général RONDOT avaitsouhaité une intensification de la pénétration et recevoir directement lesinformations. Lui-même avait demandé à sa source fin février-début mars 2004
un récapitulatif des transactions de janvier et février 2004 dont la copie se trouvaitsur la clef USB. Au début du mois d'avril, il lui avait fait la même demande

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portant sur les mois de mars et avril.

Jean-Louis GERGORIN indiquait que, jusqu'en mars 2004, le GénéralRONDOT n'avait pas clairement exprimé de doutes sur la qualité desinformations de la source, mais était conscient de la nécessité de procéder à desvérifications. En avril suivant, le Général avait commencé à lui faire part de sesinterrogations au travers d'expressions comme : "Il y a du vrai et du faux... c'estpas clair... il y a des choses qui collent, d'autres non...". Ces doutes s'étaient
renforcés à partir de juin-juillet 2004 à la suite des vérifications qu'il avaiteffectuées.

A l'occasion de la remise de sa décoration, il avait eu un aparté avecDominique de VILLEPIN, mais affirmait n'avoir plus eu d'entretien avec celui-cià partir de ce jour- là. A cette occasion, Dominique de VILLEPIN lui avait
répondu : "Cette affaire est maintenant totalement entre les mains de la justice"
(D1158/8). Il l'avait croisé 2 ou 3 fois en juillet et septembre 2004 à l'occasiond'entretiens qu'il avait eus avec son conseiller Bruno LE MAIRE.

Au sujet de l'incident du 25 mars 2004 (D1158/8 et 9), il indiquait que lanote litigieuse devait servir à informer Pierre Georges SAVA des activités d'ImadLAHOUD qui exerçait en qualité de consultant d'EADS à temps partiel. Il
précisait que c'est Philippe RONDOT qui, en février ou mars 2003, lui avaitdemandé de trouver une occupation à Imad LAHOUD au sein d'EADS.
Ultérieurement, il avait été informé qu'Imad LAHOUD travaillait directementpour le CROS.

Jean-Louis GERGORIN affirmait que lors de l'incident lié à la garde à vued'Imad LAHOUD, lui-même se trouvait en Angleterre et n'avait pas appeléDominique de VILLEPIN et que Philippe RONDOT ne lui avait pas fait part del'appel de ce dernier.

Si Jean-Louis GERGORIN admettait avoir informé Dominique deVILLEPIN de l'origine des listings, et notamment que la pénétration avait étéréalisée par sa source qui disposait d'un accès dans le cadre de la lutte antiterroriste,
il affirmait qu'il ne lui avait pas indiqué l'identité de cette source.

Jean-Louis GERGORIN déclarait avoir nourri des suspicions sur le fondsHIGHFIELDS. Il lui fallait dans ces conditions examiner les moyens légaux deréagir. Il avait décidé de s'en entretenir avec Thibault de MONTBRIAL, fils deThierry de MONTBRIAL, qui était conseil d'une partie civile dans l'affaire desFrégates et qui avait d'excellentes relations avec Renaud VAN RUYMBEKE. Ilavait été convenu d'un rendez-vous pour une discussion vers le 10 avril. Puis, lorsd'une deuxième rencontre, Jean-Louis GERGORIN évoquait l'idée de rencontrerle magistrat. Il soutenait que c'était une décision qu'il avait prise seul sans enparler à quiconque (D1158/15 et 16).

Une première rencontre avec le juge Renaud VAN RUYMBEKE avait eulieu au cours de la deuxième quinzaine d'avril, au cours de laquelle il lui avaitmontré sur l'ordinateur des exemples de transactions. Renaud VAN RUYMBEKElui avait proposé de recueillir son témoignage ce qu'il avait refusé, arguant du faitque l'action de pénétration est une action officielle mais clandestine. Il exposaitque finalement l'anonymat avait été décidé par consensus (D1158/16).

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Il ajoutait qu'un dialogue avait été par la suite instauré de façon indirectepar l'entremise de l'avocat de MONTBRIAL et cela jusqu'en octobre 2004.

Il avait exposé à Renaud VAN RUYMBEKE la provenance de sesinformations par des opérations de hacking et ses craintes vis à vis du fonds
HIGHFIELDS et fourni lors de la deuxième rencontre des informations plusdétaillées, notamment des extraits de l'annuaire des 33.000 comptes sur lequelapparaissait celui de Gilbert FLAM.

Il soutenait n'avoir parlé à Renaud VAN RUYMBEKE du GénéralRONDOT ni de ses vérifications peu avancées, ni d'Imad LAHOUD, sans pour
autant être animé à l'endroit du magistrat d'une quelconque intention dedissimuler.

A la fin mai, la source lui avait annoncé la fermeture des 895 comptes endate du 12 mai, et CLEARSTREAM n'avait pas réagi de façon significative àl'annonce de cette clôture. Il avait dû insister une nouvelle fois auprès de sa sourcequi lui avait fait parvenir dans la 2ème quinzaine de septembre 2004 un CD-ROMqu'il avait fait envoyer au juge d'instruction par l'avocat, mais sans succès. Il avaitfait une nouvelle demande à sa source qui disait n'être plus en mesure que derécupérer des données éparses qu'elle regroupait dans le CD-ROM parvenu àRenaud VAN RUYMBEKE le 4 octobre. A l'origine, il avait demandé à la sourced'effectuer elle-même cet envoi direct à Renaud VAN RUYMBEKE, ce qu'ellelui avait assuré avoir fait.

Interrogé le 7 juillet 2006 (D 1214), Jean-Louis GERGORIN reconnaissaitavoir rédigé les lettres reçues par le juge VAN RUYMBEKE les 3 mai et 14 juin2004 (D57/1 et D123/1). En ce qui concerne le courrier inclus dans le CD ROMdu 4 octobre (D976/2), il affirmait ne pas en être le rédacteur direct, lui-mêmeayant demandé à sa source de mettre une "brève formule d'accompagnement" avec
la signature "DT" (Deep Throat), sa source sachant ce qu'elle faisait et la
destination de cet envoi.

Dans son esprit, à la suite de la communication des premiers élémentsfournis par sa source en octobre 2003, et dont il avait fait part au GénéralRONDOT, la demande de poursuivre émanant de celui-ci avalisait cette pratique.
Il en déduisait qu'il aurait suffi au Général RONDOT de donner l'ordred'interrompre tout transfert d'information pour que le processus soit effectivementinterrompu.

Jean-Louis GERGORIN précisait qu'après avoir compris que le GénéralRONDOT ne solliciterait pas la DGSE, il avait décidé de se tourner vers le jugeRenaud VAN RUYMBEKE. Il avait été renforcé dans sa conviction par la
vérification de la borne cellulaire du téléphone de Jean-Pierre JOULIN àLuxembourg le 11 janvier 2003 (date d'une transaction cash dans laquelle celui-ciparaissait impliqué) et le fait que sa source lui avait fourni début mars et débutavril un total de plus de 8.000 transactions.

Il indiquait que l'intitulé "MATRIX" apparu dans les propriétés du courrierinclus dans le CD-ROM d'octobre 2004 correspondait à celui de sa source, commetout le CD-ROM qu'elle avait livré.

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Il contestait être intervenu pour influencer le contenu de ces listings qui à
ses yeux représentaient le résultat de la pénétration informatiqueCLEARSTREAM. A ses yeux, il était logique que les noms de BAUDIS et VEIL,
qui étaient mentionnés dans les tableaux joints au premier envoi, n'apparaissentplus dans les trois derniers envois car leurs comptes n'étaient pas des comptesCLEARSTREAM mais des comptes individuels dans les banques clientes de
CLEARSTREAM (D1214/13). Il en était de même pour de LASTEYRIE DUSAILLANT, FRANQUET, SIMSON et ROGER.

Jean-Louis GERGORIN était de nouveau interrogé le 13 septembre 2006(D 1301) et apportait les précisions suivantes :

Dès la première quinzaine de mai 2004, il avait informé le GénéralRONDOT de ses démarches vers Renaud VAN RUYMBEKE sur l'intervention
d'un avocat, l'envoi d'une lettre et le choix de l'anonymat décidé d'un communaccord. A cette occasion, le Général RONDOT avait manifesté un vif
mécontentement face à une telle démarche susceptible de mettre la source en
danger. Il l'avait également informé début juillet de l'envoi de juin 2004. Il luiparaissait impensable de ne pas le faire compte tenu de l'enquête que le Généralcontinuait de mener de son côté. Ce dernier avait été également informé par lasource de la clôture des comptes de mai 2004 et en avait reçu la liste.

En revanche, il affirmait ne pas avoir tenu Dominique de VILLEPINinformé de ces derniers éléments.

S'il n'avait rien dit à EADS, à Arnaud LAGARDERE et à PhilippeCAMUS, alors même que Laurence DORS figurait sur les listings, c'est parcequ'il se sentait tenu à une obligation de confidentialité vis à vis de PhilippeRONDOT et de Renaud VAN RUYMBEKE. Quant à la présence sur le listingdu 20 août du nom de Bernard DELAFAYE, de chez LAGARDERE, il avait
pensé que cette identité avait dû être usurpée. Il admettait que certains nomsfigurant dans la liste pouvaient ne pas correspondre à la réalité des bénéficiaireséconomiques mais il était globalement convaincu de l'authenticité des documents.

Il admettait n'avoir jamais assisté personnellement à une pénétration du systèmeCLEARSTREAM. Il ne pouvait pas faire de vérification avant la transmission auGénéral RONDOT ou à Renaud VAN RUYMBEKE. Il ne disposait pas desmoyens techniques nécessaires. Le lien avec l'affaire des Frégates avait été fait parle biais des comptes CITITRUST Alain GOMEZ et WANG CHUAN POO enSuisse. C'était une hypothèse admise par Renaud VAN RUYMBEKE.

d) La révélation du nom de la source par Jean-Louis GERGORIN et laprécision du rôle d'Imad LAHOUD

Lors de son interrogatoire du 22 mars 2007 (D2447), une fois connus lesrésultats de l'analyse du contenu de sa clef USB par rapport aux donnéesprovenant de CLEARSTREAM, Jean-Louis GERGORIN finissait par admettrela falsification des listings fournis par Imad LAHOUD qu'il dénonçait comme sasource, et par considérer que, tout comme le Général RONDOT, il avait été dupépar Imad LAHOUD.

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En fin d'interrogatoire, il était mis en examen supplétivement D2447/27)
du chef de recel de vol et de recel d'abus de confiance.

De plus, la pénétration du système informatique de CLEARSTREAMparaissait à ses yeux s'inscrire dans la mission de renseignement assignée à ImadLAHOUD, ainsi qu'en attestent les quelques notes découvertes sur l'ordinateurde l'intéressé avec la mention "Rondot" (D1018/70 et 63). En fait, ImadLAHOUD avait fourni en direct au Général RONDOT les informations que celui-
ci réclamait sur le "réseau lié aux frégates que l'on pensait avoir identifié". Ces
informations étaient livrées en temps réel à compter de janvier 2004. ImadLAHOUD lui avait alors indiqué avoir utilisé comme "cheval de Troie" un
serveur-relais basé à Jersey auquel il se connectait à partir d'un bureau dont ildisposait chez HYPERPANEL, et avoir utilisé un contact chez CLEARSTREAMet chez JULIUS BAER.

Jean-Louis GERGORIN reconnaissait finalement avoir donné le nom
d'Imad LAHOUD à Renaud VAN RUYMBEKE (D2447/5). Ce qui avaitdéclenché la colère du Général RONDOT qui s'était montré fort mécontent del'initiative prise de s'adresser à un juge et "fou de rage" de la divulgation du nom
de la source (cf note "opération MADHI 8" du 3 mai 2004 - D701/15). Imad
LAHOUD partageait ce sentiment.

Jean-Louis GERGORIN précisait que l'annuaire avait été établi dès la finseptembre 2003 par Imad LAHOUD. Il l'avait reçu en novembre et l'avait par lasuite remis au Général RONDOT lors d'une discussion le 23 novembre 2003.
"Ultérieurement, il y a eu, expliquait-il, une note dite WANG CHANG POO (...)
rédigée par Imad LAHOUD (..) qui a résumé le système tel qu'Imad LAHOUD ledécrivait avec en annexe des listes de comptes et de transactions".

Jean-Louis GERGORIN reconnaissait avoir rédigé seul la note DDV enreprenant des éléments d'une note antérieure, la "note WANG CHANG POO",
cette note lui ayant été remise par son auteur, qui n'était autre qu'Imad LAHOUD(D2247/12).

Il avait réitéré la demande de vérification en demandant à Imad LAHOUD
ses algorithmes de pénétration afin de faire refaire celle-ci par les servicestechniques de la DGSE. Imad LAHOUD avait lui-même transmis ses informationsdirectement au Général RONDOT (notamment une "liste" en mars 2004 D701/
12à 14). Imad LAHOUD avait, de lui-même, élargi ses recherches aux

8.236 transactions. Jean-Louis GERGORIN avait chargé sur sa clef USB ces
transactions dans un fichier "RECENT".
Il avait personnellement fait un tri pour le premier envoi. Dans le deuxièmeenvoi, il avait transmis l'intégralité des 895 comptes clôturés. Fin juillet, il avaitremis à Maître de MONTBRIAL un CD-ROM contenant les 33.380 comptesréférencés le 5 avril 2004 et à lui transmis début avril (reçu le 20 août par RenaudVAN RUYMBEKE). Le 4 octobre, le CD-ROM contenait des transactions
extraites de celles qui avaient été communiquées entre janvier et avril 2004.

Jean-Louis GERGORIN contestait avoir demandé à Imad LAHOUD de
créer une boîte aux lettres morte "Matrix Neo".

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Il n'avait jamais fait compléter les listes CLEARSTREAM par qui que cesoit et encore moins par le cabinet HAKLUYT, honorablement connu sur la placede Londres et consultant d'EADS.

Lors de son interrogatoire du 18 juillet 2007, Jean-Louis GERGORINremettait aux juges d'instruction une deuxième clé USB qui était saisie (scelléJLG Pôle financier 1 - D2732- D2733). Selon ses propres déclarations, cette clédevait contenir en plus de la liste des 895 comptes clôturés en mai 2004, que sasource lui avait communiquée le 11 juin suivant :

- une liste d'une douzaine de comptes qui n'avaient jusque-là jamais étécités, constituant un sous-ensemble de la liste de 895 comptes, avec les soldes declôture positifs et négatifs de certains d'eux, dont ceux de NAGY et BOCSA etcelui attribué par sa source à Brice HORTEFEUX,
- un fichier datant de février ou mars 2004 comprenant sous format Exceldes listes de transactions de janvier-février-mars 2004 dont celles concernant lecompte 80082.
e) la confection et l'utilisation des notes et des supports des dénonciations

Le 19 octobre 2007, les magistrats instructeurs procédaient à un nouvelinterrogatoire de Jean-Louis GERGORIN (D3213) dont il ressortait les élémentssuivants au sujet de la note dont un exemplaire avait été découvert au domicile duGénéral RONDOT (scellés RONDOT-MEUDON n°7 et 11 - D3188/16) et un
autre exemplaire dans la messagerie de Florian BOURGES sous l'intitulé
"noteWSP"(scellés BOURGES 10 et 11 - D1547/26, D1825/7, D1824, D3188/17).

Jean-Louis GERGORIN confirmait avoir participé à la rédaction de cettenote, précisant que les éléments d'information qu'elle contenait venaientexclusivement d'Imad LAHOUD, s'agissant d'une synthèse d'information sur lesystème CLEARSTREAM communiquée également au Général RONDOT. Ilavait demandé une synthèse à Imad LAHOUD qui avait rédigé une premièremouture. Il avait ainsi pu contribuer à la rédaction (formulation, présentation,
clarté...). Les dernières informations étaient relatives au transfert de fonds ducompte KHODORKOVSKI à HIGHFIELDS évoqué dans le dernier paragraphe
du document.

Jean-Louis GERGORIN expliquait qu'il s'était servi de ce texte en lecontractant considérablement pour rédiger, avec Imad LAHOUD, la note
"DDV.doc" et que son contenu avait largement inspiré celui de la première lettreanonyme remise à Renaud VAN RUYMBEKE le 3 mai 2004 qui était destinéeà synthétiser les discussions très détaillées qu'il avait eues avec ce magistrat(D3184/2 et 3), et qu'il disait avoir rédigée le dimanche 2 mai avec ImadLAHOUD au domicile de ce dernier. Ce jour-là, il avait travaillé tout seul sur lanote "WSP" dont il s'était servi lors de ses discussions avec Renaud VAN
RUYMBEKE et sur l'historique des transactions récentes CLEARSTREAM quifiguraient sur sa clé USB. Une fois ce "brouillon" établi, il s'était rendu au

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domicile d'Imad LAHOUD qui avait mis en forme le texte sous sa propre dictéesur un ordinateur (le sien ou celui d'Imad LAHOUD et avec l'imprimante d'ImadLAHOUD). Selon Jean-Louis GERGORIN, le rôle d'Imad LAHOUD était doncd'assurer un soutien logistique et de valider le contenu de cet écrit dont ilconnaissait la finalité.

Jean-Louis GERGORIN ne se souvenait pas avoir remis un exemplaire dela note WSP à Renaud VAN RUYMBEKE. Il la lui avait montrée de sorte que lemagistrat avait ainsi pu prendre des notes. Pour sa part, il avait mis l'accent sur letype de questions à poser à CLEARSTREAM. Ses discussions avec Renaud VANRUYMBEKE avaient porté sur l'appréciation pouvant être faite de la validité desinformations, sur le type de questions à poser à CLEARSTREAM pour aboutir
rapidement, sur les suites à donner, et sur le consensus final. Jean-Louis
GERGORIN affirmait n'avoir rien dicté à Renaud VAN RUYMBEKE mais
reconnaissait avoir insisté auprès du magistrat sur les points qui lui paraissaientimportants.

2 - Une relecture des faits aboutissant à la mise en cause de Dominique deVILLEPIN

Lors de son interrogatoire du 18 juillet 2007 (D2732), Jean-LouisGERGORIN précisait les circonstances dans lesquelles il avait été amené àcommuniquer avec le juge VAN RUYMBEKE ainsi qu'elles ressortaient destermes contenus dans les notes "Opération Reflux" (1) à (4) du Général RONDOT(2 février 2004 - D2701/4 et 5, 17 mars 2004 -D2701/5 et 6, 26 mai 2004 D2701/
9 et 10, et 30 juin 2004 -D2701/10 à 12).

Contredisant sur ces points ses précédentes déclarations selon lesquellesil n'avait pas tenu informé Dominique de VILLEPIN de la suite des informationsapportées par sa source et de ses démarches auprès du magistrat, Jean-LouisGERGORIN révélait aux juges d'instruction avoir eu des entretiens réguliers etconfidentiels avec Dominique de VILLEPIN, postérieurement au 9 janvier 2004,
et qu'il en avait rendu compte régulièrement au Général RONDOT.

Il ajoutait qu'il avait tenu Dominique de VILLEPIN régulièrementinformé des informations que lui communiquait Imad LAHOUD et notamment del'existence d'un deuxième réseau indépendant du premier faisant apparaître descomptes attribués notamment aux dénommés "Paul de NAGY" et "StéphaneBOCSA" reprenant le patronyme de Nicolas SARKOZY, et un compte attribuéà Brice HORTEFEUX sous l'intitulé "BPB HOR".

Il ajoutait avoir remis à Dominique de VILLEPIN un CD-ROM reprenantl'essentiel des informations, y compris l'existence du second réseau.

Il précisait qu'à l'occasion de l'un de ces entretiens, courant mars 2004,
il avait entendu Dominique de VILLEPIN lui dire que la seule intervention
efficace serait celle d'un juge, puis, dans la première quinzaine d'avril 2004, avaitreçu de celui-ci l'instruction de saisir ou d'informer un juge, et que soninterlocuteur avait pris soin de préciser qu'il s'agissait d'une instruction duPrésident de la République. Cette instruction de Dominique de VILLEPIN n'était

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pas suffisante pour le déterminer à saisir le juge mais elle était néanmoins, une
condition nécessaire.

Il affirmait ne pas avoir informé Dominique de VILLEPIN de l'envoi du4 octobre et ne pouvait en être certain en ce qui concernait l'envoi du 20 août(D2732).

Jean-Louis GERGORIN précisait que c'est à la suite de sa propre demanded'intervention formulée le 1er janvier 2004, que Dominique de VILLEPIN étaitentré dans un processus impliquant le Président de la République. Il s'était jusque-
là abstenu d'en parler car il s'estimait lié par un devoir de confidentialité qui avaitété levé du fait de la jonction au dossier de ces nouvelles pièces. Dominique deVILLEPIN lui avait demandé d'établir une note synthétique qu'il comptaitsoumettre au Président tout en l'invitant à garder le secret absolu sur cettedemande. Dominique de VILLEPIN lui avait également intimé l'ordre de ne riendire à EADS. Cette note avait été rédigée avec Imad LAHOUD dans la 1ère
semaine de janvier 2004 et déposée au secrétariat du ministre des AffairesEtrangères. Quelques jours après, Mme IZARD, secrétaire particulière deDominique de VILLEPIN, l'avait convoqué pour le 9 janvier.

a) sur les propos tenus lors de la réunion du 9 janvier 2004:

Jean-Louis GERGORIN disait avoir été convaincu de l'existence, au delà
des clivages politiques, de réseaux "tangentiels" ou "transverses" rassemblant des
hommes d'affaires et des hommes politiques dans des opérations de financementocculte. Aussi Dominique de VILLEPIN considérait-il comme une tâche de
moralité publique d'identifier et de combattre ces réseaux, citant à cette occasionles noms de Maître SZPINER, d'Alexandre DJOURI et de Patrick MAUGEIN,
tout en insistant par ailleurs sur la forte tension existant entre Jacques CHIRACet Nicolas SARKOZY.

Il ajoutait que Dominique de VILLEPIN avait indiqué qu'il avait obtenudu Président de la République que la DGSE mette tous ses moyens à la dispositiondu Général RONDOT pour effectuer ses vérifications, cela en vue, à son avis, del'établissement d'un rapport d'ensemble qu'il appartiendrait au Premier Ministrede déclassifier pour un signalement en application de l'article 40 du code deprocédure pénale.

Si le cas de Patrick OLLIER avait été évoqué, c'est, selon Jean-LouisGERGORIN, pour persuader le Général RONDOT de ne pas parler du résultat deses investigations à Michèle ALLIOT-MARIE.

Jean-Louis GERGORIN n'avait conservé aucun souvenir de l'évocation
de "comptes couplés" de Nicolas SARKOZY. Il expliquait que peut-être ImadLAHOUD lui avait parlé d'une rumeur à ce sujet quelques temps auparavant etdont il aurait pu faire état et que Dominique de VILLEPIN aurait alors demandéde vérifier. En réalité les noms "de BOCSA" et "NAGY" ne sont apparusréellement que sur les listes de mars 2004. Il avait aussi conservé un souvenirprécis de l'apparition de Brice HORTEFEUX au début du mois de février 2004.

Jean-Louis GERGORIN ne se souvenait pas que le nom de LAHOUD aitété évoqué, mais que l'on parlait de "MADHI" ou de "la source".

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Dominique de VILLEPIN avait insisté sur la nécessité qu'il y avait de biencomprendre l'ensemble du système en cause, l'objectif affiché étant dereconstituer l'historique de ce système de rétro-commissions dont l'affaire desfrégates n'était qu'un élément parmi d'autres. Le Général RONDOT avait la tâchede vérifier l'intégralité des informations recueillies sur le "système occulteCLEARSTREAM", ce qui excédait largement les termes de la mission qu'il avaitreçue de Philippe MARLAND.

b) sur les réunions secrètes avec Dominique de VILLEPIN :

Voyant les nouveaux éléments affluer, Jean-Louis GERGORIN avaitsollicité une nouvelle entrevue auprès de Dominique de VILLEPIN. C'est dans cescirconstances qu'au cours d'une réunion en tête à tête dans le bureau du ministredes Affaires Etrangères en février 2004, Dominique de VILLEPIN avait confirméles instructions du Président de la République et demandé l'état des investigations,
notamment en ce qui concernait Brice HORTEFEUX et le compte 80082.
Dominique de VILLEPIN avait également demandé que lui soit remis un CDROM
regroupant les données CLEARSTREAM les plus spécifiques.

Jean-Louis GERGORIN précisait qu'il n'avait pas fait jusque-là état de ceséléments, cela en raison du secret, décrété le 9 janvier, qui recouvrait l'ensemblede la démarche. Il indiquait qu'il en rendait compte au Général RONDOT. Ilestimait à cet égard que la révélation des "notes REFLUX", authentifiées par leGénéral RONDOT, l'avait délié du secret.

Au cours de la réunion de mars 2004, Jean-Louis GERGORIN avait remis
à Dominique de VILLEPIN un CD-ROM, sans l'avoir préalablement visionné,
confectionné par Imad LAHOUD et dont il n'avait pas conservé de copie.
Dominique de VILLEPIN avait à cette occasion manifesté un scepticisme surl'aide des services, évoquant le fait que, selon lui, la seule investigation efficaceserait celle d'un juge d'instruction. Jean-Louis GERGORIN lui avait indiquél'apparition de Brice HORTEFEUX, Patrick GAUBERT et des noms de"BOCSA" et "de NAGY" qui apparaissaient dans un réseau différent de celui desFrégates. Imad LAHOUD lui avait en effet présenté dans la 2ème quinzaine de marsune liste d'une douzaine de comptes parmi lesquels se trouvaient ceux qui leurétaient attribués, ce dont il avait informé le ministre (page 19). Il était convaincu
que les investigations ne progresseraient que par l'intervention d'un juged'instruction. Dominique de VILLEPIN disant que le Général RONDOT devaitcependant continuer.

En avril 2004, après le remaniement ministériel du 31 mars, il avait eu untête-à-tête avec Dominique de VILLEPIN dans son bureau au ministère de
l'Intérieur. Au cours de cette réunion qui était postérieure à la remise dedécoration qu'il situait par erreur le 6 avril, Dominique de VILLEPIN lui avait
dit : "c'est clair, il n'y plus d'autre issue que d'informer ou de saisir un juge",
ajoutant d'un ton inhabituellement sec : "C'est une instruction du Président de la
République".

Jean-Louis GERGORIN avait confié un Blackberry à la secrétaire de

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Dominique de VILLEPIN, Madame IZARD avec le terminal "MADRID" (ImadLAHOUD s'était curieusement attribué cet indicatif dans son livre). Cet appareilétait restitué en juillet suivant.

Il précisait qu'il avait été incité à rencontrer Renaud VAN RUYMBEKEpar trois éléments :

- les informations venant de LAGARDERE,
- les données communiquées par Imad LAHOUD,
- les suggestions spécifiques de Dominique de VILLEPIN et du Présidentde la République.
Il disait :"Un juge d'instruction compétent en la matière devait être saiside l'essentiel des informations qui avaient été recueillies sur le systèmeCLEARSTREAM ces derniers mois afin de vérifier et d'enquêter sur celles-ci"
(page 23). Il devait cependant le cacher au Général RONDOT jusqu'au 4 mai
suivant.

Il affirmait qu'à ce stade, Dominique de VILLEPIN partageait sa
conviction sur l'authenticité des listings.

Jean-Louis GERGORIN avait indiqué que sa source était Imad LAHOUDdont Dominique de VILLEPIN connaissait le frère et auquel il avait révélé lasituation judiciaire de sa source (Page 24) .

A la suite de la perquisition effectuée chez CLEARSTREAM le 5 mai,
tous les outils de pénétration informatique d'Imad LAHOUD étaient, selon cedernier, devenus inefficaces. Or, vers le 15 mai, Imad LAHOUD avait annoncé
une nouvelle pénétration menée avec succès et qui avait révélé la fermeture enbloc de 895 comptes, dont l'essentiel avait fait l'objet des investigations menéespar le Général RONDOT depuis novembre 2003.

Jean-Louis GERGORIN avait demandé à rencontrer Dominique deVILLEPIN pour lui apprendre la nouvelle. C'est le 19 mai qu'il l'avait informédes conditions de la rencontre avec Renaud VAN RUYMBEKE et avait rappeléla substance de la lettre dont il lui était précisé qu'elle avait été transmise aumagistrat, non signée, par l'intermédiaire d'un ami commun. Il avait mis l'accent
sur "l'extrême confidentialité" de cette démarche. Dominique de VILLEPIN était
apparu "satisfait qu'un juge soit saisi" mais en même temps préoccupé du "risqued'exposition"qui résultait du fait que Jean-Louis GERGORIN l'avait rencontré defaçon transparente. Il avait alors informé Dominique de VILLEPIN des principauxnoms présents, y compris "de NAGY" et "BOCSA".

Lors d'une nouvelle rencontre en juin 2004 avec le ministre de l'Intérieur,
Jean-Louis GERGORIN avait informé Dominique de VILLEPIN de la clôture des895 comptes et de la communication de cette information au juge Renaud VANRUYMBEKE selon le même processus. Il avait tenté d'inciter Dominique deVILLEPIN à saisir la DST.

Jean-Louis GERGORIN avait revu Dominique de VILLEPIN en juillet2004, peu après la parution de l'article du Point sur cette affaire qui commençaità faire du bruit et à provoquer l'inquiétude des personnes concernées. A cette

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occasion, Dominique de VILLEPIN lui avait annoncé qu'il avait saisi la DSTdepuis peu et lui restituait le Blackberry.

Il rencontrait de nouveau le ministre à la fin du mois de juillet 2004, enmarge d'un entretien avec Bruno LEMAIRE portant sur les bases de données antiterroristes.
Il lui faisait à cette occasion part des informations qu'il avait obtenues
sur Karel SCHMITT.

De même, il avait un nouvel entretien en septembre 2004, peu après undîner chez Tante Marguerite avec le Général RONDOT en date du 13 septembre2004. A cette occasion, Dominique de VILLEPIN lui avait indiqué que son servicede renseignement n'avait ni confirmé, ni infirmé les informations sur les listingsCLEARSTREAM et l'avait incité à être très prudent. La réaction de Dominiquede VILLEPIN s'était résumée à ces mots: "laissons agir et attendons ...".

Jean-Louis GERGORIN ne se souvenait pas d'avoir informé Dominiquede VILLEPIN de l'envoi du 20 août mais ne l'excluait pas. Il ne l'avait pasinformé de l'envoi du 4 octobre 2004.

Il disait avoir tenu régulièrement informé le général RONDOT de sesentrevues avec Dominique de VILLEPIN.

Si Dominique de VILLEPIN, qui s'était limité à répercuter les instructionsdu Président de la République, avait initié le processus, Jean-Louis GERGORINse considérait comme seul responsable de la suite donnée. Renaud VANRUYMBEKE lui avait demandé de ne lui transmettre que les informations qui luiétaient nécessaires. Il maintenait que les communications ultérieures avaient étéle fruit des interactions entre Renaud VAN RUYMBEKE et lui. Les propos deDominique de VILLEPIN avaient été une condition nécessaire mais non suffisantede sa prise de contact avec le magistrat.

c) Sur l'entretien du 4 mai 2004 avec le Général RONDOT ( points n°1 et 2 de lanote Opération Reflux (3) - D2701/9et10)

Interrogé le 20 juillet 2007,il confirmait que, le 4 mai 2004, il avaitinformé le Général RONDOT en ces termes : "Dominique de VILLEPIN m'ademandé sur instruction du Président de la République de voir un juge, VANRUYMBEKE, que j'ai vu il y a 8 jours". Il lui avait précisé l'identité de l'avocatquelques jours plus tard. Il avait également précisé le contenu de la lettre. Ilconfirmait avoir bien employé devant le Général RONDOT l'expression "parlerau juge VR" mais en lui indiquant qu'il s'agissait de son choix suite à uneinstruction de Dominique de VILLEPIN d'informer ou de saisir un juge.

Contrairement à ce qu'indiquait le Général RONDOT dans sa note, Jean-
Louis GERGORIN contestait avoir dit que l'instruction du ministre de l'Intérieurlui avait été donnée 8 jours auparavant et maintenait l'avoir reçue entre le 31 marset le 14 avril.

Jean-Louis GERGORIN se disait "presque sûr" d'avoir précisé au Général

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RONDOT que cette instruction venait du Président de la République. Mais il n'ena pas informé le magistrat, ni l'avocat de MONTBRIAL en raison du secret voulupar Dominique de VILLEPIN, ni nommé le Général RONDOT. Au cours du moisde mai, il lui avait rendu compte succinctement des rencontres avec Renaud VANRUYMBEKE et de la transmission de la lettre.

Selon Jean-Louis GERGORIN, Dominique de VILLEPIN ne voulait pasque son rôle ni celui du Président de la République apparaissent. Il pensait que leDirecteur Général de la Police Nationale était beaucoup plus proche de l'ancienMinistre de l'Intérieur que de lui.

Jean-Louis GERGORIN décrivait Dominique de VILLEPIN comme trèssatisfait du fait que Renaud VAN RUYMBEKE ait lancé une enquête vigoureuseauprès de CLEARSTREAM ce qui devait avoir l'effet d'un coup de pied dans lafourmilière ayant provoqué la clôture des 895 comptes et s'était à cette occasionmontré "jubilatoire".

d) sur la réunion de mise au point du 14 avril 2004 avec Imad LAHOUD et leGénéral RONDOT (D2574/28 et 29)

Les souvenirs conservés par Jean-Louis GERGORIN différaient de ceuxfournis par le Général RONDOT dans sa déposition, mais lui paraissaientconformes aux indications contenues dans sa note du 21 avril 2004 à destination
de Michèle ALLIOT-MARIE. Le Général RONDOT avait évoqué le fait que lessuisses n'avaient pas identifié le compte FLAM à la Banque Cantonale Vaudoiseainsi qu'un autre compte, CHOUET ou MARTINI. Le Général RONDOT avait
paru moins sceptique qu'il ne le déclarait (cf points 2 et 4 de la note - D701/13 et14).

Jean-Louis GERGORIN précisait que cette réunion n'avait eu aucunimpact sur la décision de rencontrer Renaud VAN RUYMBEKE prise surl'instruction du Président de la République. Il avait déjà pris rendez-vous avecl'avocat.

e) sur les entrevues ultérieures avec Dominique de VILLEPIN

Interrogé le 15 janvier 2008 au vu des fiches saisies chez AIRBUS (scelléAIRBUS SAS 14) mentionnant trois rendez-vous entre Jean-Louis GERGORINet Dominique de VILLEPIN, suivant les modalités de réception à l'extérieur parun officier de sécurité du SPHP en avril et mai 2004, et le 11 juillet 2004 , Jean-
Louis GERGORIN reconnaissait avoir eu des rendez-vous par l'entremise deBruno LEMAIRE le 26 juillet, puis le 27 août et à la mi-septembre 2004 (D3459).

Jean-Louis GERGORIN précisait s'être rendu aux rendez-vous de février
et mars en voiture.

Dans la deuxième partie du mois d'août, il avait reçu un message parBlackberry "tout cela finirait mal", c'était selon Jean-Louis GERGORIN la
première manifestation de scepticisme de la part de Dominique de VILLEPIN.
Celui-ci en venait à porter des jugements péjoratifs sur Imad LAHOUD ("drôle

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de zigue", "drôle de gus", "il est un peu spécial"...).

Jean-Louis GERGORIN faisait valoir que, pas plus Philippe MARLANDque Michèle ALLIOT-MARIE ou bien Dominique de VILLEPIN, ne l'avaient mis
en garde contre Imad LAHOUD ni fait aucun reproche sur les listingsCLEARSTREAM, alors qu'ils étaient tous les trois, ou au moins deux d'entre eux(Philippe MARLAND et Dominique de VILLEPIN) pleinement informés de sonrôle. Il avait compris que par cette attitude des officiels à son égard, les politiquesavaient voulu neutraliser cette affaire, pour éviter les vagues.

C- Les dénégations d'Imad LAHOUD

Imad LAHOUD était entendu en garde à vue les 7 et 8 juin 2006, lelendemain de l'entretien préalable à son licenciement de chez EADS (6 juin), etalors que Florian BOURGES était entendu par les magistrats instructeurs le 7 juin.

S'il reconnaissait avoir eu des liens tant avec Jean-Louis GERGORIN
qu'avec le Général RONDOT pendant la période considérée, il se défendaitd'avoir réalisé les falsifications et d'avoir détenu en connaissance de cause des
documents informatiques et les fichiers . Il maintenait ses déclarations en premièrecomparution.

Il admettait cependant avoir obtenu de Denis ROBERT, en février 2003,
un CD-ROM de données sur les fichiers clients CLEARSTREAM dans le cadre
d'une mission confiée par la DGSE et dont le produit avait été immédiatementremis à son officier traitant, mais contestait avoir reçu des fichiers de la part deFlorian BOURGES.

Il niait toute participation active à la confection des listings parvenus àRenaud VAN RUYMBEKE et au Général RONDOT, ainsi qu'à l'élaboration desdocuments imprimés, supports des dénonciations. Il contestait avoir transmis àDenis ROBERT les fichiers "EXPLICATIONS.doc", "WSP.doc" et "DDV.doc".
Il admettait avoir rédigé les annexes intégrées à la note remise au GgénéralRONDOT le 23 novembre 2003.

Le 21 février 2007, il publiait un ouvrage "Le coupable idéal" dans lequelil persistait à contester toute implication dans ces dénonciations et dansl'élaboration des documents et listings CLEARSTREAM.

1- sa garde à vue et sa mise en examen

a) son audition en garde à vue

Imad LAHOUD précisait qu'en novembre-décembre 2002, son frèreMarwan lui avait demandé de prendre contact avec le Général RONDOT dont il

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lui avait fourni le numéro de téléphone. Il avait rencontré ce dernier dans le
bureau du CROS, au ministère de la Défense. Philippe RONDOT lui avait alorsexpliqué que Jean-Louis GERGORIN avait parlé de lui. A l'issue de cette
entrevue, intéressé par les compétences manifestées par Imad LAHOUD, legénéral l'avait convié à un dîner avec des responsables de la DGSE (D1000). Dèsle lendemain, Jean-Louis GERGORIN l'avait fait appeler pour un petit déjeunerau cours duquel il lui proposait de devenir consultant d'EADS.

Au cours du dîner organisé en janvier 2003 par le Général RONDOT, enprésence d'Alain JUILLET et du Général CHAMPTIAUX, directeur de cabinetdu DGSE, avait été arrêtée l'idée de mener des investigations notamment sur leschambres de compensation, à commencer par CLEARSTREAM (D1002/2). DenisROBERT avait été désigné comme cible en raison des enquêtes que celui-ci avaitmenées sur cet organisme. Son officier traitant l'avait joint pour un rendez-vousavec le Général CHAMPTIAUX. Deux rencontres avaient eu lieu à Paris en vue
de son déplacement sur Metz. Il avait ainsi été convenu qu'il approche DenisROBERT en prétextant de son implication dans un dossier judiciaire et del'utilisation par ses partenaires de CLEARSTREAM contre lui.

Ainsi s'était-il rendu à Metz en février 2003 pour le compte de la DGSE,
afin de récupérer tous éléments concernant CLEARSTREAM. Dans le bureau deDenis ROBERT, ce dernier lui avait montré des listings informatiques et avaitgravé un CD-ROM qu'il avait lui-même ensuite remis à son officier traitant. ImadLAHOUD ajoutait que Denis ROBERT lui avait dit bénéficier d'une source ausein de la chambre de compensation et ne lui avait pas remis d'autres documents.

Il précisait qu'en juin 2003, après que plusieurs opérations eurent étémontées avec la DGSE, il avait été convoqué par le Général RONDOT qui luiavait annoncé la fin de sa collaboration avec ce service, lui expliquant qu'il allait" le prendre en direct après autorisation du Ministre de la Défense ".

Au sujet de l'obtention d'un bureau, alors qu'aux dires de Jean-LouisGERGORIN celui-ci craignait qu'il soit suivi (point évoqué à la cote 48 du scelléRONDOT CHANAUX 8), Imad LAHOUD expliquait que c'était par amitié queJean-Louis GERGORIN se préoccupait de ses conditions de travail.

Sur présentation de la note du général en date du 1er juin 2003 (scellé
RONDOT MEUDON 17 cote 7) évoquant l'opération MADHI et son embauchepar Jean-Louis GERGORIN et mentionnant "satisfaction connexions mafieuses
de Alain GOMEZ. A prendre avec précaution", Imad LAHOUD affirmait n'avoir
jamais parlé d'Alain GOMEZ avec Jean-Louis GERGORIN ou PhilippeRONDOT. Il contestait également avoir parlé à Philippe RONDOT de PierreMARTINEZ contrairement à ce que laissait à penser une autre note de ce dernier(scellé RONDOT CHANAUX 2 cote 14 à 16).

Il précisait que Jean-Louis GERGORIN n'avait jamais évoqué avec lui sesdoutes sur les circonstances du décès de Jean-Luc LAGARDERE. Par contre, il
indiquait que le Général RONDOT lui avait demandé vers février ou mars 2004
de lui établir une note sur un dénommé Karel SCHMITT dont un exemplaire étaitretrouvé chez Jean-Louis GERGORIN (scellé GERGORIN 1 cotes 1et 2).

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Confronté au contenu de la note du général RONDOT (cote 3 du scelléRONDOT-MEUDON 17), Imad LAHOUD affirmait ne pas avoir parlé avec leGénéral RONDOT de l'affaire de Taïwan et de compromission, en revanche iladmettait que les noms de Gilbert FLAM et Jean-Jacques MARTINI avaient déjàété évoqués avec lui, précisant que ces deux personnes avaient enquêté sur unhomme politique français. Il ajoutait :"j'ai compris qu'il s'agissait de soi-disantcomptes bancaires de Jacques CHIRAC".

Sur présentation des documents remis par Jean-Louis GERGORIN auGénéral RONDOT le 23 novembre 2003, Imad LAHOUD contestait en avoir été
l'auteur. Il affirmait n'avoir fourni aucune information au Général RONDOT
concernant les noms de MARTINI, SQUARCINI, FLAM, CHOUET,
JEVAKHOFF, MARCHIANI (scellé RONDOT MEUDON 17 cote 3).

Imad LAHOUD reconnaissait avoir remis une fiche policière sur PetarMANDJOUKOV au Général RONDOT mais il n'était pas question d'AlainGOMEZ dans cette fiche (scellé RONDOT-MEUDON 12 - cote 13 et D1003).

Il indiquait qu'il n'avait pas été avisé de la réunion du 9 janvier 2004 auministère des Affaires Etrangères avec Dominique de VILLEPIN et que personnene l'avait informé par la suite de son contenu.

Sur la découverte à l'occasion de son placement en garde à vue en mars2004, dans une procédure distincte, du document rédigé par Jean-Louis
GERGORIN citant le Général RONDOT, il expliquait que Jean-Louis
GERGORIN avait rédigé cette lettre destinée au directeur du Centre Commun deRecherches d'EADS, établissement à régime renforcé dans l'enceinte duquel ilavait obtenu un bureau à la demande de Philippe RONDOT, alors même qu'iln'était pas encore salarié d'EADS ni habilité secret-défense.

Il avait été convoqué le lendemain par Philippe RONDOT qui ne lui avaitrien dit au sujet de l'intervention de Dominique de VILLEPIN, malgré le "savon"
passé au cours de l'entretien.

Il affirmait n'avoir jamais effectué de pénétration informatique du systèmede CLEARSTREAM et contestait les mises en scène de Meudon et de Suresnes
décrites par Philippe RONDOT dans sa note du 6 avril 2004 (scellés RONDOTMEUDON
16- cote 4- et RONDOT-MEUDON 28- cote 26) et dans sa noteCROS/447 du 21 avril 2004 (§2 et 3).

Il ne s'expliquait pas comment le Général RONDOT pouvait indiquer que
"Mahdi en savait beaucoup sur Jean-Louis GERGORIN avec implication de DDV
et le juge VR" (scellé RONDOT-MEUDON 12, cote 12 du 19 juillet 2004).

Au sujet de la mention "contacts Mahdi Sarko"portée sur la note du 7septembre 2004 (scellé RONDOT-MEUDON16, cote 8), Imad LAHOUDaffirmait n'avoir jamais eu de contact avec Nicolas SARKOZY mais indiquaitavoir rendu visite à deux officiers de la DST en charge de la criminalité
informatique.

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Il n'avait pas remis un CD-ROM au Général RONDOT mais une clé USB
sur laquelle il y avait la version numérique de toutes les notes blanches saisies surson ordinateur.

Finalement, l'ensemble des déclarations d'Imad LAHOUD tendait à
présenter Philippe RONDOT comme un menteur, et à prétendre que tout ce qu'ilavait noté était faux. Il soutenait n'avoir jamais évoqué avec le Général RONDOTle nom d'Alexandre JEVAKHOFF, qu'il connaissait par ailleurs (D 1007).

Sur ses contacts avec Florian BOURGES, Imad LAHOUD précisait que,
lors d'un procès intenté par CLEARSTREAM à Denis ROBERT, et auquel il avaitassisté en juillet 2003, Denis ROBERT lui avait présenté, à la suspensiond'audience, Florian BOURGES comme un auditeur d'ARTHUR ANDERSEN.
A cette occasion, Florian BOURGES lui avait confirmé qu'il avait réalisé un auditchez CLEARSTREAM et qu'il collaborait avec l'OLAF. Quelques jours plus tard,
Florian BOURGES l'avait contacté. Ils s'étaient ensuite rencontrés sur Paris
(D1009). Florian BOURGES lui avait dit qu'il disposait de fichiers d'archives deCLEARSTREAM sur les transactions suspectes et les comptes occultes qu'ilproposait de lui remettre contre rémunération, à raison de 5.000 et 10.000 eurosle fichier (il y avait entre 100 et 150 fichiers). Lui-même s'était présenté à FlorianBOURGES comme il l'avait fait vis à vis de Denis ROBERT. Il n'avait jamais
dit qu'il s'était fait "virer" de la banque anglaise qui l'avait employé comme
trader et qu'il aurait voulu nuire à la réputation de cette banque en utilisant cesfichiers. Si Florian BOURGES l'avait par la suite relancé par téléphone, il nel'avait rencontré qu'une seule fois. A cette occasion, Florian BOURGES ne lui
avait pas remis de fichier CLEARSTREAM . Il reconnaissait qu'il était bien enpossession d'une clef USB biométrique, ainsi que l'avait indiqué FlorianBOURGES dans son témoignage.

Imad LAHOUD affirmait n'avoir été à l'origine d'aucune modification defichiers, que lui-même n'était pas titulaire d'un compte "Matrix Neo" et qu'iln'était l'auteur d'aucun des envois au juge Renaud VAN RUYMBEKE. Il sedéfendait d'avoir été la source de Jean-Louis GERGORIN qui ne l'avait jamaisinformé des dénonciations anonymes, et disait ne pas comprendre pourquoi celui-
ci l'avait désigné comme tel au juge VAN RUYMBEKE (D729/2et3 - D988/8).
Pour sa part, il n'avait jamais rencontré ce magistrat.

Il considérait que le qualificatif d'informaticien de génie que lui auraitattribué Jean-Louis GERGORIN devant le magistrat était très largement excessif.

Imad LAHOUD contestait avoir été le rédacteur de la note "DDV.doc"
créée le 4 janvier 2004, retrouvée sur la messagerie de Florian BOURGES etcomportant "Matrix Neo" dans ses propriétés. Il ne s'expliquait pas comment sonprénom avait pu figurer dans les propriétés du document, lui-même n'ayant jamaisutilisé le pseudonyme "Matrix Neo".

Imad LAHOUD expliquait que Florian BOURGES s'était fait appeler
"Jonathan GANTRY" et avait tenté d'entrer en relation avec lui en vain sous cette
identité en septembre 2005 (D1009/7).

Il reconnaissait avoir été l'utilisateur de l'ordinateur saisi et placé sous

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scellé B4, mais maintenait n'avoir jamais eu de compte internet "Matrix Neo" ou
"Matrix". Les conclusions du rapport d'expertise de l'IRCGN du 8 juin 2006 surl'exploitation du disque dur permettait pourtant de retrouver la liste des nomsd'utilisateurs parmi lesquels "Imad LAHOUD" et "Matrix". Imad LAHOUD notait
sur ce dernier point que le disque dur ne contenait pas de système d'exploitationet qu'il ne pouvait s'agir d'un utilisateur du disque.

Ayant eu l'occasion de rencontrer Alain JUILLET lors du dîner derecrutement par la DGSE, Imad LAHOUD lui avait par la suite présenté sonrapport sur le Blackberry susceptible d'intéresser le SGDN, ce qui, selon lui,
pouvait expliquer que le nom de cette personne ait été évoqué lors de l'appeltéléphonique passé par son épouse en avril 2005 pendant la perquisition effectuéeà son domicile.

Il certifiait ne pas avoir su qui pouvaient être les dénommés "BOCSA" et
"de NAGY", et cela jusqu'à ce que la presse en parle.

S'il admettait connaître François GONTIER, financier qu'il avait croiséquand il faisait du trading, il assurait ne connaître aucune des autres personnesdont les noms ont été cités dans cette affaire.

Il précisait que lors de la remise des fichiers par Denis ROBERT, ilsétaient seuls tous les deux dans son bureau (D1012) et affirmait n'avoir rendu
compte de sa visite à Metz qu'à son officier traitant ANTOINE, et non à PhilippeRONDOT.

b) sa mise en examen

Le 9 juin 2006, les juges d'instruction notifiaient à Imad LAHOUD samise en examen des chefs de dénonciation calomnieuse auprès du juge RenaudVAN RUYMBEKE, faux et usage de faux (D1016).

Imad LAHOUD précisait que le CD-ROM que Denis ROBERT lui avaitremis contenait des listings CLEARSTREAM, sans en être certain. Il l'avait
transmis à son officier traitant sans l'avoir ouvert, et sans en garder de copie.
Quant à Florian BOURGES, il maintenait que celui-ci ne lui avait jamais remisle moindre document relatif à CLEARSTREAM. Il persistait à dire qu'il n'étaitpas la source de Jean-Louis GERGORIN, qu'il ne lui avait pas donné de listingsfalsifiés ni parlé avec lui de CLEARSTREAM et n'avait jamais personnellementfalsifié des documents CLEARSTREAM.

2- ses interrogatoires ultérieurs:

Lors de son interrogatoire du 24 octobre 2006 (D1545), Imad LAHOUDprécisait que sa mission impartie par la DGSE était de décrire et d'expliquer

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autant que possible par des notes ou par des exemples remis à son officier traitant,
les mécanismes de financement des grandes familles du Moyen-Orient.

Il ajoutait que le nom de Denis ROBERT avait été évoqué au cours de sonpremier entretien avec Antoine. L'idée de l'approcher avait été validée par lahiérarchie. Il avait alors proposé de passer par l'intermédiaire d'Eric MERLEN,
son contact, ancien journaliste de "Libération".Ils s'étaient fixé un rendez-vous engare de Metz, après quoi, ils s'étaient retrouvés tous les deux seuls dans le bureauoù ils avaient discuté de CLEARSTREAM. Denis ROBERT avait alors acceptéde lui fournir sur CD-ROM les informations dont il disposait. Il l'avait caché lorsde sa première audition afin de protéger la DGSE et le secret défense. Il n'y avaiteu qu'un seul CD-ROM, contrairement à ce qu'avait indiqué ANTOINE dans soncompte rendu du 3 mars 2003(D707/15). Denis ROBERT lui avait dit qu'il luiavait gravé des listes de comptes et de transactions CLEARSTREAM.

Imad LAHOUD affirmait que Jean-Louis GERGORIN, dont le rôle s'étaitlimité à lui présenter le Général RONDOT, ne lui avait jamais fait de propositionsur des "projets douteux", contrairement à ce qu'avait indiqué Antoine dans sonrapport du 26 février 2003 (D1305/18). Il estimait que les contrats de consultantn'avaient rien de fictif, qu'un travail avait été effectivement réalisé et qu'il nes'agissait nullement à ses yeux d'une couverture.

Il n'avait pas effectué de recherches sur les titres LAGARDERE, sur lesflux financiers et des investissements dans les fonds.

Il reconnaissait avoir personnellement rédigé les notes relatives à PetarMANDJOUKOV, Gafur RAKHIMOV et Karel SCHMITT retrouvées sur son
ordinateur (D547/20 à 22), cela également à la demande du Général RONDOT.
Ces notes se trouvaient d'ailleurs intégrées dans un dossier intitulé "RONDOT".
Il n'avait remis ces données qu'au général.

Au sujet de la note "DDV.doc", il précisait que la description dufonctionnement de CLEARSTREAM correspondait à une annexe d'une note surRadovan KARADZIC qu'il avait remise au Général RONDOT en septembre 2003,
que les mots "facteur" et "notaire" étaient repris du livre de Denis ROBERT("Révélation$") et que le premier paragraphe dans son entier n'était autre quel'extrait d'un ouvrage d'ATTAC auquel Denis ROBERT avait participé. Il
assumait la faute d'orthographe ("on appel"), le reste du texte étant de lui. Danssa note KARADZIC, il avait fait état de références précises sur la banque"PRIVEDNA BANKA ZAGREB", les données qu'il avait recueillies étaientensuite recoupées et complétées par celles que lui livrait le Général RONDOT.

C'est par la presse qu'il avait appris l'existence de la réunion du 9 janvier2004. Il disait ne pas connaître personnellement Dominique de VILLEPIN. Ilcontestait les propos rapportés par Stéphane CARTERON à ce sujet (D1434/6) etceux rapportés par Antoine dans son compte-rendu du 14 mars 2003 (D1303/5).
Il ne croyait pas à la thèse du coup monté contre son beau-père au sujet de l'affairedu fonds VOLTER.

Sur l'éventualité d'une intervention de Dominique de VILLEPIN lors desa garde à vue de mars 2004, Imad LAHOUD affirmait ne pas le connaître et ne

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l'avoir jamais rencontré. Enfin, il affirmait que Dominique de VILLEPIN n'avaitrien à craindre car lui-même n'avait rien à dire. Il contestait les termes du généraldisant qu'il se trouvait "au piano", persistant à nier avoir commis la moindrepénétration du système CLEARSTREAM.

De nouveau interrogé le 28 novembre 2006 (D 1698), Imad LAHOUDaffirmait n'avoir jamais remis de fichiers à Philippe RONDOT ni à son assistanteStéphane QUEROY, contrairement à ce qu'indiquait celle-ci (D1105/5 etD1654/2). Il soutenait que les déclarations de Stéphane QUEROY lui avaient étédictées par son oncle (D1698/6). Il n'avait jamais remis au Général RONDOT delisting provenant d'une pénétration CLEARSTREAM.

Il n'avait pas davantage procédé à une tentative de pénétration deCLEARSTREAM avec Philippe RONDOT ou Jean-Louis GERGORIN le 12février à Asnières (D1698/23).

Il contestait la réalité des déplacements en date du 6 avril 2004 àl'Observatoire de Meudon et à Suresnes relatés par le Général RONDOT, aux finsde démonstration de pénétration informatique. Si ce dernier était venu le voir àSuresnes, c'était pour vérifier son installation (D1698/6). Jean-Louis GERGORINet Pierre-Georges SAVA étaient présents. Il n'était alors que consultant. Il n'avaitfait à cette occasion aucune démonstration de pénétration informatique (D1698/5).

Il remarquait que s'il était possible qu'il ait rencontré Philippe RONDOTle 14 avril 2004, il ne l'avait néanmoins jamais rencontré en présence de Jean-
Louis GERGORIN au ministère de la Défense (scellé RONDOT-MEUDON 162/
02/04, 10/02, 6/04, 13/04 , 14/04) (D1698/8). Il voyait souvent PhilippeRONDOT en juillet 2004 mais n'avait jamais évoqué avec lui "l'OpérationReflux"(D1698/11).

Il avait constaté que Philippe RONDOT avait une obsession au sujet deGilbert FLAM et de Jean-Jacques MARTINI mais, pour sa part, il n'avait pasenquêté sur ces personnes, ni sur "l'affaire des Frégates". Il disait avoir tout ignoréde ce qui pouvait se passer entre Jean-Louis GERGORIN et Philippe RONDOT(D1698/8) et décrivait le Général RONDOT comme un professionnel durenseignement et de la manipulation (D1698/ 9).

Il ne savait pas qui pouvait être le dénommé "Mabuse" cité à ses cotés le
27 juillet 2004 par Philippe RONDOT (scellé RONDOT-MEUDON 16).

A ses yeux, il paraissait insensé que Jean-Louis GERGORIN établisse desfaux listings sur lesquels figuraient des personnes qui, de notoriété publique,
étaient ses propres ennemis (D1698/9).

Il relatait que le 16 septembre 2004 (D1698/14 et 17), il avait eu unrendez-vous à Bercy avec Nicolas SARKOZY paraissant informé de ce que Jean-
Louis GERGORIN était le corbeau, agissant sur ordre de Dominique deVILLEPIN, et lui annonçant que l'affaire allait éclater. Il avait choisi de ne pas enparler à son ami François PEROL, préférant"cloisonner", mais s'en était
entretenu avec le Général RONDOT la semaine suivante. Une seconde entrevue
avait eu lieu le 8 décembre 2004 (D1698/17). Cette fois, il avait été à nouveauquestion de Dominique de VILLEPIN. Nicolas SARKOSY cherchait à obtenir

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confirmation de l'implication de Dominique de VILLEPIN.

Imad LAHOUD n'avait parlé à personne de ces deux entretiens par peurdes représailles professionnelles. Ce n'était que le 3 novembre 2006, qu'il avaitdemandé à son conseil d'en dévoiler l'existence à la presse.

Ces allégations étaient formellement démenties par la partie civile
concernée qui en justifiait par la production de pièces au dossier.

Il révélait que Denis ROBERT, qu'il savait très lié à Renaud VANRUYMBEKE., l'avait informé de sa rencontre informelle avec ce magistrat le 11février 2005, que Denis ROBERT lui envoyait de très nombreux SMS et qu'il lesdétruisait au fur et à mesure, qu'il avait ainsi pu obtenir quelques bribes du dossier(D1698/27).

Il reconnaissait être l'auteur des paragraphes 1 et 2 de l'annexe dudocument coté D945/5 et portant la mention "source Madhi remis par JLG le
23.11.03" qui avaient dans un premier temps figuré en annexe d'une notetransmise sur la lutte anti-terroriste (D1698/30).

Il contestait les affirmations de François GONTIER sur ses mobiles
éventuels à son égard. Il n'avait pas fait état de son lien de parenté lors de sa gardeà vue alors qu'il était parent avec Claudine HADDAD épouse GONTIER(D1698/31). Il ajoutait n'avoir jamais évoqué avec Antoine François GONTIERni TOKHTAKHOUNOV(D1698/32).

Au cours de son interrogatoire du 14 février 2007 (D2271), ImadLAHOUD indiquait que c'est Denis ROBERT qui avait recopié les donnéesinformatiques CLEARSTREAM à partir de son propre ordinateur et lui avait justeremis un CD-ROM sur lequel ces données figuraient. Il n'avait pas cherché àconnaître la provenance des listings, sachant qu'une partie figurait dans le livre"REVELATION$" (D2271/2).

Imad LAHOUD affirmait que les seules informations qu'il avait eues del'affaire CLEARSTREAM lui étaient venues de Denis ROBERT qui lui-mêmeles tenait de Renaud VAN RUYMBEKE et d'un magistrat du parquet de Paris. Ilavait eu Denis ROBERT au téléphone qui se vantait d'être installé dans le fauteuilde ce magistrat et qui lui donnait lecture des résultats d'une commission rogatoireinternationale. Il prétendait avoir enregistré la conversation puis avoir remis lacassette sur le champ au Général RONDOT en présence de sa nièce StéphaneQUEROY. Il en déduisait que c'était Denis ROBERT qui l'informait et non
l'inverse (D2271/5).

Il niait être l'auteur des mails adressés à Denis ROBERT en septembre2004 (D1811/2, 14, 18, 13, , 8 et 9), auxquels étaient joints les documents"Explications.doc", "WSP.doc" et "DDV.doc" (D1824 et 1825) et avoir été àl'origine de l'emploi, au cours de leurs échanges, du vocable "peintre" pourdésigner les magistrats.

Denis ROBERT le tenait informé de tout ce que faisait Renaud VANRUYMBEKE dans le dossier. Il transmettait ensuite les informations au Général

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RONDOT. Il avait commencé à "traiter" Denis ROBERT avant l'envoi des lettres
anonymes jusqu'à ce que le Général RONDOT lui notifie la fin de ce traitement.
En juin 2004, alors que la DST commençait à enquêter sur cette affaire, il avaitremarqué qu'il faisait l'objet de filatures. Le Général RONDOT lui aurait dit àcette occasion : "Ne vous inquiétez pas, Michèle est au courant, vous êtes dans les
clous" (D2271/12).

Le 23 juin, il avait envoyé un SMS à Denis ROBERT pour exprimer sonembarras au sujet des instructions de Philippe RONDOT et des pressions de laDST (D2271/15et16). Ultérieurement, Denis ROBERT lui avait envoyé le
message "oui-oui cherche à me voir en off", il lui avait demandé "qui est oui-
oui?", et Denis ROBERT avait répondu c'est le juge "DUIS" [d'HUY]
(D2271/20). Selon lui, Denis ROBERT avait dû supprimer ces SMS, nonretrouvés par les enquêteurs.

En fin d'interrogatoire, Imad LAHOUD était mis supplétivement enexamen du chef de recel de vol et de recel d'abus de confiance (D2271/27).

3 - les "révélations" contenues dans le livre "Le coupable idéal"

A la suite de la parution de son livre "Le coupable Idéal", Imad LAHOUDétait une nouvelle fois interrogé le 21 mars 2007 (D2442). Il confirmait qu'enmars 2004, Jean-Louis GERGORIN lui avait demandé de monter un système demessagerie crypté pour une opération de lutte contre le terrorisme. Tous lesmessages devaient passer par un ordinateur central qui était installé au début dansson bureau puis dans la salle serveur d'ITS. EADS sauvegardait tous ses mails quipassaient par le serveur central qui les archivait dans une chambre forte. Toutesles traces étaient selon lui disponibles au siège d'EADS et les connexions auxbornes téléphoniques étaient conservées chez SFR.

Il précisait qu'il avait pu constater que le terminal Blackberry "MUNICH",
dont il prétendait qu'il avait été attribué à Renaud VAN RUYMBEKE, s'étaitconnecté à la borne SFR qui relayait le secteur du pôle financier.

L'appareil saisi dans la résidence secondaire du Général RONDOTcorrespondait au terminal AMSTERDAM. L'analyse effectuée par l'expertpermettait de découvrir un message sous la signature "Max" (Général
RONDOT)où Jean-Louis GERGORIN était appelé "le fou" ou "Mabuse".Le
Général RONDOT le surnommait également"Docteur Jekyll et Mr Hyde".

Imad LAHOUD se souvenait qu'à une époque, Jean-Louis GERGORINavait dit au Général RONDOT que Philippe DELMAS était de "mèche" avec des
mafieux russes pour mener les actions du "groupe AZF". Il en avait parlé à dePierre de BOUSQUET qui l'avait traité "d'illuminé".

Imad LAHOUD expliquait que les messages reproduits dans son livrerésultaient de notes prises à l'époque. Alors que le Général RONDOT lui avaitdit d'effacer tous les soirs les messages, il en avait retranscrit certains. C'étaitavant l'envoi du Blackberry à Renaud VAN RUYMBEKE.

Le fait que Stéphane QUEROY et le Général RONDOT avaient l'un et

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l'autre disposé d'un terminal avait crédibilisé à ses yeux la version initiale avancéepar Jean-Louis GERGORIN selon laquelle les appareils étaient destinés à aider àla lutte contre le terrorisme. Mais il ignorait que Thibault de MONTBRIAL etRenaud VAN RUYMBEKE avaient été également équipés. Imad LAHOUD disaitque compte tenu de la qualité des protagonistes dans ce dossier, il avait eu trèspeur de révéler l'existence d'un tel système de messagerie.

Sur ses relations avec certains responsables des Renseignements Généraux,
Imad LAHOUD expliquait qu'il avait existé une relation d'amitié entre lui etFrançois CASANOVA qu'il rencontrait régulièrement depuis sa sortie de prisonen octobre 2002 alors qu'il était chargé de mission auprès de BernardSQUARCINI, adjoint au directeur central des Renseignements Généraux. Tout cequ'il savait de l'affaire CLEARSTREAM, il le faisait remonter au GénéralRONDOT et à François CASANOVA qui l'un comme l'autre savaient que sasource était Denis ROBERT.

Dans son ouvrage, Imad LAHOUD révélait aussi que le Général RONDOTlui ayant demandé de récupérer un CD-ROM de listings CLEARSTREAM auprèsde Denis ROBERT, il s'était fait remettre deux CD-ROM en octobre ou novembre
2003 (D2337/88);

La boîte aux lettres "morte" dejazee2000@yahoo.fr avait été ouverte à la
demande de Jean-Louis GERGORIN. Elle avait été ensuite confiée par Jean-LouisGERGORIN au Général RONDOT et à sa nièce (D2337/207).

Il était également indiqué, dans ce livre, que Jean-Louis GERGORIN luiavait précisé avoir eu recours à des consultants étrangers pour modifier des listingsCLEARSTREAM qui étaient en sa possession (D2337/107 et 213). Il s'agissaitdu cabinet HAKLUYT à Londres. Jean-Louis GERGORIN était convaincu queles listings étaient incomplets. Il avait relevé l'existence d'un compte attribué à uncertain CACERES GOMEZ qui selon Jean-Louis GERGORIN ne pouvait êtrequ'Alain GOMEZ.

4 - les interrogatoires ultérieurs

Imad LAHOUD affirmait que le Général RONDOT lui remettait des nomset des numéros de comptes. Sur ce sujet, il concluait en ces termes : "J'ai eu tort
de faire confiance au général RONDOT, je ne le pensais pas capable de réécrirel'histoire avec son ami Jean-Louis GERGORIN et dire que j'ai tout inventé moi-
même car pour la plupart des noms qui sont dans la procédure, je ne connais pas99% des gens."

Il contestait avoir eu en sa possession la liste des 895 noms que Jean-LouisGERGORIN avait prétendu avoir reçue de sa part, soutenant qu'aucun deséléments retrouvés sur son ordinateur n'était venu étayer de telles affirmations(D2552/10).

Sur la note "Opération REFLUX (source Madhi)" du 23 novembre 2003( 2701/2 à 4), Imad LAHOUD confirmait avoir été l'auteur de l'annexe
comportant 5 paragraphes (correspondant à l'annexe d'une note sur les Serbes).
En revanche, il n'était pas l'auteur de la partie principale , depuis "en 1989 Wang
Chan Poo" jusqu'à "dont il était le plus gros actionnaire avec 7% du capital au

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30.08.2003". Il avait effectivement tapé en gras la phrase "la liste des comptes nonpubliés n'est accessible que par une procédure informatique connue seulement duprésident".

Il maintenait que sa source d'information sur CLEARSTREAM était DenisROBERT qui lui avait remis un 2ème CD-ROM qu'il avait transmis en septembre2003 à Philippe RONDOT qui, à son tour, avait pu le remettre à Jean-LouisGERGORIN. Quelques semaines après Jean-Louis GERGORIN avait fait effectuéla vérification à Londres au sujet d'Alain GOMEZ.

Il ajoutait que Jean-Louis GERGORIN était un mythomane qui se mentaità lui-même et déclarait à ce sujet: "Depuis le début, Jean-Louis GERGORIN m'aconstruit comme un alibi et a monté une sorte de mythe autour de [mon]
personnage pour masquer son propre rôle dans cette manipulation qu'il a montéelui-même" (D2552/3).

Courant septembre 2003, il avait expliqué au Général RONDOT, et à sademande, comment insérer des noms aux fichiers de Denis ROBERT. En
revanche, il avait refusé d'accéder à la demande de Jean-Louis GERGORIN de
le former au logiciel "Access".

Revenant sur les points 1 et 2 de la note "Opération REFLUX" (3)
(D2701/9 et 10), Imad LAHOUD indiquait qu'il n'était pas au courant de larencontre entre Jean-Louis GERGORIN et Renaud VAN RUYMBEKE, ni du rôle
éventuel de Dominique de VILLEPIN. Il n'avait remis à Philippe RONDOT lacopie de la lettre anonyme qu'après le 4 mai, soit vers le 21.

Il contestait avoir participé à la prétendue "réunion de mise au point" du
14 avril au cours de laquelle Philippe RONDOT aurait fait part de ses convictions(D2574/28 et 29).

Sur la note publiée sur le site "nouvelobs.com" ("entretien avec IL... me
dit que les 894 comptes ont été fermés par CS dans le we du 15 au 16 mai" D799/
3), il soutenait n'avoir jamais tenu de tels propos au sujet de la clôture des895 comptes (D2552/12).

Il avait sollicité Denis ROBERT, à la demande du Général RONDOT pourobtenir l'expédition de ces 895 comptes (D2552/17).

Il affirmait n'avoir pas davantage tenu les propos prêtés par PhilippeRONDOT dans le point 3 de sa note "Opération REFLUX (4)" (D2701/10 à 12)
au sujet des instructions reçues par Jean-Louis GERGORIN de Dominique deVILLEPIN de "balancer NS".

Il contestait avoir informé le Général RONDOT d'un quelconque envoiopéré par Jean-Louis GERGORIN auprès de Renaud VAN RUYMBEKE. Lesseules informations dont il disposait provenaient de Denis ROBERT qui ne luiavait jamais dit qui était le corbeau (D2552/19).

Interrogé sur la "note WSP" (D3208), Imad LAHOUD contestait l'avoir

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adressée à Denis ROBERT. Cette note n'avait pas été évoquée avec Jean-LouisGERGORIN. Seul, le Général RONDOT avait mentionné les noms de certaines
personnes citées, souvent en référence aux obsessions de Jean-Louis GERGORIN,
comme Alain GOMEZ, Pierre MARTINEZ, Philippe DELMAS, Andrew WANG.
Philippe RONDOT lui avait parlé également du compte japonais de JacquesCHIRAC ( §6 de la note). Le fonds HIGHFIELDS avait été évoqué à plusieursreprises devant lui par Jean-Louis GERGORIN au sujet d'une OPA sur le groupeLAGARDERE (D3208/2). Néanmoins, ni Philippe RONDOT, ni Jean-LouisGERGORIN ne lui avaient parlé de cette "note WSP" (D3208/3).

Il affirmait enfin qu'il n'avait pas rédigé la lettre anonyme du 3 mai et queJean-Louis GERGORIN n'était pas à son domicile le 2 mai dans l'après-midi.

5 - les résultats des expertises :

EE

L'expertise du disque dur utilisé par Imad LAHOUD (scellés 3 et 4 ) etle rapport de l'assistant spécialisé Paul PIOT en date du 30 avril 2007 (D2550),
révélaient que, dans les clusters non alloués, étaient découvertes des chaînes decaractères pour certaines identiques à celles apparaissant dans les CD-ROMadressés à Renaud VAN RUYMBEKE, ainsi que 39 des noms figurant égalementdans les listings transmis au Général RONDOT et au magistrat instructeur.

Etaient ainsi inventoriés les noms suivants:
D AMBIEL
Vict AVERIN
Stéphane BOCSAFAB BOSSARD
Pierre CABANES
CARLYLE
EDIN CAYBAN
JP CHEVENEMENT
T DANA
B DELAFAYE
L DORS
P DOURY
JF DUBOS
EURORSCG TRUST
Jean Renaud FAYOL
G FLAM
Jacques FRANQUETArka GAYDAMAK
GEOS
ALAIN GOMEZ
Bernard GUETTA
Jean Yves HABY
Guillaume HANNEZO
Jean HEINRICH
Bernard HEMERY
HOMAKHAN ZAND
JP JOULIN
Issam KEIRALLAH

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SER KLEBNIKOFF
JC de LASTEYRIE du SAILLANT
PET MANJOUKOW
JP MARCHIANI
MARTINEZ PIERRE Y ASOCIADOS
JJ MARTINI
Ser MIKHAILOV
Paul de NAGY
Denis OLIVENNES
P PASQUA
PRETORY
Gaf RAKIMOV
M RICH
René RICOL
Kar SCHMITT
Seg SEGURIDADE ULMO
Alain de WULF
D YOFFE

Les résultats de l'expertise de la première clé USB remise par Jean-LouisGERGORIN aux juges d'instruction (scellé JLG_UNIQUE), confiée à PhilippeJOLIOT (D1236) étaient analysés par Paul PIOT qui livrait ses conclusions dansdeux rapports datés du 13 mars 2007 (D2351).

Dans ce rapport étaient mentionnés de nouveaux noms n'apparaissant pasdans les listings mais inclus dans le DVD-ROM:

Allain GUILLOUX
Benoit HABERT
Benoit TELLIER
Bernard GUETTA
Bernard HEMERY
Bertrand DUFOURCQ
Christian SASSO
Denis OLIVENNES
Guillaume HANNNEZO
Jean ROZEVALLON
Jean-Renaud FAYOL
Jean-Yves HABY
Michel BARAT
Michel CHARASSE
Philippe GUGLIELMIPierre CABANES
René RICOL
Simon GIOVANNAI
Yves BEAUMLIN
Yves GLAIZES

Parmi ces noms, ceux de GUETTA, HEMERY, OLIVENNES,
HANNEZO, FAYOL, HABY, CABANES, RICOL, figuraient également sur les

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disques durs utilisés par Imad LAHOUD (scellés 3 et 4 ).
Ces conclusions étaient notifiés à Imad LAHOUD le 3 mai 2007 (D 2552).

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Celui-ci estimait que ces expertises n'étaient pas concluantes faute dedatation des créations de données. Il expliquait que celles-ci avaient pu résulterdes recherches qu'il avait menées sur GOOGLE à partir des noms que lui avaitcommuniqué le Général RONDOT.

Il tentait d'expliquer que les éléments retrouvés sur les "clusters non
alloués" de son ordinateur étaient des noms et des références qui lui avaient étédonnées par le Général RONDOT postérieurement à la date des faits (exemple derecherche : requêtes sur GOOGLE sur Karel SCHMITT). Ces tracesn'appartenaient pas à des fichiers de type Excel ou Word. La seule chosedémontrée, selon lui, était que les noms et les références avaient bien été tapés surl'ordinateur, mais sans être datés. Il se rappelait que lorsque l'affaire
CLEARSTREAM avait éclaté dans le courant de l'été 2004, le Général RONDOT
lui avait confié un certain nombre de fiches à faire sur les personnages qui étaientcités et que les noms de Guillaume HANNEZO et Denis OLIVENNES lui avaientété donnés bien après l'affaire (D2552/3).

Il ajoutait qu'il n'avait pas effacé de fichiers de façon délibérée. Il avaitinstallé sur son ordinateur un effaceur, "ERASER", qui sécurisait en écrasant lesdonnées renvoyées à la corbeille. Il estimait que si ces fichiers avaient été sur sonordinateur, on aurait retrouvé des traces Excel et des intitulés de noms de fichiers.
ERASER se lançait automatiquement tous les soirs à minuit.

La mention "Néolight" figurant dans les propriétés de documents qui luiétaient personnels et sur des documents anonymes reçus par Renaud VANRUYMBEKE le 4 octobre, correspondait, selon lui, à une composante des moteursde recherche équipant les ordinateurs. Si cette propriété n'apparaissait pas surl'ordinateur de Jean-Louis GERGORIN, c'était selon Imad LAHOUD, en raison
de la différence de configuration entre les appareils équipant le siège d'EADS etceux de l'établissement de Suresnes. Il avait installé sur son propre ordinateur"OPEN SQL" dans lequel se retrouvait la composante "Néolight".

Des constatations analogues étaient faites sur le disque dur d'un ordinateurportable personnel qu'avait utilisé Imad LAHOUD à cette même époque et quel'intervention de François GONTIER avait permis de récupérer et finalement desaisir et d'expertiser.

Imad LAHOUD reconnaissait bien l'ordinateur (scellé "juge d'instructionGONTIER") comme étant son ordinateur depuis décembre 2002 et jusque courant
2005. Il l'avait alors remis à sa mère en France, après la première perquisition,
faisant toutefois remarquer que l'ordinateur se trouvait à son domicile le 28 avril2005 et qu'à cette occasion les policiers avaient fouillé le disque dur maisn'avaient rien pris.

Cet appareil était destiné à sa petite soeur, Youmna. Il s'agissait d'unordinateur personnel. Il disait craindre une substitution du disque dur, tout enaffirmant ne pas avoir procédé à l'effacement des données du disque dur avant dele remettre à sa mère. Il n'y avait pas d'élément CLEARSTREAM à sa
connaissance sauf si quelqu'un les y avait placés. Il faisait état de mauvaisesrelations avec son frère Walid (D3536).

Il constatait que les traces subsistant sur son portable (scellé GONTIER 1)
et relative au compte "NAD AUCHI" n'étaient pas datées et qu'il manquait des

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colonnes de la base "DS PRODUCTION ACCOUNT.mdb". Il se souvenait avoir
visionné sur cet ordinateur un CD-ROM apporté par "Antoine" de la DGSE. Ils'agissait d'un CD-ROM de listings CLEARSTREAM et Antoine lui avait
demandé d'indiquer où se trouvait le compte DGSE (D3380).

Au vu du rapport établi par l'assistant spécialisé (D3660), Imad LAHOUDnotait que les similitudes étaient limitées, car il manquait à chaque fois une partiedu fichier, et ne comprenait pas pourquoi d'autres noms ajoutés ne se retrouvaientpas également sur l'ordinateur.

6 - les confrontations avec les principaux protagonistes

a) confrontation avec Florian BOURGES

Au cours de la confrontation organisée dès le 6 juillet 2006 avec FlorianBOURGES (D1210), Imad LAHOUD déclarait qu'en septembre 2003, ce quil'intéressait c'était de comprendre les mécanismes de CLEARSTREAM. Florian
BOURGES lui avait proposé de lui vendre des fichiers. Il n'avait jamais fait état
de la DGSE, de MBDA, de Marwan LAHOUD ou d'une carte de visite
République Française. La deuxième rencontre avait eu lieu dans un café parisien.
Il n'avait pas vu les fichiers que Florian BOURGES lui proposait à la vente.

Il affirmait n'avoir transmis aucun fichier à Denis ROBERT. Les noms de
fichiers "DDV.doc", EXPLICATION.doc et WSP.doc (D969/266-267-257) ne luidisaient rien.

Contrairement à ce que soutenait Florian BOURGES, Imad LAHOUDaffirmait que celui-ci avait été présenté par Denis ROBERT sous sa véritableidentité. Il n'avait jamais entendu parler de "Jonathan GANTRY".Ce n'était qu'envoyant la bande vidéo de l'accueil d'EADS en septembre 2005 qu'il avait fait lelien entre Florian BOURGES et "Jonathan GANTRY". Celui-ci l'avait appelé àplusieurs reprises, mais il n'avait pas voulu le rencontrer. Il n'avait pas cherché
à le contacter par la suite.

Imad LAHOUD affirmait que Florian BOURGES ne lui avait remis aucundocument.

b) confrontation avec Denis ROBERT:

Imad LAHOUD était confronté à Denis ROBERT le 19 décembre 2007
(D3380).

Au cours de cette confrontation, Denis ROBERT déclarait que, pensantque le corbeau disait vrai, il s'était inscrit dans une démarche de vérificationauprès d'Imad LAHOUD qui lui paraissait très informé sur ce dossier. ImadLAHOUD avait manifesté une volonté forte de récupérer les listings, posant desquestions précises et intéressantes sur leur contenu. Pour sa part, il répercutait àImad LAHOUD les questions posées par Renaud VAN RUYMBEKE concernant
Alain GOMEZ et des noms sur la liste. Il confirmait l'existence d'une boîte mail
"Dejazee 2000" dédiée. Les mails avaient été transférés à Florian BOURGES pour

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examen.

Au vu de la note " Opération Reflux (3)" et de la note publiée sur le site"nouvel.obs" le 23 mai 2004 (D799/3), Denis ROBERT déclarait n'avoir conservéaucun souvenir de la remise d'une lettre à Imad LAHOUD, mais admettait lui
avoir remis le 20 juin 2004 une liste de 895 comptes qu'il tenait d'une sourcejournalistique.

Imad LAHOUD lui avait paru connaître de nombreux noms (ceux demafieux russes et de Karel SCHMITT) ainsi que des membres d'EADS et dugroupe LAGARDERE dont il pouvait préciser les fonctions. C'était ImadLAHOUD qui lui avait appris l'identité complète de Nicolas SARKOZY.

Il précisait qu'en mai 2004, il n'avait eu aucun rapport suivi avec RenaudVAN RUYMBEKE. Il sentait qu'Imad LAHOUD était au coeur de la
manipulation, mais il avait longtemps cru et continuait de penser "qu'à l'intérieurdes services secrets certains agents participaient à cette manipulation et ImadLAHOUD avait accès à des informations qu'il divulguait au général RONDOTou qu'il me transmettait avec parcimonie" (D3380/27).

Denis ROBERT ne se souvenait pas avoir remis un deuxième CD-ROMà Imad LAHOUD ce que celui-ci avait prétendu auprès du Général RONDOT quil'a, pour sa part, contesté.

Imad LAHOUD contestait toute implication dans l'établissement des fauxlistings et maintenait ses précédentes déclarations.

c) confrontation avec Jean-Louis GERGORIN

Confronté à Jean-Louis GERGORIN le 26 novembre 2007 (D3297), ImadLAHOUD contestait avoir été sa source et celle du Général RONDOT, avoir
rédigé les notes WSP et DDV conjointement avec Jean-Louis GERGORIN et lesavoir fait parvenir à Denis ROBERT.

Il contestait également avoir fait état d'un compte couplé aux noms de "deNAGY" et "BOCSA" et avoir remis à Jean-Louis GERGORIN une liste de
comptes faisant apparaître ces noms et celui de Brice HORTEFEUX, avoirconfectionné le CD-ROM destiné, selon Jean-Louis GERGORIN, à Dominiquede VILLEPIN.

La seule personne qu'Imad LAHOUD admettait connaître parmi cellesapparaissant tant sur son propre ordinateur que sur la clé USB de Jean-LouisGERGORIN était Monsieur HANNEZO, inspecteur des finances. Il ne comprenaitpas la motivation de Jean-Louis GERGORIN de le placer au centre de toutes cesmanipulations.

Il soutenait que Jean-Louis GERGORIN était persuadé qu'Alain GOMEZavait amassé un trésor de guerre issu des rétro-commissions sur les marchés queTHOMSON avait pu accorder sous sa présidence dans le passé à hauteur de 140Mde FF. Son obsession était de découvrir où était ce trésor.

Au cours de cette même confrontation, Jean-Louis GERGORIN rappelaitqu'à l'origine, Gérard WILLING lui avait donné des indications précises sur desopérations visant les groupes EADS et LAGARDERE et paraissant notammentimpliquer trois personnes : Karel SCHMITT, Petar MANDJOUKOV et undénommé Emin CAYKARA. Il n'avait pas accordé d'attention à cette information

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qui lui était parvenue à la fin mars 2003, antérieurement au décès de Jean-LucLAGARDERE.

Alors que la famille de LAGARDERE demandait une enquête sur lescauses du décès, il avait lui-même évoqué une mort non naturelle notamment avecPierre de BOUSQUET. Dans la deuxième quinzaine d'avril 2003, il avait envisagéde procéder à des recherches à partir des opérations sur le titre de la sociétéLAGARDERE dans les mois qui avaient précédé la disparition. Il avait eu l'idéede consulter Imad LAHOUD au sujet duquel il avait eu un écho favorable de lapart de Philippe RONDOT. Au cours d'un déjeuner pris dans les locaux deLAGARDERE, avenue Malakoff, il avait évoqué l'affaire "couper les ailes del'oiseau" en citant notamment les noms d'Alain GOMEZ et Pierre MARTINEZ
et mentionnant ses craintes à l'égard d'un associé minoritaire, le fondsHIGHFIELDS. Il lui avait également parlé des informations reçues fin 2002, début2003 au sujet de SCHMITT, CAYKARA et MANDJOUKOV (cf D1304). En mai2003, Imad LAHOUD lui avait donné connaissance des mouvements de titres
suspects juste avant l'hospitalisation de Jean-Luc LAGARDERE, puis, fin mai-
début juin 2003, lui donnait l'information selon laquelle trois comptes paraissaientjouer un rôle fondamental et central dans les mouvements, s'agissant des comptes83656 dont l'ayant droit économique était Alain GOMEZ, E3251 de PierreMARTINEZ et 2 comptes couplés 03778 et 73067 dont l'ayant droit économiqueétait Philippe DELMAS.

C'est dans ce contexte, face à ce risque de déstabilisation d'EADS et deLAGARDERE, que le dialogue s'était intensifié avec Imad LAHOUD.

Lorsqu'Imad LAHOUD avait insisté pour accréditer l'implication dePhilippe DELMAS, Jean-Louis GERGORIN avait relaté l'épisode de l'automne2000, la campagne de dénigrement menée au sein d'EADS par PhilippeDELMAS, à la suite de son congé maladie de 6 semaines et les initiatives prisespar Jean-Pierre JOULIN pour l'éloigner de son poste. Mais il avait indiqué à ImadLAHOUD que, par la suite, il avait repris des relations étroites avec Jean-PierreJOULIN notamment dans le cadre de l'enquête sur la mort de Jean-LucLAGARDERE. Quelques semaines plus tard, Imad LAHOUD lui avait indiquéqu'un compte ouvert début octobre 2000, et fermé en décembre suivant, avaitbénéficié d'un transfert important du compte 03778 attribué à Philippe DELMAS.
De même, un compte nouveau ouvert en juin 2003 de la Banque CantonaleVaudoise avait reçu un premier transfert de Philippe DELMAS.

Jean-Louis GERGORIN était certain de ne pas avoir parlé à ImadLAHOUD de Laurence DORS, de Gérald de ROQUEMAUREL et de Bernard
DELAFAYE, ni évoqué les noms des personnalités parisiennes et de mafieuxrusses. Il estimait cependant qu'une action solitaire d'Imad LAHOUD à cette finaurait été extravagante et suicidaire.

La première réaction de Jean-Louis GERGORIN face aux informationsd'Imad LAHOUD était une "grande méfiance" en l'absence de preuve matérielle.
Puis il avait été "illusionné" par le fait que les noms qu'il avait prononcés étaientnoyés dans un nombre croissant de noms différents notamment d'origineétrangère. Il reconnaissait avoir fait preuve de naïveté. Imad LAHOUD avait suexploiter son inquiétude suite au décès de Jean-Luc LAGARDERE et profiter dela très grande confiance qu'il lui faisait spontanément à la suite de sa présentationpar son frère Marwan, des informations positives de Philippe RONDOT et de

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l'excellente impression qu'il lui faisait.

Il n'avait jamais parlé devant Imad LAHOUD de Monsieur ULLMO maisImad LAHOUD avait évoqué à son sujet une vente d'AIRBUS en Inde. Il relevait
qu'une note récupérée sur l'ordinateur d'Imad LAHOUD par les enquêteurspouvait correspondre à cette affaire. Le nom de Fabien BAUSSARD était apparuquand celui-ci avait été refusé comme intermédiaire pour la Russie.

En juin 2003, il avait cité le nom de Serge KLEBNIKOF, ancien chargéde mission de THOMSON devenu ensuite consultant d'Alain GOMEZ, basé à
Genève, puis devenu indépendant. Il serait, selon Jean-louis GERGORIN, devenu
un "consultant discret" de Philippe DELMAS. Il l'avait mentionné à ImadLAHOUD. Sa relation avec Imad LAHOUD s'était intensifiée, Jean-Louis
GERGORIN évoquant avec lui assez librement sa vie professionnelle et sesmultiples contacts.

Courant juillet 2003, Imad LAHOUD était venu lui demander si le nomd'Edin CAYBAN lui disait quelque chose. Il lui avait donné peu de temps aprèsun schéma manuscrit de transactions montrant des liens entre des comptesGOMEZ, CAYBAN et SCHMITT dans les semaines précédant la mort de Jean-
Luc LAGARDERE. Ce schéma transactionnel l'avait fortement impressionné.

D- Les dénégations de Dominique de VILLEPIN

L'implication de Dominique de VILLEPIN ressortait notamment despremières déclarations du Général RONDOT et des notes appréhendées lors desperquisitions effectuées à son domicile. Elle était ensuite confirmée par Jean-LouisGERGORIN. Dominique de VILLEPIN la contestait, tant lorsqu'il était entenduen qualité de témoin en décembre 2006 qu'après sa mise en examen intervenuele 27 juillet 2007.

1) ses dénégations initiales en qualité de témoin (D1835)

Dominique de VILLEPIN confirmait la très brève entrevue du 1er janvier2004 à l'occasion du passage de Jean-Louis GERGORIN au Ministère desAffaires Etrangères. Jusque-là, il ignorait tout de cette affaire. Jean-Louis
GERGORIN lui avait révélé l'existence de réseaux internationaux occultes, d'un
système de financement dont le Général RONDOT avait été chargé par le Ministrede la Défense de vérifier l'existence. Il lui avait fait part de ses inquiétudes sansentrer dans les détails, citant des noms de personnalités de pays de l'Est, le nomd'Alain GOMEZ, de Jean-Pierre CHEVENEMENT, mais pas le nom deCLEARSTREAM. Jean-Louis GERGORIN lui tenait des propos confus autravers desquels il avait néanmoins saisi que son informateur disposait d'élémentsde l'intérieur du système. Jean-Louis GERGORIN avait exprimé le souhait qu'ilrencontre le Général RONDOT pour accélérer les vérifications dont il avait lacharge et qui n'avançaient guère. A cette occasion, Jean-Louis GERGORINn'avait présenté aucun document.

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Il avait envisagé d'organiser une réunion avec le Général RONDOT pourfaire le point.

Jean-Louis GERGORIN ne lui avait transmis aucun document,
notamment la note "DDV". Il avait pu préparer une note mais il ne la lui avait pasmontrée, ni communiquée plus tard. Il n'avait pas davantage eu connaissance des
deux autres documents.

Cette réunion s'était tenue le 9 janvier 2004.

Jean-Louis GERGORIN avait expliqué que les comptes étaient liés à dessystèmes de rétro-commissions de grands contrats pouvant impliquer despersonnalités françaises et étrangères et qu'il disposait d'informations quin'étaient pas soupçonnables puisqu'elles émanaient de l'intérieur même dusystème de chambre de compensation au Luxembourg, sans citer pour autant lenom de CLEARSTREAM.

Le Général RONDOT avait marqué son intérêt pour cette affaire et évoquéles vérifications qu'il avait engagées dans le cadre de sa mission confiée au seindu ministère de la Défense.

Pour sa part, Dominique de VILLEPIN s'était montré partagé. Soninquiétude résultait de l'existence du précédent de "l'affaire LEE". Il craignait lerisque de manipulation ou de provocation à travers l'usage de prête-noms.

Il assurait ne pas être entré dans une "logique de liste"et avoir
recommandé la plus grande prudence et un traitement discret compte tenu de lasensibilité de l'affaire.

Il avait dit au Général RONDOT qu'il souhaitait être informé de ladimension internationale de ce dossier. Il s'était référé aux orientations que luiavait fixées le Président de la République, qui réclamait une extrême vigilance surtout ce qui touchait la moralisation de la vie économique internationale et l'imagede la France, dans le droit fil de l'accord OCDE de 2000.

Il n'avait jamais évoqué un quelconque système CLEARSTREAM avecle Président de la République. Il avait mentionné devant Jacques CHIRAC,
quelques jours avant le 9 janvier, son inquiétude sur des réseaux internationaux.

Dans son esprit, il ne s'agissait pas de mener une enquête mais d'obtenirun éclaircissement sur la vraisemblance d'un tel dispositif.

Invité à donner son avis sur la note RONDOT du 9 janvier (scelléRONDOT MEUDON 12 D610/15 à 17 et 19), il déclarait qu'il s'agissaitd'amalgames et de suppositions résultant de réécritures et de reconstructions faitesa posteriori. Certains éléments étaient faux, comme la transmission d'une note parJean-Louis GERGORIN, les instructions du Président de la République auquel ilaurait été rendu compte, le voyage de Nicolas SARKOZY en Chine, l'évocationde MADHI et de sa sécurité. Il remarquait que d'autres sujets avaient été abordéspostérieurement comme les affaires relatives à l'IRAK, à la LYBIE ou à laSYRIE, que les derniers avaient été évoqués en marge de cette rencontre, comme

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l'affaire du DC10. Il notait enfin des éléments anachroniques : les comptescouplés de NAGY et BOCSA alors qu'il les avait découverts en juillet, les doutespersistants du Général RONDOT et "la belle construction intellectuelle de Jean-
Louis GERGORIN" qui étaient en contradiction avec les termes de la lettre du 12
janvier.

La seule allusion à Nicolas SARKOZY au cours de cette réunion avait
porté sur la question de savoir s'il fallait le tenir informé de cette affaire mais avecle risque d'entretenir des rivalités entre ministères ou services. Le nom de NicolasSARKOZY n'avait pas été cité en lien avec une quelconque affaire de
financement occulte.

Ce n'était qu'en juillet 2004, qu'il avait appris la présence des nomsBOCSA et de NAGY sur les listings et en avait informé Jean Pierre RAFFARINen marge du conseil des ministres du 7 juillet.

Il en avait également fait part à Nicolas SARKOZY qui avait indiqué qu'ilne s'agissait pas de son père. Jusqu'alors il ignorait que le patronyme "de NAGYBOCSA" correspondait à Nicolas SARKOZY.

Les noms de Michel ROUSSIN et Alexandre DJOURI n'avaient été cités
qu'à l'automne 2004, à l'occasion de l'affaire des otages, tandis que ceux deMikhail KHODORKOVSKY et de Jean-Pierre JOULIN avaient été évoqués enrapport avec la mort de Jean-Luc LAGARDERE.

S'agissant d'une réunion exploratoire, sans élément vérifié, il estimait qu'iln'avait pas à tenir informé son directeur de cabinet ni son successeur, en lapersonne de Michel BARNIER.

Il n'avait reçu aucune note sous forme de rapport du Général RONDOTou autre et n'avait reçu ni eu entre les mains des listes ou documents concernant
CLEARSTREAM. N'ayant eu aucun retour du Général RONDOT entre le 9janvier et le 19 juillet 2004, il avait pensé que celui-ci ne disposait pas d'élémentsnouveaux susceptibles de l'éclairer sur ce sujet.

A la suite de l'article du "Point"du 7 juillet 2004 et à la demande duPremier Ministre de missionner la DST, il avait pris l'initiative de convoquer leGénéral RONDOT pour l'en informer et lui indiquer que s'il avait des élémentsnouveaux il lui appartenait de prendre l'attache de ce service. A ce moment-là, legénéral RONDOT n'avait plus de mission spécifique sur ce dossier.

Avec Jean-Pierre RAFFARIN, ils en avaient parlé le 5 juillet au téléphone,
évoquant l'existence dans les listes du nom du père d'un ministre. Jean-PierreRAFFARIN lui avait demandé de saisir la DST, ce qu'il avait fait le jour-mêmeen demandant à Pierre de BOUSQUET de procéder à des investigations lors deleur départ pour le G5.Quelques jours après, la DST lui avait indiqué que lesnoms diffusés seraient "de NAGY" et "BOCSA" pouvant renvoyer à NicolasSARKOZY. Le Premier Ministre allait l'en informer.

Les éléments sortis dans la presse et les investigations de la DST
constituaient à ses yeux les vrais éléments nouveaux du dossier.

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La mission confiée à la DST sur cette affaire avait consisté à vérifier la
mise en cause des personnels du ministère de l'Intérieur et notamment Jean-
Jacques MARTINI.

Cette affaire avait été évoquée avec le ministre de la Défense à deuxoccasions :

• en marge du conseil des ministres du 7 juillet 2004, peu avant la parution del'article du "Point" ;
• lors d'un petit déjeuner à la mi-juillet au cours duquel Michèle ALLIOT-MARIEavait évoqué la mission confiée au Général RONDOT par le ministère de laDéfense sans que fussent précisés les noms ou qualités des personnes suspectées.
Elle lui avait fait part de ses doutes qu'il partageait compte tenu des informationsdont il disposait en provenance de la DST et qui évoquaient alors l'hypothèsed'une éventuelle manipulation.
Il savait que les listings provenaient d'un informateur disposant d'un accèsà l'intérieur du système de financement ou de la chambre de compensation etbénéficiant d'informations brutes. Il n'avait demandé l'identité de cet informateur,
ni à Jean-Louis GERGORIN, ni au Général RONDOT. Il n'avait jamais étéquestion de pénétration informatique.

Il ignorait que les listings avaient été falsifiés à partir de documentsprovenant de CLEARSTREAM et frauduleusement détournés.

Il affirmait ne plus avoir eu de contact avec Jean-Louis GERGORIN àcompter d'avril 2004.

Il assurait n'être jamais intervenu pour faire libérer Imad LAHOUD degarde à vue le 25 mars 2004. Il reconnaissait avoir appelé le Général RONDOTpour l'interroger sur le dossier terroriste de Madrid préalablement au sommet deBruxelles. En fin de conversation, le Général RONDOT avait évoqué brièvementle comportement déplaisant de Jean-Louis GERGORIN et la garde à vue de soninformateur. Il avait dû lui répondre : "Voyez ce qu'il en est...", sans donner une
quelconque instruction.

Sur la note du 21 avril 2004 n°447 (D701/13) et les instructions précisesdu Président de la République, Dominique de VILLEPIN indiquait qu'il n'avaitjamais été question de demander au Général RONDOT de mettre un terme à samission au sein du ministère de la Défense et de ne pas en référer à sa hiérarchie.
Il notait que s'il y avait eu instruction du Président de la République, le GénéralRONDOT n'aurait pas pu en référer aussi naturellement qu'il semblait l'avoir faità Michèle ALLIOT-MARIE. Il en déduisait qu'en fait, le Général RONDOT étaitresté fidèle à sa ligne hiérarchique, du début à la fin. Pour sa part, il n'avait jamaiseu connaissance des notes du Général RONDOT adressées au ministre de la
Défense.

Il décelait une contradiction entre le secret qu'aurait imposé le Présidentde la République et les termes de ses notes adressées au ministre de la Défense etdisait avoir tout ignoré de la délimitation de la mission confiée par ce dernier.

Il s'expliquait sur les propos rapportés dans les verbatim du Général.
L'expression "si nous apparaissons , nous sautons..."(scellé RONDOT

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MEUDON 12 et D699) correspondait à des propos tenus devant lui par NicolasSARKOZY qui lui avait fait le reproche, à la suite d'un entretien avec Pierre de
BOUSQUET, de ne pas avoir communiqué un prétendu rapport d'enquête de laDST. Ils les avait rapportés au Général RONDOT.

Au cours de l'entretien téléphonique qu'il avait eu avec le général le 27juillet 2004, celui-ci l'avait informé de ce que les vérifications faites au début dumois n'avaient pas confirmé l'existence des comptes recherchés. Il l'avait aussitôtrenvoyé sur la DST.

L'entretien avec le Général RONDOT le 2 septembre 2004 avait pour objetl'affaire des otages en Irak. Avaient été évoquées en marge, les fortes rivalitésdans le secteur industriel de la défense.

Il n'avait appris qu'en mai 2006 l'envoi par Jean-Louis GERGORIN deslettres anonymes à Renaud VAN RUYMBEKE en prenant connaissance de sesdéclarations dans la presse. A aucun moment il n'avait été informé des rendez-
vous entre Jean-Louis GERGORIN et Renaud VAN RUYMBEKE.

Dès la mi-octobre 2004, il avait demandé à la DST de prendre contact avecle Procureur de la République de Paris. Il n'y avait pas eu véritablement d'enquêtede la DST mais de simples vérifications.

2-ses dénégations maintenues après la mise en examen

Dominique de VILLEPIN était mis en examen le 27 juillet 2007 des chefsde complicité de dénonciation calomnieuse par instruction , complicité d'usage defaux, recel d'abus de confiance et recel de vol (D2807).

Au cours de l'interrogatoire du 13 septembre suivant (D2978), il
s'expliquait sur l'entretien d'avril 2004 tel que rapporté par Jean-LouisGERGORIN aux juges d'instruction et au cours duquel il aurait été, selon cedernier, décidé de "parler au juge Renaud VAN RUYMBEKE".

Il affirmait qu'il n'avait jamais donné une telle instruction et n'avait pasété informé des rencontres ultérieures avec l'avocat Thibault de MONTBRIAL et
Renaud VAN RUYMBEKE.

Il faisait observer que le Général RONDOT, dans ses notes "OpérationReflux", se contentait de rapporter les propos de Jean-Louis GERGORIN :"Là où
le général RONDOT est scripteur, Jean-louis GERGORIN est prescripteur et iln'a pas besoin d'inspirateur pour suggérer un scénario".

Il n'avait plus rencontré Jean-Louis GERGORIN après le 9 janvier 2004,
sauf pour la remise de décoration le 14 avril 2004 (et non le 6) à 19h00, alors quela rencontre Jean-Louis GERGORIN - Thibault de MONTBRIAL avait eu lieu à
17h30. Il n'avait fait que croiser Jean-Louis GERGORIN.

Il refusait de le rencontrer car il n'avait ni compétence, ni autorité, ni

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légitimité pour mener une mission CLEARSTREAM.

Le secret n'était plus de mise dès lors qu'au ministère de la DéfenseMichèle ALLIOT-MARIE et Philippe MARLAND avaient été informés.

Il contestait la tenue des réunions de février et de mars 2004, ainsi que laremise d'un CD-ROM par Jean-Louis GERGORIN regroupant toutes les donnéesCLEARSTREAM. Si Jean-Louis GERGORIN lui avait remis un Blackberry parl'intermédiaire de sa secrétaire, il le lui avait fait restituer.

Il n'y avait eu d'instruction présidentielle ni le 9 janvier, ni à aucun autremoment. S'il s'agissait d'instructions présidentielles, il n'aurait pas tolérél'absence du Général RONDOT aux prétendues réunions ultérieures. A aucunmoment, il n'avait été informé d'une quelconque réticence du Général à
s'entretenir avec lui.

Après la réunion du 9 janvier, il avait informé le Président de la
République de ses inquiétudes dans le domaine de la moralisation des grandscontrats et de la demande d'éclaircissement faite au Général RONDOT.

Il estimait qu'il avait été instrumentalisé par Jean-Louis GERGORIN vis-
à-vis du Général RONDOT et cela pour accélérer les recherches de celui-ci.

Dominique de VILLEPIN soulignait que Jean-Louis GERGORIN
s'appuyait dans ses déclarations sur des réunions inexistantes qu'il tentait decrédibiliser par des éléments concrets tels que des passages furtifs au ministèredans le bureau de Bruno LEMAIRE.

Il n'avait été informé ni de la clôture des 895 comptes ni de la présenceparmi ceux-ci des noms BOCSA et de NAGY.

Il maintenait qu'il n'y avait eu aucune réunion ultérieure avec Jean-LouisGERGORIN.

Il avait demandé au Général RONDOT, le 19 et le 27 juillet, d'aller voirla DST et de lui donner tous éléments utiles.

Par la suite, il n'avait pas été tenu informé des résultats des investigationsmenées par Renaud VAN RUYMBEKE.

En septembre 2004, il n'avait pas été envisagé de transmettre d'élémentsspécifiques à la Justice, mais en octobre, il avait demandé au directeur de la DSTde prendre l'attache du procureur de la République de Paris pour lui faire parvenirles éléments dont ils disposaient.

Dès lors qu'il s'agissait uniquement de déterminer les modalités deréponse aux développements politiques et médiatiques de cette affaireCLEARSTREAM, il avait agi en liaison avec le Premier Ministre auquel il rendaitcompte depuis le début du mois de juillet. Il n'avait pas eu de contact avec laChancellerie. Il était apparu opportun de laisser la justice faire son travail, ainsique le recommandait la DST.

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Le Général RONDOT ne lui avait rapporté pas de certitude "absolue" enjuillet 2004 sur la fausseté des listings, conformément aux termes de la note desynthèse d'octobre 2004. Jusqu'en décembre 2004, la DST émettait l'hypothèsed'un montage partiel ou total et mettait l'accent sur les rivalités industrielles.

A partir de juillet 2004, son inquiétude était fondée sur le risqued'instrumentalisation médiatique et politique de l'affaire.

Une confrontation avec Philippe RONDOT et Jean-Louis GERGORINétait organisée le 11 décembre 2007. Dominique de VILLEPIN confirmait
l'intégralité de ses déclarations (D3325).

Une deuxième confrontation suivait le 12 décembre avec PhilippeRONDOT (D3332). Dominique DE VILLEPIN fournissait les explicationssuivantes sur des expressions relevées par le Général dans ses verbatim.

Sur la mention "Il y a sans doute une part de vérité" (verbatim du 19juillet 2004), il ne disposait d'aucune indication technique permettant de se faireune certitude et s'était interrogé devant le Général RONDOT sur l'hypothèse
d'un montage partiel ou total concernant CLEARSTREAM .

Sur la mention "tout ce beau monde s'agite et s'inquiète"( verbatim du 2septembre 2004), on lui avait fait état d'une agitation dans les milieux industrielset d'une très vive réaction dans les milieux politiques.

Il n'avait pas pris l'attache de Jean-Louis GERGORIN car à cette époque,
il ignorait qu'il était le corbeau.

La réunion du 15 octobre 2004 avait été motivée par l'entretien qu'ildevait avoir dans l'après-midi avec Nicolas SARKOZY en présence de Pierre deBOUSQUET. Il savait que Nicolas SARKOZY évoquait avec insistancel'existence d'un rapport de la DST qui en réalité n'existait pas. Il était inquiet desdéveloppements politiques et médiatiques possibles de cette affaire.

Lors d'un nouvel interrogatoire le 31 janvier 2008 (D3538) sur les fichesd'entretien, il admettait que Jean-Louis GERGORIN avait rencontré BrunoLEMAIRE à 2 ou 3 reprises dans son bureau. Il soutenait que les prétenduesrencontres cachées au ministère de l'intérieur ne pouvaient être "qu'une vue de
l'esprit" et que Jean-Louis GERGORIN n'avait pas bénéficié de procédured'entrée particulière.

Il contestait les propos rapportés et selon lui déformés par Frantz OlivierGIESBERT ( "S c'est fini. Si les journaux font leur travail, il ne survivra pas à
cette affaire-là" -D3320/1 et 7) qui, selon lui, ne s'appliquaient pas à l'affaireCLEARSTREAM.

Il expliquait que les notes DST des 23 octobre et 9 décembre 2004,
retrouvées lors de la perquisition à son domicile en juillet 2007, lui avaient ététransmises afin qu'il puisse préparer l'audition de 2006.

III- La procédure d'audience

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A) le versement de la procédure connexe à l'initiative du parquet.

Le 7 septembre 2009, le procureur de la République versait au dossierl'intégralité des pièces de la procédure d'information ouverte au cabinet deMonsieur D'HUY sous le n° de parquet 0701296013 , par réquisitoire introductifdu 8 février 2007 consécutif à une plainte avec constitution de partie civile de lasociété EADS France du chef d'escroquerie, abus de confiance et faux.

Cette plainte se fondait sur les conclusions d'un rapport d'audit internerelatif à l'organisation du département "Stratégic Coordination" dirigé par Jean-
Louis GERGORIN sur la période 2003-2005. Cet audit, diligenté en marge del'affaire "Clearstream", avait mis en lumière des prestations de conseil qualifiéesde fictives et prétendument réalisées par Imad LAHOUD, ayant donné lieu à laproduction de rapports plagiés et falsifiés, mais facturées sous l'intitulé ILCONSEIL à EADS France, pour un montant total de l'ordre de 300.000 euros,
dans le cadre de ses deux contrats successifs de consultant d'EADS. Il était
également dénoncé une utilisation abusive des services de la société de taxi G7 surle compte de la société EADS, pour une somme de 84.000 euros sur la périoded'octobre à mai 2006, alors qu'à cette époque, Imad LAHOUD disposait d'un
véhicule de fonction.

Il ressortait de ces pièces qu'Imad LAHOUD avait été mis en examen le9 décembre 2008 pour escroquerie par manoeuvres frauduleuses, abus deconfiance et faux en écritures privées (D153 de cette procédure).

Au cours de cet interrogatoire de première comparution, Imad LAHOUDavait fait part de l'insistance qu'avait manifestée Jean-Louis GERGORIN à sonendroit à partir du mois de septembre 2003 pour qu'il complète des listingsexistants notamment en y faisant apparaître le nom de Philippe DELMAS, ou biend'établir de fausses notes pour faire croire aux dirigeant d'EADS que cette sociétéfaisait l'objet d'attaques boursières de la part du fond d'investissement hostiles,
ce à quoi il s'était refusé.

Il avait relaté à cette occasion les propos que lui avait tenus Jean-LouisGERGORIN sur la nuisance de Philippe DELMAS pour le groupe, laissantentendre que celui-ci orchestrait une OPA hostile avec un fonds d'investissementet avait des liens avec Alain GOMEZ bénéficiaire de rétro-commissions.

Il déclarait également avoir été amené, courant février ou mars 2004, alorsqu'il était encore consultant d'EADS, à la demande de Jean-Louis GERGORIN,
à recopier sur une feuille Excel vierge avec 5 ou 6 colonnes (nom, pays, banque,
numéro de compte, ouverture, clôture) deux noms "de NAGY" et "BOCSA",
avec des comptes bancaires rattachés, qui s'étaient retrouvés dans les faux listingsCLEARSTREAM, ce fichier ayant été incorporé dans les listings Clearstream,
mais par quelqu'un d'autre que lui.

Il ajoutait que ces faits avaient eu lieu dans le bureau d'Yves BERTRAND
au ministère de l'Intérieur, en la présence de ce dernier et de Jean-LouisGERGORIN, qui avait fourni l'ordinateur portable, qu'il savait que Jean-LouisGERGORIN était en relation avec Dominique de VILLEPIN à cette époque et que"la cabale contre Nicolas SARKOZY était montée sous la connaissance de

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Dominique de VILLEPIN", et que Jean-Louis GERGORIN avait conditionné à laréalisation de la feuille Excel la création du laboratoire de sécurité informatiquedu groupe EADS et son recrutement au sein d'EADS en vue d'en prendre ladirection.

Mis en examen le 27 novembre 2008 du chef d'abus de confiance et faux
(D132), Jean-Louis GERGORIN devait contester, lors d'un interrogatoire ultérieurdu 23 juin 2009, les affirmations d'Imad LAHOUD (D157).

B) Les conclusions in limine litis déposées à l'audience du 21 septembre 2009

1- Les conclusions de la défense de Florian BOURGES

La défense de Florian BOURGES soulève l'incohérence contenue dans
l'ordonnance de renvoi qui poursuit Florian BOURGES pour avoir détourné desdocuments au préjudice de CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAMINTERNATIONAL des documents qu'il lui est par ailleurs reproché d'avoirfrauduleusement soustraits à la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES
Elle conclue qu'en toute hypothèse les termes de l'ordonnance de renvoi nepermettent pas la poursuite de faits commis à l'étranger et notamment auLuxembourg, ce qui serait le cas des faits commis au préjudice deCLEARSTREAM BANKING et que, de surcroît, une procédure serait
actuellement pendante devant la juridiction luxembourgeoise du chef de violationdu secret professionnel luxembourgeois, ce qui empêcherait, en application de larègle "non bis in idem", que de nouvelles poursuites soient engagées en France.

Le procureur de la République a requis le rejet de ces exceptions.

Sur l'action civile, la défense de Florian BOURGES fonde l'exceptiond'irrecevabilité des parties civiles sur les éléments suivants :

- l'existence d'une précédente indemnisation du même préjudice ainsi qu'enattesteraient les termes de la note DST en date du 21 juillet 2004 ayant pour objetl'affaire CLEARSTREAM relatant que "la liste des clients CLEARSTREAM,
possiblement celle dérobée voici deux ans par d'anciens collaborateurs indélicatset depuis judiciairement condamnés, aurait été récupérée et enrichie par unemanipulation bureautique aisée, de noms variés dont les plus repérables seraientdestinés à appeler l'attention sur les autres";
- l'existence d'un protocole transactionnel signé entre Florian BOURGES et lasociété ERNST & YOUNG en date du 3 mai 2004 aux termes duquel "les partiesrenoncent réciproquemen , irrévocablement et définitivement à toute contestationnée ou à naître, à toute action à caractère judiciaire ou trouvant directement ouindirectement son origine dans la conclusion, l'exécution ou la fin de son contratde travail susvisé", ledit protocole visant les dispositions de l'article 2044 etsuivant du code civil et notamment l'article 2052 du même code qui confère à latransaction l'autorité de chose jugée en dernier ressort ;
- l'absence de préjudice direct au sens de l'article 2 du code de procédure pénaledans la mesure où il est reproché à Florian BOURGES d'avoir soustrait desfichiers à CLEARSTREAM, société qui n'a jamais eu de lien contractuel avecBARBIER FRINAULT & ASSOCIES.
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2 - Les conclusions de la défense de Denis ROBERT

Le conseil de Denis ROBERT a déposé des conclusions tendant à voirprononcer la nullité partielle de l'ordonnance de renvoi en date du 17 novembre2008 sur le fondement des dispositions de l'article 11 de la Déclaration des Droitsde l'Homme et du Citoyen de 1789, des articles 6 et 10 de la ConventionEuropéenne des Droits de l'Homme et des articles préliminaire, 459 et 802 du
code de procédure pénale.

Il fait valoir :

- d'une part que Denis ROBERT a acquis et utilisé ces informations dans le cadrede son travail d'enquête postérieur à la parution de son premier livre
"REVELATION$" au travers de "LA BOÎTE NOIRE" paru en février 2002, puisà l'occasion du film documentaire "L'affaire CLEARSTREAM racontée à un
ouvrier de chez DAEWOO" dont l'objet était de révéler au grand public lefonctionnement réel de la chambre de compensation, que les documents ont étépubliés dans ces livres et films comme preuve irréfutable de l'existence decomptes dissimulés, hébergés dans des paradis fiscaux, qu'il était entré en relationavec Imad LAHOUD par l'intermédiaire d'Eric MERLEN, journaliste au "CanardEnchaîné", qu'il était présenté comme un ancien trader qui l'assurait de pouvoirl'aider dans son enquête, notamment eu égard aux procès en cours, avec lequel ilenvisageait de réaliser un film dans le prolongement des précédents portant sur lemême sujet du blanchiment international, sujet d'intérêt général, que la
jurisprudence de la CEDH considère que la nécessité des poursuites pour recel àl'encontre d'un journaliste fait défaut dès lors que le journaliste a agi de bonne foidans le souci de fournir des informations exactes et dignes de crédit dans lerespect de la déontologie journalistique et que, dès lors, la mention dansl'ordonnance de l'affirmation selon laquelle "la circonstance tenant au fait queMonsieur Denis ROBERT s'était procuré de telles informations dans le cadre desa profession de journaliste ou d'écrivain n'est pas de nature à retirer aux faitsqui lui sont reprochés le caractère d'un délit", gravement attentatoire à la libertéd'expression et de la presse vicie ladite ordonnance qui devra être annulée pourviolation du principe constitutionnel de liberté de la presse et de l'article 10 de laCEDH.
- d'autre part que Denis ROBERT a acquis et utilisé ces informations pour lesbesoins de sa défense et qu'il ne pouvait être renvoyé pour des faits de recel euégard aux documents à lui transmis par Florian BOURGES en ce quel'ordonnance de renvoi qui , en énonçant : "Monsieur Denis ROBERT, au delà de
son activité de journaliste d'investigation, a poursuivi son intérêt personnel en se
procurant, en conservant et en transmettant des listings et données
CLEARSTREAM (..) Monsieur ROBERT s'est ainsi prévalu de ces listingsCLEARSTREAM pour étayer ses affirmations (..) Pour lesquelles il faisait l'objetde plusieurs poursuites judiciaires", retient comme élément intentionnel du délit
de recel un intérêt personnel du journaliste tiré de la volonté de se défendre enjustice dans le cadre de ses procès en diffamation et cela en violation du principeconstitutionnel des droits de la défense protégés par l'article 6 de la CEDH etl'article préliminaire du code de procédure pénale.
Le procureur de la République a requis le rejet des conclusions quiressortent de l'examen du fond de la procédure.

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3 - Les conclusions de la défense de Dominique de VILLEPIN

a)Sur la demande d'annulation de pièces

Il est demandé au tribunal d'annuler les procès-verbaux d'interrogatoirede première comparution d'Imad LAHOUD du 9 décembre 2008 et
d'interrogatoire de Jean-Louis GERGORIN du 23 juin 2009 issus de la procéduren°0701296013 versés au dossier de la présente affaire par le procureur de laRépublique le 8 septembre 2009.

Cette demande est fondée d'une part sur les dispositions de l'article 6-1 dela Convention Européenne des Droits de l'Homme édictant le principe de l'égalitédes armes entre les parties à la procédure judiciaire. Il est soutenu que , si leparquet n'est pas, selon la jurisprudence de la CEDH, une autorité judiciaire et àce titre soumis à un devoir d'impartialité, il n'en est pas moins tenu à une exigencede loyauté et qu'en ayant eu connaissance dès le 9 décembre 2008 et le 23 juin2009 des pièces précitées qui n'ont été versées au dossier de la présente affaire quele 6 septembre 2009 à la suite d'une interview d'Imad LAHOUD publiée dans leJournal du Dimanche du même jour, le procureur de la République a manqué àson devoir de loyauté et porté atteinte à l'égalité des armes. Selon la défense deDominique de VILLEPIN, l'annulation s'imposerait également au motif que lemagistrat instructeur en charge de cette procédure distincte consécutive à uneplainte de la société EADS du chef de faux, usage de faux escroquerie et abus deconfiance, a outrepassé les limites de sa saisine "in rem" en questionnant les misen examen sur les faits dont le tribunal est saisi depuis l'ordonnance de renvoi du17 novembre 2008.

A l'audience, le procureur de la République s'est opposé à l'annulation deces procès verbaux contestant toute déloyauté dans sa démarche et toute atteinteau principe de l'égalité des armes, indiquant toutefois ne pas être opposé à ce queles pièces dont le versement est critiqué soient écartées des débats.

b) Sur l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de Nicolas SARKOZY

Il est par ailleurs demandé de déclarer irrecevable en l'état la constitutionde partie civile de Nicolas SARKOZY sur le fondement des principes d'équité etd'impartialité énoncés dans les dispositions de l'article 6-1 de la ConventionEuropéenne des Droits de l'Homme (CEDH) et repris dans l'article préliminairedu code de procédure pénale, et du principe d'égalité des armes tiré de cesdispositions par la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

La défense de Dominique de VILLEPIN fait valoir que, dans le cadre dela présente procédure, le Président de la République, est constitué partie civile,
qu'il tient de l'article 13 de la Constitution un pouvoir réglementaire lié à lanomination des magistrats, que, selon l'article 67 de cette Constitution, il bénéficiepar ailleurs d'une immunité pendant toute la durée de son mandat, qu'il anéanmoins manifesté publiquement un vif intérêt pour cette affaire, que des

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éléments nouveaux sont apparus au travers d'articles de presse qui lui ont étéconsacrés, parmi lesquels une interview donnée par Imad LAHOUD, co-prévenudans cette affaire, mettant en cause Dominique de VILLEPIN et Jean-LouisGERGORIN ("le Point" du 6 novembre 2008), et la reproduction des déclarationsfaites par le même prévenu le 9 décembre 2008 dans le cadre d'une autreinformation et dont jusqu'alors la défense du prévenu ignorait l'existence("Journal du Dimanche" du 6 septembre 2009), que de telles circonstances sontde nature à faire naître des appréhensions objectivement justifiées de la part duprévenu quant au respect des principes précités que seule une déclarationd'irrecevabilité de la constitution de partie civile de Nicolas SARKOZY
permettrait de garantir.

Dans ses écritures en réponse, le conseil de Nicolas SARKOZY, partiecivile, a conclu au rejet de cette exception au visa de l'article préliminaire et del'article 2 du code de procédure pénale, de l'article 6-1 de la CEDH, de l'article67 de la Constitution.

Il fait valoir que Dominique de VILLEPIN a été considéré comme un mis
en examen comme les autres, qu'au cours de la procédure d'information il arenoncé à soulever l'incompétence de la juridiction de droit commun au profit dela cour de justice de la République et à contester la régularité de sa mise enexamen, qu'il n'a pas davantage contesté au cours de l'information la recevabilitéde la constitution de partie civile de Nicolas SARKOZY, qu'aucune de sesdemandes d'actes ne s'est heurtée au statut de Président de la République.

Il soutient que, par arrêt du 5 juin 2009, le Conseil d'Etat a rejeté lerecours formé par Dominique de VILLEPIN à l'encontre du décret du 27 août2008 portant nomination de magistrats en tant qu'il avait fixé au 20 novembre2008 la nomination de Monsieur PONS en qualité de président de chambre à lacour d'appel de Montpellier, ce dernier ayant co-signé l'ordonnance de règlement,
aucun élément du dossier ne permettant d'étayer le moyen selon lequel le décretattaqué aurait eu pour objet la mise en place d'une instruction partiale, et que laposition prise par le prévenu dans ses conclusions in limine litis sont en
contradiction avec les propos qu'il avait tenu lors d'une interview diffusée surCanal + le 13 septembre 2009, Dominique de VILLEPIN ayant à cette occasionadmis la présence de Nicolas SARKOZY en qualité de partie civile.

Il rappelle que son client est une partie civile comme les autres, qu'il s'estconstitué par voie incidente antérieurement à son accession à la présidence de laRépublique dans le cadre de l'information ouverte depuis le 3 septembre 2004,
qu'il a été entendu par les magistrats instructeurs, qu'il n'a formulé aucunedemande d'acte et n'a adressé aucune note à ces magistrats à l'exception de lacorrespondance de son conseil datée du 1er décembre 2006 destinée à démentir
certaines affirmations contenues dans l'interrogatoire d'Imad LAHOUD diligentéle 28 novembre 2006 par les juges d'instruction.

C) le déroulement des débats

A l'audience, Florian BOURGES a réitéré ses aveux relatifs à la
conservation des données CLEARSTREAM et l'utilisation qu'il en avait faiteauprès de Denis ROBERT et d'Imad LAHOUD.

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Il a toutefois précisé que, lors de son recrutement par la société BFA, àl'âge de 23 ans, il avait fait des stages de marketing mais n'avait pas eu deformation d'informaticien, que ses problèmes relationnels étaient apparus avec sonemployeur dès octobre 2001, que toutes ses observations avaient déplu au clientet qu'on lui avait fait comprendre qu'il devait les oublier. Il avait alors envisagéde s'orienter vers le secteur de l'investigation en postulant auprès du cabinetSalamandre.

Il a par ailleurs indiqué que sa mission s'était déroulée chez
CLEARSTREAM SERVICES qui gérait les données informatiquesCLEARSTREAM, qu'au travers de ses requêtes les données d'origine avaient étémodifiées, que les fichiers clients avaient eux-mêmes été retravaillés (notesd'audience, page 30) et que l'on avait retrouvé ses documents de travail à sondomicile. Il s'est défini comme un créateur de ces données (page 34).

Comme il avait constaté des anomalies mettant en cause la fiabilité du
DATA SERVER et que certains numéros de comptes n'étaient pas référencés dansle fichier client, il avait cru à l'existence d'une double comptabilité (page 39).

Il a déclaré qu'il n'avait pas exactement su ce qu'avait copié ImadLAHOUD et que, cette opération n'ayant pas duré plus de 7 à 8 minutes, celui-cin'avait pas pu transférer toutes les données sur une seule clef USB et avaitcertainement dû avoir une autre source chez ARTHUR ANDERSEN (page 37).

Selon Florian BOURGES, les quatre premiers envois reçus par RenaudVAN RUYMBEKE étaient sans rapport avec son travail.

Il a maintenu qu'en voyant en octobre 2004 dans le cabinet du jugeRenaud VAN RUYMBEKE, les fichiers de transactions comprenant les quatrecolonnes supplémentaires, il avait pensé à Imad LAHOUD qui était la seulepersonne à qui il avait remis ce type de document (page 29).

Denis ROBERT a confirmé avoir obtenu de Florian BOURGES, à la fin
de l'année 2001, ou au tout début 2002, les fichiers clients et les "comptesfantômes" CLEARSTREAM, avoir eu connaissance de leur provenance réelle enavril 2002 et les avoir remis en copie à Imad LAHOUD en février 2003.

Il a soutenu avoir agi dans le cadre de son activité journalistique et pourles besoins de sa défense dans le cadre des procédures de diffamation engagées àson encontre par CLEARSTREAM, estimant que ses livres étaient sa seule armeet que c'est CLEARSTREAM qui s'était acharnée contre lui et non l'inverse(page42). Son objectif avait toujours été de démontrer sa vérité, en faisant l'offre depreuve à l'audience.

Il a reconnu qu'à aucun moment il n'avait souhaité divulguer sa source, ques'il avait indiqué que les fichiers avaient été extraits en octobre 2001 et eu recoursau pseudonyme de Jonas, c'était pour se protéger lui-même ainsi que FlorianBOURGES (page 43).

Il a confirmé avoir rencontré en février 2003 Imad LAHOUD, présenté surinternet comme trader, par l'intermédiaire d'Eric MERLEN. Imad LAHOUD luiavait dit qu'il avait besoin des listings et qu'en échange il l'aiderait à
"comprendre". Lors du rendez-vous avec Imad LAHOUD, celui-ci avait dû copierles documents, lui-même ne contrôlant pas ce qu'il faisait pendant la copie. Il avaitprésenté Imad LAHOUD à Florian BOURGES sous l'identité de Jonathan
GANTRY. Il avait alors ignoré que ses informations iraient à la DGSE. Il s'en étaitdouté par la suite. En juillet 2004, Imad LAHOUD l'avait conduit dans les locauxEADS à Suresnes, dans un endroit sécurisé (page 45), où il lui avait présenté deshackers et fait écouter une écoute téléphonique réalisée pour une "affaire

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ALTRAN". Imad LAHOUD l'avait entretenu dans la croyance du hacking du
système CLEARSTREAM (page 47).Quand on lui avait demandé de trouver unexpert, il avait pensé à Imad LAHOUD. Il avait déjà des soupçons sur ImadLAHOUD quand il a proposé à Florian BOURGES de contacter Renaud VANRUYMBEKE pour l'aider.

Il a indiqué avoir remis à Imad LAHOUD les 33.000 comptes, le règlementintérieur et les 21.600 comptes de BACKES. "C'est à titre d'expertise que jedonne les documents. C'est un échange de bons procédés. Il m'aide dans montravail" (page 48). Il avait spécifié à Imad LAHOUD que les données venaientd'une source à l'intérieur de CLEARSTREAM et c'est plus tard qu'il avait évoquéun auditeur mais sans en préciser l'identité.

Il a de nouveau fait état de la poursuite de ses relations avec ImadLAHOUD dont il avait dénoncé la duplicité tant à l'époque des faits que lors del'information."Il est impossible de ne pas se faire avoir par IML" a-t-il déploré
(page 43).

Il a assuré qu'en écrivant des livres comme "LA BOITE NOIRE", il se
sentait "Journaliste jusqu'au bout des ongles" , en ajoutant : "J'écris des livres car
mon rôle est d'informer".

Il a confirmé sa rencontre avec Jean-Louis GERGORIN au château de Pin,
au cours de laquelle Jean-Louis GERGORIN avait qualifié Florian BOURGESd'agent double, propos que Jean-Louis GERGORIN a contesté (page 50).

Le témoin Laurent BECCARIA,,éditeur de Denis ROBERT, a confirmé
cette rencontre au cours de laquelle Jean-Louis GERGORIN s'était tenu sur ladéfensive, accusant Philippe DELMAS, dont il se disait victime, d'avoir montédes affaires contre lui, tout en gardant ses distances à l'égard d'Imad LAHOUDqui semblait pourtant le fasciner. Jean-Louis GERGORIN avait dit qu'il allaitrégulièrement en Angleterre pour consulter les listings (page 303).

Jean-Louis GERGORIN a précisé avoir, à la fin du mois d'avril 2005, fait
un séjour en Angleterre où il était en contact avec le cabinet HAKLUYT.

Enfin, Denis ROBERT a indiqué qu'à la parution de "REVELATION$",
un confrère lui avait indiqué qu'Yves BERTRAND, à cette époque à la tête de laDirection des Renseignements Généraux, souhaitait le rencontrer en avril 2001.
Il voulait une copie des listings, ce qu'il avait refusé et ça s'était arrêté là (page56).

Entendu en qualité de témoin, Yves BERTRAND a confirmé cet entretien
avec Jean NICOLAS qu'il voyait souvent au sujet de la Corse mais assuré que leslistings dont il s'agissait alors n'avaient rien à voir avec les faux d'aujourd'hui(page 363).

Imad LAHOUD a reconnu avoir obtenu de Denis ROBERT une premièrecopie des données CLEARSTREAM puis auprès de Florian BOURGES enseptembre 2003. Il avait remis les premières à la DGSE et les secondes à Jean-
Louis GERGORIN.

Il a précisé que deux CD-ROM avaient été gravés chez Denis ROBERT,
qu'il les avait lus plus tard avec son officier traitant de la DGSE(page 60), qu'enjuillet 2003, alors qu'il n'avait plus les fichiers en sa possession, il s'était adresséà Florian BOURGES, qu'il avait utilisé une clef biométrique de 128 Mo, que lefichier clients comptait environ 20 à 25.000 comptes, que, parmi les documentscopiés, 'il n'y avait pas de documents internes ni de mémos, qu'en octobre 2003,

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il était revenu à la charge auprès de Denis ROBERT qui lui avait alors remis, ànouveau, deux CD-ROM, ce dont Denis ROBERT n'a pas gardé le souvenir (page63), qu'il avait transmis cette fois-ci à Jean-Louis GERGORIN et que, DenisROBERT lui ayant dit qu'il était receleur, il l'avait répété à Antoine (page 64).

Imad LAHOUD a également indiqué que Denis ROBERT lui avaitprésenté Florian BOURGES sous son pseudonyme en précisant qu'il était auditeur,
qu'à cette occasion il avait voulu récupérer les données qu'il avait eu une premièrefois de Denis ROBERT et dont il s'était départi (page 63).

Il a confirmé avoir été titulaire de l'adresse DEJAZEE 2000@yahoo.frouverte au nom de "Matrix Néo"et créée essentiellement pour correspondre avecJean-Louis GERGORIN, qu'il s'agissait d'une boîte-mail "poubelle" à partir delaquelle il avait envoyé à Denis ROBERT les fichiers "WSP.doc" et "DDV.doc"
(page 62 et 65).

Il a déclaré que Jean-Louis GERGORIN était au centre de l'affaire,
déchargeant de ce point de vue le Général RONDOT qu'il avait eu tendance àaccabler lors de l'instruction et auquel il a par ailleurs admis avoir remis desdocuments CLEARSTREAM. Le Général RONDOT savait qu'il avait eu desinformations de Florian BOURGES (page 69). Les documents restés sur sonordinateur et relatifs à CLEARSTREAM étaient destinés au général qui s'étaitintéressé aux dénommés RAKHIMOV, SCHMITT et MANDJOUKOV que Jean-
Louis GERGORIN avait décrits comme des mafieux (page 70). Il s'est néanmoinsdéfendu de toute participation à la confection des listings, des courriers et desnotes dénonciateurs.

Il a reconnu s'être vanté devant Sorbas VON COESTER d'avoir manipuléFlorian BOURGES et avoir manipulé Denis ROBERT sous l'autorité de la DGSE,
de Jean-Louis GERGORIN et du Général RONDOT. A sa sortie de prison , c'est
Jean-Louis GERGORIN qui lui avait fait rencontrer le Général RONDOT, ce quilui a semblé un calcul de la part de Jean-Louis GERGORIN (page 68).Il s'étaittrouvé sous l'emprise de Jean-Louis GERGORIN (page 65) qu'il avait tenuinformé de la provenance des données (page 66). Il a cependant contesté avoir étéla source de Jean-Louis GERGORIN, avoir fabriqué de faux listings
CLEARSTREAM ou inséré des données (page 67), qu'au contraire Jean-Louis
GERGORIN lui avait demandé de conserver les données de Denis ROBERT,
voulant compléter la liste des détenteurs de comptes.

En ce qui concerne l'opération d'effacement des fichiers, il l'avait lancéeen avril 2005 à la demande de Jean-Louis GERGORIN et avait ainsi écrasé toutes
les données, à l'aide du logiciel ERASER qu'il avait chargé précisément à cettefin (page 68), les traces subsistant sur son disque dur correspondant à des fichiersque Jean-Louis GERGORIN lui avait confiés pour les conserver (page 69).

Il a affirmé qu'il avait été prêt à se rendre auprès du juge mais que Jean-
Louis GERGORIN l'avait repris en mains en prétextant que Philippe DELMASétait capable de tout.

Sur le nom de KEIRALLAH figurant sur les listings, il disait tout enignorer et incapable d'affirmer que cette personne pouvait avoir un lien avecMireille KEIRALLAH qu'il avait citée dans la procédure qui lui avait valu d'êtreplacé en garde à vue en mars 2004.

En réponse à ce qu'il a considéré comme un "tissu total de contre-vérités"
(page 66), Jean-Louis GERGORIN a pour sa part affirmé qu'il n'avait pas étémis au courant des contacts d'Imad LAHOUD avec Florian BOURGES et Denis
ROBERT, qu'Imad LAHOUD ne lui avait jamais transmis les fichiersBOURGES, qu'il n'avait eu entre les mains les premiers documents informatiques

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qu'en octobre 2003 et la liste des 33.000 comptes en avril 2004, ajoutant que cen'est qu'en 2005 qu'Imad LAHOUD lui avait parlé de Florian BOURGES et de"Jonathan GANTRY" qu'il lui avait dit avoir rencontré lors d'un procès de Denis
ROBERT.

Confirmant avoir mis Imad LAHOUD en relation avec le Général
RONDOT, il a admis avoir été informé des liens d'Imad LAHOUD avec la DGSE,
celui-ci ne respectant pas le cloisonnement, contrairement à ce qu'il a pu
prétendre.

Il a reconnu avoir dit à Philippe RONDOT qu'Imad LAHOUD avait hacké
CLEARSTREAM, avoir envoyé au juge Renaud VAN RUYMBEKE l'annuaire
qui lui avait été transmis par Imad LAHOUD qui était à l'origine de la note "WSP"
et qu'il n'avait conservé aucun fichier de transactions, ayant tout transmis auGénéral RONDOT (page 70). Imad LAHOUD avait prétendu qu'il avait créé uncheval de Troie pour pouvoir lire les données. Dès juillet 2003, Imad LAHOUDavait eu une explication cohérente sur les rétro-commissions décrivant le systèmed'initiation ayant permis l'ouverture des comptes. En octobre 2003, il lui avait ditêtre parvenu à extraire des bouts de transactions et, début novembre, était revenuvers lui avec le listing de deux pages (page 71). Imad LAHOUD qui lui avait parlédes liens de WANG CHUAN POO avec les parrains, disait qu'il y avait des "soussystèmes",
qu'il avait déterminé l'existence de trois flux : les rétro-commissions,
les fonds de placement et le narco-trafic (page 141). Le 1er octobre 2003, Jean-
Louis GERGORIN avait demandé au Général RONDOT de faire vérifier le
hacking par des spécialistes. En avril 2004, étaient apparus deux éléments
supplémentaires dans la crédibilité des listings : les 33.000 comptes et une massede transactions comprenant 34 paramètres. Il en a déduit qu'Imad LAHOUDavait su lui faire illusion ainsi qu'au Général RONDOT.(page 72). Jean-LouisGERGORIN a indiqué qu'Imad LAHOUD avait pu monter seul cette histoire etqu'il en avait la capacité malgré la masse des falsifications, sans doute avec l'aided'une "petite main".

Pascal LORENT, réalisateur et journaliste, a expliqué qu'Imad LAHOUDavait dit à Denis ROBERT qu'il avait lu "Révélation$" pendant sa détention.
Pascal LORENT a ajouté qu'Imad LAHOUD s'était vanté auprès de lui de sescapacités techniques de pénétration informatique, prétendant avoir tenté de"hacker" le système CLEARSTREAM et, avec Denis ROBERT, ils y avaient cru.
Mais, de rendez-vous manqué en rendez-vous manqué, Imad LAHOUD étaitparvenu à se défiler.

Denis ROBERT a rappelé qu'il y avait eu trois rencontres avec ImadLAHOUD en février et en juillet 2003 puis en mars-avril 2004. Il l'avait revu seul
en 2006. Ce que devait confirmé Imad LAHOUD (page 301).

Imad LAHOUD a également confirmé le fait, déjà mentionné dans sonouvrage "Le coupable idéal" (pages 70-71), qu'une source haut placée l'avaitprévenu de l'imminence d'une perquisition en avril 2005 (page 303).

Jean-Louis GERGORIN a rappelé que, selon Imad LAHOUD, l'annuaire
concernait l'affaire des Frégates. L'envoi de la deuxième lettre à Renaud VANRUYMBEKE avait résulté du fait qu'Imad LAHOUD avait dit qu'il avait denouveau réussi à hacker et découvert une deuxième partie de la liste, comprenantles comptes du père de Nicolas SARKOZY. Au sujet des transactions de janvier

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et février 2004, Imad LAHOUD avait eu une théorie sur un compte 99999 situéen dehors du réseau des Frégates. Etaient alors apparus six comptes à la Banquedi SONDRIO dont un compte apparemment attribué à Brice HORTEFEUX et unautre à François GAUBERT. Il s'agissait là d'un réseau différent du premier (page75) . Il avait mis ces archives à l'abri sur sa clé USB biométrique et, refusantd'entrer dans le jeu politique, n' avait pas utilisé ces données.

Sur les démonstrations de pénétration, Imad LAHOUD a expliqué queJean-Louis GERGORIN était convaincu que les listes étaient incomplètes et lesfaisait compléter, que, devant les doutes exprimés par le Général RONDOT, Jean-
Louis GERGORIN lui avait demandé de parler de pénétration informatique par laDGSE et de faire une simulation pensant ainsi crédibiliser ses dires.

Par ailleurs, Imad LAHOUD a reconnu avoir recopié en mars 2004 lesnoms "de NAGY" et "BOCSA" sur document Excel à la demande de Jean-Louis
GERGORIN, sur la base d'un modèle papier que celui-ci lui avait fourni et quiressemblait aux listings de Florian BOURGES et Denis ROBERT. Surprésentation du document coté D3290/99, il indiquait que dans son souvenir, ilcomportait 10 colonnes alors que le document présenté n'en compte que neuf. Ilmanquait une dernière colonne intitulée "balance account". Il avait ainsi complétéles 10 colonnes sur 2 lignes.

Cela s'était passé au ministère de l'Intérieur où ils étaient attendus par YvesBERTRAND. Jean-Louis GERGORIN lui avait demandé le secret absolu. Il
s'était soumis à cette règle et n'en avait pas parlé (page 77). Comme Jean-LouisGERGORIN lui avait parlé avant les premières perquisitions, il n'avait rien dit aucours de l'audition et s'était enferré dans ses mensonges lors de l'instruction (page78).

Il a situé l'instruction d'introduire les noms de NAGY et BOCSA
antérieurement à celle de saisir le juge. Elle émanait de Jean-Louis GERGORINet non de Dominique de VILLEPIN (page 195).

Il a cependant persisté à nier la confection de la liste des 895 comptesclôturés.

Jean-Louis GERGORIN a démenti la réalité de cette scène dans le
bureau d'Yves BERTRAND. Il s'est par ailleurs décrit comme le "pigeon" de cette
affaire (page 79), soutenant avait cru à la pénétration de CLEARSTREAM. Il adéclaré : "J'ai été drogué, intoxiqué , mais j'y ai cru de bonne foi" (page 81).

Fin 2002, début 2003, Imad LAHOUD lui avait révélé l'existence
d'opérations de déstabilisation visant le groupe LAGARDERE. Puis était survenule décès de Jean-Luc LAGARDERE dont la famille avait demandé une enquêteque Jean-Pierre JOULIN avait coordonné. Il a produit à l'audience une lettre duprofesseur Luc MONTAGNE, qu'il avait fait "coopter" comme expert, qui l'avait
renforcé dans sa conviction du complot. Fin avril 2003, il avait expliqué sesinquiétudes à Imad LAHOUD et lui avait parlé de l'affaire "couper les ailes de
l'oiseau".(page 81)

Au dernier trimestre 2003, toutes les explications d'Imad LAHOUDn'étaient que des synthèses de données, de sorte que, lorsqu'il avait obtenu par lasuite de la même source des données brutes, il avait été en mesure d'affiner ses
allégations notamment dans la lettre du 3 mai 2004 par rapport à celles qui avaientété portées à la connaissance du Général RONDOT (page 130). De plus, en mars

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2004, Imad LAHOUD lui avait signalé de nouveaux flux impliquant le fondsHighfields. A l'époque , il croyait aux assertions d'Imad LAHOUD (page 132) etétait préoccupé par l'assemblée générale de LAGARDERE à venir, en mai 2004.
Plus il avait d'informations et plus il y croyait (page 134).

 Le 9 janvier, Dominique de VILLEPIN lui avait dit que le Présidentprenait l'affaire au sérieux, ce qui n'avait pas manqué de l'impressionner (page 80).

En ce qui concerne les 25.543 effacements sur son disque dur, il a soutenuqu'ils concernaient des recherches Internet, sans rapport avec le dossier. Il anéanmoins confirmé qu'Imad LAHOUD avait fait installer ERASER sur sonordinateur et l'avait actionné à distance. Personnellement il ne s'était pas déplacéchez EADS à 1h du matin, heure de l'effacement (Page 82).

Yves BERTRAND a confirmé avoir eu en sa possession à la fin 2003 unlisting de comptes CLEARSTREAM sous forme d'un CD-ROM qu'un journalistelui avait remis sans en préciser la provenance et que ses services avaient pudécrypter et sur lequel il avait été constaté l'absence de noms de personnalités, cequi le rendait sans intérêt (page 359) et l'avait incité à le considérer commeauthentique (page 363).

Considérant que les listings incriminés étaient "faits de bric et de broc",
il a catégoriquement contesté toute implication dans leur fabrication.

Il a expliqué que Brigitte HENRI lui avait parlé d'Imad LAHOUD dont lenom est apparu dans ses carnets. Imad LAHOUD l'avait intéressé car il était legendre de Monsieur HEILBRONNER. (page 363).Il lui avait été indiqué que cetterelation était destinée à faciliter une procédure d'adoption. Il avait conseillé àBrigitte HENRI de"ne pas fréquenter des gens dans des affaires troubles" (page
364). Il avait rencontré Imad LAHOUD 3 ans auparavant, rue de Miromesnil.

En revanche, il a affirmé avoir ignoré les contacts ayant existé entre ImadLAHOUD et Francis CASANOVA, celui-ci ne rendant compte qu'à BernardSQUARCINI. Il n'avait appris qu'après sa disparition que François CASANOVAavait été l'officier traitant d'Imad LAHOUD (page 368).

Il a formellement contesté les allégations d'Imad LAHOUD au sujet de lafalsification de listings effectuée dans son bureau courant mars 2004, rappelantqu'il avait quitté les Renseignements Généraux en janvier précédent. Il parlait àce sujet d'une "fable rocambolesque" (page 361).

Pourtant, Imad LAHOUD a maintenu ses déclarations en précisant avoirrencontré Yves BERTRAND à trois reprises et avoir fait la falsification en saprésence dans son bureau à l'IGA , rue des Saussaies, ainsi qu'en présence deJean-Louis GERGORIN, à l'aide d'un ordinateur et avec un modèle que ce dernieravait apportés.

Yves BERTRAND savait qu'Eric MERLEN était journaliste et travaillaitavec Brigitte HENRI (page 362). C'est après que l'affaire avait été médiatiséequ'il a su qu'Imad LAHOUD avait eu des documents CLEARSTREAM.

Brigitte HENRI a expliqué avoir fait la connaissance d'Imad LAHOUDpar l'intermédiaire d'Eric MERLEN en 2003 pour des raisons personnelles liéesà l'éventualité de lancer une procédure d'adoption. Dès leur premier contact, ImadLAHOUD lui avait parlé de sa détention et de ses liens avec la DGSE. Elle avait
eu de nouveaux contacts en juillet et en octobre 2003 (page 369). Imad LAHOUD
restait évasif sur les conseils qu'elle attendait. En avril 2004, Imad LAHOUDavait pris l'initiative d'organiser une nouvelle rencontre au restaurant d'EADS oùil lui avait proposé de rencontrer Jean-Louis GERGORIN. A aucun moment Imad

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LAHOUD ne l'avait entretenue de CLEARSTREAM, ni même de ses liens avec
CASANOVA. Personnellement elle ne s'était jamais occupé de l'affaireCLEARSTREAM et à sa connaissance les Renseignements Généraux ne s'yétaient pas intéressés (page 369). Elle avait rencontré Jean-Louis GERGORIN en2005 à l'instigation d'Imad LAHOUD. Au cours de cette entrevue, Jean-Louis
GERGORIN lui avait proposé le poste de responsable de la sécurité chez EADSet lui avait demandé un curriculum vitae. Elle ne s'expliquait pas comment cedocument avait pu être découvert parmi les archives du Général RONDOT.

L'existence et l'objet de cette rencontre avec Brigitte HENRI ont étéconfirmés par Jean-Louis GERGORIN qui a indiqué qu'elle avait le profil pourdevenir directeur de la sécurité d'EADS. Il contestait avoir transmis le curriculum
vitae au Général RONDOT (page 372).

Bernard SQUARCINI, partie civile, a maintenu que François
CASANOVA ne lui a jamais parlé de sa rencontre avec Imad LAHOUD. Quantà Brigitte HENRI il ignorait qu'elle avait eu des contacts avec le même individu.
Il ne connaissait pas Imad LAHOUD. Il ajoutait en ce qui le concernait
personnellement que ce n'était pas la première fois qu'il faisait l'objet d'unecabale (page 267)

Alors que l'avocat de Jean-Louis GERGORIN produisait aux débats uneinterview qu'avait accordée un dénommé Ely CALIL ancien co-détenu d'ImadLAHOUD à la maison d'arrêt de La Santé et qui l'avait entendu dire dès 2002 qu'ildétenait déjà l'affaire qui allait "faire sauter la République" et lui permettre de se
venger, Imad LAHOUD a nié de tels propos, pourtant confirmés par l'intéressédans un courrier adressé au tribunal au cours des débats, et avoir eu l'occasion de
rencontrer cette personne de nouveau après sa détention. Il ne lui avait jamais faitpart de ses liens avec la police française et n'avait pas cherché à entrer en contactavec lui par la suite (page 356).

Il a dit ne pas connaître à l'époque les noms de DELAFAYE, JOULIN,
MAINFROID, de ROQUEMAUREL, et avoir entendu Jean-Louis GERGORIN
parler une fois de Pierre MARTINEZ (page 83). Il ne connaissait pas les noms deGOMEZ et de MARTINEZ avant que Jean-Louis GERGORIN lui en ait parlérespectivement en 2003 et mars 2004. S'il a admis connaître Edwy PLENEL, lenom d'Alain GENITEAU n'évoquait rien pour lui. Imad LAHOUD a précisé quec'est Jean-Louis GERGORIN qui lui avait donné des éléments sur "l'affairejaponaise" (page 151) et que le nom de TOKHTAKOUNOFF avait été mentionnéen sa présence par Eric MERLEN, ce qui expliquait qu'il en ait parlé à Antoine.

Il a contesté avoir été l'auteur de la note "WSP" dans son intégralité, mais
reconnu en avoir rédigé les seules annexes alors que, pour Jean-LouisGERGORIN, il en avait été l'auteur intellectuel, confectionné les deux premièreslettres de 2004, avoir fourni le "super annuaire" et un CDROM. Concernant ledernier envoi reçu par Renaud VAN RUYMBEKE, il a reconnu avoir remis le
CD-ROM en mains propres à Jean-Louis GERGORIN. Il s'est défendu d'avoir
voulu "appâter" Jean-Louis GERGORIN (Page 138). Sa participation s'est limitéeà conserver les données sur son ordinateur au-delà d'octobre et jusqu'à
l'écrasement des données (page 137).

Jean-Louis GERGORIN a expliqué que, dès le début, il s'était demandé

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si Imad LAHOUD ne se moquait pas de lui. "Je n'arrivais pas à croire qu' Imad
puisse monter un tel chantier" a-t-il dit. (Page 84). Il a notamment fait observerque, dans une note, Imad LAHOUD avait critiqué Monsieur ULMO, dont le nom
comportait une même faute d'orthographe que dans les listings (page 85). Il n'avaitjamais pensé que Gilbert FLAM et Edwy PLENEL aient pu être corrompus. Il
avait envisagé de saisir la justice mais le problème était qu'il fallait préalablementdéclassifier une partie de l'enquête. Pour s'en sortir, il était impératif d'aller au
terme des investigations (Page 86).

Confirmant ses déclarations devant les juges d'instructions (D2732/11),
il s'est dit certain que le nom d'Imad LAHOUD avait été mentionné en présencede Dominique de VILLEPIN. Il a confirmé avoir téléphoné à ce dernier le 25 mars2004 après avoir eu connaissance de la garde à vue d'Imad LAHOUD (page 88).
Philippe RONDOT lui avait dit qu'il avait reçu un appel après la garde à vue etque Dominique de VILLEPIN lui avait dit "Tu ne le lâches pas"(Page 89).

Il a certifié ne pas avoir été prévenu de la perquisition, ne pas s'être servid'ERASER et ne pas avoir été l'auteur des effacements.

Imad LAHOUD qui disait connaître Dominique de VILLEPIN par sabelle-soeur Madame PILLOQUET qui était une relation de voisinage a déclaré quec'est par son intermédiaire qu'il avait rencontré Dominique de VILLEPIN en2005, après l'épisode LAFLANDRE. Il avait voulu le rencontrer et "Jean-Louis
GERGORIN m'en a dissuadé" a-t-il soutenu. Mais il a ajouté :"Je voulais voir
Dominique de VILLEPIN car sinon j'allais parler". A chaque fois qu'il fallaitfaire quelque chose, Jean-Louis GERGORIN disait que cela venait de Dominiquede VILLEPIN. Il l'avait donc rencontré chez sa belle-soeur. Il a tenté de justifierses mensonges lors de l'instruction par son souci de protéger Dominique deVILLEPIN, et Jean-Louis GERGORIN qui avait été l'organisateur de leurrencontre (page 90).

Cependant, Dominique de VILLEPIN a déclaré ne pas connaître Imad
LAHOUD jusqu'à ce jour.

Dephine LEGEAY ép. PILLOQUET, la belle-soeur de Dominique deVILLEPIN (page 344) a déclaré qu'elle n'avait aucune relation avec celui-ci maiss'était présentée lors de la perquisition au domicile de l'intéressé. Elle a déclaré :
"C'est un pur mensonge de dire que j'ai été l'intermédiaire entre Imad LAHOUDet Dominique de VILLEPIN. Il n'y a jamais eu de repas entre eux". Elle a indiquéqu'elle entretenait des relations d'amitié avec l'épouse d'Imad LAHOUD et quela dernière fois qu'Imad LAHOUD était venu chez eux c'était en 2007. Elle avaitalors assisté à une scène "cocasse". Imad LAHOUD cherchait des micros cachés
et disait à haute voix avoir rencontré Nicolas SARKOZY à deux reprises.

Michel PILLOQUET (page 347) a confirmé pour sa part les termes del'article paru peu avant l'ouverture du procès sur le site "Mediapart"et notammentle fait d'avoir embauché comme stagiaire Anne CASANOVA sur la demanded'Imad LAHOUD. Le stage avait été interrompu le 11 mars 2004 après qu'il l'eutsurprise en compagnie d'Imad LAHOUD dans son bureau en train de manipulerson ordinateur. Imad LAHOUD avait alors prétendu être venu aider AnneCASANOVA à ouvrir un fichier. Le lendemain, Anne CASANOVA avait décidé
de partir.

Sa femme lui avait rapporté la venue inopinée d'Imad LAHOUD en 2007.
Il en avait parlé tardivement, fin août 2009, à Dominique de VILLEPIN qui avait

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été surpris et choqué. Lui n'avait pas fait le lien entre l'incident et l'affaire.

Imad LAHOUD a reconnu l'embauche par son intermédiaire de la fillede François CASANOVA mais contesté la réalité de l'incident du 10 mars 2004.
En revanche il a maintenu l'existence d'une rencontre arrangée avec Dominiquede VILLEPIN en mai 2005.Il avait rendu une visite à Michel PILLOQUET le 16
mai 2005 en début de matinée. Ce jour-là il avait rencontré Philippe
LAFLANDRE.

Jean-Louis GERGORIN a fait part de sa conviction qu'Imad LAHOUDétait à la recherche d'un protecteur.

Il a évoqué une réflexion attribuée à Marwan LAHOUD qui parlait au sujetde son frère Imad d'un "risque réputationnel". Il a exprimé le sentiment d'avoir
été victime d'une " mystification" sur la provenance des données et la réalité du
hacking (page 98). Jean-Louis GERGORIN n'a pas exclu qu'Imad LAHOUD ait
donné de nouveaux fichiers pour restaurer sa crédibilité. Il a affirmé qu'il avait puchanger ligne à ligne les transactions (Page 100).

Il a déclaré qu'en appliquant l'adage "une seule source égale zéro source",
il n'avait pas voulu entamer la "chasse aux sorcières" en se fondant sur une seulesource (page 127).

A ses yeux, la grande difficulté de l'affaire résidait dans les vérificationsinformatiques. Il connaissait les méthodes de travail du Général RONDOT qu'ilpensait en capacité de mobiliser les services techniques de la DGSE. Il anéanmoins admis que le Général RONDOT lui avait fait part de son scepticismepuis de sa perplexité (page 137).

Il a maintenu que les deux lettres, du 3 mai et du 14 juin, avaient été tapéespar Imad LAHOUD sous sa dictée, ainsi que la lettre d'accompagnement desfichiers placés dans le CD-ROM du 4 octobre. Il lui avait demandé de signer
"DT", ce qui signifiait "Deep Throat", afin que le juge sache d'où venaient les
deux derniers écrits (page 136).

Il a également affirmé qu'il y avait eu consensus avec Renaud VANRUYMBEKE. L'objectif qu'il s'était fixé était de remettre au magistrat lesdocuments synthétiques utiles à son instruction (page 155), Renaud VANRUYMBEKE l'ayant averti qu'il allait envoyer une commission rogatoireinternationale au Luxembourg. Jean-Louis GERGORIN admettait, contrairementà ce qui a été écrit dans l'un des courriers, ne pas avoir été témoin des pratiques
dénoncées "depuis de nombreuses années" mais "depuis plusieurs mois",
reconnaissant s'être paré d'un "habit grotesque" pour les besoins de cettedémarche. Il était à cette époque profondément stressé et, selon lui, les termesemployés traduisaient cette tension.

Alors que Jean-Louis GERGORIN a prétendu ne pas avoir été prévenu dela perquisition, Imad LAHOUD a soutenu avoir été prévenu de la perquisition parJean-Louis GERGORIN (page 145).

Jean-Louis GERGORIN a reconnu avoir rédigé la "note DDV" sous lecontrôle d'Imad LAHOUD. Il devait "faire simple et court" (page 150). Il
confirmait les propos tenus sur le répondeur de Philippe CAMUS et que celui-cia rapportés au sujet de l'adjonction des noms de NAGY et BOCSA (D1938/6 et7).

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Dominique de VILLEPIN a expliqué qu'on lui avait dit que les données
CLEARSTREAM étaient des données brutes venant de l'intérieur du système etqu'elles étaient incontestables, qu'il n'avait examiné aucun document, qu'au coursde la réunion du 9 janvier ils n'étaient pas entrés dans le détail de l'implication despersonnes (page 160) et qu'il avait personnellement rendu compte au Président dela République quelques jours après. Dominique de VILLEPIN a précisé qu'il avait
parlé au Président de la République de la menace annoncée par Jean-LouisGERGORIN, mais pas de la rencontre du 1er janvier (page 176).

Il a assuré qu'en affirmant qu'il n'y avait jamais eu d'instructionprésidentielle, il ne cherchait pas à couvrir Jacques CHIRAC (page 163).

Dominique de VILLEPIN a déclaré qu'il n'avait pas donné d'instructionsà Philippe RONDOT mais que seuls des "propos" ont été tenus (cf lettre PHR du12.01).

Estimant que "Face à une menace, on ne peut pas la découper en
rondelles", il n'avait rien estimé devoir ajouter à la mission d'origine confiée parle ministère de la Défense qui avait pris en compte la globalité de la menace.
N'ayant été informé d'aucun développement, il avait estimé ne pas devoir eninformer son successeur au ministère des Affaires Etrangères, en la personne deMichel BARNIER. Il s'était posé la question de savoir si le Premier ministre ou lePrésident de la République avaient été informés par le ministre de la Défense.

Lors de l'aparté du 14 avril 2004, il avait renvoyé Jean-Louis GERGORINsur le Général RONDOT (page 179).

A son avis, tout aurait dû s'arrêter le 25 mars, à l'occasion de la garde à vued'Imad LAHOUD, or tout s'est accéléré. Ce jour-là, en fin de conversation, leGénéral s'était dit victime d'une indélicatesse de la part de Jean-Louis GERGORINet l'avait informé que sa source était en garde à vue. Le nom d'Imad LAHOUDn'avait jamais été évoqué devant lui (page 162). Il a maintenu ne pas connaître cettepersonne (page 178).

En juillet 2004, il avait joint le Premier ministre et le Président de laRépublique pour proposer de saisir la DST. Il estimait qu'il était naturel que tousles services de l'Etat pouvant clarifier l'affaire soient saisis. Il pensait que leministre de l'Intérieur et celui de l'Economie étaient également informés de cetteaffaire et devaient réagir et apporter utilement des informations.

Début juillet, il avait demandé à Pierre de BOUSQUET de s'intéresser àl'affaire CLEARSTREAM et avait convoqué le Général RONDOT pour le 19juillet afin de l'inviter à se rapprocher de la DST qui par ailleurs avait commencéà l'informer. L'objet de l'entretien avait été de savoir ce qui s'était passé depuis ledébut de l'année. Le général lui avait fait part de ses doutes (page 164).

Il a reconnu que la note DST du 21 juillet lui avait été transmise. Elle n'étaitpas aussi précise qu'on l'a prétendu. Elle n'avait pas présenté le montage commeune certitude. La DST avait travaillé sur le cas d'un individu et non sur un système.
Aucune des notes des services n'avait indiqué avec certitude qu'il s'agissait d'unfaux (page 167). Il n'avait pas été destinataire de la note du 21 juillet 2004 qui avaitété adressée au directeur de cabinet qui lui en avait communiqué les principauxpoints. Il avait effectivement été informé que Jean-Jacques MARTINI avait étévictime d'une intention de nuire.

Au sujet de la rencontre du 27 juillet, il a précisé : "mes doutes viennent de
ce que me rapporte la DST". Il avait continué de voir le Général RONDOT en
septembre quand le dossier était devenu politique (page 166).

Il a estimé qu'en septembre 2004, Arnaud LAGARDERE avait à êtreinformé non pas des conclusions de la DST, mais seulement de la situation difficile

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de son groupe et des rivalités internes d'autant que l'on ignorait alors que Jean-
Louis GERGORIN était le corbeau.

En octobre, le nom de Jean-Louis GERGORIN avait déjà été cité dans lesnote DST et la rumeur parisienne le désignait comme "possible corbeau". Il ne
s'est plus entretenu avec Jean-Louis GERGORIN sur ce dossier, mais sur d'autresdossiers. Il avait eu deux échanges avec lui dans le bureau de Bruno LEMAIRE surle terrorisme.

Il a affirmé qu'il n'avait pas eu d'aparté avec Jean-Louis GERGORIN le 14avril 2004, à l'occasion de la remise de sa décoration (page 169).

Jean-Jacques MARTINI (page 267) précisait qu'en juillet 2004, sadirection lui avait présenté les listings, qu'il avait pensé que Jean-Louis
GERGORIN l'avait mis sur la liste.

En 1994 il avait été sous-directeur à la DST. Il confirmait l'intervention de
Jean-Louis GERGORIN dans l'affaire "couper les ailes de l'oiseau". Jean-LouisGERGORIN craignait que la déclassification d'une note DST et sa production enjustice dans le cadre de cette affaire l'expose à des poursuites du chef d'abus debiens sociaux.

Il confirmait l'existence des contacts avec Philippe RONDOT à partird'informations données en 2003 par "AMIRA"(autre surnom doné à
LAHOUD)(page 268) et de contacts ultérieurs en juin 2004, alors que les listingsn'étaient pas encore sortis.

En octobre 2003, le Général RONDOT avait demandé des investigationsà sa source qui prétendait avoir de bons moyens d'investigation. Il voulait que leservice vérifie leur valeur. Il ignorait à l'époque de ses investigations que Jean-
Louis GERGORIN avait rencontré Renaud VAN RUYMBEKE. Il n'y avait pas eud'enquête judiciaire de la DST en juillet 2004. Le nom de Jean-Louis GERGORINrevenait sans cesse. Gérard WILLING était une source de la DST. Jean-Louis
GERGORIN s'était défendu d'être le corbeau.

Il y avait différentes hypothèses mais le nom de Jean-Louis GERGORINrevenait souvent. La DST disposait d'indices graves contre Jean-Louis
GERGORIN et non de preuve (page 273).

Imad LAHOUD précisait qu'il avait rencontré pour la première fois Jean-
Jacques MARTINI à l'audience. Les propos de Pierre SELLIER au sujet desrelations qu'ils auraient pu nouer sont faux.

Selon Jean-Louis GERGORIN, la DST leur avait rendu un grand servicedans l'affaire "couper les ailes de l'oiseau". Sa colère sur cette affaire ne justifiaitpas que Jean-Jacques MARTINI devienne son ennemi.

Pierre de BOUSQUET (page 273) a confirmé avoir découvert
CLEARSTREAM en juillet 2004 sur le tarmac de l'aérodrome de Villacoublay. Leservice qui avait pu récupérer la liste du 14 juin, était parti de l'hypothèse que cetteliste n'était pas authentique. L'été s'était passé sans rien de très affirmatif et sansconsistance. C'est en septembre qu'une source avait apporté un document quiposait question sur Jean-Louis GERGORIN.

Le 20 septembre 2004, il avait rendu compte à Dominique de VILLEPIN.
Celui ci allait en parler à Arnaud LAGARDERE et à cette fin, Pierre deBOUSQUET avait rédigé un mémo. En octobre, il avait demandé à Dominique deVILLEPIN d'en sortir, d'en parler à Nicolas SARKOZY. Les doléances formulées

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par Nicolas SARKOZY reposaient sur trois points:

- l'existence d'un rapport caché qui l'innocentait,
- la nécessité de saisir la justice dans le cadre de l'art 40 du code de procédurepénale,
- la nécessité de purger la campagne présidentielle.
Il n'avait pas saisi la justice car les éléments n'étaient pas, à ses yeux, assezprobants. La saisine du parquet aurait exposé sa source. Il avait été convenu qu'ilen parle au Procureur de la République de Paris, Yves BOT. La DST s'était
ensuite retirée de cette affaire au fur et à mesure de sa judiciarisation (page 275).
Il n'avait reçu aucune instruction du ministre de l'Intérieur. Il n'avait pas eu decontact ultérieur avec Nicolas SARKOZY.

Quand il avait eu connaissance de la liste des 895 comptes, le 10 juillet(page 278), il avait appelé l'attention de Claude GUEANT sur le nom décomposéde Nicolas SARKOZY, et il avait fait revenir Jean-Jacques MARTINI de congé.
Il avait eu, en juillet, un bref contact téléphonique avec Général RONDOT qui luiavait dit "C'est bidon" (page 277). Lui même partageait cette conviction qui enréalité n'est apparue qu'alors que l'affaire était déjà judiciarisée. Il avait fait partde ses soupçons notamment au directeur de cabinet du ministre puis avait vouluvoir le ministre le 22 septembre.

Le 3 septembre 2004, il avait eu un entretien avec Jean-Louis GERGORINqui niait être le corbeau et dont l'ami Jean-Pierre JOULIN figurait dans les listings,
ce qui était de nature à le dédouaner.

Il ne disposait pas des moyens permettant d'étayer la mise en cause deJean-Louis GERGORIN Il ne voyait pas à quel rapport Jean-Louis GERGORINpouvait faire allusion dans sa plainte pour faux et violation du secret, car il n'y enavait pas eu (page 280). C'est le 15 juin 2005 qu'il avait appris que GénéralRONDOT avait rencontré Dominique de VILLEPIN et Jean-Louis GERGORIN
le 9 janvier 2004 pour parler de cette affaire.

Il déclarait avoir informé Nicolas SARKOZY après avoir eu la liste (page282), ce qu'a contesté l'intéressé (D689/2).
La note DST du 13 juillet 2004 (D138) ne portait pas mention du nom deNicolas SARKOZY car il avait été retranché par prudence.
Il a prétendu que la non-transmission de la note du 21 juillet 2004 avait étédû à un simple oubli (page 283).

Jean-Pierre RAFFARIN a indiqué avoir été informé le 5 juillet 2004 parDominique de VILLEPIN de la parution imminente dans "le Point" d'un article ausujet de cette affaire et faisant référence à des personnalités. Le sujet avait étéabordé le 8 juillet au matin avec le ministre de l'Intérieur. En milieu de journéeavec le ministre de l'Economie pour l'informer que le père du ministre cité par "lePoint" pouvait être le sien. En revanche, il ne s'était jamais entretenu de cetteaffaire avec le ministre de la Défense. Il avait découvert dans cet article que lajustice avait été saisie. Il avait souhaité obtenir des éléments sur la véracité de cesinformations (page 288 et suivantes).

Cette affaire posait selon le témoin la question de la transmission d'undossier dans un appareil d'Etat. Il s'agissait en l'espèce d'un dossier sensible maisincertain. Il considérait qu'il n'était pas aberrant qu'un ministre changeant deportefeuille poursuive son travail sur ses affaires réservées.

Il avait eu retour oralement d'informations sur l'enquête de la DST quilaissaient entendre que le mécanisme de fraude dénoncé était peu étayé, tandis que

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grondait la révolte du ministre de l'Economie et des Finances.

A sa connaissance, l'intervention du Président de la République n'avait pasété évoquée, le ministre de la Défense ne lui avait pas fait part d'informations etDominique de VILLEPIN avait été le premier des ministres à lui parler de cetteaffaire. Il avait eu par la suite des conversations avec Michèle ALLIOT-MARIEsur les conséquences politiques. Il estimait que l'on ne pouvait transmettre desinformations si elles n'avaient pas un degré de certitude suffisant.

Jean-Louis GERGORIN a confirmé la réalité de ses entretiens avec
Dominique de VILLEPIN. Il a expliqué que le 9 janvier, avait été posée la règle dusecret absolu, qu'une nouvelle réunion avait eu lieu fin janvier- début février2004, suite aux nouvelles informations en provenance d'Imad LAHOUD. Il a
maintenu avoir remis à Dominique de VILLEPIN un CD-ROM contenant lestransactions de janvier et l'avoir averti de l'apparition du nom de BriceHORTEFEUX et des noms "de NAGY" et "BOCSA".

 Il a rappelé qu'en mars 2004, Dominique de VILLEPIN avait fait uneréflexion à voix haute, au sujet des services qui n'étaient pas à la hauteur (page170). C'est en avril suivant, que, sur un ton solennel, il avait évoqué la seulesolution envisageable : celle qu'un juge d'instruction s'en occupe. C'était présentécomme une instruction du Président de la République. Il avait alors compris queDominique de VILLEPIN n'avait plus de relation avec le Général RONDOT, alorsmême que celui-ci poursuivait ses vérifications. Quand il avait rencontré Thibaultde MONTBRIAL, il n'avait pas encore l'instruction du Président de la République.
Dans son esprit, cette instruction n'avait été qu'une condition nécessaire mais nonsuffisante. "Je ne serais jamais allé voir Renaud VAN RUYMBEKE sans cette
recommandation. J'ai rencontré Thibault de MONTBRIAL de ma propre initiative"
déclarait-il (page 171). Il assurait le "Go between" entre le Général RONDOT et
Dominique de VILLEPIN dans une situation qu'il a qualifié de "bizarrerie
administrative".

Il avait informé Dominique de VILLEPIN de la substance des informationsdonnées à Renaud VAN RUYMBEKE.

Jean-Louis GERGORIN a démenti avoir reçu de Dominique de VILLEPINl'instruction de "balancer NS" (page 172), propos qu'Imad LAHOUD a cependant
confirmés.

Il a affirmé que Dominique de VILLEPIN savait que les informationsprovenaient d'un hacking,, savait qu'Imad LAHOUD était la source et qu'il avaitdes ennuis judiciaires. Le 25 mars 2004, il avait appelé Dominique de VILLEPINet l'avait prévenu de la garde à vue dImad LAHOUD. Il n'avait jamais participé àdes réunions sur le terrorisme au ministère de l'Intérieur, sauf avec Bruno
LEMAIRE (page 174). Leurs rencontres n'avaient jamais été des rencontres deconspirateurs mais entre des personnes qui y croyaient.

Il a souligné qu'un ministre ne pouvait pas donner d'instruction à unepersonne civile et qu'après avril 2004, il n'y avait plus eu d'instruction de
Dominique de VILLEPIN (page175).

Dominique de VILLEPIN a déclaré :"Un ministre ne travaille pas sur des
doutes. Il travaille sur des certitudes". Il n'y avait eu aucune note du Ministre del'Economie. En juillet, on savait que la source avait été manipulée (page 182) etquand Pierre de BOUSQUET faisait une recommandation, elle s'imposait etpersonne n'était "autorisé à venir y picorer!". Il a affirmé que "Si l'on s'écarte de
l'avis des professionnels c'est le désordre qui s'installe" (page 183).

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Il a fait observer que vingt-six officiers et quatre huissiers du ministère del'Intérieur ont contredit les affirmations des agents de AICS en indiquant qu'iln'existait pas de procédure spéciale. Il a déclaré à ce sujet : "Il est curieux que laparole de 26 officiers et 4 huissiers pèsent moins que celles des officiers d'officinesde sécurité recrutés par EADS. Je trouve cela choquant" (page 180).

N'ayant jamais eu les listings en sa possession on ne saurait prétendre qu'il
ait détenu les éléments d'information ouvrant la voie de l'article 40(page 189).

Jean-Louis GERGORIN a affirmé avoir demandé à Dominique deVILLEPIN de saisir la DST car il avait des éléments "confirmatoires" et éprouvaitdes difficultés pour avancer dans son enquête, étant toujours convaincu de la réalitédu système.

Il a expliqué qu'en avril, il avait eu un "small talk" avec Dominique de
VILLEPIN après quoi ont été abordées les instructions du Président de la
République. Dominique de VILLEPIN avait été très intéressé par la clôture des895 comptes. C'était une réunion de deux personnes qui croyaient en la crédibilitédes informations.

Il devait cacher au Général RONDOT que l'instruction émanait duPrésident de la République, Il a précisé qu'elle avait été donnée entre le 7 et le 14avril, avant sa remise de décoration (page 192). Il a maintenu l'existence de l'apartédu 14 avril où il avait voulu entretenir Dominique de VILLEPIN de la réunion dumatin avec le Général RONDOT.

Jean-Louis GERGORIN a prétendu que les vérifications qu'il attendait
s'éloignaient de plus en plus tandis qu'Imad LAHOUD l'abreuvait d'informations,
qu'en réalité il ne serait jamais allé voir le juge sans l'incitation initiale deDominique de VILLEPIN mais que celui-ci ne lui avait pas demandé d'écrire deslettres anonymes. "C'est la dynamique de ma relation avec Renaud VAN
RUYMBEKE qui m'a fait envoyer des lettres " (page 193) a-t-il soutenu.
Dominique de VILLEPIN ne voulait surtout pas être impliqué mais voulait êtreinformé de ce qui se passait (page 194).

Jean-Louis GERGORIN a déclaré qu'il n'y avait eu qu'une seuleinstruction et que le comportement de Dominique de VILLEPIN ne pouvaits'expliquer que par un "quotient élevé de crédibilité des documents" (page 196).

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Alain GOMEZ a indiqué au tribunal (pages 101) que selon lui l'originede cette affaire résidait dans une rivalité industrielle, l'opposition étant apparu dès1994 quand Jean-Louis GERGORIN était en charge du dossier pour le compte deMATRA, il utilisait des armes déloyales voire illégales contre THOMSON. Ladéclassification de la note DST impliquant Jean-Louis GERGORIN dans l'affaire"couper les ailes de l'oiseau" l'avait fortement embarrassé.

Dès le départ, sa conviction avait été dans cette affaire que Jean-LouisGERGORIN était à l'origine des dénonciations.

Il décrivait le mode opératoire constamment utilisé par Jean-LouisGERGORIN dans ses entreprises de déstabilisation:

- l'attribution à la cible d'un acte de nature à lui nuire et des intentions
condamnables,
- la détermination des "sources", qualité qu'il confère à celui qui sait, la source est"objectivée",
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- l'officialisation afin de bénéficier d'un "sceau officiel".
Alain GOMEZ considérait qu'en 2003, Jean-Louis GERGORIN avait eu
une "nouvelle bouffée délirante", il avait fantasmé, notamment en allant voir EdwyPLENEL pour lui dénoncer la personne qu'il accusait d'avoir commandité del'assassinat de Jean-Luc LAGARDERE.

Selon Jean-Louis GERGORIN, c'est Imad LAHOUD s'était proposécomme source. Il avait vécu toutes ces histoires avec passion. Il a indiqué que le27 juin 2003, le Général IMBOT lui avait fait part de sa conviction que son filsn'était pas décédé de mort naturelle et mettait en cause la direction de THOMSON.

Il a précisé, sur l'épisode NEMER, avoir souhaité avertir Renaud VANRUYMBEKE comme autorité morale mais non comme magistrat. Il n'avait alorscité aucun nom.

Il a soutenu que la note présentée comme émanant de la DST et qui avaitété produite dans l'affaire "couper les ailes de l'oiseau" avait été simplement
"estampillée DST".

Pierre MARTINEZ a dépeint Jean-Louis GERGORIN comme un
personnage ambigü et un être "très friable" (page 112). Il a souligné que son
passage au Crédit Lyonnais à compter du 1er septembre 1991 avait été
complètement occulté par Jean-Louis GERGORIN et qu'en 1994, il ne connaissaitpas Alain GOMEZ. A son avis, il est impossible qu'Imad LAHOUD ait connu lenom des cadres dirigeants de LAGARDERE.

Jean-Louis GERGORIN a déclaré qu'en 2003, il avait su que PierreMARTINEZ avait rejoint le groupe THOMSON en 1995 et que les tensions entreles deux groupes (MATRA et THOMSON) étaient connues.

Edwy PLENEL (page 114) a confirmé ses entretiens avec Jean-Louis
GERGORIN de l'automne 2003. Il s'est dit solidaire de Denis ROBERT sur la
question du recel. En revanche, il s'est interrogé sur le comportement du GénéralRONDOT qui avait continué de travailler jusqu'en 2005 avec Imad LAHOUDqu'il avait pris en main en 2003 en connaissance de sa situation et mis en relationavec les plus hautes autorités, sans même prendre en compte l'avertissement del'officier traitant.

Il a estimé que Nicolas SARKOZY avait été au courant au plus tard aucours de l'été 2004. Il n'imaginait pas que les services de renseignements n'aientpas informé l'univers ministériel.

Il se disait convaincu que Dominique de VILLEPIN ne "relevait pas d'un
cabinet noir".
C'est l'ensemble d'un dispositif étatique qui était selon lui compromis dans lacirculation de la calomnie.

Jean-Louis GERGORIN a précisé qu'il avait eu une première rencontreavec Edwy PLENEL au printemps 2003, au cours de laquelle le décès de Jean-LucLAGARDERE avait été évoqué. Une seconde rencontre était intervenue le 5novembre. Il avait alors abordé l'existence de flux informatiques mettant en causeAlain GOMEZ. Il ne se souvenait pas d'avoir accusé explicitement Alain GOMEZ,

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ne faisant état à son endroit que de suspicions.

Allain GUILLOUX a soutenu que derrière l'affaire Clearstream commederrière l'affaire de l'Angolagate, agissaient les Renseignements Généraux (page119). Il en veut pour preuve queles noms d'Albert AFFALO, Samuel
MANDELSAFT ou Gilbert SALOMON étaient inconnus des prévenus.

Pierre PASQUA a fait remarquer qu'il n'avait aucun lien avec les
prévenus. Il considérait que son nom avait été utilisé pour atteindre son père
(page119).

Philippe DELMAS, partie civile, a confirmé les termes de sa plainteinitiale et les propos qu'il avait tenus à l'occasion de ses deux auditions. Il faisait
part de sa conviction que Jean-Louis GERGORIN était derrière tout cela (pages375 à 387).

Il avait été frappé par les conceptions manichéennes de Jean-Louis
GERGORIN qui livrait un combat pour le bien (LAGARDERE) contre le mal(THOMSON) dont le sommet était incarné par Alain GOMEZ.
Dans ses opérations , il y a la compromission et l'implication d'autorités publiques.

Au décès de Jean-Luc LAGARDERE, les incertitudes sur le sort de
Philippe CAMUS rejaillissaient sur Jean-Louis GERGORIN qui à partir de cemoment a fait choix des bons alliés politiques.

Il a pu constater que "Jean-Louis GERGORIN fusionnait ses objectifs
politiques et industriels" (page 378).

Le choix de RONDOT par Jean-Louis GERGORIN avait été motivé par lacaution qu'il apportait à la dénonciation. Son autorité avait accroché Dominiquede VILLEPIN. Le choix d'Imad LAHOUD qui travaillait sur les réseauxinternationaux avait été formidable pour Jean-Louis GERGORIN.

Ses initiatives en 2004 et 2005 étaient calculées, de même que son attitudeambigüe au sein d'EADS, car, selon la partie civile,"en mentant sur tout, le temps
ferait son affaire" (page 379 et 380).

Jean-Louis GERGORIN a répliqué que lui même s'était trouvé
"totalement vulnérable". A la fin 2004, il s'était retrouvé devant cette alternative:
"soit il ne disait rien, soit il disait tout". Lorsqu'il avait déposé plainte ennovembre 2004, il était en plein déni tout en croyant encore à la réalité du systèmeCLEARSTREAM (page 381)

François GONTIER, partie civile, expliquait connaître Imad LAHOUDdepuis 1996, étant lui-même marié à Claudine LAHOUD, une cousine d'ImadLAHOUD.

Il a évoqué le fait qu'Imad LAHOUD s'était vanté en 2005 d'avoir obtenuà la suite d'une intervention une place au lycée français pour quelqu'un de safamille pour la rentrée 2004, alors que son épouse travaillait au ministère desaffaires étrangères.

L'ordinateur personnel d'Imad LAHOUD avait été récupéré et mis ensûreté chez un avocat libanais. Il assurait n'avoir jamais touché au disque dur (page338).

Imad LAHOUD expliquait que Dominique de VILLEPIN n'était jamais

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intervenu pour sa nièce ou son épouse. Il avait donné son ordinateur en 2004 pourles 18 ans de sa soeur. Il s'en était dessaisi en 2004 alors qu'il se trouvait enFrance.

Jean-Louis GERGORIN a déclaré avoir été inquiet de voir figurerFrançois GONTIER sur les listings car c'était un des meilleurs opérateurs sur laplace de Paris. Il ajoutait que de LASTEYRIE était son premier client et qu'ImadLAHOUD le connaissait, ce qu'Imad LAHOUD contestait.

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Entendu lors de l'audience du 5 octobre 2009, Philippe RONDOT s'est
remémoré sa première audition comme témoin, audition qu'il a qualifiéed'éprouvante, précisant qu'il avait commis des erreurs dans ses déclarations tellesqu'elles avaient été enregistrées (page 200).

Il a précisé que sur cette affaire, il n'avait jamais eu d'entretien avec le
Président de la République, cela en dépit de la demande qu'il avait formulée (page200).

Il a expliqué que toute source était importante en matière de terrorisme,
qu'il ne lâchait jamais une source dans la nature, qu'il n'abandonnait jamais une
source humaine, et Imad LAHOUD était une source humaine. Jean-Louis
GERGORIN lui avait signalé l'existence d'une personne très au fait des circuitsfinanciers et du financement des réseaux islamistes qu'il avait immédiatementorientée, eu égard à sa connaissance des réseaux vers la DGSE (page 202), ImadLAHOUD n'ayant pas été à la hauteur des espoirs qui avaient été placés en luicompte tenu des promesses qu'il avait faites, la DGSE avait voulu s'en débarrasser
et le Général RONDOT l'avait pris en compte avec l'autorisation du ministre.
C'est ainsi que, par la suite, Imad LAHOUD avait apporté une affaire importantede transfert de fonds, dans l'idée que ce financement devait servir à AL QAEDA.
Il n'avait pas transmis l'information à la DGSE et s'était retourné vers les servicesaméricains qui avaient conclu que cela ne tenait pas la route, car les informations,
on les retrouvait sur internet. Il avait alors décidé de cesser ses relations avec Imad
LAHOUD.

Néanmoins, le 1er octobre 2003, Imad LAHOUD était réapparu en
manifestant l'intention d'apporter sa contribution aux services (page 203). Il enavait accepté le principe, bien qu'il se fût agi d'une personne difficile à traiter.
Son expérience lui faisait dire que c'est à partir d'une source ténue et fragile qu'on
capture un terroriste.

Le même jour, Jean-Louis GERGORIN était revenu vers lui, ayant deschoses intéressantes à lui confier (page 203). A cette occasion, Jean-LouisGERGORIN avait développé sa théorie sur l'assassinat de Jean-Luc LAGARDERE
qui était l'oeuvre de la mafia russe, en relation avec Alain GOMEZ, alors qu'ImadLAHOUD avait déjà évoqué la "fixation" de Jean-Louis GERGORIN sur AlainGOMEZ (verbatim du 1er juin 2003).Il notait, comme à son habitude, ce que Jean-
Louis GERGORIN lui racontait, notamment les noms qu'il citait.

Il n'avait pas parlé de politiques ni des russes mais d'anciens membres dela DGSE ainsi que de membres actuels de la DST. C'est en voyant les noms de sesamis, qu'il avait été incité à s'intéresser à cette affaire. En novembre 2003,

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Philippe MARLAND, auquel il avait rendu compte, lui avait donné instruction des'intéresser aux personnels de la Défense qui avaient été dénoncés.

Il s'était rendu à la réunion du 9 janvier 2004 au cours de laquelle il avaitpris des notes, personne ne lui ayant demandé de ne pas en prendre, pendant queDominique de VILLEPIN écoutait ce que Jean-Louis GERGORIN exposait, aprèsavoir rappelé les consignes générales de lutte contre la corruption. Le nom deNicolas SARKOZY avait été cité par les uns et par les autres. Jean-LouisGERGORIN avait cité un compte couplé Nicolas SARKOZY -"BOCSA", dont ilne connaissait pas l'orthographe exacte, ce qui pouvait expliquer l'erreur
d'orthographe ("BOKSA"). Il avait brandi une liasse de documents qui semblait être
des listings. Le "déluge verbal" de Jean-Louis GERGORIN était en partie
incompréhensible (page 204).

Selon Philippe RONDOT, Dominique de VILLEPIN avait confirmé lesinstructions du Président de la République et en était venu à lui demander de ne pasen référer à son ministre dont le compagnon était en lien avec les milieuxd'affaires. S'il n'en avait pas parlé, dans un premier temps, avec son ministre, il enavait informé Philippe MARLAND. Il lui avait montré ses notes d'étapes oùavaient été relatées les conversations et les faits dont il avait jusqu'alors euconnaissance. Il avait plus tard rédigé une note de synthèse à partir de ces quatrenotes internes.

Il n'avait plus eu de contact avec Dominique de VILLEPIN de janvier àjuillet 2004 à l'exception de l'appel téléphonique relatif à l'épisode de la garde àvue d'Imad LAHOUD. Ce dernier continuait cependant de lui fournir des listings.
Il lui sortait des tableaux avec des mouvements. Pour le général, c'était ImadLAHOUD qui les fabriquait.

Avant mai 2004, il avait fait procéder à une vérification par la DST enSuisse au sujet du compte censé appartenir à un membre de la Défense. Il n'avaitété retrouvé aucune trace de ce compte. Il avait alors "des doutes qui s'amplifient".
Il avait été témoin d'une tentative de pénétration dans les locaux d'EADS avecJean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD (page 205). Il avait quitté Suresnesavec la copie de listings. Pour lui, à cette époque, Imad LAHOUD avait
effectivement pénétré un système informatique (page 206).

Il a rappelé que Jean-Louis GERGORIN lui avait dit qu'il s'était adressé àRenaud VAN RUYMBEKE sur instruction de Dominique de VILLEPIN. Jean-
Louis GERGORIN n'avait pas été satisfait de ses vérifications et avait voulu quele Général RONDOT mette en oeuvre les moyens de la DGSE. Il avait été
personnellement consterné mais soulagé d'apprendre la saisine du juge RenaudVAN RUYMBEKE. Consterné, car il avait eu le sentiment que l'on était rentraitdans une manipulation.

Imad LAHOUD était venu dans son bureau et lui avait montré une liste
supportant les deux patronymes "de NAGY" et "BOCSA". Les premièresvérifications dans le "Who's Who?" l'avait convaincu qu'il s'agissait de NicolasSARKOZY. Mais il avait retenu l'information car il ne voulait pas outrepasser lestermes de sa mission. Il en avait toutefois informé Philippe MARLAND. Jean-

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Louis GERGORIN, à l'occasion de rencontres ou par le truchement de mots laissésau ministère, lui avait fait part de ses entretiens avec Dominique de VILLEPIN. Ilsupposait que Jean-Louis GERGORIN informait Dominique de VILLEPIN quin'avait aucune raison de mettre en doute ses propos (page 206). Il avait faitremonter l'information à Philippe MARLAND. Personnellement il ne s'est pasintéressé aux enquêtes du juge.

En juillet 2004, il avait déjà rencontré ses camarades des services (àl'exception d'Alain CHOUET et de Gilbert FLAM). Tous ces entretiens lui avaientpermis d'évacuer l'idée que ces personnes fussent impliquées . Il avait égalementconsulté des correspondants suisses qui lui avaient dit que "cela ne tenait pas la
route". Il en avait averti tout le monde et notamment Dominique de VILLEPIN, laDST, le ministre de la Défense et même la DGSE.

Il avait été convoqué par Dominique de VILLEPIN auquel il avait fait unrésumé de ses recherches. A cette occasion, celui-ci avait eu cette formule "Si nous
apparaissons ,le PR et moi, nous sautons" (page 207). Fin juillet il n'avait plus dedoutes mais des certitudes. Il avait demandé à sa hiérarchie de prévenir le Présidentde la République. Il était apparu urgent, dès lors que Dominique de VILLEPINétait impliqué et que le Président de la République était également cité, de faire ensorte que l'on ne puisse remonter sur les deux plus hautes autorités de l'Etat. Il
avait esquivé les réunions avec Jean-Louis GERGORIN car on le lui avaitdemandé. Il était établi que cette affaire résultait d'un montage. Le 23 octobre2004, il avait eu une réunion avec Dominique de VILLEPIN qui, alors, croyait àl'existence d'un montage (page 207).

Il a soutenu que, dans cette affaire, si la justice avait dû être saisie, c'eût été
à sa hiérarchie de le faire (page 209).

Dominique de VILLEPIN lui avait demandé de "Démonter le système" ce
qui n'impliquait pas dans son esprit une modification en profondeur de la missionqu'il avait obtenue du ministre de la Défense, mais avait eu pour seul effet de luifaire changer d'autorité supervisante. La différence se situait notamment dans laportée de ses investigations: "Si cette branche tombe [celle sur laquelle le
Ministère de la Défense lui avait demandé d'enquêter], le système tombe" (page215). A aucun moment Dominique de VILLEPIN ou Jean-Louis GERGORIN nelui avaient demandé d'aller au delà de la mission qu'il tenait du ministère de la
Défense (page 227).

Il ne s'était pas rendu à la convocation de fin janvier que lui avait adresséeJean-Louis GERGORIN (page 216).

S'il s'est dit objet d 'une instrumentalisation, c'était en rapport avec lesmanières de faire de Jean-Louis GERGORIN qui s'arrangeait pour déposer desmots en son absence, faisant référence au "Mousquetaire", surnom donné entre euxà Dominique de VILLEPIN, et l'incitant à accélérer ses investigations. Il avaitrencontré Pierre BROCHAND pour lui demander de procéder à des criblages sanspour autant lui en dévoiler les motifs et l'affaire CLEARSTREAM.

L'expression "réseaux tangentiels" avait été employée par Jean-Louis
GERGORIN (page 231), ce que ce dernier a admis à l'audience se justifiant parl'apparition de liens entre Jean-Charles MARCHIANI et Bernard SQUARCINIdans les fichiers de transactions.

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Il a précisé que c'est Jean-Louis GERGORIN qui avait évoqué le nom deNicolas SARKOZY le 9 janvier 2004 (page 217). En mars, Imad LAHOUD luiavait donné des informations complémentaires. Le 15 mars 2004, dans sa noteOpération Reflux (2), il en avait fait état sans citer de noms. Il en avait informéPhilippe MARLAND. Imad LAHOUD lui avait remis un document concernant lestransactions qui faisait 10 ou 15 pages sur lesquels figuraient les noms de"BOCSA" et "de NAGY". Ce document avait été détruit en décembre 2005.

Concernant la garde à vue d'Imad LAHOUD, il avait fait un lien entrel'appel à Jean-Louis GERGORIN et celui de Dominique de VILLEPIN qui lui avaitdit qu'il fallait libérer la source, sans donner de nom, mais le Général avait compris(page 217). Au sujet de la réplique prêtée à Dominique de VILLEPIN, le GénéralRONDOT a confirmé les termes employés par Dominique de VILLEPIN au sujetdu gardé à vue : "qu'il soit libéré".

Le 19 juillet 2004, Dominique de VILLEPIN avait encore des doutes surla véracité des listings tandis qu'à cette même époque le Général RONDOT était"passé de questions à des quasi-certitudes". Il lui avait dit qu'il avait établi quatre
notes d'étapes internes. Il avait proposé "par réflexe" à Dominique de VILLEPIN
d'établir une note finale et de détruire ces notes d'étapes. Dominique de VILLEPINlui avait demandé de prendre contact avec la DST. Il ne paraissait pas très sûr deséléments que le général lui avait rapporté."Si nous apparaissons nous sautons",
cela avait effectivement été dit dans ces mêmes circonstances, il ne s'agit pas d'unanachronisme, Dominique de VILLEPIN ne lui avait pas parlé de l'entretien avecNicolas SARKOZY. Le Général RONDOT savait que Renaud VAN RUYMBEKEavait reçu des lettres mais l'idée que Jean-Louis GERGORIN fût le corbeau n'avait
jamais été abordée.

A aucun moment le Général RONDOT n'avait pu mettre en cause lasincérité de Jean-Louis GERGORIN, malgré l'expression de ses propres doutes.
En septembre 2004, Jean-Louis GERGORIN était encore apparu convaincu (page222). Pour sa part, ce que lui avait promis Imad LAHOUD en matière de luttecontre le terrorisme était "appétissant".La profusion des informations d'ImadLAHOUD l'avait surpris. Imad LAHOUD lui avait dit qu'il était possible d'injecterou de retirer des noms (page 236). Il ne s'était pas rapproché d'experts pours'assurer de la crédibilité de la fraude, qui était nulle aux yeux de MM CHOUET,
CAMUS, CLAIR et MONGIN.

A partir du 11 mai 2004, Michèle ALLIOT-MARIE et PhilippeMARLAND avaient su que Jean-Louis GERGORIN était le corbeau. Il n'avaitnéanmoins reçu aucune instruction particulière d'informer le juge (page 245).

Commentant les termes du verbatim du 29 juin 2004, il a indiqué que
l'affaire avait commencé à déraper médiatiquement dangereusement, qu'il estimaitnécessaire d'avertir le Président de la République et que si Dominique de
VILLEPIN était inquiet, lui-même l'était davantage (page 229).

Imad LAHOUD a reconnu avoir donné des informations au Général
RONDOT ainsi que des listings, et avoir procédé à une simulation à MEUDONen février 2004 puis, à la demande de Jean-Louis GERGORIN, en avril 2004 (page308 et 309).

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Philippe RONDOT a confirmé qu'Imad LAHOUD était la source et avaitfait des simulations. A cette occasion, des documents papiers était sortis del'ordinateur. Sur le moment il avait été impressionné, mais les doutes étaient
apparus plus tard (page 309).

Jean-Louis GERGORIN a confirmé la tentative du 12 février 2004 mais
déclarait avoir été absent en avril (page 310).

Imad LAHOUD a considéré que tout ce qui était dit à son sujet dans lesnotes RONDOT était exact.

Philippe RONDOT a maintenu qu'Imad LAHOUD lui avait
personnellement remis un CD-ROM en disant que c'était des archives, sousenveloppe scotchée, et qu'il l'avait finalement détruite sans en vérifier le
contenu.Le Général RONDOT confirmait la remise par Imad LAHOUDd'éléments nouveaux en mars 2004. Philippe RONDOT confirmait avoir reçud'Imad LAHOUD la liste des 895 comptes et la lettre du 3 mai.

Selon Imad LAHOUD il s'agissait des fichiers de Jean-Louis
GERGORIN.

Jean-Louis GERGORIN a soutenu l'inverse, rappelant que c'est ImadLAHOUD qui lui avait remis ses archives et que lui-même avait pour sa partconservé la clef biométrique. Il a souligné que toutes les données venaient d'Imad
LAHOUD.

Imad LAHOUD a reconnu que la liste des 895 comptes provenait de Jean-
Louis GERGORIN et la lettre du 3 mai venait de Denis ROBERT.

Imad LAHOUD a contesté avoir participé à la rédaction de cette lettre(page 311), tandis que Jean-Louis GERGORIN persistait à le mettre en cause.

Philippe RONDOT a contesté avoir demandé à Imad LAHOUD de traiter
Denis ROBERT.

Imad LAHOUD a pourtant maintenu avoir conservé des liens avec DenisROBERT à la demande du Général RONDOT auquel il donnait sur cette affairedes informations qui venaient toutes de Denis ROBERT.

Imad LAHOUD a maintenu avoir entendu Jean-Louis GERGORIN lui
rapporter que Dominique de VILLEPIN avait demander de "Balancer NS".

Philippe RONDOT a confirmé avoir entendu ces propos, tandis que Jean-
Louis GERGORIN contestait les avoir tenus.

Denis ROBERT ayant douté d'Imad LAHOUD, celui-ci l'avait amené àSuresnes, chez EADS. Denis ROBERT en était ressorti troublé. C'était tout un jeuà l'époque.

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Selon Imad LAHOUD, Denis ROBERT l'avait appelé pour lui annoncerque Nicolas SARKOZY figurait dans les listings. Imad LAHOUD en avait référé
à Jean-Louis GERGORIN qui avait demandé de convaincre Denis ROBERT (page312).

Il a reconnu l'utilisation du pseudonyme "Matrix Néo" et la destruction des
fichiers.

C'est Jean-Louis GERGORIN qui les avait donnés. Imad LAHOUDignorait s'il les avait fabriqués, en tout cas, il contestait l'avoir fait. Jean-Louis
GERGORIN l'avait prévenu de ses envois à Renaud VAN RUYMBEKE .

Imad LAHOUD a contesté avoir rédigé la lettre du 14 juin 2004.

Il a refusé d'indiquer le nom du haut fonctionnaire qui l'avait averti de laperquisition, se limitant à dire q'il ne s'agissait ni d'Yves BERTRAND, ni de
Bernard SQUARCINI, ni de Jean-Jacques MARTINI.

Imad LAHOUD a déclaré que c'était à 22 heures, le 25 mars 2004, àl'issue de sa garde à vue, que Jean-Louis GERGORIN lui avait appris queDominique de VILLEPIN était intervenu et que le Général RONDOT lui avait
confié "Dominique m'a dit tu ne le laches pas".

Dominique de VILLEPIN a maintenu ses déclarations en ajoutantqu'Imad LAHOUD avait été placé en garde à vue pour une affaire de faux et quela moindre des choses aurait été que l'on s'interrogeât à ce moment sur sa fiabilité.
Pour sa part, il n'avait pas demandé la libération d'Imad LAHOUD qu'il neconnaissait pas (page 315).

Selon Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD, la source unique d'undossier majeur, était en danger et il avait décidé d'en aviser Dominique deVILLEPIN (page 316).

Le Général RONDOT a indiqué que, le commissaire DYEVRE lui ayantannoncé qu'Imad LAHOUD s'était réclamé de lui, son premier réflexe avait été
d'appeler Jean-Louis GERGORIN (page 318) et que, lors de son propre appel,
Dominique de VILLEPIN avait semblé informé de la garde à vue d'Imad
LAHOUD (page 317).

Dominique de VILLEPIN a souligné que le Général RONDOT ne l'avait
pas rappelé après la levée de la garde à vue d' Imad LAHOUD. Il a admis qu'il
n'aurait eu aucune compétence pour demander la libération d'Imad LAHOUD (page320).

Jean-Louis GERGORIN n'avait jamais fait référence à des instructionsprésidentielles de s'adresser au juge (page 323). La poursuite des entretiens avecDominique de VILLEPIN se situaient dans la continuité du 9 janvier. Dominiquede VILLEPIN voulait être informé des avancées. Il ne pouvait pas dire au GénéralRONDOT qu'il y avait des instructions présidentielles (page 323).

Le Général RONDOT ne voyait aucun lien entre la destruction des notes"Opération Reflux" et la volonté de Dominique de VILLEPIN de ne pas apparaître(page 324). A ce sujet, Dominique de VILLEPIN expliquait que le général l'avaitinformé de l'existence de ces notes personnelles sur lesquelles il n'avait pas de

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commentaire à faire.

Le 19 juillet 2004, l'affaire étant devenue publique, le Général RONDOTavait mis Jean-Louis GERGORIN en garde sur les risques et sur le peu decrédibilité de la source (page 325).

Jean-Louis GERGORIN précisait qu'il avait discerné deux messages dansles propos du Général RONDOT consistant à dire qu'Imad LAHOUD est un "drôle
de type" et que tout ceci allait "mal finir", alors que lui vivait dans un mondedifférent, étant toujours convaincu. Il avait eu deux entretiens avec Dominique deVILLEPIN les 26 juillet et 27 août au cours desquels il avait évoqué les dernièresinformations en provenance d'HAKLUYT et lui parlant des 33.000 comptes. Enjuillet 2004, Jean-Louis GERGORIN avait reçu des infos importantesd'HAKLUYT sur Karel SCHMITT. Il en avait parlé à Dominique de VILLEPINqui lui avait dit de s'adresser au Général RONDOT (page 329).

Dominique de VILLEPIN a reconnu ne pas avoir donné à Jean-Louis
GERGORIN l'instruction d'arrêter(page 326).

Selon Philippe RONDOT, le fait qu'Imad LAHOUD ait été "grassementpayé" chez EADS était de nature à le dissuader de parler (D2571/17) (page 329).
Imad LAHOUD avait été une source partagée entre lui et Jean-Louis GERGORIN.
C'était la source initiale de Jean-Louis GERGORIN qui la lui avait transmise. Iln'avait jamais vu Imad LAHOUD remettre des documents à Jean-Louis
GERGORIN. Il n'a jamais vu Imad LAHOUD falsifier des listings. Le 19 juillet,
Dominique de VILLEPIN ne lui semblait pas persuadé de la fausseté des listings.
Dominique de VILLEPIN ne l'avait pas interrogé sur le corbeau, ce qui ne l'avaitpas étonné car Jean-Louis GERGORIN avait prétendu avoir agi sur les instructionsdu ministre (page 332).

Dominique de VILLEPIN a confirmé l'exactitude des termes de la lettre
du 12 janvier que lui a adressé le Général RONDOT (page 336).

Enfin, le Général RONDOT a expliqué qu'en accomplissant la mission,
il avait toujours eu en tête l'instruction du Président de la République, ce quiexpliquait qu'il avait voulu, devant les développements médiatiques de l'affaire,
"protéger le Président et Dominique de VILLEPIN" (page 337).

Renaud VAN RUYMBEKE (page 246) a confirmé avoir rencontré Jean-
Louis GERGORIN à deux reprises au domicile de Thibault de MONTBRIAL. Iln'a pas confirmé l'existence de réunions nocturnes avec Jean-Louis GERGORIN,
parlant à ce sujet de "pure fantasme". Si Jean-Louis GERGORIN avait été
"convaincu et convaincant", il était apparu perturbé par la mort de Jean-LucLAGARDERE et avait fait état des velléités d'achat des russes. Jean-Louis
GERGORIN lui était apparu sincère. Il ne le suspectait pas de mise en scène (page254), d'autant qu'il agissait à visage découvert (page 262). Il avait tenté deconvaincre Jean-Louis GERGORIN de déposer sous X . Il était inquiet et a refusé.
Finalement il avait laissé Jean-Louis GERGORIN et l'avocat régler la question dumode de transmission des informations.

Il avait douté à la réception du premier courrier. Il avait fait des
vérifications. Le courrier avait été versé au dossier et visible par tous, y comprisTHALES qui était partie civile. Il avait procédé par commission rogatoire

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internationale en toute transparence. Le parquet lui paraissait avoir adopté la mêmeprudence (page 263). Pour sa part, il n'avait jamais eu la certitude que les comptesétaient faux. La seule chose sûre c'est que Hugo CACRES GOMEZ n'était pasAlain GOMEZ. La commission rogatoire internationale avait été positive, lescomptes existaient bien, mais les personnes physiques ne pouvaient pas en êtretitulaires, CLEARSTREAM étant la banque des banques.

Le deuxième courrier avait été versé au dossier et transmis au procureur dela République. Il avait procédé par sondages sur les listes. Il avait questionné BNPPARIBAS qui lui avait indiqué que les comptes étaient exacts ainsi que les datesd'ouverture.

Les enquêteurs lui avaient dit que es noms "de NAGY" et "BOCSA"
correspondaient au patronyme du ministre de l'Intérieur ou à son père. Il ne s'étaitpas manifesté. Il n'a pas eu l'attention attirée sur le libellé "HOR" dont il n'avaitpas soupçonné qu'il pût correspondre à Brice HORTEFEUX (page 251).
Il n'avait appris que le 30 avril 2006 qu'une enquête parallèle avait été réalisée parle Général RONDOT. Dès le lendemain, il était allé voir son collègue pour luiparler de l'affaire.

Imad LAHOUD lui avait été présenté par Jean-Louis GERGORIN commeun informaticien de génie ayant décrypté le système CLEARSTREAM. Il n'avaitnul besoin de le savoir et de connaître son nom. Jean-Louis GERGORIN l'avait
indiqué de sa propre initiative (page 254) et lui avait parlé des antécédents d'ImadLAHOUD (page 262).

Il précisait qu'il n'avait jamais été convenu que Jean-Louis GERGORINlui envoie des courriers (page 251), qu'il avait eu des contacts ultérieurs avecThibault de MONTBRIAL, que Jean-Louis GERGORIN était un peu comme uninformateur et que lui-même n'était pas demandeur.

Les deux derniers envois (reçus les 20 août et 4 octobre 2004) ne leconcernaient pas (page 252) Il n'a pas travaillé sur les CD-ROM. Il évoquaitl'hypothèse que ces CD-ROM aient eu une autre provenance.

En octobre 2004, il était entré dans une phase de doute qui grandissait. Ilavait déjà les premiers retours du Luxembourg. Il n'avait jamais demandé à FlorianBOURGES de procéder à une analyse. Il ne l'avait vu qu'à deux reprises pendantcinq minutes. Jean-Louis GERGORIN ne voulait pas apparaître. La boîte "Matrix
Néo" ne lui disait rien.

Le nom DELMAS avait été cité par Jean-Louis GERGORIN. Il était enpremière ligne, à la croisée des chemins. Jean-Louis GERGORIN avait fait état desa surprise d'avoir découvert le nom d'un ancien collaborateur (page 257).

Il n'avait pas le souvenir d'avoir remis à Florian BOURGES des donnéesà étudier (page 260) Il ne se souvenait pas de l'avoir vu en juin 2004. Il était venu
spontanément ou sur incitation de Denis ROBERT (page 260). Ce que FlorianBOURGES lui apportait ne l'intéressait pas (Page 261).

Contrairement à ce qu'avait pu affirmer Imad LAHOUD dans son livre, iln'avait jamais eu de Blackberry ; cette affirmation était parfaitement fantaisiste(page 264).

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Cité à la requête de Denis ROBERT, Bernard BARRAULT a déclaré à
l'audience qu'il avait toujours essayé d'inciter Denis ROBERT à reprendre son

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activité d'écrivain. Il n'était pas parvenu à convaincre Denis ROBERT d'arrêterson enquête. Il mettait l'accent sur le professionnalisme et le "côté obsessionnel"deDenis ROBERT (page 355).

Mike TURNER livrait un témoignage sur l'intégrité et l'honnêteté deJean-Louis GERGORIN. Il faisait part des propos que lui tenait Jean-LouisGERGORIN au sujet des actions de Philippe DELMAS (pages 387 et 388).

Sorbas VON COESTER, consultant, faisait état de ses relations avec
Imad LAHOUD, consultant d'EADS comme lui, depuis mars 2003, et de laconnaissance qu'il avait eu au travers des révélations de ce dernier sur l'affaireALTRAN (pages 389 à 392).

Francis GUTMANN, ambassadeur de France, dressait un portrait élogieuxde son acien collaborateur, Jean-Louis GERGORIN, qu'il qualifiait de"profondément honnête , modeste et désintéressé" à l'époque où il oeuvrait au
CAP (pages 392 et 393).

Jean-Claude COUSSERAN, prédécesseur de Pierre BROCHAND à latête de la DGSE de 2000 à 2002 avait eu l'occasion de s'entretenir avec Jean-Louis
GERGORIN de l'affaire japonaise et des dénommés Gilbert FLAM et AlainCHOUET alors que cette affaire avait provoqué son départ de la DGSE. Sur le sensde l'Etat de Jean-Louis GERGORIN, le témoin déclarait: "il a servi l'Etat aussi
bien qu'on peut le faire" (page 396).

D) les conclusions au fond

1 - Les conclusions de la défense de Florian BOURGES

Les conseils de Florian BOURGES ont déposé des conclusions tendant àla relaxe de leur client et au débouté des parties civiles de l'ensemble de leursdemandes à son encontre.

Ils font valoir :

- qu'il ressort des déclarations concordantes de Denis ROBERT et de FlorianBOURGES que Denis ROBERT n'a reçu de Florian BOURGES que la base clientsde CLEARSTREAM, document accessible au public, ainsi que ce que DenisROBERT appelle les "comptes fantômes", ce qui exclut la transmission de fichiersde transactions ; qu'il ressort des déclarations constantes de Florian BOURGESque celui-ci a remis à Imad LAHOUD des fichiers clients, des fichiers detransactions ainsi que des mémos ; que l'ensemble de ces documents ne sont pasdes documents originaux mais des documents de travail de Florian BOURGES quià l'audience a précisé qu'il s'agissait d'extractions qu'il copiait chez ArthurAndersen et travaillait, les fichiers clients étaient eux-mêmes retravaillés par lui etétaient devenus sa propriété ; que de plus les informations extraites du systèmeCLEARSTREAM étant une chose incorporelle est insusceptible de détournementqui serait constitutif de l'abus de confiance visé aux poursuites ; qu'il n'est pas
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établi que les documents transmis à Denis ROBERT et Imad LAHOUD par FlorianBOURGES ait fait l'objet d'une remise préalable à ce dernier parCLEARSTREAM SERVICES, qu'il ait été missionné spécialement de rendre oude restituer les listings mis à sa disposition, ni qu'il ne lui avait été précisé d'enfaire un emploi déterminé ; qu'il n'est pas démontré que le fait que FlorianBOURGES ait remis à Denis ROBERT et Imad LAHOUD ses propres documentsde travail ait fait obstacle à ce que les sociétés CLEARSTREAM BANKING etCLEARSTREAM INTERNATIONAL exercent leurs droits sur les fichiers
CLEARSTREAM ; que la preuve d'une demande émanant des sociétésCLEARSTREAM à l'adresse de Florian BOURGES de restituer ses documents de
travail soi-disant détournés n'a pas été rapportée ;

- qu'aucune soustraction frauduleuse au préjudice de BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES ne peut être reprochée à Florian BOURGES celui-ci étant l'auteur desdocument transmis ; qu'il s'agit de choses incorporelles insusceptibles de fairel'objet d'une soustraction frauduleuse ni d'un abus de confiance au préjudice dela société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES qui n'en a jamais été dépossédée ;
qu'en conservant ses documents de travail Florian BOURGES a agi de bonne foidans la mesure où son contrat de travail le liant à la société BARBIER FRINAULT
& ASSOCIES prévoyait expressément que la convention collective descommissaires aux comptes s'appliquait et que le salarié devait veiller à respecterles règles propres de cette profession, notamment l'article 66 du décret n°69-810applicable à l'époque des faits édictant une obligation de conservation desdocuments établis par le commissaire aux compte relatifs à la personne contrôlée ;
qu'il n'est pas démontré que Florian BOURGES ait été destinataire desinstructions relatives à la conservation des documents constitués dans le cadre de
la mission réalisée chez CLEARSTREAM ; que dans ces conditions les élémentsintentionnels des infractions de vol ou d'abus de confiance font défaut d'autant
qu'à l'époque de leur commission, il avait été relevé, concernant Florian
BOURGES, un manque de maturité ; que, de surcroît, il ne saurait être reprochéà Florian BOURGES une quelconque violation de la clause de confidentialitécontenue dans son contrat de travail dans la mesure où Imad LAHOUD s'était
présenté à lui comme un agent de la DGSE, organisme officiel qui entrait dans lesexceptions énoncées à l'article 6 du dit contrat.
Ils soulignent par ailleurs :

- que le premier envoi reçu par le juge Renaud VAN RUYMBEKE comprenant unextrait de tableau de comptes clients CLEARSTREAM qui ne contient que deuxnuméros de comptes dont le libellé a été modifié au nom de Pierre MARTINEZ,
et présents dans les documents de travail de Florian BOURGES, compteségalement présents dans l'envoi MONNOT mais sous le libellé "MARTINEZ GILY ASSOCIADOS AVB SA", la falsification de telles données auraient très bien
pu être réalisée à partir de la liste "Costumers in account number order" disponible
sur le site internet de CLEARSTREAM ;
- que de la même façon, le listing inclus dans l'envoi du 14 juin, créé de toutespièces à partir des fichiers CLEARSTREAM, aurait pu être réalisé à partir deslistes publiées sur internet, d'autant que l'expertise a établi que les "donnéesBourges" ne contenaient pas de fichiers mentionnant la clôture de 895 comptescomparable au fichier envoyé anonymement sous forme papier le 14 juin 2004 ;
- que l'instruction a montré que la liste des clients CLEARSTREAM reçue par lejuge Renaud VAN RUYMBEKE le 20 août 2004 sous CD-ROM est un fauxobtenu par la modification des dossiers de travail de Florian BOURGES alorsmême que les code list étaient accessibles jusqu'en 2005 sur internet ;
- que Florian BOURGES n'est en rien responsable des falsifications constatées
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dans les documents et fichiers de transactions parvenues au magistrat le 4 octobre2004, que son intervention auprès de Renaud VAN RUYMBEKE à la suite de laréception des deux premiers envois et les conclusions contenues dans les rapportsadressés au magistrat auraient dû mettre fin à cette affaire.

Ils rappellent que Florian BOURGES a transigé avec la société ERNST &
YOUNG le 3 mai 2004, que cette transaction a mis un terme au litige entre FlorianBOURGES et la société ERNST & YOUNG et que, si BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES et ARTHUR ANDERSEN Luxembourg sont liées au réseau ARTHURANDERSEN par un engagement intitulé "Inter-firm Agreement", elles n'en
demeurent pas moins juridiquement indépendantes et que seule ARTHURANDERSEN Luxembourg était liée à CLEARSTREAM BANKING pourl'exécution de la mission d'audit.

Ils indiquent enfin :

- que BARBIER FRINAULT & ASSOCIES est malvenue à prétendre avoir subiune atteinte à l'image et à la notoriété qu'elle a elle-même contribué à créer ; qu'eneffet, Florian BOURGES n'a jamais fait mention ni dans sa déposition de témoin,
ni dans son interrogatoire de première comparution qu'il faisait partie deBARBIER FRINAULT & ASSOCIES, que les ouvrages de Denis ROBERT nefont nullement référence à un auditeur de BARBIER FRINAULT & ASSOCIES
et que la presse n'a jamais mentionné le nom de BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES, ni même affirmé que le collaborateur indélicat faisait partie du bureaufrançais d'ARTHUR ANDERSEN ;
- que la haute confidentialité revendiquée par CLEARSTREAM BANKING desfichiers informatiques mentionnant notamment le nom de clients de
CLEARSTREAM est en contradiction avec la publicité des listes telle qu'elle étaitpar ailleurs admise dans les médias par les responsables de cette même société.
2 - Les conclusions de la défense de Denis ROBERT

Dans ses conclusions déposées à l'audience du 22 octobre 2009, la défensede Denis ROBERT sollicite la relaxe de son client sur l'application des articles 11de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et des articles 6et 10 de la CEDH.

Il est soutenu:

- que Denis ROBERT a acquis et utilisé les informations de Florian BOURGESdans le cadre de son travail d'enquête journalistique sur la société
CLEARSTREAM à la suite de ses rencontres avec Ernest BACKES ancien
dirigeant de la chambre de compensation et de 2 années d'enquête qui ont suivi aucours desquelles il a publié en 2001 "REVELATION$", ouvrage d'investigationdans lequel il avait mis à jour le fonctionnement et les pratiques de la chambre decompensation et publié des documents qui attestaient de ses découvertesnotamment sous la forme de listings ;
- que cet ouvrage a été à l'origine d'une mission parlementaire française, qu'il aprovoqué l'ouverture d'une enquête pénale à Luxembourg, que Denis ROBERTavait obtenu à cette occasion le soutien de magistrats européens spécialisés dans
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la lutte contre la délinquance financière internationale, qu'en février 2002, il apublié "La Boîte Noire" où il évoquait un informaticien, dénommé Jonas, qui luiavait proposé le 14 octobre 2001 le listing des clients CLEARSTREAM actualiséau mois d'octobre 2001 et dont on trouvait un extrait dans l'ouvrage à la fin duquell'auteur adressait ses remerciements à Jonathan GANTRY, qu'en février 2003, aété diffusé sur Canal + un film documentaire issu de "La Boîte Noire", "L'affaire
CLEARSTREAM racontée à un ouvrier de chez DAEWOO" à la fin duquel DenisROBERT a produit des extraits de listings et de fichiers d'erreurs de transaction,
documents également transmis par Florian BOURGES ;

- que les documents fournis par Florian BOURGES ont été évoqués et publiés dansles livres et films de Denis ROBERT comme preuve irréfutable de l'existence decomptes dissimulés, hébergés dans des paradis fiscaux ;
- que c'est également dans le cadre de son enquête journalistique que DenisROBERT a transmis les listings authentiques, non contestés par CLEARSTREAM,
à la faveur d'une rencontre provoquée par Eric MERLEN en février 2003 avecImad LAHOUD qui l'assurait pouvoir, du fait de son expérience de trader, l'aider
dans son enquête, notamment eu égard aux procès en cours intentés parCLEARSTREAM et aux difficultés informatiques qu'il rencontrait, et, de surcroît,
être en mesure de hacker le système informatique de CLEARSTREAM, ImadLAHOUD ayant à ce sujet accepté le principe que la scène soit filmée dans le cadred'un film que Denis ROBERT s'apprêtait à réaliser; que Denis ROBERT a parailleurs transmis ses documents à plus de 50 personnes, diffusant ainsi largementles informations en sa possession ;
- qu'il est ainsi parfaitement établi que Denis ROBERT a détenu ces informationsdans le cadre exclusif de l'exercice de son activité de journalisme d'investigationparticipant à un vif débat sur le blanchiment international, sujet d'intérêt général ;
- que la jurisprudence de la CEDH a posé le principe que malgré la légitimité desintérêts à protéger lors de poursuites engagées contre des journalistes du chef derecel, la nécessité de telles poursuites fait défaut dès lors que le journaliste a agi debonne foi, dans le souci de fournir des informations exactes et dignes de créditdans le respect de la déontologie journalistique ;
- que la transmission des données considérée à l'époque où elle est intervenue, soiten mars 2003, s'est toujours inscrite dans un souci d'information ou de poursuitede l'enquête, les motivations propres d'Imad LAHOUD étant à cet égardindifférentes dès lors qu'elles ne sont pas illicites, s'agissant de prouver soninnocence dans le cadre de la procédure d'instruction menée à son encontre, qu'ila été de surcroît établi que cette transmission avait abouti entre les mains de laDGSE, qu'il n'est nullement démontré que les fichiers remis à Imad LAHOUD parDenis ROBERT aient été à l'origine de la falsifications intervenues par la suite,
que cette filiation est exclue en ce qui concerne le dernier envoi à Renaud VANRUYMBEKE en octobre 2004 ; qu'il ne saurait dans ces circonstances être retenuà l'encontre de Denis ROBERT un quelconque manquement à ses devoirs etresponsabilités de journaliste qui le priverait du bénéfice de l'article 10 de laCEDH.
Il est par ailleurs soutenu que Denis ROBERT a acquis et utilisé cesinformations pour les besoins de sa défense dans le cadre des nombreux procèsdont il a fait l'objet, qu'il a produit "La Boîte Noire" dans les procès de

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diffamation de même que le film "l'affaire CLEARSTREAM racontée à un ouvrierde chez DAEWOO", et que l'intervention d' Imad LAHOUD répondait pour DenisROBERT à un besoin de conseils techniques dans l'exercice de sa défense pourles procès engagés ainsi qu'en prévision de ceux qui risquaient d'être intentés sicelui-ci poursuivait son enquête.

Il est invoqué la fin de non-recevoir aux poursuites du chef de recel tiréede la production ou de la détention par le journaliste poursuivi du chef dediffamation des pièces propres à établir la vérité des faits allégués, Denis ROBERTne pouvant dès lors être poursuivi du chef de recel eu égard aux documents obtenusde Florian BOURGES alors qu'est retenu comme élément intentionnel del'infraction l'intérêt personnel tiré de la volonté du journaliste de se défendre enjustice dans le cadre de procès en diffamation, ce qui correspond précisément auxmotifs retenus dans l'ordonnance de renvoi.

3 - Les conclusions de la défense de Dominique de VILLEPIN

Les conseils de Dominique de VILLEPIN ont déposé des conclusions auxtermes desquelles ils sollicitent la relaxe de ce dernier de l'ensemble des chefsvisés aux poursuites.

Ils considèrent :

- que les faits de complicité de dénonciation calomnieuse dont le tribunalest saisi se limitent à l'instruction de saisir un juge d'instruction telle qu'ellerésulte des déclarations de Jean-Louis GERGORIN qualifiées néanmoins par lesconcluants de "confuses, évolutives et contradictoires" mais dont il ressort en
définitive que le seul souhait qu'aurait pu exprimer Dominique de VILLEPINselon Jean-Louis GERGORIN aurait été de saisir un juge, réflexe légitime d'unministre à l'égard d'une personne sur laquelle il n'a aucune autorité, et non detransmettre des documents listings ou CD-ROM à un juge d'instruction ;
- que les notes extraites du journal de marche du Général RONDOTrecèlent des anachronismes comme par exemple l'apparition des noms "de NAGY"
et "BOCSA" et des "comptes couplés" apparus, selon le Général RONDOT, enmars et non en janvier 2004 ; qu'en ce qui concerne l'existence de réunions entreJean-Louis GERGORIN et Dominique de VILLEPIN, leur mention dans les notesRONDOT résulte exclusivement des propos de Jean-Louis GERGORIN lui-même,
que rapporte le général; que celui-ci aurait persisté à croire jusqu'en juillet 2004,
tout en nourrissant, au long de l'été 2004, des doutes sur l'authenticité des listingsqui pouvaient à tout le moins receler une part de vérité ;
-que ce n'est qu'en octobre qu'il avait acquis la quasi-certitude que ceslistings n'étaient pas authentiques ;
- qu'il n'est pas démontré que Dominique de VILLEPIN ait euconnaissance de la fausseté des listings en avril 2004 ;
- que les listings en eux-mêmes sont dénués de valeur juridique, ne faisantqu'énumérer des noms de personnes physiques ou morales pouvant avoir descomptes dans un organisme financier étranger, la détention de comptes et de fondsà l'étranger n'étant pas en soi illégale et ne constituant pas une infraction pénale;
que leur seul envoi ne saurait constituer une dénonciation calomnieuse ;
- que la manière de procéder pour dénoncer n'est pas une preuve de lamauvaise foi ;
- que rien ne permet d'établir que Dominique de VILLEPIN ait eu à un
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moment quelconque avant le mois de juillet 2004 des doutes, et encore moins descertitudes, tels qu'ils auraient dû le conduire à remettre en cause l'authenticité deslistings ; que de simples doutes sur l'authenticité des listings, nés au mois dejuillet, ne permettaient pas d'affirmer la fausseté ;

- que tous les enquêteurs pouvaient être dépourvus de certitude et croireencore à la véracité des listings, comme le Général RONDOT, jusqu'en juillet2004 ;
-que Jean-Louis GERGORIN n'a jamais mentionné à Dominique deVILLEPIN que les listings provenaient d'une pénétration informatiquefrauduleuse ; que ce dernier savait uniquement qu'il s'agissait de documents bruts,
originaux provenant de la chambre de compensation et dont rien ne permettait desuspecter l'authenticité ;
- que la certitude du montage se situe bien après juillet 2004 ;
- que les seules déclarations de Jean-Louis GERGORIN ne sauraient suffireà établir la réalité des entretiens allégués en mars et avril 2004 et des instructionsprétendues ; que la simple "incitation", voire "suggestion"émanant de Dominiquede VILLEPIN, telle qu'alléguée par Jean-Louis GERGORIN, ne saurait constituerl'instruction que suppose l'acte de complicité tel que poursuivi et qu'en toutehypothèse elle ne pouvait que se limiter au premier envoi du 3 mai 2004 qui necomprenait aucun inventaire ; que l'instruction d'envoyer les listings et le CDROM au juge d'instruction ne saurait à elle seule caractériser l'acte de complicitédans la mesure où de tels documents ne contenaient aucun fait susceptible d'êtresanctionné ;
- que la bonne foi de Dominique de VILLEPIN doit s'apprécier en avril2004, qu'elle est établie par les déclarations du Général RONDOT; que le parqueténonçait, le 13 juillet 2004, le caractère exacte des relations entre
CLEARSTREAM et les banques française BNP PARIAS (D826/3) ;
- qu'en matière d'infraction volontaire, l'acte de complicité suppose un actepositif et que l'abstention n'est punissable qu'en matière d'infraction involontaireou d'infractions le prévoyant expressément; que les envois d' août et octobre 2004ne contiennent aucune imputation pénale mais de simples listings informels sanscommentaires calomnieux; que leur envoi est intervenu alors que la premièredénonciation mettant en cause les personnes était déjà réalisée ; que la constructiondu parquet est hors saisine et ne résiste pas à l'examen ;
- que les préventions de complicité d'usage de faux et de recel de vol etd'abus de confiance ne sont pas davantage établies, faute de pouvoir démontrer laconnaissance de la fausseté des listings, une détention matérielle des documentset l'existence d'un profit en résultant pour son auteur.
4 - Les conclusions de la défense d'Imad LAHOUD

Le conseil d'Imad LAHOUD a déposé des conclusions tendant à la relaxede son client.

Il fait valoir:

€ sur les délits de faux:

- que les résultats des expertises des ordinateurs utilisés par ImadLAHOUD n'indiquent pas que celui-ci est l'auteur des faux, les traces retrouvéesfigurant uniquement dans les clusters non alloués, faute d'avoir été en mesure dedéterminer la date de création, la date de modification ou l'auteur des mentions ;
- que les fichiers détenus par Imad LAHOUD ont par ailleurs fait l'objetd'une large diffusion, d'autant qu'ils étaient, selon Yves BAGUET, Directeur
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informatique de CLEARSTREAM, pour les comptes clients l'objet d'un accèstotalement libre au début des années 2000 ;

-que les fichiers falsifiés ont été retrouvés sur la clef USB de Jean-LouisGERGORIN ;
- que les témoignages d'Eric MERLEN et de l'officier traitant Antoine nesont pas probants ;
- qu'il résulte des propos de Florian BOURGES qu'Imad LAHOUD n'a paspu transférer l'intégralité des documents qui lui auraient été confiés et que FlorianBOURGES était convaincu de l'existence d'une autre source ayant sorti les fichiersd'ARTHUR ANDERSEN ;
- que Denis ROBERT a reconnu pour sa part avoir donné les fichiers à demultiples journalistes ;
- que le témoignage de Marc DEPARIS est indirect qu'il est démenti parcelui de Philippe DELMAS et de Monsieur LAFLANDRE; que Renaud VANRUYMBEKE a indiqué au tribunal ne pas avoir vu les 4 colonnes ajoutées parFlorian BOURGES sur les listings et que le Général RONDOT n'a jamais vu ImadLAHOUD falsifier les listings ;
- que les noms apparaissant dans les listings sont pour la plupart desennemis ou des proches de Jean-Louis GERGORIN qu'Imad LAHOUD ne pouvaitpas connaître ;
- que les aveux passés par Imad LAHOUD à l'audience sur l'insertion desnoms de NAGY et de BOCSA ne constituent que l'établissement d'un faux quin'est pas concerné par les usages poursuivis et la dénonciation calomnieuse.
€ sur l'usage de faux:

- que ce délit constitue un concours idéal d'infraction avec ladénonciation calomnieuse effectuée auprès de Général RONDOT et Renaud VANRUYMBEKE.
€ sur la dénonciation calomnieuse:

- que le CROS est dénué de tout pouvoir propre et de toute délégation designature, qu'il n'avait aucune compétence en matière judiciaire, qu'il a admis àl'audience ne pas être un fonctionnaire d'autorité, mais un conseiller ; que lafonction de CROS a été supprimée juste après son départ à la retraite ;
- que sur la période de 2003 Imad LAHOUD n'a remis aucun document auGénéral RONDOT; qu'il n'a rédigé qu'un document, lequel est dénué de toutedénonciation ;
- qu'en dehors de la période de prévention il n'a rédigé que des documentsà la demande du Général RONDOT et ne comportant aucune dénonciation ;
- que, sur la période, le Général RONDOT a détruit un très grand nombrede pièces ;
- que le Général RONDOT ne constitue pas une autorité de poursuite, etn'est pas caractérisée la volonté d'atteindre au delà de sa personne l'autoritécompétente ;
- qu'aucun élément matériel ne permet d'indiquer que la destination etl'usage des documents envoyés au juge Renaud VAN RUYMBEKE fussentconnus d'Imad LAHOUD ; que seules les accusations de Jean-Louis GERGORINimpliquent Imad LAHOUD dans les dénonciations faites à Renaud VAN
RUYMBEKE.
€ sur le délit de recel:

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- qu'Imad LAHOUD ne pouvait avoir connaissance de la provenancefrauduleuse des documents remis par Denis ROBERT, alors même que cetteremise avait été faite sur autorisation expresse et préalable de la DGSE ;
- que la nature des documents remis à Imad LAHOUD par FlorianBOURGES ne peut être déterminée.
5 - Les conclusions de la défense de Jean-Louis GERGORIN

Les conseils de Jean-Louis GERGORIN ont déposé des conclusions viséesà l'audience du 22 octobre 2009 aux termes desquelles ils demandent à titreprincipal :

€ au visa des articles 64 et 65 de la Constitution, de constater, au vu des
déclarations de Monsieur Nicolas SARKOZY, Président de la République et partiecivile dans la présente procédure, faites, postérieurement à l'ouverture des débats,
le 23 septembre 2009, dans une interview retransmise par les deux principaleschaînes françaises de télévision au cours de laquelle, s'agissant de l'affaireCLEARSTREAM, celui-ci a déclaré "deux juges indépendants ont estimé que lescoupables devaient être traduits devant le tribunal correctionnel", propos précisés
par leur auteur, selon le magazine l'Express en date du 1er octobre 2009,devant les
dirigeants de l'UMP le 28 septembre en ces termes : "... il y a quand même deux
personnes [Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD -note du journaliste] quiont avoué et qui sont donc coupables! Après il faut savoir qui a tiré les ficelles"
et relayés, approuvés et commentés par différents responsables de la majoritéprésidentielle et ministres du gouvernement, que Jean-Louis GERGORIN est endroit de douter du caractère équitable du procès qui lui est fait ;

€ au visa de l'article préliminaire et de l'article 802 du code de procédurepénale et l'article 6 alinéa 1 de la CEDH, de constater que seul le prononcé de lanullité de la procédure est proportionné à la gravité des atteintes aux droits de ladéfense de Jean-Louis GERGORIN.

Au fond, ils sollicitent la relaxe de leur client et le débouté des partiesciviles. Ils soutiennent :

-sur le délit de faux:

€ que la démonstration de la falsification reprochée à Jean-Louis
GERGORIN repose entièrement sur les déclarations d'Imad LAHOUD, telles querapportées par le Général RONDOT, qui paraissent dépourvues de pertinence, ced'autant que les dernières déclarations faites à l'audience par Imad LAHOUD,
limitées à la reconnaissance de la falsification d'un unique document faite à lademande de Jean-Louis GERGORIN dans le bureau d'Yves BERTRAND, sont
relatives à une seule transaction attribuée faussement à Nicolas SARKOZY et quine se retrouve pas parmi les documents incriminés ;

€ qu'aucun indice matériel et a fortiori aucune preuve de l'implication deJean-Louis GERGORIN ne figure dans les pièces de la procédure, pas un seul desdocuments en cause n'ayant été retrouvé sur les ordinateurs du prévenu.

-sur le délit d'usage de faux:

€ qu'en l'espèce, les dénonciations calomnieuses par ailleurs poursuiviessupposent l'usage d'un faux pour être matériellement consommées, qu'elles n'ontexisté que par l'usage de ces faux documents ;

€ qu'enfin la poursuite du faux permet déjà à elle seule de réparerl'éventuelle atteinte "à l'intégrité et au crédit d'un document ayant un effet

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juridique".

-sur le délit de dénonciation calomnieuse:

€ que la mauvaise foi, élément constitutif du délit de dénonciationcalomnieuse, ne saurait s'induire de la seule fausseté du fait dénoncé; que fauted'élément établissant la participation de Jean-Louis GERGORIN à la falsificationdes listings, l'affirmation contenue dans l'ordonnance de renvoi selon laquelleJean-Louis GERGORIN "n'a pas pu croire sincèrement à la réalité des faitsdénoncés qui concernaient de nombreuses personnes gravitant dans son entouragepersonnel et professionnel immédiat (...)" est manifestement inopérante à
caractériser le "mensonge intentionnellement trompeur" nécessaire à
l'incrimination de la dénonciation calomnieuse ; que la mauvaise foi étantétrangère à l'intention de nuire, l'affirmation dans l'ordonnance de renvoi selonlaquelle " Jean-Louis GERGORIN a agi de mauvaise foi , avec l'évidente intentionde nuire (...)" est non seulement gravement erronée mais au surplus parfaitement
inopérante ;

€ que l'information initiale du Général RONDOT par Jean-LouisGERGORIN sous forme orale, intervenue au cours d'un entretien situé le 1er
octobre 2003, est exclue de la poursuite dans la mesure où sont seuls visés commesupports de la dénonciation les "documents, listings de comptes et de fichiers detransactions de la société CLEARSTREAM, remis au général RONDOT";

€ que parmi les documents remis par Jean-Louis GERGORIN au GénéralRONDOT les 5 et 23 novembre 2003, tels que compris dans la saisine, seule lanote dite "WSP" constitue une dénonciation, mais cette dénonciation ayant étéprécédée d'une demande formulée par le général ne saurait revêtir de caractèrespontané condition de l'existence du délit de dénonciation calomnieuse ;

€ que Jean-Louis GERGORIN a pu croire en la véracité des informationsque lui fournissait sa source en la personne d'Imad LAHOUD et dont il persisté àsolliciter l'authentification par les services du ministère de la Défense qui auraitpermis d'établir la fausseté des faits dénoncés ;

€ que Jean-Louis GERGORIN a rencontré le juge Renaud VANRUYMBEKE à compter de la mi-avril 2004 sur la forte suggestion de Dominiquede VILLEPIN, alors ministre de l'Intérieur, de "voir informer ou informer un juge"
sur "instruction du Président de la République", qu'il a fait part au magistrat desinformations transmises par sa source, Imad LAHOUD (dont il n'a caché nil'identité ni le passé judiciaire) et susceptibles d'apporter un éclairage àl'instruction du dossier des Frégates, cela en dépit de la mise en garde del'intéressé par le Général RONDOT le 14 avril mais inopérante dans la mesure oùil n'établissait en rien la fausseté des listings, et alors que Jean-Louis GERGORIN,
agissant à visage découvert, est apparu au magistrat "manifestement convaincu et
convaincant" en portant à la connaissance de ce dernier des informationsvérifiables prenant ainsi le risque de la découverte de la manipulation ;

€ que la dénonciation du 3 mai 2004 ne recouvre aucun caractère spontanédès lors que le choix de verser dans la procédure des Frégates par la voie d'unelettre anonyme des éléments communiqués oralement par Jean-Louis GERGORINa été le fruit d'un consensus entre le magistrat et le prévenu, que les informationscontenues dans cette lettre anonyme correspondent exactement à celles qui ont étéexposées au magistrat en avril et que le juge Renaud VAN RUYMBEKE a parailleurs formulé à plusieurs reprises le souhait que Jean-Louis GERGORIN luifasse parvenir les informations portées à sa connaissance ;

€ que l'envoi du 14 juin 2004 a été le résultat d'échanges entre Jean-LouisGERGORIN et le magistrat par l'intermédiaire de Maître de MONTBRIAL qui a

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répercuté les attentes du magistrat auprès de son client; qu'en outre, le magistrata confirmé à la barre que son enquête sur la base des premiers éléments, loin derévéler, à ce stade, la fausseté des faits dénoncés, semblait tout au contraire leur
apporter un certain crédit ;

€ que l'envoi du 26 août n'imputant aucun fait à personne ne sauraitconstituer une dénonciation, que de surcroît c'est à cette époque que Jean-LouisGERGORIN recevait de la part du consultant HAKLUYT des éléments confirmantles informations données par Imad LAHOUD, en particulier sur les mafieux
russes ;

€ que de la même façon, selon Jean-Louis GERGORIN, le dernier envoidu 4 octobre s'inscrivait dans le droit fil du précédent et consistait en l'envoid'informations complémentaires au juge Van RUYMBEKE qu'il a sollicitéesauprès d'Imad LAHOUD, la provenance matérielle de ces documents ayant été àcet égard établie par l'expertise.

- sur le délit de recel:
€ que Jean-Louis GERGORIN ignorait jusqu'en septembre 2005l'existence de Florian BOURGES, que les documents remis au Général RONDOTpar Jean-Louis GERGORIN, quelque soit leur forme, sont totalement distincts desdocuments et données prélevées dans la base informatique CLEARSTREAM parFlorian BOURGES ; que le seul fait que ces données authentiquesCLEARSTREAM aient pu lui inspirer la manipulation à laquelle il s'est ensuitelivré est inopérant à fonder le délit de recel à l'encontre des personnes ayant détenules listings, tableaux et informations fausses, fruit de la falsification ;

€ que les données portées sur le premier envoi au juge Renaud VANRUYMBEKE sont toutes inexactes, qu'il s'agit de pures créations, de même lessix mentions portées sur la deuxième lettre, correspondent à des informationsfrauduleusement modifiées en référence aux données authentiques ou créées pourla circonstance (date d'ouverture ou de fermeture), que la conservation des donnéesexactes pour le numéro de compte et le libellé mais avec mention d'une date declôture inexacte ne saurait caractériser à elle seule le délit de recel dans la mesure
où elles ne peuvent être dissociées des données auxquelles elles sont rattachéespour constituer une information complète et authentique dans la base informatiqueCLEARSTREAM ;

€ que c'est l'ensemble du fichier envoyé le 20 août 2004 qui a subi unefalsification ligne par ligne, par la modification de la date dans la colonne "LASTUPDATE" ;

€ que d'une façon plus générale, les listings et informations communiquéespar Jean-Louis GERGORIN au Général RONDOT ou au juge VAN RUYMBEKEsoit étaient falsifiées, soit n'existaient pas en ce qu'il ne correspondaient en rienà la réalité des comptes ouverts et détenus au sein de la chambre de compensation ;

€ que les listings et informations détenus par Jean-Louis GERGORIN nepouvaient provenir de l'abus de confiance ni du vol reprochés à FlorianBOURGES, en ce qu'ils leur sont matériellement et intellectuellement totalementétrangers ;

€ qu'il ne saurait dès lors être imputé à Jean-Louis GERGORIN unquelconque délit de recel de vol ou d'abus de confiance.

SUR QUOI, LE TRIBUNAL

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I -Sur l'action publique

A) Sur les conclusions in limine litis sur l'action publique :

1 - Sur la nullité de l'ordonnance de renvoi soutenue par la défense de DenisROBERT :

Attendu qu'à l'audience du 21 septembre 2009, le conseil de Denis ROBERT adéposé, avant toute défense au fond, des conclusions tendant à voir prononcer lanullité partielle de l'ordonnance de renvoi en date du 17 novembre 2008 sur lefondement des dispositions des articles 11 de la Déclaration des Droits del'Homme et du Citoyen de 1789, les articles 6 et 10 de la Convention Européennedes Droits de l'Homme, l'article préliminaire et les articles 802 et 459 du code de
procédure pénale ;

Attendu qu'à l'audience de plaidoirie au fond du 22 octobre 2009, l'avocat deDenis ROBERT a déclaré se désister de ses conclusions ; qu'il convient de lui endonner acte ;

2 - Sur les exceptions soulevées par la défense de Florian BOURGES

Attendu que les conseils de Florian BOURGES dénoncent ce qu'ils considèrentcomme une incohérence de l'ordonnance de renvoi qui poursuit FlorianBOURGES pour avoir détourné au préjudice des sociétés CLEARSTREAM
BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL des documents qu'il lui estpar ailleurs reproché d'avoir frauduleusement soustraits à la société BARBIERFRINAULT & ASSOCIES, qu'au surplus les termes de l'ordonnance de renvoi nepermettent pas la poursuite de faits commis à l'étranger et notamment auLuxembourg, ce qui serait le cas des faits commis au préjudice de
CLEARSTREAM BANKING et que, de surcroît, une procédure serait
actuellement pendante devant la juridiction luxembourgeoise du chef de violationdu secret professionnel luxembourgeois, ce qui empêcherait, en application de larègle "non bis in idem", que de nouvelles poursuites soient engagées en France ;

Attendu qu'il ne saurait être relevé d'incohérence dans les termes de l'ordonnancede renvoi entre la qualification d'abus de confiance au préjudice deCLEARSTREAM et de vol au préjudice de BARBIER FRINAULT & ASSOCIES,
les faits ainsi qualifiés étant distincts tant par leur objet que par le cadre juridiquedans lequel ils s'inscrivent, qu'il s'agit vis-à-vis de CLEARSTREAM de laviolation de la confidentialité des données détenues pour les seuls besoins de lamission d'audit, tandis que vis-à-vis de l'employeur, il s'agit de l'atteinte portéeà la propriété des documents de travail ;

Attendu qu'il n'est pas rapporté la preuve de l'existence d'une condamnationdéfinitive de Florian BOURGES par la justice luxembourgeoise pour des faitsidentiques à ceux faits poursuivis devant la juridiction nationale française ; qu'ils'ensuit que la règle non bis in idem ne saurait trouver à s'appliquer en l'espèce ;

Attendu que les faits poursuivis sous la qualification d'abus de confiance aupréjudice de CLEARSTREAM se situent à Luxembourg, Neuilly-sur-Seine,

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Courbevoie et Paris; que dès lors le tribunal de grande instance de Paris ne peutque retenir sa compétence pour connaître de ces faits dont l'essentiel se déroule surle territoire national, les détournements incriminés étant constitués par laconservation et l'utilisation qui a été faite sur le territoire français de l'objet dudélit poursuivi ;

Attendu qu'en conséquence, les conclusions de la défense de Florian BOURGESseront rejetées ;

3 - Sur les conclusions déposées par la défense de Dominique de VILLEPIN

Attendu qu'il est demandé au tribunal d'annuler le procès-verbal d'interrogatoirede première comparution d'Imad LAHOUD du 9 décembre 2008 et le procès-
verbal d'interrogatoire de Jean-Louis GERGORIN du 23 juin 2009, tous deux issusde la procédure n°0701296013 versée au dossier de la présente affaire, le 8septembre 2009, par le procureur de la République ;

Attendu que, selon la défense de Dominique de VILLEPIN, l'annulations'imposerait au motif que le magistrat instructeur en charge de cette procéduredistincte consécutive à une plainte de la société EADS du chef de faux, usage defaux escroquerie et abus de confiance, a outrepassé les limites de sa saisine "inrem" en questionnant les mis en examen sur les faits dont le tribunal est saisidepuis l'ordonnance de renvoi du 17 novembre 2008 rendue dans le présentdossier ;

Attendu qu'il ressort des débats que le procureur de la République a pris l'initiativede verser la copie intégrale des pièces de la procédure d'information ouverte sousle n°0701296013 et contenant notamment les procès verbaux d'interrogatoire depremière comparution d'Imad LAHOUD en date du 9 décembre 2008 etd'interrogatoire de Jean-Louis GERGORIN en date du 23 juin 2009 ;

Attendu que les pièces contestées sont issues d'une procédure d'informationdistincte, toujours en cours et à laquelle Dominique de VILLEPIN n'est pas partie ;
qu'il n'est nullement démontré que, dans de telles circonstances, l'irrégularitéalléguée, à la supposer établie, ait été de nature à lui causer personnellement grief ;
qu'il ne saurait dès lors être fait droit à ce moyen de nullité ;

Attendu que l'exception est également fondée sur les dispositions de l'article 6-1de la Convention Européenne des Droits de l'Homme édictant le principe del'égalité des armes entre les parties à la procédure judiciaire ; qu'il est soutenu quesi le parquet n'est pas, selon la jurisprudence de la CEDH, une autorité judiciaireet, à ce titre, soumis à un devoir d'impartialité, il n'en est pas moins tenu à uneexigence de loyauté ; qu'en l'espèce, en ayant eu connaissance dès le 9 décembre2008 et le 23 juin 2009 des pièces précitées qui n'ont été versées au dossier de laprésente affaire que le 8 septembre 2009 à la suite d'une interview d'ImadLAHOUD publiée dans le "Journal du Dimanche" du même jour, le procureur dela République aurait manqué à son devoir de loyauté et porté atteinte à l'égalité des
armes ;

Attendu qu'il appartient au tribunal de s'assurer du respect du principe d'égalitédes armes au cours du procès pénal ; que cette égalité suppose que les parties

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soient mises en mesure de prendre connaissance, dans un délai raisonnable, despièces connues de leurs adversaires ;

que ces pièces, ainsi que l'ensemble de celles qui ont été diligentées dans le cadrede cette information sur commission rogatoire du magistrat instructeur, ont étéportées de façon systématique à la connaissance du procureur de la République aufur et à mesure de leur accomplissement, comme en attestent les soit-transmisétablis par le juge d'instruction en charge du dossier ; que c'est à la suite de larévélation de la teneur de l'interrogatoire d'Imad LAHOUD dans le "Journal duDimanche" du 6 septembre 2009 et alors même que ce prévenu avait prisl'initiative d'accorder, dès le mois de novembre 2008, une interview à
l'hebdomadaire "le Point" sur le même sujet en lien avec la présente affaire, leprocureur de la République a décidé de verser ces pièces aux débats afin degarantir la complète information des parties concernées par la présente affaire ;

Attendu qu'il se déduit de ces éléments que le procureur de la République, quiétait en droit de verser toute pièce nouvelle intéressant l'affaire et cela jusqu'à lafin des débats, s'est dans un premier temps abstenu de toute initiative de versementdes pièces dont il avait eu connaissance à l'instar de deux autres des prévenus, parailleurs mis en examen dans cette autre procédure, et cela depuis plusieurs mois,
pour finalement les joindre au dossier du tribunal à la suite de la parution del'article du "Journal du Dimanche"; que ces pièces ayant été finalement soumisesau débat contradictoire, leur ignorance par l'un des prévenus jusqu'à leurversement au dossier alors même que tant le ministère public que deux autres desprévenus en connaissaient les termes depuis leur établissement, a de fait créé uneinégalité des armes dans le cadre du présent procès ;

qu'en conséquence, il convient, afin de rétablir cette égalité, sans annuler les ditsprocès-verbaux, de les écarter des débats, mesure à laquelle le ministère public aindiqué à l'audience ne pas être opposé.

B) - Sur les conclusions de nullité présentées au cours des débats par ladéfense de Jean-Louis GERGORIN

Attendu que les conseils de Jean-Louis GERGORIN ont déposé des conclusionsvisées à l'audience du 22 octobre 2009 aux termes desquelles ils demandent à titreprincipal, au visa des articles 64 et 65 de la Constitution, de constater, au vu desdéclarations de Monsieur Nicolas SARKOZY, Président de la République et partiecivile dans la présente procédure, faites le 23 septembre 2009 après l'ouverturedes débats, à l'occasion d'une interview retransmise par les deux principaleschaînes françaises de télévision au cours de laquelle, s'agissant de l'affaireCLEARSTREAM, celui-ci a déclaré: " deux juges indépendants ont estimé que lescoupables devaient être traduits devant le tribunal correctionnel", propos dontl'auteur a par la suite précisé le sens devant les dirigeants de l'UMP le 28septembre, selon le magazine l'Express en date du 1er octobre 2009, en ces termes
"... il y a quand même deux personnes [Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD

- note du journaliste] qui ont avoué et qui sont donc coupables! Après il fautsavoir qui a tiré les ficelles", que ces déclarations ont été relayées, approuvées etcommentées par différents responsables de la majorité présidentielle et ministresdu gouvernement et que Jean-Louis GERGORIN est dès lors en droit de douter ducaractère équitable du procès qui lui est fait; qu'il est en conséquence demandé autribunal, au visa de l'article préliminaire et de l'article 802 du code de procédurepénale et l'article 6 alinéa 1 de la CEDH, de constater que seul le prononcé de la
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nullité de la procédure est proportionné à la gravité des atteintes aux droits de ladéfense de Jean-Louis GERGORIN ;

Attendu que, selon l'article 802 du code de procédure pénale, toute juridictionsaisie d'une demande d'annulation ne peut prononcer la nullité que lorsquel'irrégularité résulte d'une violation des formes prescrites par la loi à peine denullité ou d'inobservation des formalités substantielles et a eu pour effet de porteratteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ;

Attendu que la défense de Jean-Louis GERGORIN fonde ses prétentions sur lesdéclarations faites lors d'une intervention télévisée par Nicolas SARKOZY,
Président de la République et partie civile dans la présente procédure, enregistréeset diffusées pendant la durée des débats, puis reprises par l'intéressé dans les jourssuivants, dont il résulterait, selon le concluant, "des raisons de douter de l'équité
du procès au sens de l'article 6 de la CEDH";

Attendu qu'il est établi que Nicolas SARKOZY a déclaré au cours d'une interviewaccordée depuis New-York le 23 septembre 2009 et diffusée le soir-même : " deux
juges indépendants ont estimé que les coupables devaient être traduits devant le

er

tribunal correctionnel"; que selon un article de "l'Express" du 1 octobre, NicolasSARKOZY a tenu le 28 septembre les propos suivants : "il y a quand même deuxpersonnes qui ont avoué et qui sont donc coupables!" Après il faut savoir qui atiré les ficelles"; que de telles interventions publiques pendant la durée des débatset en dehors de l'enceinte judiciaire, qui émanent d'une partie au procès pénal, paressence partiale et convaincue du bien fondé des poursuites engagées, maisexerçant par ailleurs les fonctions de chef de l'Etat, ne sauraient, au regard despouvoirs que celle-ci tient des articles 64 et 65 de la Constitution, justifier à ellesseules les appréhensions du prévenu sur le défaut d'impartialité du tribunal;
qu'elles ne sauraient davantage s'analyser en une "violation des formes prescritespar la loi à peine de nullité", ni comme une "inobservation d'une formalité
substantielle" au sens de l'article 802 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il convient en conséquence de rejeter l'exception soulevée ;

C- Sur le fond de l'action publique

1 - Sur la culpabilité

a) Sur la culpabilité de Florian BOURGES

Attendu qu'il est reproché à Florian BOURGES "d'avoir à Luxembourg , Neuillysur-
Seine , Courbevoie et Paris , en tout cas sur le territoire national , courant
2001 à 2004, en tout cas depuis temps non prescrit, détourné des listings decomptes et de transactions et tous autres documents ou données qui lui avaient étéremis et qu'il avait acceptées à charge de les rendre ou représenter ou d'en faireun usage déterminé, et ce au préjudice des sociétés de droit luxembourgeoisCLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL sises au
Luxembourg";

Attendu qu'il est par ailleurs reproché à Florian BOURGES "d'avoir à Neuilly-sur


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Seine et Paris, en tout cas sur le territoire national, courant 2001 à 2004, en tout
cas depuis temps non prescrit, frauduleusement soustrait des listings de compteset de transactions et tous documents ou données provenant des sociétésCLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL sises au
Luxembourg, au préjudice de la société BARBIER FRINAULT et ASSOCIES";

a-1) sur les faits d'abus de confiance commis au préjudice de CLEARSTREAMBANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL

Attendu qu'aux termes de l'article 314-1 du code pénal, le délit d'abus deconfiance peut être reproché à la personne auteur d'un détournement, au préjudiced'autrui, de fonds, valeurs ou bien quelconque qui lui ont été remis ou qu'elle aacceptés à charge de les rendre ou d'en faire un usage déterminé ;

Attendu que l'information a établi que Florian BOURGES a été recruté en qualitéde stagiaire par la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES en avril 2001,
qu'au cours de son stage accompli de juillet à septembre 2001 au sein de cettesociété membre du réseau ARTHUR ANDERSEN, il a participé, aux côtés denombreux autres salariés du réseau, à la mission d'audit confiée dès le 27 juin 2001par CLEARSTREAM INTERNATIONAL, CLEARSTREAM BANKING et lecabinet d'avocats FRESHFIELD BRUKHAUS DERINGER à la société ARTHUR
ANDERSEN Luxembourg (D3281) ; que les recherches ont porté sur lessuspicions de blanchiment, de comptes secrets, de boîtes noires et de paiementsfrauduleux à des tiers ou à des employés ; que Florian BOURGES appartenait augroupe "IT", supervisé par Dominique GEORGES, ayant en charge les extractionsde données destinées à alimenter les autres équipes et notamment le groupe AML("Anti Money Laundering") lui-même chargé de la partie "Blanchiment etsuspicions de paiements frauduleux" (D3374/65) ; que ces données étaientextraites du système informatique "DATA SERVER" de CLEARSTREAM à
partir d'un terminal mis à disposition par CLEARSTREAM et selon desprocédures de sécurité très précises, les documents informatiques étant rassemblésdans un local ("Data Centralisation Room") mis exclusivement à dispositiond'ARTHUR ANDERSEN LUXEMBOURG (D3377/4) ;

Attendu que Godefroy LAMBORAY, executive director de CLEARSTREAMBANKING, a expliqué que Florian BOURGES avait eu accès, à compter du 12juillet 2001, au DATA SERVER et au DATA WAREHOUSE de
CLEARSTREAM BANKING, à toutes les banques de données financières et dupersonnel (SAP) ainsi qu'au système qui réalisait les transactions et reprises auDATA-SERVER de CLEARSTREAM (RTS) (D3374/3) ; que selon ce témoin, leDATA SERVER n'était pas accessible par internet (D3374/8); qu'Yves BAGUET,
managing director informatique de CLEARSTREAM, a précisé que seule la"codelist", qui est une version réduite du DATA SERVER, avait été diffusée enligne au début des années 2000 avec un accès totalement libre jusqu'en 2005(D932/5) ;

Attendu qu'une note circularisée par mail, adressée le 27 juillet 2001 par Jean-
Louis PACAUD, alors associé au sein de ce cabinet luxembourgeois, notamment
aux "équipes de projet Lux-Cleartsream", mettait l'accent sur le caractère
"extrêmement sensible" des recherches entreprises répondant à l'engagement d'ARTHUR ANDERSEN qu'il convenait de traiter de la façon la plus confidentielle
et la plus professionnelle" (D3377/6) ; que, selon ce témoin, "Florian BOURGES
avait accès au DCR, et ne pouvait prendre aucune initiative, il n'était là que pour

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procéder à des extractions de données sur instruction de son manager et à lademande des autres équipes participant à l'audit (...) Florian BOURGES avait un
rôle d'exécutant, il était le plus junior dans l'équipe informatique et il disposaitégalement d'un ordinateur portable professionnel. Il devait se servir de son
ordinateur portable pour mettre en forme des rapports d'extraction qu'on lui avaitdemandés. Les données étaient extraites du DATASERVER, ensuite gravées surCD-ROM. Ce CD-ROM était ensuite utilisé sur l'ordinateur portable parMonsieur BOURGES, pour ses travaux de mise en forme mentionnés ci-dessus"
(D3374/58 et 59) ; qu'il a par ailleurs précisé que "Florian BOURGES n'était pasimpliqué dans les discussions relatives aux conclusions à tirer des différentstravaux. En outre, il a quitté la mission de mémoire vers le 15 septembre, c'est-àdire
environ un mois avant le début de la rédaction du rapport. Toutes lesanomalies détectées au cours de la mission étaient discutées en interne avec les
managers et moi-même puis avec le client et dans tous les cas , nous avons obtenudes explications satisfaisantes pour chacune d'entre elles" (D3374/63) ;

que Florian BOURGES a été par la suite, à compter du 1er octobre 2001 au 30 juin2003, salarié de la société d'expertise comptable et de commissariat aux comptesBARBIER FRINAULT et ASSOCIES, puis, à compter du 1er juillet 2003 etjusqu'au 13 juillet 2004, au sein de la société ERNST & YOUNG ;

Attendu que les travaux d'analyse et de comparaison effectués par l'Office Centralde Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l'Information et de laCommunication (OCLCTIC) à partir des "données BOURGES" identifiées sur lesarchives de Florian BOURGES issues de son travail chez CLEARSTREAM, ont
montré que celui-ci détenait à son domicile sur CD-ROM (intitulé "DCPJ"- scelléBOURGES 1- D1008) d'une part un fichier "Db3.zip" correspondant selon FlorianBOURGES à la liste de tous les clients CLEARSTREAM extraite le 3 septembre2001, et d'autre part un fichier "Clearstream.zip" contenant lui-même plusieursmilliers de fichiers de travail qu'il avait conservés depuis la fin de sa mission chezCLEARSTREAM ;

Attendu qu'il ressort de l'information et des débats que Florian BOURGES a établises documents de travail à partir des données extraites du système informatique deCLEARSTREAM et relatives aux intitulés et correspondances bancaires decomptes clients et aux transactions enregistrées et que ces documents devaient êtretransmis aux équipes ARTHUR ANDERSEN en charge de leur analyse ;

Attendu que ces documents ont été retrouvés à l'identique d'une part dans lesdonnées que Denis ROBERT tenait de lui et d'autre part dans les donnéestransmises ultérieurement par Imad LAHOUD à la DGSE ; que ces transmissionssuccessives, bien que contestées par Imad LAHOUD, ont été confirmées par DenisROBERT ;

Attendu en effet que l'analyse de l'OCLCTIC a permis de constater que lesdonnées figurant sur les CD-ROM que Denis ROBERT a remis aux magistratsinstructeurs, ont été retrouvées à l'identique sur le disque dur de son ordinateursaisi à son domicile, qu'elles contiennent notamment huit fichiers de type "access"
qui ont tous pour auteur CLEARSTREAM, et qu'un fichier "totalité des comptesavant 2000.xls" a comme auteur "Denis Robert" (D2328/17) ;
Attendu que ces mêmes travaux de police technique ont permis de retrouver latrace des données BOURGES parmi les données figurant d'une part sur les CDROM
adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE en août et octobre 2004 etd'autre part parmi les données conservées par Denis ROBERT et sur les CD-ROM

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saisis à la DGSE ;

qu'il a été constaté sur le même disque dur de Denis ROBERT la présence detransactions, antérieures à septembre 2001, découvertes dans les donnéesBOURGES lesquelles sont elles-mêmes identiques aux transactions figurant dansles fichiers "CP FANTOMES" des CD-ROM saisis au cours de la perquisitionDGSE (D2328/18) ;que la comparaison de ces "fichiers fantômes" avec l'envoi
anonyme du 20 août 2004 au juge Renaud VAN RUYMBEKE a permis de relever9 numéros de comptes, dont 7 numéros de comptes sont présents dans les "donnéesBOURGES", auxquels ont été ajoutés deux comptes numéros N0055 et 90765; queces deux comptes apparaissent sur les fichiers dans lesquels Florian BOURGESavait recensé les incohérences de la base de données CLEARSTREAM ("Mémo_
CLEARSTREAM_ unknown_ account_ sum-up_130901.doc") et figurent parmiles comptes ajoutés à la base "Db3", sous les noms de "Charles EDELSTENNE"
et "Ser MIKHAILOV" ;

que les 19.380 transactions figurant dans les "données BOURGES" se retrouventintégralement et à l'identique dans les "données ROBERT"et dans les CD-ROMsaisis à la DGSE sous les fichiers "CP FANTOMES" provenant, aux dires deDenis ROBERT et d'Imad LAHOUD, des données transmises à l'origine parFlorian BOURGES (D2329 / 19 à 23) ;

qu'ainsi a-t-il été constaté que les transactions découvertes dans les "donnéesBOURGES" se retrouvent dans l'envoi du 4 octobre 2004 au juge Renaud VANRUYMBEKE et correspondent intégralement aux transactions découvertes sur ledisque dur de Denis ROBERT ;

Attendu que Florian BOURGES a reconnu au cours de l'information avoireffectivement transmis à Denis ROBERT courant 2002, sous format "excel", la
base clients de CLEARSTREAM extraite le 3 septembre 2001, cette base
comportant 33.430 comptes clients (D972/5), ainsi que les listes de comptesbaptisés ultérieurement "comptes fantômes" par Denis ROBERT, et dont ce derniera fait état dans ses publications ultérieures ;

que Florian BOURGES a également déclaré avoir permis à Imad LAHOUD, lorsde leur rencontre en septembre 2003 à Courbevoie, de copier à partir de sa clé USBbiométrique les fichiers clients, les fichiers de transactions et ses mémos (D972/6),
précisant qu'Imad LAHOUD est la seule personne à qui il a remis sa base clientset une partie des fichiers de transactions (D972/11) ;

que, sur présentation par les magistrats instructeurs d'un extrait du scellé n°2,
correspondant au CD-ROM parvenu au juge Renaud VAN RUYMBEKE le 20août 2004, Florian BOURGES a admis qu'il correspondait à une copie du fichierclients CLEARSTREAM présent dans la base de données du DATA SERVER surlaquelle des noms avaient été ajoutés ; que les responsables de CLEARSTREAMBANKING, Christian HEYNE et Andreas WELLER, entendus sur commission
rogatoire internationale des juges d'instruction, ont confirmé que la structure deslistings contenus dans les envois reçus par le juge Renaud VAN RUYMBEKE surpapier le 14 juin 2004 et sur CD-ROM le 20 août 2004 correspondait à celle desdonnées CLEARSTREAM (D3374/28) ;

que Florian BOURGES a également déclaré avoir identifié, sur le CD-ROM

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parvenu au juge d'instruction VAN RUYMBEKE le 4 octobre 2004, les fichiersde transactions issus de ses documents de travail élaborés à partir des données duDATA SERVER de CLEARSTREAM, caractérisés par la présence, outre d'unequinzaine de colonnes qu'il avait lui-même sélectionnées dans ses requêtes etclassées dans un ordre correspondant à celui repris dans le CD-ROM, de 4colonnes supplémentaires "BID", "OFFER", "SPREAD", "OVER/UNDER"qu'ilavait lui-même créées ;

Attendu qu'il s'ensuit que ces mêmes données, rapprochées des déclarations deFlorian BOURGES rapportant aux juges d'instruction les constatations qu'il avaitpu faire dans le cabinet du juge VAN RUYMBEKE, permettent d'établir que lesfichiers de transactions contenus dans le CD-ROM du 4 octobre 2004, qui étaitl'un des supports de la dénonciation adressée au juge Renaud VAN RUYMBEKE,
présentaient les mêmes caractéristiques que ses documents de travail qu'il n'avaitremis qu'au seul Imad LAHOUD et qui avaient été modifiés ;

Attendu par ailleurs que les propriétés des 9 fichiers gravés sur ce CD-ROMmentionnent une création en date du 30 septembre 2004 et une modification à lamême date avec le nom "MATRIX"; que ce nom correspond au pseudonyme"Matrix Néo" employé par Imad LAHOUD pour communiquer avec DenisROBERT (D1008/7) ;

Attendu qu'il apparaît dès lors établi que Florian BOURGES a conservé par deverslui, à l'issue de sa participation à la mission d'investigation chez CLEARSTREAMpour le compte d'ARTHUR ANDERSEN LUXEMBOURG, des documentscontenant des données extraites du système informatique CLEARSTREAM etrelatives tant aux références internes et bancaires des clients de la chambre de
compensation luxembourgeoise qu'à des transactions impliquant nombre d'entreces clients, telles qu'elles ressortaient en septembre 2001 ;

Attendu que, contrairement à ce qu'il prétend, Florian BOURGES ne pouvaitignorer le caractère confidentiel des informations qu'il avait extraites depuisl'intérieur du système ; que le DATA SERVER était, quant à lui, inaccessible parle biais du site CLEARSTREAM ; que, de plus, il n'a pu qu'être sensibilisé à cettespécificité par les nombreuses mesures de sécurité imposées en amont lors del'extraction des données, ainsi que par l'apposition, sur certains des documentsdécouverts à son domicile bien qu'émanant de CLEARSTREAM, de la mention"highly confidential for internal use only" (cote n°119 à 135 et 188 du scellé
BOURGES 3) ;
Attendu que la prétendue publicité que les responsables de CLEARSTREAMauraient mise en avant auprès de certains médias pour se défendre d'avoir favorisédes pratiques occultes, apparaît par ailleurs contradictoire avec le fait que FlorianBOURGES a eu l'idée d'en monnayer la transmission, sans succès auprès de DenisROBERT, puis auprès d'Imad LAHOUD, lequel aurait même suggéré, selonFlorian BOURGES, de passer par le biais d'une filiale du groupe EADS dirigée parson frère Marwan LAHOUD ; qu'une telle transparence apparaît surtout
incompatible avec l'emploi par Florian BOURGES du pseudonyme "Jonathan
GANTRY" dans ses échanges avec Denis ROBERT et le fait d'avoir indiqué unedate d'extraction des données qui s'est par la suite révélée erronée (septembre aulieu d'octobre 2001), ces dissimulations auprès de ses interlocuteurs successifsayant pour effet d'entraver les éventuelles enquêtes ultérieures afin qu'ellesn'aboutissent pas à son identification, comportements incompatibles avec la bonnefoi alléguée ;

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Attendu qu'il est au contraire démontré qu'en conservant et en transmettant à destiers des données extraites du système informatique de CLEARSTREAM auquelil avait accès pour les besoins de la mission à laquelle il participait dans un cadreconfidentiel, Florian BOURGES a fait un usage qu'il savait contraire à celui quiavait été initialement prévu de ces données, contenues sur des supportsinformatiques et qui lui avaient été confiées à charge pour lui sinon de les détruire,
de les transmettre aux équipes d'ARTHUR ANDERSEN Luxembourg, ou bien deles conserver dans le "Data Centralisation Room" mis en place parCLEARSTREAM pour les besoins de cette seule mission, ce qui excluait de touteévidence la transmission à des tiers ;

Attendu que de tels agissements sont constitutifs du délit d'abus de confiance quitrouve son origine en septembre 2001 au Luxembourg, lieu d'extraction desdonnées appartenant à CLEARSTREAM BANKING, dans les locaux deCLEARSTREAM SERVICES, filiale du groupe CLEARSTREAM, et a étéconsommé en France, où ces données ont été conservées et détournées entre
octobre 2001 et septembre 2003 au préjudice des sociétés CLEARSTREAMBANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL, et dont Florian BOURGES
s'est rendu coupable ;

a-2) Sur les faits de vol commis au préjudice de la société BARBIER FRINAULT& ASSOCIES et l'éventuelle requalification en abus de confiance

Attendu qu'il a été constaté que Denis ROBERT était en possession de la baseclient de CLEARSTREAM et des fichiers fantômes que lui avait remis FlorianBOURGES et qui étaient issus de ses documents de travail, qu'il a été démontréque ce dernier avait délibérément transmis à Denis ROBERT ces élémentsd'information, que Denis ROBERT était également en possession d'un fichier"Team contact List" ayant pour auteur "Kristin ZELLER/Arthur Andersen",
détaillant le nom des salariés du réseau ARTHUR ANDERSEN ayant participé àla mission et incluant celui de Florian BOURGES, liste qui était manifestementincluse dans les données à lui transmises par Florian BOURGES ; que la preuvea été rapportée de la remise par Florian BOURGES à Imad LAHOUD, outre de lamême base de données clients CLEARSTREAM, de nombreux fichiers de
transactions, pour ces derniers de façon exclusive ;

Attendu qu'il n'apparaît pas que la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIESse soit appropriée ces documents contenant pour l'essentiel des données issues deCLEARSTREAM, ce qui exclut qu'elle puisse être considérée comme victimed'une soustraction frauduleuse caractérisant le délit de vol ;

Attendu qu'avant d'envisager une éventuelle relaxe de ce chef, il appartient autribunal de donner aux faits leur exacte qualification dès lors que les élémentsservant à la requalification éventuelle ne modifient en rien la saisine in rem du
tribunal, qu'ils ont été, comme en l'espèce, soumis au débat contradictoirepermettant au prévenu de présenter sa défense, ainsi qu'il ressort des termes desconclusions déposées à l'audience par ses avocats, et que cette requalificationn'entraîne pas d'aggravation de la peine encourue ; qu'au demeurant laqualification d'abus de confiance avait été évoquée par le ministère public lors durèglement du dossier d'information et a été requise oralement à l'audience ;

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Attendu que, dans ses rapports contractuels avec la société BARBIER FRINAULT& ASSOCIES , Florian BOURGES était tenu à une obligation de confidentialitéénoncée dans l'article 13 de la convention de stage établie par l'EDHEC le 18 avril2001 pour la période du 9 avril au 31 août 2001 dans les termes suivants: "Le
secret professionnel est de rigueur absolue. Les élèves stagiaires prennent doncl'engagement de n'utiliser en aucun cas les informations recueillies par eux pouren faire l'objet de publication, communication à des tiers sans accord préalablede la direction de l'entreprise , y compris le rapport de stage. Cet engagementvaudra non seulement pour la durée du stage mais également après son expiration.
L'élève s'engage à ne conserver, emporter ou prendre copie d'aucun document,
de quelque nature que ce soit, appartenant à l'entreprise, sauf accord de cettedernière" (scellé ERNST & YOUNG / DRH1 cotes n°272 et 273) ; que les termesde cette obligation sont repris à l'article 5 du contrat de travail conclu en octobre2001 avec la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES ainsi rédigé:
"Monsieur Bourges -Sévenier Florian s'engage à conserver, de façon la plusstricte, la discrétion absolue sur l'ensemble des informations qu'il pourrarecueillir à l'occasion de ses fonctions(...) Il veillera à ce qu'aucun document ouinformation ne soit montré, divulgué ou relaté à des tiers sans l'autorisationpréalable du client concerné, sauf instruction formelle d'une juridiction ou d'unorganisme officiel (...) Ces obligations demeureront même après la fin du présentcontrat quelle qu'en soit la cause." (scellé ERNST & YOUNG / DRH 1 cotes 15
à 19) ;

qu'il s'ensuit que cette obligation de confidentialité a couvert son activité au seindes équipes ARTHUR ANDERSEN pour les besoins de la mission d'investigation,
et a perduré au fil des années et au-delà de la reprise du contrat de travail parERNST & YOUNG ;

que cet engagement est repris dans l'article 8 de l'accord transactionnel intervenuentre Florian BOURGES et ERNST & YOUNG le 3 mai 2004 ainsi qu'il suit :
"Monsieur BOURGES-SEVENIER conservera un caractère confidentiel à toutes
les informations relatives à la société ou à sa clientèle qui lui auront été confiéeset qu'il aura recueillies à l'occasion de sa collaboration avec la Société" (scelléERNST & YOUNG / DRH 1 cotes 5 à 13) et qui mentionne également uneobligation de restitution de "tous produits, manuels, documents, logiciels et autres
moyens et outils de travail" appartenant à la Société (article 9 de la transaction) ;

Attendu que Florian BOURGES devait, vis-à-vis de son employeur, se conformerà son obligation de confidentialité dans ses rapports avec les tiers en s'abstenantde leur divulguer la teneur de ses documents de travail, et cela afin de préserver lesintérêts particuliers de la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES dont la
responsabilité pouvait être recherchée en cas de violation de ce secret du fait de sonpréposé ;

que force est de constater que Florian BOURGES n'a pas hésité, au mépris desobligations qui s'imposaient à lui, à transmettre, par voie de reproductioninformatique, à des tiers, en la personne dans un premier temps de DenisROBERT, courant 2001 et début 2002, à Metz, puis d'Imad LAHOUD enseptembre 2003, à Courbevoie, les documents de travail qu'il avait conservés pardevers lui à l'insu de son employeur ;

qu'il apparaît que les documents, objet du délit poursuivi, n'ont pas été soustraitsmais détournés de leur usage contractuellement déterminé;

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Attendu que, pour tenter de démontrer qu'il a pu avoir le sentiment d'agir surinstruction d'un organisme officiel et justifier ainsi de sa bonne foi, le prévenu nesaurait utilement s'abriter derrière la qualité de membre de la DGSE de soninterlocuteur, telle qu'Imad LAHOUD l'aurait alléguée lors de leurs entretiens enprésentant une carte de visite supportant le logo de la République Française,
l'adresse du ministère de la Défense, 16 rue Saint Dominique, et le nom duGénéral RONDOT ;

qu'il a été en effet établi que ces rencontres ont été rendues possibles par lesrelations que Florian BOURGES a entretenues à l'origine avec le journaliste DenisROBERT ; qu'il n'ignorait pas que le débat public sur les pratiques ayant cours ausein de CLEARSTREAM avait été lancé par Denis ROBERT dont l'ouvrage avaitprovoqué la décision des dirigeants de la chambre de compensation de recourir auxinvestigations confiées à ARTHUR ANDERSEN Luxembourg ; qu'il a été desurcroît démontré qu'il s'est volontairement abstenu de dévoiler sa véritableidentité à son interlocuteur et s'était rendu en 2005, toujours sous le même nomd'emprunt, non pas dans les locaux de la DGSE mais, à Suresnes, dans ceuxd'EADS où travaillait Imad LAHOUD, pour tenter d'y retrouver son interlocuteur ;

Attendu que Florian BOURGES ne saurait davantage se retrancher derrière lesdispositions régissant les professions d'expert comptable et de commissaire auxcomptes, auxquelles fait référence son contrat de travail, et notamment l'obligationde conservation des informations pendant 10 ans qui s'impose aux commissairesaux comptes ; que la mission dont il s'agit ici ne relève nullement du commissariataux comptes exercé par le cabinet BARBIER FRINAULT & ASSOCIES mais
bien d'un audit, voire, selon l'expression de Jean-Michel PACAUD, d'une
mission d'investigation, menée au Luxembourg au sein de CLEARSTREAM etpour l'accomplissement de laquelle la société BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES a mis son personnel, rémunéré par elle, à la disposition de la sociétéARTHUR ANDERSEN Luxembourg à laquelle elle était liée par un accord "Interfirm
Agreement" ;

qu'en tout état de cause, Florian BOURGES, employé et ancien stagiaire de lasociété d'expertise comptable et commissaire aux comptes BARBIER FRINAULT& ASSOCIES, décrit par les différents témoins comme un simple exécutant destâches qui lui étaient confiées par sa hiérarchie, ne peut, pour prétendre être endroit de divulguer à des tiers les documents et informations appréhendées dans lecadre de la mission confiée par son employeur, exciper de l'obligation deconservation qui, loin d'autoriser de telles divulgations, l'astreignait, bien aucontraire, à s'assurer de la confidentialité des documents qu'il détenait ;

Attendu que la preuve est rapportée que Florian BOURGES a fait, de mauvaise foi,
de ses documents de travail, existant sous la forme de fichiers de transactions,
fichiers "mémos" et de listings de comptes clients, un usage contraire à celuiauquel il devait s'astreindre à l'égard de son employeur ; qu'il convient enconséquence de requalifier les faits poursuivis sous la qualification de vol commisau préjudice de la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES en abus deconfiance commis au préjudice de la même société, délit dont Florian BOURGESsera déclaré coupable ;

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b) sur la culpabilité de Denis ROBERT:

Attendu qu'il est reproché à Denis ROBERT "d'avoir à Châtel-Saint-Germain et
Metz (57), en tout cas sur le territoire national, courant 2001 à 2006, en tout casdepuis temps non couvert par la prescription, sciemment recelé des listings decomptes et de transactions et tous autres documents ou données qu'il savaitprovenir d'un délit, en l'espèce un abus de confiance commis au préjudice dessociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL sises
au Luxembourg et un vol commis au préjudice de la société BARBIER FRINAULT& ASSOCIES";

Attendu que devant les magistrats instructeurs, Denis ROBERT a reconnu avoirreçu par mail de Florian BOURGES vers la mi-décembre 2001, "le fameux listing
de clients qui était, disait-il, très intéressant pour moi car il était daté d'octobre2001 et qu'il actualisait complètement l'enquête que j'avais menée auparavant"
(D1828/3), et avoir publié des extraits de ce listing, tout en ajoutant : "j'ai pudémontrer d'une manière absolue que la pratique d'ouverture de comptes dans desparadis fiscaux perdurait et s'était amplifiée, sur 107 pays représentés dans celisting, il y avait 40 paradis fiscaux et cela démontrait pour moi queCLEARSTREAM était véritablement une pompe ou un poumon de la financeparallèle"; qu'il a par ailleurs déclaré avoir transmis ce listing à des dizaines dejournalistes et l'avoir produit lors de son audition par la commission parlementairesur le blanchiment présidée par Vincent PEILLON ;

que Denis ROBERT a également déclaré avoir reçu de Florian BOURGES enjanvier 2002, avant leur première rencontre d'avril 2002 à la FNAC, d'autresfichiers relatifs à des pannes informatiques qu'il a appelés "comptes fantômes" et
qui ont figuré à la fin de son film "L'affaire CLEARSTREAM racontée à un
ouvrier de chez DAEWOO" (D1828/4) ;

Attendu que Denis ROBERT a reconnu au cours de l'information avoir su, àl'occasion d'une rencontre avec Florian BOURGES à la FNAC à Paris en avril
2002, les fonctions de ce dernier au sein d'ARTHUR ANDERSEN et les
circonstances dans lesquelles celui-ci était entré en possession de ces données dansle cadre de la mission d'audit de CLEARSTREAM ; que nonobstant cetteinformation, Denis ROBERT non seulement a conservé ces données sur son
ordinateur, mais les a transmises à Imad LAHOUD en février 2003 ;

Attendu qu'il apparaît ainsi établi que Denis ROBERT a matériellement détenu àson domicile entre la fin de l'année 2001 et le mois d'octobre 2006, date de la
perquisition effectuée chez lui, des documents et informations relatives à la baseclients de CLEARSTREAM provenant de la remise à lui faite par FlorianBOURGES et concernant les données qu'il savait, à compter d'avril 2002, avoir
été extraites par ce dernier du système informatique de la chambre decompensation dans les circonstances déjà évoquées ;

Attendu que Denis ROBERT sollicite néanmoins la relaxe en se fondant surl'application des articles 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyende 1789 et des articles 6 et 10 de la Convention Européenne des Droits del'Homme ; qu'il fait valoir que c'est dans le cadre de son travail d'enquêtejournalistique sur la société CLEARSTREAM sur le blanchiment international,
sujet d'intérêt général, qu'il a acquis et utilisé les informations CLEARSTREAM,
dont l'authenticité n'était d'ailleurs pas contestée et qu'il tenait de FlorianBOURGES ; qu'il soutient également que la transmission de ces données, à

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l'occasion d'une rencontre avec Imad LAHOUD provoquée par son confrère EricMERLEN en février 2003, s'est inscrite dans un souci permanent d'informationet de poursuite de son enquête, et qu'il les a utilisées pour les besoins de sa défensedans le cadre des nombreux procès en diffamation dont il a fait l'objet, ce queconfirme l'ordonnance de renvoi qui retient, comme élément intentionnel del'infraction, la recherche d'un intérêt personnel tiré de sa volonté de se défendreen justice dans le cadre du procès en diffamation, ce qui, à ses yeux, suffirait à faireéchec aux poursuites ;

Attendu que l'article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droitsde l'Homme et des Libertés fondamentales énonce que "toute personne a droit àla liberté d'expression et que ce droit comprend la liberté d'opinion et la libertéde recevoir ou de communiquer des informations ou des idées" et que "l'exercice
de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à
certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions , prévues par la loi, quiconstituent des mesures nécessaires dans une société démocratique (...) à laprotection de la réputation ou des droits d'autrui , pour empêcher la divulgationd'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité ou l'impartialité dupouvoir judiciaire sans qu'il puisse y avoir ingérence des autorités publiques" ;

que l'application du principe du droit à la liberté d'expression posé par ce texte,
et dont doit bénéficier le journaliste, exige de permettre à celui-ci tout à la foisd'exercer pleinement sa mission d'information du public sur les sujets d'intérêtgénéral, avec pour corollaire la légitimité de l'intérêt porté par le public à êtreinformé, et le cas échéant la possibilité pour le journaliste d'en répondre devant untribunal ;

Attendu qu'il est établi que Denis ROBERT a utilisé les informations de FlorianBOURGES dans le cadre de son travail d'enquête journalistique sur la sociétéCLEARSTREAM qui avait débuté par sa rencontre avec Ernest BACKES, anciencadre de la chambre de compensation, et qui avait donné lieu à la publication en2001 de "REVELATION$", ouvrage d'investigations dans lequel il avait mis enlumière le fonctionnement et les pratiques de la chambre de compensation et jointdes documents destinés à attester l'étendue et la pertinence de ses découvertes,
notamment sous la forme de listings ;

que Denis ROBERT et Ernest BACKES ont été amenés à déposer devant la

"Mission parlementaire française d'information sur les obstacles au contrôle età la répression de la délinquance financière et du blanchiment des capitaux enEurope"; que la publication de leur livre avait également provoqué l'ouvertured'une enquête pénale à Luxembourg le 26 février 2001 au sujet des pratiques qu'ilsdénonçaient ;

qu'en février 2002, Denis ROBERT a publié "La boîte noire", où il évoquait uninformaticien, qu'il dénommait "Jonas", qui lui avait proposé le listing des clientsCLEARSTREAM actualisé au mois d'octobre 2001 et dont on trouvait un extrait
dans l'ouvrage ; que Denis ROBERT a précisé : "Ces données CLEARSTREAM
et ces effacements de traces sont absolument fondamentaux dans tout le travail quej'ai fait et le témoignage de Florian BOURGES était pour moi très intéressantdans le sens où pour la première fois quelqu'un d'extérieur, qui n'était motivé nipar l'argent ou par un règlement de comptes démontrait qu'à Luxembourg dansce centre névralgique de la finance, on pratiquait industriellement l'effacement destransactions financières qu'on peut chiffrer à plusieurs dizaines, voire centainesde millions de dollars." (D1828/8) ; qu'en février 2003, a été diffusé sur "Canal +"

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un film documentaire, "L'affaire CLEARSTREAM racontée à un ouvrier de chez
DAEWOO" à la fin duquel Denis ROBERT a produit des extraits de listings et defichiers d'erreurs de transactions transmis par Florian BOURGES, ce qu'ilconsidérait comme une preuve irréfutable de l'existence de comptes dissimulés,
hébergés dans des paradis fiscaux ;

Attendu que Florian BOURGES a déclaré qu'ayant eu le sentiment, à l'issue de sestravaux au sein de CLEARSTREAM, que des questions étaient demeurées sansréponse, il avait lui-même pris l'initiative de contacter Denis ROBERT qui luiparaissait "la personne la mieux à même de continuer cette recherche surCLEARSTREAM" (D972/4), qu'il a par la suite ajouté que "contacter Denis
ROBERT , c'était un moyen d'accéder à la justice" (D1819/4) ;

Attendu qu'au cours de l'audience, Denis ROBERT a confirmé avoir transmis leslistings, à la faveur d'une rencontre provoquée par Eric MERLEN, en février 2003à Imad LAHOUD qui se disait susceptible de l'aider dans son enquête et les procèsque lui intentait CLEARSTREAM (notes d'audience page 48) et avoir par ailleursfait des vérifications au sujet de cette personne (notes d'audience page 44) ; qu'ilconsidère que vis-à-vis d'Imad LAHOUD, il s'agissait d'un échange de bonsprocédés qui devait se poursuivre par la réalisation d'un documentaire faisantapparaître Imad LAHOUD tout à la fois comme trader et hackeur ;

qu'il est apparu qu'en réalité Imad LAHOUD n'a pas apporté l'aide tant espéréepar Denis ROBERT, par l'intermédiaire duquel il a cependant fait la connaissancede Florian BOURGES dans l'enceinte du palais de justice de Paris en juillet 2003,
cela en marge d'une audience consacrée à la procédure de diffamation lancée parCLEARSTREAM contre Denis ROBERT ;

Attendu que Denis ROBERT a reconnu avoir également utilisé les données dansle cadre de ses procès contre CLEARSTREAM comme offre de preuve afin dedémontrer le sérieux de son enquête et que "CLEARSTREAM était un outil de
dissimulation" (D1828/7) ; que cette offre de preuve ressort des termes desjugements rendus par le tribunal correctionnel de Paris (17ème chambre) dans ses
décisions de novembre 2003 ;

Attendu qu'il apparaît ainsi démontré que, lors de la réception des donnéesCLEARSTREAM, Denis ROBERT ignorait les circonstances précises danslesquelles Florian BOURGES les avaient été obtenues ; que ces données se sontrévélées utiles à sa démarche journalistique ; que pour les besoins de sa propredéfense à l'occasion des procès en diffamation engagés à son encontre parCLEARSTREAM, Denis ROBERT a bâti son offre de preuve notamment à partirde ces données ; que leur transmission à Imad LAHOUD en février 2003 sejustifiait dans l'esprit de Denis ROBERT par l'espoir, qu'il nourrissait à tort, debénéficier de l'aide de l'ancien trader, compte tenu des compétences reconnuesalors à ce dernier dans le domaine de la finance ;

Attendu qu'il ressort de ce qui précède que les faits poursuivis s'inscrivent, depuisleur origine, dans le cadre de l'activité journalistique d'investigations de DenisROBERT que celui-ci avait engagée depuis plusieurs années et qui avait provoquéet alimenté un débat public sur la lutte contre la corruption internationale et lesréseaux de blanchiment ;

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que, dès lors, les poursuites initiées à l'encontre de Denis ROBERT, fondées surla détention à compter de décembre 2001 de documents informatiques contenantdes informations dont il n'a connu la provenance frauduleuse qu'en avril suivant,
et sur l'usage qu'il en a fait par la suite en les divulguant à son tour à un tiers etdans le cadre de sa défense en justice, apparaissent incompatibles avec le respectdu principe instauré par l'article 10 précité de la CEDH garantissant au journalistenon seulement la liberté d'exercer son activité d'information du public sur un sujetd'intérêt général mais également la possibilité de démontrer, le cas échéant enjustice, l'exactitude des informations qu'il a diffusées ; que de tels faits nesauraient recevoir la qualification de recel d'abus de confiance ou de vol, délit quin'apparaît pas constitué à l'encontre du prévenu ;

Attendu que Denis ROBERT devra en conséquence être relaxé;

c) sur les faits reprochés à Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominiquede VILLEPIN

Attendu qu'il est reproché aux trois prévenus d'avoir participé à la commission desdélits de dénonciation calomnieuse, de faux et usage de faux et de recel d'abus deconfiance et de vol ;

Attendu que, pour être constitués, les délits de dénonciation calomnieuse reprochésà Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN en qualité d'auteurs principaux et àDominique de VILLEPIN en qualité de complice pour les seuls faits de 2004,
nécessitent la réunion des conditions suivantes :

• sur l'élément matériel :
- que les dénonciations portent sur des faits de nature à entraîner dessanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires,
- que les faits dénoncés soient imputés à une personne déterminée ouaisément déterminable,
- que ces faits soient totalement ou partiellement inexacts,
- que la dénonciation adressée soit à un officier de justice ou de policeadministrative ou judiciaire, soit à une autorité administrative ou judiciaire ayantle pouvoir d'y donner suite ou de saisir l'autorité compétente, soit enfin auxsupérieurs hiérarchiques ou à l'employeur de la personne dénoncée ;
• sur l'élément intentionnel :
- que la dénonciation soit spontanée,
- que l'auteur de la dénonciation ait connaissance, au moment de celle-ci,
de la fausseté des faits dénoncés ;
c-1) sur la matérialité des délits de dénonciation calomnieuse

- sur les données objectives de la dénonciation :
Attendu que les personnes dénoncées sont toutes parties prenantes dans ce qui estprésenté comme une organisation criminelle aux contours très étendus, soit en tantque concepteurs , initiateurs, soit en tant qu'agents du système ou bien l'un de sesnombreux bénéficiaires ; que les faits imputés, s'agissant de blanchiment et decorruption, exposent de toute évidence leurs auteurs à des sanctions pénales ;

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Attendu que l'organisation dénoncée se caractérise par sa dimension internationaleet l' expansion régulière qu'elle a connue au cours des dix dernières années; queles vecteurs de ces dénonciations prennent la forme de notes, de lettres et dedocuments informatiques supposés provenir de la comptabilité de
CLEARSTREAM ; que les dénonciations ont été étayées en 2003 seulement parquelques documents pour l'essentiel prétendument issus de CLEARSTREAM et,
en 2004, par des listings présentés comme plus complets, de la même provenance,
sans que leur contenu soit plus fiable ; que le dénonciateur s'est attaché à faireconcorder le contenu des écrits rédigés à cette fin avec celui des listings et tableauxutilisés ;

qu'il convient à cet égard d'observer qu'aux termes de l'ordonnance de renvoi,
seule est incriminée la rédaction et la remise d'écrits et de documents comptablesCLEARSTREAM ; qu'il apparaît que la démarche de Jean-Louis GERGORIN aévolué ; qu'en octobre et novembre 2003, il a présenté au Général RONDOT desdocuments qu'il a par la suite synthétisés dans une note chronologique, tandisqu'en 2004, auprès du juge Renaud VAN RUYMBEKE, il a décrit les faits dansdes lettres anonymes en les étayant par la suite de données informatiques ; quedans l'un et l'autre cas, la remise des écrits a suivi des échanges verbaux avecchacun des destinataires au cours desquels a été livré l'essentiel de la révélation ;
que ces échanges préalables, qui ne transparaissent sur aucun écrit ultérieur, ont euvocation, dans l'esprit du dénonciateur, à demeurer confidentiels ;

€- l'affirmation d'un cadre offert par CLEARSTREAM favorable auxturpitudes dénoncées

Attendu que selon l'auteur de la dénonciation faite en 2003, c'est bien le
fonctionnement de cette chambre de compensation qui est en cause en ce qu'ellea rendu possible l'instauration du système dénoncé ; que les annexes de la note denovembre 2003 (paragraphes 1 à 5) fournissent quelques explications d'ordregénéral sur l'historique de CLEARSTREAM, sur son fonctionnement, ainsi quesur la nature et l'objet des différents types de comptes ; qu'ainsi les comptes"RMBA" sont-ils présentés comme étant des comptes "non publiés" ouverts à la
chambre de compensation "directement", qui n'ont "aucun contact bancaire ou
financier à l'extérieur" et "ne peuvent ni recevoir ni transférer de l'argent ou des
valeurs mobilières" qu'à partir de comptes CLEARSTREAM non publiés, lesécritures relatives à ces opérations figurant dans une "comptabilité parallèle"; qu'est jointe une courte définition des "paradis fiscaux et financiers" et des avantages
qu'ils sont censés accorder en matière fiscale et d'accueil "illimité et anonyme de
capitaux" ;

Attendu que, de façon cohérente, la lettre du 3 mai 2004 reprend l'idée queCEDEL a offert une opportunité au "groupe mafieux" qui, étant à la recherche d'un
"système d'occultation financière", a su "profiter de la cupidité personnelle del'ancien président de la chambre de compensation luxembourgeoise, à partir de1986", et générer selon l'auteur un "système de blanchiment et de noircissementparfait garanti par l'extraordinaire efficacité technique de CLEARSTREAM";

Attendu que cette rhétorique impliquant la chambre de compensationluxembourgeoise a été reprise dans la lettre du 14 juin par l'emploi d'unesémantique bien éprouvée, signant la parenté avec les précédents écrits, en cequ'elle fustige le "dévoiement d'un extraordinaire système financier etinformatique, Clearstream, au profit d'intérêts crapuleux et même mafieux" et
pointant "les multiples réseaux utilisant le système de blanchiment de

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CLEARSTREAM" ;
€-la dénonciation de 2003:

* sur le caractère spontané de la dénonciation:
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier d'information et des débats que Jean-
Louis GERGORIN a reconnu avoir porté à la connaissance du Général PhilippeRONDOT l'existence de mouvements de fonds au bénéfice de plusieurs personnesayant participé à des opérations de corruption et de blanchiment parl'intermédiaire de la chambre de compensation luxembourgeoiseCLEARSTREAM, cela à partir d'informations que lui délivrait sa source, ImadLAHOUD ; que les déclarations de Jean-Louis GERGORIN sur l'objet, lesmodalités et le déroulement de cette dénonciation, ainsi que la nature et la teneurdes supports utilisés ont été confirmées par le témoignage de Philippe RONDOTreçu par les juges d'instruction et que celui-ci a confirmé à la barre du tribunal ;
que cependant Imad LAHOUD a toujours contesté avoir été la source de Jean-
Louis GERGORIN et avoir accompli, contrairement à ce que ce dernier a toujoursprétendu, la moindre pénétration du système informatique CLEARSTREAM ;

Attendu que cette dénonciation s'est déroulée au cours des mois d'octobre et denovembre 2003 au travers des propos tenus par Jean-Louis GERGORIN devant leGénéral RONDOT et par la remise à ce dernier de documents venant étayer sespropos et synthétiser le processus de mise en place du système mis en évidence ;
que ces documents ont été saisis en copie lors de la perquisition effectuée audomicile du Général RONDOT le 24 mars 2006 (scellé RONDOT MEUDON 7) ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a pris l'initiative de la dénonciation dès ledébut octobre 2003, en présentant sa source comme étant Imad LAHOUD qui avaitobtenu les données par la pénétration du système informatique CLEARSTREAM,
en remettant au Général RONDOT les premiers supports (liste de comptes ettableaux de transactions) et en les accompagnant de propos explicatifs ; qu'il aformalisé la dénonciation par une note qu'il a reconnu avoir remise au général le23 novembre suivant (D1090/7) ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a reconnu avoir présenté et remis au GénéralRONDOT dès le 5 novembre 2003, deux pages de listings comprenant une liste de97 comptes présumés ouverts au sein de la chambre de compensationluxembourgeoise et faisant apparaître 80 noms de personnes physiques ou morales
présumées titulaires de ces comptes chez CLEARSTREAM (D 859/31), ainsi quele document manuscrit intitulé "ANNUAIRE CATEGORIEL", précisant les lienspouvant exister entre les différents protagonistes et l'activité professionnelle dechacun d'eux (D859/31) et le document dactylographié intitulé "SYNTHESE
(OUTRE LES DEUX FONDATEURS)" qui reprend les mêmes éléments en classantles personnes concernées en fonction de leur secteur d'appartenance (D859/33) ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a également reconnu avoir remis au GénéralRONDOT, le 23 novembre suivant, la note chronologique comprenant en annexe5 paragraphes explicitant le cadre institutionnel de l'affaire et le fonctionnementdes différents types de comptes, et 7 tableaux de comptes et de transactions(D859/31) ;

qu'il ressort des termes employés dans cette note remise au Général RONDOT par

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Jean-Louis GERGORIN le 23 novembre 2003 que celle-ci avait pour objet dedécrire un système de corruption et de blanchiment de fonds organisé autour detrois personnages principaux : WANG CHUAN POO, Alain GOMEZ et PhilippeDELMAS; que ce système était né de l'intérêt porté à l'origine, dès 1989, par ledénommé WANG CHUAN POO au fonctionnement de la chambre de
compensation CEDEL ; que celui-ci est présenté comme ayant disposé d'une sériede comptes de type "dual" avec des correspondants bancaires situés dans desparadis fiscaux et financiers et entretenu en 1991 des relations avec les "narcotraficants
en Colombie";

qu'Alain GOMEZ apparaît comme ayant pris une part active et déterminante dansce montage en se dotant, à compter de 1992, du "moyen de blanchir ses rétro-
commissions" au travers de sociétés offshore ayant des comptes chezCLEARSTREAM et dans des paradis fiscaux, puis, à partir de 1994, en ouvrantet "attribuant des comptes à des parrains du milieu";

que l'arrivée de Philippe DELMAS et de plusieurs autres personnages aurait donnéà cette organisation l'apparence "d'une grande entreprise de corruption à dérive
maffieuse" qui perdurera au travers du recrutement et de la rémunération denombreuses personnes issues de divers milieux ;

que la "grande cooptation à la fois mafieuse et affairiste" à laquelle se serait livréAlain GOMEZ en 1994 , par l'attribution de comptes concerne les personnesmentionnées dans la colonne "beneficial owner" du "tableau n°1" joint à la notedu 23 novembre 2003, parmi lesquelles: Pierre MARTINEZ, Karel SCHMITT,
Arkadi GAYDAMAK, Pierre FALCONE, la société EURO RSCG, Alain de
WULF, Georges KIEJMAN, Jean-Charles MARCHIANI, Hadhmi AUCHI, Marc
RICH et Alain MADELIN ;

qu'un "tableau n°2" se rapporte au paragraphe suivant ainsi rédigé: "En 1996,
Alain GOMEZ opère une deuxième grande cooptation en initiant plusieursoligarques aux bienfaits des comptes dans des chambres de compensation
(Tableau n°2)" ; que ce deuxième tableau récapitule trois comptes attribués aux
nommés Roman ABRAMOVITCH, Mikhaïl KHODORKOVSKI et OlegDERIPASKA ;

qu'un "tableau n°3" illustre ce qui est qualifié de " troisième cooptation" opéréepar Alain GOMEZ en 1999 et mentionne certains comptes ouverts, pour troisd'entre eux dont l'un porte le n°03778, au nom de Philippe DELMAS, ainsi qued'autres aux noms d'Edin CAYBAN/CAYCARA, de Fabien BOSSART, de PetarMANDJOUKOW et de Serge de KLEBNIKOFF ;

que figurent, dans un "tableau n°4", les comptes attribués à des personnes
"cooptées" par Philippe DELMAS et travaillant "pour le compte de la nation",
qu'il s'agit de Bernard SQUARCINI, Gilbert FLAM (compte 9DTVE), Jean-
Jacques MARTINI (compte 9DTVU), Alain CHOUET, Edouard ULLMO, Jean-
Pierre JOULIN ; qu'il est également mentionné un compte ouvert au nom d'unesociété PRETORY SA ;

que, de la même façon, un "tableau n°5" récapitule les comptes CLEARSTREAMattribués à d'autres personnes également cooptées par Philippe DELMAS et issues

"de divers horizons très divers dans l'administration, l'industrie et la presse"(voirtableau 5 et 5bis)"; que sont concernées, outre Philippe DELMAS, les personnesdont les noms suivent : Dov YOFFE, la société CARLYLE Ltd, Gérald de

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ROQUEMAUREL, Alain LEMARCHAND, Jean-Pierre JOULIN, AlimjanTOCHTAKHOUNOV, Dominique BAUDIS, Laurence DORS, Irène STOLLER,
Jean-Pierre DUBOS, Alexandre JEVAKHOFF, Thierry DANA, Edwy PLENEL,
Dominique AMBIEL, Bernard MAINFROY, et Jean VEIL ;

que deux autres tableaux numérotés 4bis et 5bis regroupent un certain nombre detransactions effectuées courant 2001 à 2003 notamment à partir du compte 03778(précédemment attribué de Philippe DELMAS) et au bénéfice des comptes 9DTVE et 9 DTVU (précédemment attribués respectivement à Gilbert FLAM etJean-Jacques MARTINI) ; que ces tableaux ne mentionnent aucun nom de titulaireet comportent 14 colonnes intitulées "EM_ ACCT", "INS_ TYF_CD",
"SEC_QTY", "STAT_CD", "VAL_DT", "EXEC_DT", "SETTLE_DUE_DT",
"MATCHED_DT", "INS_AMT_USD", "TRADE_PRO", "CP_ACCT",
"ACCT_NUM", "ACCT_COUNTRY_NM", "INS_ID";

Attendu qu'il apparaît, à la lecture de ces documents, que ceux-ci sont le supportd'une même dénonciation initiée par Jean-Louis GERGORIN de façon spontanéeet dont le Général RONDOT a été, jusqu'alors, l'unique autorité destinataire, sansque ce dernier l'ait provoquée ni recherchée d'une quelconque façon ;

* sur la qualité du destinataire de la dénonciation
Attendu que les fonctions de Philippe RONDOT à cette époque, au sein du cabinetdu Ministre de la Défense, le mettaient en situation, voire dans l'obligation, sinonde porter les faits qui lui étaient dénoncés à la connaissance de l'autorité judiciaire,
à tout le moins d'en référer au directeur de cabinet du ministre d'autant qu'unepartie de ces informations impliquaient des membres des services dépendant ouayant dépendu de cette autorité hiérarchique, ce qui était le cas d'Alain CHOUETGilbert FLAM et d'Alexandre JEVAKHOFF ; que ces faits s'inscrivaient desurcroît dans le prolongement de la passation de marchés dans le domaine del'industrie française de l'armement et à ce double titre intéressaient au premier chefle ministère de la Défense ; qu'ayant eu connaissance de cette dénonciation, leGénéral RONDOT n'a pris, pour sa part, aucune autre initiative que celle d'enaviser son autorité hiérarchique ; que c'est précisément cette autorité, en lapersonne de Philippe MARLAND, qui, informé le 14 novembre 2003 de la "mise
en cause des personnels de la Défense , de l'industrie de l'armement et desServices de renseignements quant à leur présence sur les listings
CLEARSTREAM", lui a demandé, selon ses propres termes, de "procéder à unevérification de la vraisemblance des informations recueillies sur les personnels denotre ministère" (D859/11) ;

que par ailleurs, ainsi que l'a confirmé Michèle ALLIOT-MARIE, PhilippeMARLAND a parallèlement informé la ministre de la Défense de cette situation,
laquelle a rappelé les limites du champ d'investigation confié au général surcertaines personnes relevant de son autorité, ce qui excluait le cas des industriels(D1671) ;

Attendu que le Général RONDOT a pour sa part déclaré : " Jean-Louis
GERGORIN, au début du mois d'octobre 2003, m'a alerté sur une vaste entreprisede corruption à partir d'informations qu'il détenait d'une source qu'il m'aprésentée comme étant Imad LAHOUD. Dans un premier temps, Jean-LouisGERGORIN m'a présenté un certain nombre de tableaux manuscrits, que vousavez d'ailleurs saisis. Un peu plus tard une sorte de note explicative que vous avez

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également saisie, dont je crois me souvenir que cela m'a été remis autour du 23novembre et qui décrivait le fonctionnement du système en faisant apparaîtrequelques noms des initiateurs de ce système, en particulier, dans l'ordre, MWANG, M GOMEZ et Philippe DELMAS" (D2666/8) ; que le Général RONDOTen a informé le directeur de cabinet du ministre de la Défense le 9 octobre 2003,
faisant référence dans son verbatim à l'évocation rapide de "l'enquête de Jean-
Louis GERGORIN sur la mort de Jean-Luc LAGARDERE" , de "transferts
financiers" et des noms de Karel SCHMITT et Philippe DELMAS (D2575/104) ;

Attendu que ce sujet a été de nouveau abordé entre les deux hommes le 6novembre ; qu'il en est fait mention dans le verbatim du général sous la rubrique"ops MADHI *** (très sensible)", évoquant cette fois-ci les "fournitures de IL" en
lien avec l'affaire des Frégates ("TAIWAN"), les noms FLAM et MARTINI, ens'interrogeant sur les autorités à prévenir : "à qui en parler ? D de VILLEPIN ?
-> PR: affaire japonaise", et finalement la mention "voir avec MAM"
(D2575/112) ;

Attendu que le Général Philippe RONDOT a expliqué que les "fournitures de IL"
correspondaient aux listes de transactions intitulées "RESULT _EM_unk_
transactions_ data" , sur lesquelles figuraient des opérations financières dontauraient bénéficié Gilbert FLAM et Jean-Jacques MARTINI, et
"DS_PROD_ACCOUNT" incluant une énumération des données relatives aux
comptes déjà cités (cote D 859/33) ; qu'il a déclaré à ce sujet " C'est Imad
LAHOUD qui m'a remis personnellement ces documents dans mon bureau";

Attendu que le verbatim du 14 novembre 2003 mentionne l'affaire des listings sousle vocable "affaire de TAIWAN" en notant "information (source MADHI) en cours
d'exploitation" et citant les personnes impliquées: "A.GOMEZ, Ph.DELMAS, JJ.
MARTINI et G.FLAM" (D2575/114) ; que le Général RONDOT a précisé à ce sujet
: "Entre le 6 et le 14 novembre , Imad LAHOUD a continué à m'alimenter en
informations et je note que ces informations sont en cours d'exploitation de moncôté , c'est à dire que je continue à travailler dessus en attendant de rédiger unenote de synthèse pour mon ministre" (D2666/9) ;

Attendu que le verbatim du Général RONDOT en date du 25 novembre 2003 relatesous la rubrique "ops Reflux" l'exposé auquel celui-ci s'est livré auprès de
Philippe MARLAND "à partir des dernières informations communiquées parMADHI, avec mise en cause de: JJ MARTINI, A JEVAKHOFF, B. SQUARCINI,
JC. MARCHIANI, G.FLAM, A CHOUET" et mentionnant leurs interrogationscommunes sur la véracité des documents, les "objectifs visés par MADHI agissant
seul ou actionné par GERGORIN" , et la mise en cause d'un "système GOMEZ";
que selon le Général RONDOT , "Imad LAHOUD [lui] semblait très au courantde l'affaire japonaise , il connaissait l'implication de MM FLAM et CHOUET soità travers M GERGORIN, soit à travers les lectures qu'il avait faites dans lesmédias. Jean-Louis GERGORIN était également au courant de cette affairejaponaise. (...) Il en avait la version que lui avait donnée Jean-ClaudeCOUSSERAN , ancien DGSE à l'époque des faits" (D2666/13) ;

que le Général RONDOT précise dans sa note du 22 décembre 2003, qu'il apoursuivi ses "investigations" (...) "à partir de l'affaire japonaise" (D2575/120) ;
qu'il a déclaré devant les magistrats instructeurs que ses recherches avaientconcerné "Gilbert FLAM, ancien membre de la DGSE, le Général HEINRICH,

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ancien Directeur de renseignement militaire, M de KLEBNIKOFF, ancien colonelqui appartenait au SGDN et a quitté les armées, accessoirement M AlainCHOUET, ancien membre de la DGSE chef de G FLAM" (D2666/5) ;

Attendu que force est de constater que les termes et le cadre de cette mission sonten complet décalage avec ce que Jean-Louis GERGORIN a toujours prétendu avoirescompté, dès l'origine de sa démarche, de la part du Général RONDOT, à savoirla mise en oeuvre des moyens techniques de la DGSE aux fins de vérifier lacrédibilité des informations ; que Jean-Louis GERGORIN connaissait la qualitédes personnes dénoncées, ne serait-ce que par leur implication, pour certainesd'entre elles, dans les affaires ayant défrayé la chronique de la DGSE au cours del'année 2002 ; qu'il ne pouvait penser que pour autant le CROS s'abstiendraitd'informer immédiatement son autorité hiérarchique de cette affaire ;

Attendu qu'il s'ensuit que la dénonciation a été portée à la connaissance d'uneautorité administrative ayant le pouvoir de saisir l'autorité compétente, au sens del'article 226-10 du code pénal ;

Attendu que c'est pourtant toujours le souci lié à la mise en oeuvre des moyens devérification techniques nécessaires que Jean-Louis GERGORIN mettra en avantpour justifier l'évocation impromptue de cette affaire avec le ministre des AffairesEtrangères, le jour de l'an 2004 ;

€ les dénonciations de 2004

Attendu qu'en ce qui concerne les faits de l'année 2004, Jean-Louis GERGORIN
a reconnu avoir transmis l'ensemble des documents incriminés au juged'instruction Renaud VAN RUYMBEKE par l'intermédiaire de l'avocat Thibaultde MONTBRIAL ; qu'il a expliqué que cette démarche, initiée en avril 2004, non
seulement faisait suite à la dénonciation auprès du Général RONDOT, maiségalement avait été la résultante de la poursuite de ses relations avec sa sourceImad LAHOUD et avec le Général RONDOT dans le cadre de la mission quecelui-ci avait reçue du ministère de la Défense, voire de l'instruction ou de
l'incitation émanant de Dominique de VILLEPIN qu'il avait tenu informé de cetteaffaire depuis le mois de janvier 2004 ;

* sur la spontanéité des dénonciations
Attendu que Jean-Louis GERGORIN a déclaré que c'est précisément à partir dejanvier 2004 que, le Général RONDOT ayant souhaité "une intensification de la
pénétration et l'apport en temps réel du maximum d'informations sur les
transactions des comptes les plus significatifs", il avait demandé à Imad LAHOUD
de fournir désormais l'intégralité des fiches transactionnelles extraites deCLEARSTREAM, que c'est dans ce contexte qu'une masse considérable
d'informations a été recueillie au cours des mois de janvier à avril 2004, totalisant

8.200 transactions qui ne concernaient pas uniquement les comptes de l'annuairede novembre 2003 et que ces données ont été, comme le reste, transmises auGénéral RONDOT (D958/5) ;
Attendu qu'il résulte des déclarations de Maître Thibault de MONTBRIAL,
entendu par les juges d'instruction en qualité de témoin, et des constatations faites

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sur l'agenda saisi à son cabinet (scellé MONT2) que, dès le 7 avril 2004, Jean-
Louis GERGORIN avait pris son attache en vue de le consulter sur "une questionportant sur le risque de prise de contrôle dans une société commerciale par desporteurs qui interviendraient au nom de tiers mal intentionnés dans le but de ladéstabiliser (...) Cette question s'inscrivait dans un cadre plus large de lutte contredes pratiques mafieuses se déroulant dans le monde de l'industrie de
l'armement."(D776/2) ;

qu'une deuxième rencontre a eu lieu entre l'avocat et son client le 14 avril 2004,
avant même le terme de la consultation, au cours de laquelle Jean-Louis
GERGORIN, sur un ton "assez solennel", présentant sa démarche comme "ultraconfidentielle",
lui avait "demandé d'aller voir Renaud VAN RUYMBEKE et de lui
dire qu'il souhaitait lui faire part d'un certain nombre d'éléments qu'il avait à sadisposition ou qu'il attendait incessamment (...) relatifs aux rétro-commissionsdans l'affaire des frégates de Taïwan (...) il s'agissait de permettre au juged'établir des liens financiers entre M. WANG et un certain nombre d'industriels
français", cette intervention auprès du magistrat devant demeurer "absolument
secrète" (D776/3) ; que, selon le témoin, après deux entrevues qu'il avait euespersonnellement avec le juge Renaud VAN RUYMBEKE à l'occasion desquellesle sujet avait été abordé, le magistrat a donné son accord sur le principe d'une tellerencontre, que trois réunions ont suivi, dont deux à son domicile et la troisième àson cabinet, que lors du premier rendez-vous, Jean-Louis GERGORIN a montréquelques documents, des feuilles de papier sur lesquelles figuraient desmouvements de fonds entre les comptes, que des noms ont été cités parmi lesquelsceux de "Messieurs WANG, personnage cité comme étant au centre de l'affaire desFrégates de Taïwan quant au versement d'éventuelles rétro-commissions,
GOMEZ, et MARTINEZ, ainsi qu'un nom russe", que lors du deuxième rendez-
vous, Jean-Louis GERGORIN a montré à Renaud VAN RUYMBEKE, qui les aeus en mains, "3 ou 4 pages sur lesquelles apparaissaient des noms, desmouvements de fonds et des numéros de comptes", que c'est au cours de latroisième rencontre, dans la nuit du 28 au 29 avril 2004, que le juge d'instructions'est dit "intéressé de faire rentrer ces éléments en procédure" mais s'est heurté
au refus de Jean-Louis GERGORIN de déposer comme témoin, rejetant l'idéed'une audition de témoin anonyme (D776/5et6) ;

Attendu que Renaud VAN RUYMBEKE a rapporté aux juges d'instruction quel'avocat lui avait dit "qu'un très haut responsable d'une société d'armement avaitdes révélations urgentes à [lui] faire dans l'affaire des frégates de TAIWAN.
Menacé de mort et prochain sur la liste des "morts des frégates", il voulaitconserver son anonymat et [le] rencontrer sur le champs de manière strictementconfidentielle"; que le magistrat a précisé que, lors de cet entretien, Jean-Louis
GERGORIN "présentait un état d'anxiété et de fébrilité manifeste, il étaitterrorisé et craignait pour sa vie", qu'il lui a fait part de ses soupçons sur lescirconstances de la mort de Jean-Luc LAGARDERE et de "sa conviction queJean-Luc LAGARDERE avait été assassiné par des mafieux russes" et lui a par
ailleurs confié que "des oligarques russes envisageaient de prendre prochainementle contrôle du groupe LAGARDERE grâce à l'appui de l'un de ses ancienscollaborateurs, M Philippe DELMAS et de M Alain GOMEZ" ; que le magistrata en outre indiqué avoir eu la conviction que Jean-Louis GERGORIN avait été"envoyé par la direction du groupe EADS dont les intérêts paraissaient gravementmenacés" (D729/2), Jean-Louis GERGORIN ayant agi à visage découvert ets'étant présenté comme "l'un des hauts dirigeants du groupe LAGARDERE";

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Attendu que Renaud VAN RUYMBEKE a pu constater que Jean-Louis
GERGORIN se montrait dans ses paroles particulièrement "convaincu et
convaincant", ce qu'il a confirmé à l'audience, que son interlocuteur lui a montrédes listings CLEARSTREAM sur lesquels apparaissaient des oligarques russes,
des membres du groupe EADS, des membres des services secrets et des hommespolitiques et a notamment cité Messieurs WANG, GOMEZ, MARTINEZ,
DELMAS, KHODORKOVSKI, SQUARCINI, MARTINI, STRAUSS-KAHN,
CHEVENEMENT et MADELIN (D729/3) ;

Attendu que c'est dans ces circonstances que, le magistrat n'ayant pas participé àla détermination du mode de transmission des envois anonymes, Jean-LouisGERGORIN est venu au cabinet de l'avocat "à l'improviste", le lundi matin
suivant, soit le 3 mai, et lui a remis une enveloppe fermée pour la passer à leur"ami"; que Maître de MONTBRIAL a admis, sans s'en souvenir, avoir transmisla lettre à Renaud VAN RUYMBEKE sans avoir lu préalablement son contenu(D776) ;

Attendu qu'il n'est nullement démontré que le magistrat ait provoquél'intervention de Jean-Louis GERGORIN auprès de lui , qu'au contraire c'est bience dernier qui a spontanément pris l'initiative de le contacter et de lui révéler desfaits pouvant l'intéresser dans la progression de son information ; que dans cesconditions la spontanéité des envois ultérieurs caractérisant les dénonciations tellesque retenues dans les termes de l'ordonnance de renvoi apparaît démontrée ;

* Sur l'unité d'ensemble des dénonciations
Attendu que Jean-Louis GERGORIN assure s'être attaché à répondre au travers deses envois successifs aux attentes du magistrat instructeur qui, de son côté, lançaitdes investigations aux fins de vérifier la pertinence des données portées à saconnaissance ;

Attendu que l'objet de la lettre anonyme reçue le 3 mai 2004 par le juge RenaudVAN RUYMBEKE (D119) était de dénoncer l'existence d'un "groupe mafieux(...) qui commence à étendre en France des méthodes de corruption et deprédation qui ont fait tant de mal à la Russie dans les années quatre vingt dix", et
d'un "système de blanchiment et de noircissement parfait" ;

que l'exposé suivant reprend les éléments chronologiques déjà exposés ennovembre précédent au Général RONDOT, présentant cette fois-ci WANGCHUAN POO comme le "dirigeant d'une importante Triade et un des principauxintermédiaires pour les achats d'armes sur l'île [ de Taïwan]" qui aurait ouvert en
1991, "juste après la signature des contrats des frégates avec la France", en tant
qu'ayant droit d'un trust Citibank/ Cititrust à Bogota, un compte RMBA n°82313,
et, en 1992, aurait introduit Alain GOMEZ, Président de Thomson-CSF, en lui
ouvrant un compte sous le n°83656 dont le titulaire est également un trust à la
Citibank ;

que sont ensuite énoncées les différentes phases de recrutement auxquelles seserait livré Alain GOMEZ en 1994, 1996 et 1999 ; qu'il est également indiquél'arrivée dans le système de Pierre MARTINEZ, présenté comme un proched'Alain GOMEZ, également titulaire de comptes mouvementés en fonction des

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besoins, et de Philippe DELMAS "qui deviendra le régisseur du système financier
qui avait été mis en place" et qui, "à partir de 2000, (...) se lance dans uneentreprise de corruption de responsables des Ministères de Forces Français";

qu'il est mentionné que "Alain GOMEZ, WANG CHUAN POO et leurs amis russes
établiront des liens financiers avec des familles colombiennes" dont les compteschez Clearstream sont précisés (92158,92159, 92160 et 72031) et qu'AlainGOMEZ "fera preuve de générosité envers quelques amis Français";

qu'enfin, "un véritable système financier totalement occulte fonctionne depuis dixans brassant des milliards entre trois grands groupes: la mafia prédatrice qui s'estcréée par le pillage des richesses de l'Union soviétique, les narcos-traficants et ungroupe d'industriels européens dévoyés";

que cette lettre mentionne l'existence de nombreux comptes parmi lesquels les
comptes :

• C0043, C0044, 82313 au nom de WANG CHUAN POO,
• 83656 au nom de Cititrust Bogota attribué à Alain GOMEZ ,
• 84601 au nom de Cititrust à St Hellier Jersey attribué à Michail
KHODORKHOVSKY,
• 03778 au nom de Philippe DELMAS,
• les comptes RMBA C2059 , 9DTVE, 9DTVU et C2071 ouverts par le mêmePhilippe DELMAS et "attribués à des hauts fonctionnaires français en activités";
qu'elle comporte également une liste de sept comptes dont deux sont attribués àPierre MARTINEZ (comptes RMBA n°E3521 domicilié à Madrid et compten°73067 à la JULIUS BAER domicilié à Genève), un compte n° 55887 au nom deMarc RICH (domicilié à la CITIBANK à Nassau) et quatre autres comptes, les n°
90765, 90780, 90762 et 90764, en relation avec des comptes domiciliés à laZUGER KANTONAL BANK à Zug (Suisse), attribués à un "parrain russe" pourles trois premiers et à un "parrain ouzbek" pour le quatrième ;

que cette liste présente une similitude de caractères et de mise en page avec lelisting de 2 pages de novembre 2003 et concorde avec les informations
antérieurement délivrées au Général RONDOT; qu'ainsi, les intitulés des comptesattribués à Pierre MARTINEZ et Marc RICH ont été fidèlement repris, les comptesattribués aux "parrains" ressortant quant à eux dans le listing de novembre 2003
comme étant libellés aux noms de Victor AVERIN (compte 90780), SergueïMIKHAILOV (compte 90765), Karel SCHMITT (compte 90762) et GafurRAKHIMOV (compte 90764) ;

que ces personnes figurent également dans l'annuaire catégoriel de 2003 en qualité
de "consultant sécurité" (Pierre MARTINEZ), "Parrain/sécurité" (Karel
SCHMITT), "Parrain mafieux" (Victor AVERIN, Sergueï MIKHAILOV, Gafur
RAKHIMOV) ou bien de "milliardaire" et "financier/blanchisseur" (Marc
RICH); qu'ils étaient par ailleurs inclus dans les "consultants sécurité", "12
mafieux de l'est de tout premier plan" et les "intermédiaires affairistes limite
mafia" visés dans la "synthèse" établie et remise à cette même occasion; quel'ensemble de ces comptes apparaissait avec une date unique d'ouverture au 31octobre 1994 ;

que le texte est clos par "la manifestation particulièrement scandaleuse de ce

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système" et le transfert de 1.150 Millions de USD ayant affecté les comptes 84601et 83656 puis les comptes 87032 , 03778, 89492 puis finalement, pour partie, uncompte 51179 au bénéfice réel du Hedge-fund "Highfields Capital Limited" établià Grand Cayman à hauteur de 200.000.000 USD ;

Attendu que Thibault de MONTBRIAL a indiqué que Jean-Louis GERGORIN luiavait remis successivement une lettre et deux CD-ROM qu'il a postés de troisendroits différents mais que seulement la lettre d'une part et un des deux CD-ROMd'autre part sont parvenus au juge (D776/7) ;

Attendu qu'il a été établi que, le 14 juin 2004, le juge Renaud VAN RUYMBEKEa reçu par pli postal une lettre et un listing de 19 feuillets ; que la lettre reprend lestermes de la dénonciation d'origine sur le réseau de blanchiment mais, y ajoutant,
décrit la réaction des responsables et des clients de CLEARSTREAM suite auxinvestigations menées par les juges, évoquant la clôture groupée des 895 comptesle 12 mai 2004 et la fuite des capitaux vers des paradis fiscaux et financiers autravers de "l'exode des crapules";

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a reconnu avoir rédigé dans son bureaud'EADS la lettre reçue le 14 juin 2004 par le juge Renaud VAN RUYMBEKE(D123) et, comme la première, conjointement avec Imad LAHOUD, et y avoirjoint la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai 2004 que celui-ci lui avaitapportée le 11 juin (D2751/18) ; qu'il a précisé qu'Imad LAHOUD éludait sanscesse sa demande de transmettre les listings de transactions directement liées audossier des Frégates que le juge VAN RUYMBEKE lui avait fait demander parMaître de MONTBRIAL, ce que le magistrat a toujours contesté, et qu'il s'étaitfinalement décidé, en raison de "la frustration du juge", à transmettre à ce dernier
la liste des 895 comptes et la lettre jointe (D2751/21) ;

Attendu que l'objet de cette deuxième lettre , signée "DT", était de réitérer la
dénonciation de ce qui est qualifié de "dévoiement d'un extraordinaire systèmefinancier et informatique, Clearstream, au profit d'intérêts crapuleux et mêmemafieux";

qu' après avoir constaté "une accélération de ce scandaleux détournement"
l'auteur indique avoir pris la décision d'informer le magistrat auquel il s'adresse
en ces termes: "des agissements d'un des multiples réseaux utilisant le système deblanchiment de Clearstream, réseau qui avait partiellement l'avantage d'êtrel'objet d'une de vos enquêtes. Avec vos collègues luxembourgeois et suisses vousavez agi avec célérité et efficacité provoquant stupeur et panique chez les crapulesà Luxembourg, Genève et autres places concernées, surprise et inquiétude chezleurs nombreux collègues naïfs abusés ou volontairement aveugles";

que la dénonciation est actualisée en révélant que "La direction de Clearstream
pour se couvrir vis à vis des actionnaires allemands a organisé l'Exode des
crapules: 895 comptes non publiés ont été fermés en bloc le 12 mai 2004, lessoldes considérables correspondants étant transférer à des paradis fiscauxclassiques";

que l'auteur prend soin d'ajouter : "Tous ne sont pas des comptes crapuleux et tousles comptes crapuleux n'ont pas été fermés ce jour-là. Mais pour l'essentiel le
compte y est. La plupart des comptes individuels douteux (...) ont été fermés";

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qu'il poursuit en ces termes : "Il s'agit là de comptes individuels anormaux etcontraires aux statuts de clearstream. Mais à côté de ces comptes individuelsdirects, de nombreux comptes indirects dissimulés par des trusts tels le 82313 oupar des comptes jumeaux dans des banques détenant officiellement des comptesclearstream tels le C0825, ont quittés les brumes luxembourgeoises pour des lieuxinsulaires et ensoleillés. Enfin un certain nombre de comptes non publiéscorrespondant seulement à des caisses noires d'entreprises ou de banques à priori(mais sait-on jamais) ont été fermés pour noyer le poisson (pourri)" ;

que cette lettre comporte une liste regroupant six comptes de type RMBA attribuésà des personnes physiques dont les noms sont à consonance italienne et domiciliésà Milan, Mestre ou Turin: BARTOLINI Dario (n° C0583), BOTTEGA Sergio(n°C0591), GIANNINI Claudia (C0611), ZOPELLARO Luigi (C0616),
QUADRINI Franco (C0618) et GRISERI Agostino (CO619) ; que ces mêmescomptes et libellés apparaissaient déjà dans l'annuaire de 2003 avec une mêmedate d'ouverture, ce tableau de six comptes étant lui-même un extrait du listing des895 comptes joint à la lettre et portant tous la même date de fermeture du 12 mai2004 ( D123/2 à 20) ;

que certains des comptes figurant dans cette liste, parmi lesquels les comptesattribués à Stéphane BOCSA, Charles EDELSTENNE, Patrick GAUBERT,
HOMA K ZAND, Issam KEIRALLAH et Paul de NAGY, n'apparaissaient pasdans les listings remis au Général RONDOT ;

Attendu que le CD-ROM reçu le 20 août 2004, qui a été adressé pour compléterla dénonciation du 14 juin 2004, est censé contenir la totalité des comptesCLEARSTREAM par reproduction de la base de données conforme au DATASERVER de CLEARSTREAM, mais dont l'enquête a démontré qu'elle avait étémodifiée par la mention des comptes suivants:

- 90765 Ser MIKHAILOV, 90780 Vict AVERIN, 3881 Arka GAYDAMAK,
E3528 PierreFALCONE, U0542WANG CHUAN POO, E3521MARTINEZ Pierre
Y ASOCIADOS SA, 92344 FR GONTIER, 55887 M RICH, 03637 JP
CHEVENEMENT, 90764 GAF RAKIMOV, R6439 STEPHANE BOCSA,R6440
PAUL DE NAGY, 03638 B DELAFAYE, 03639 P DOURY, 78111 ISSAM
KHEIRALLAH et 73071 ALAIN de WULF sur une même page (D1163/92),
- C0826 Serge de KLEBNIKOFF , C0825 la société PRETORY SA, C0827 EULMO et 9DVVY Jean-Pierre JOULIN (D1163/432),
- 9DTVU JJ MARTINI (D1163/413),
- 9DTVE G FLAM (D1163/411),
- C0723 Edin CAYBAN et C0621FAB BOSSARD (D1163/366),
- C0724 PET MAJOUKOW et C0622 GLYNDALE INV LTD (D1163/366),
- 03778 PHIL DELMAS (D1163/365),
- 37070 HOMA K ZAND (D1163/513),
- 37035 A LEMARCHAND, 37034 G de ROQUEMAUREL , 37067 JP JOULIN,
88332 LAETITIA CASTA, N0055CHARLES EDELSTENNE et 9HDRT A
TOTCHTAKHOUNOV, (D1163/512),
- 83025 D STRAUSS-KHAN (D1163/329),
- 81739 ALAIN MINC CONSEIL et 81738 JF HENIN (D1163/284),
- 81409 PIERRE PASQUA (D1163/273),
-84667 ROMAN ABRAMOVITCH, 84601MIKH KHODORKOVSKI et 84660
Oleg DERPASKA (D1163/255),
- 99302 EURORSCG-TRUST&CO (D1163/199),
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- 90762 Kar SCHMITT (D1163/172),
- 55586 NAD AUCHI (D1163/127),
- 73067 PIE MARTINEZ (D1163/115),
- C2071 Alain CHOUET (D D1125/5),
- A0016 Patrick GAUBERT et 83656, 87127, 87128 et 7032 Alain GOMEZ
(D1125/6),
- 80807 Alain MADELIN et 70769 Jean-Charles MARCHIANI(D1125/7),
- C0259 Bernard SQUARCINI (D1125/8),
- 88287 Dov YOFFE (D1125/9),
- 03639 DOURY P (D1125/6).
Attendu qu'enfin, le CD-ROM reçu le 4 octobre 2004 par le juge Renaud VANRUYMBEKE (D128 et scellé unique du 5 octobre 2004) contient un fichier sousformat "word" qui est constitué d'une courte lettre signée "DT" et adressée au
magistrat, présentant "un début d'extrait des transactions faites par les crapules"
et se terminant par la formule "A bientôt"(D976/2) ; que cette lettre accompagnedes tableaux de transactions placés dans neuf fichiers distincts et relatifs à des"comptes origines",sans précision des titulaires (outre les comptes 76082, 76087,80309, 81321, 93991 qui apparaissent sans intérêt), et au profit de "comptesdestinataires" identifiés ainsi qu'il suit :

• transactions réalisées en janvier et février 2004 avec le compte-origine 03778 (cecompte était jusque là attribué à Philippe DELMAS (D977/3 et 12):
2.500.000 $ : MARTINEZ Pierre Y ASOCIADOS SA/ E3521
3.500.000 $: Pierre FALCONE /E3526
100.000 $ + 500.000 $ +1.000.000 $+150.000 $: Serge de KLEBNIKOFF/
C0826
100.000 $ + 100.000 $: P PASQUA /61409
50.000 $ + 150.000 $+50.000 $: GEOS /C0825
200.000 $ + 300.000 $: EURO RSCG TRUIST&CO /99302
200.000 $: EDIN CAYBAN /C0723
500.000 $ + 350.000 $: Karel SCHMITT /90762
75.000 $ +100.000 $+ 75.000$: FAB BAUSSART /C0621
100.000 $ +250.000 $: PET MANJOUKOW /C0724
350.000$: JC DE LASTEYRIE DU SAILLANT /C0826
150.000$: H de LASTEYRIE DU SAILLANT /C0826
100.000 $: Dominic SIMPSON /C0826
100.000 $: Roger WILSON /C0826
400.000 $ +100.000$: Jacques FRANQUET /C0825
175.000.000 $: Alain GOMEZ /87032;
• transactions réalisées avec le compte-origine 80082 (ce compte était censéfonctionner sous le libellé BPB HOR dans l'intérêt de Brice HORTEFEUX
(D1164/7):
•75.000 $ GEOS /C0825 (Banque JULIUS BAER AC 89040) le 4/09/2003
100.000 $ EURORSCG-TRUST&CO /99302 le 14/10/ 2003
75.000 $ SER de KLEBNIKOFF /C0826 (Banque JULIUS BAER AC89040) le 12/12/2003
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•150.000 $ E PLENEL Banque Cantonale Vaudoise AC.127-A-61221 le23/01/2004;
• transactions réalisées en janvier et février 2004 avec le compte-origine 90762 (cecompte avait été attribué à Karel SCHMITT) (D1164/12):
500.000 $ Philippe DELMAS 03778
100.000 $ FAB BOSSART C0621
300.000 $ EDIN CAYBAN C0723
100.000 $ A TOCHTAKHOUNOV 9HDRT
500.000 $ Alain GOMEZ 87127;
Attendu qu'ainsi les quatre envois au juge Renaud VAN RUYMBEKE
comportent, d'une part, des éléments identiques dans chacun des envois, d'autrepart, des précisions complémentaires ou des informations nouvelles visant tant àrenforcer les éléments initiaux qu'à étendre les termes de la dénonciation ; que lateneur de ces remises successives vise tout à la fois à asseoir progressivement lesérieux et la complexité des faits dénoncés et à leur assurer une apparentecohérence globale; que les similitudes comme les différences existant entre cesquatre envois prouvent le caractère délibéré et à chaque envoi réitéré de la volontéde leur auteur ;

- sur la fausseté des allégations :
Attendu que l'information a établi que les faits allégués ne pouvaient trouveraucune justification dans les documents communiqués tant au Général RONDOTqu'au juge Renaud VAN RUYMBEKE ;

€ le rôle historique de premier plan attribué à Wang Chuan Poo relayé parAlain GOMEZ et Pierre MARTINEZ :

Attendu que Wang Chuan Poo, qui, aux termes de la lettre du 3 mai 2004, cumuleles titres de "correspondant de longue date de la CIA" , de "dirigeant d'une
importante triade" et de "l'un des principaux intermédiaires pour les achats
d'armes de l'Ile", est présenté dans la note du 23 novembre 2003 comme ayantdisposé d'un premier compte C0043 de type "RMBA" et d'un second, C0044, detype "dual", ainsi que d'une série d'autres comptes de type "dual" avec descorrespondants bancaires dans des paradis fiscaux et financiers ;

que les vérifications effectuées auprès de CLEARSTREAM ont établi que lesintitulés C0043 et C0044 correspondaient à des comptes de contrepartiesdomestiques, que le compte C0044 avait pour titulaire depuis le 9 septembre 2003la BNP PARIBAS ARBITRAGE auprès de la maison de compensation BANCAINTESA à Milan et avait été utilisé plus de 10 ans auparavant et jusqu'au 6 avril1993 comme compte de contrepartie domestique avec un intitulé "SOFIR's-
COMMISSIONARIA DI BORSA - MILAN"; qu'il a été découvert que le compteC0043 n'avait pas existé pendant les 10 dernières années pour avoir été clôturé le18 février 1993, après avoir servi de compte de contrepartie sous l'intitulé

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"ADORNO GIOVANNI-STOCKBROKER-MILAN (D2845/51-61-16); queMONTE TITOLI n'a pas retrouvé trace de ces deux comptes ;

Attendu que la note du 23 novembre mentionne l'existence, à partir de 1991, derelations de Wang Chuan Poo avec les "narco-traficants en Colombie", ce quetendraient à démontrer ses liens financiers avec le milieu par le biais d'un nouveaucompte de type dual n°82313; que la lettre du 3 mai 2004 adressée au juge RenaudVAN RUYMBEKE, prend le soin de préciser que l'ouverture de ce compte est
intervenue "juste après la signature de contrats des frégates avec la France";

que les investigations ont finalement fait ressortir que ce compte n'a été ouvert
que le 1er décembre 1997 et au nom de CITITRUST SA BOGOTA" et demeure
actif sous la dénomination "CITITRUST SA-HUGO CACERES GOMEZ"
(D2845/51-18) ;

Attendu que selon la note remise au Général RONDOT en novembre 2003, lesliens entre Wang Chuan Poo et Alain GOMEZ se sont manifestés dès1992 parl'ouverture d'un compte dual 83656 à l'initiative du premier au bénéfice dusecond, avec correspondant bancaire la Citibank, via "Cititrust", et crédité dèsl'ouverture de 1 million de dollars américains, puis, jusqu'en 1994 pour un totalde 125 millions de dollars américains ;

que ce compte 83656, devant permettre à Alain GOMEZ, selon le dénonciateur,
de "blanchir ses rétrocomissions",s'est révélé être un sous-compte rattaché aucompte précédent 82313 ouvert le 14 octobre 1999 au nom de "CITITRUST SACARLOS
EDUARDO GOMEZ" et clôturé le 17 mai 2001 (D2845/51-19) ;

Attendu qu'il sera pourtant fait allusion, dans la note du 23 novembre 2003, àl'existence sur ce compte 83656 d'un crédit à hauteur de 1.200 millions de dollarsinscrit le 9 octobre 2003 en provenance d'un compte 84601 attribué à MikhailKODORKHOVSKI qui, dans la lettre du 3 mai 2004, sera présenté comme "le plusnotable" des oligarques russes auxquels Alain GOMEZ aura recours à compter de1996 et qui, ainsi que l'avait déjà mentionné la note de 2003, agiront comme"banquiers et financiers permanents d'Alain GOMEZ et de ses troupes"; que letableau n°2 dénombrait à ce titre les trois comptes suivants domiciliés à Citibank/Cititrust à Saint Hellier - Jersey :

- 84667: Roman ABRAMOVITCH,
- 84601: Mikhaïl KHODORKOVSKY,
- 84660: Oleg DERIPASKA ;
qu'il s'est avéré que le compte 84601 n'existait pas dans le DATA WAREHOUSE
de CLEARSTREAM ;
Attendu que tant la note de novembre 2003 que la lettre du 3 mai 2004
mentionnent l'ouverture par Alain GOMEZ de nombreux comptes chez CEDELà compter de 1994, certains sur lesquels il conservera la mainmise et d'autres quifonctionneront au bénéfice de personnages qualifiés "d'affairistes" ou de"mafieux", parmi lesquels les personnes citées dans le tableau n°1 ; que c'est àcette occasion qu'apparaissent les comptes attribués à Pierre MARTINEZ (comptes03776, 73067 et E3521) qui selon le montage exposé pouvaient être utilisés pourcréditer les comptes suivants:

- 90762 Karel SCHMITT,
- 90764 Gafur RAKHIMOV,
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- XXXX Christian GIACOMOTTO,
- 90765 Serge MIKHAILOV,
- 03881 Arkadi GAYDAMAK,
- E3528 Pierre FALCONE,
- 99302 société EURO RSCG,
- 73071 Alain de WULF,
- 99639 Georges KIEJMAN,
- 79769 Jean-Charles MARCHIANI,
- 55586 Nadhmi AUCHI,
- 55887 Marc RICH
- 80807 Alain MADELIN ;
Attendu que les comptes Pierre MARTINEZ (73067 et E3521) seront repris dansla dénonciation du 3 mai 2004 au même titre que les comptes attribués à Marc
RICH (55887) et à des parrains de la nouvelle mafia s'étant "lancés dans le pillagede l'ex-union soviétique" (90762, 90764 ,90765) ;

que le compte 73067 était en réalité un sous-compte rattaché au compte principal11622 qui avait été ouvert au nom de "SOCIETE BANC JULIUS BAER-PLEDGEAC" le 8 août 1992 et clôturé le 14 décembre 1995 (D2845/51-20) ;

qu'il s'est avéré que le compte E3521 avait été fermé en date du 25 mai 1995(D2845/51-18) ; qu'il n'est pas sans intérêt de préciser que le libellé du compteE3521 (Pierre MARTINEZ) différait de celui apparaissant sur le CD-ROM reçupar Renaud VAN RUYMBEKE le 9 juin 2004 envoyé par Bernard MONNOT,
provenant de CLEARSTREAM mais n'ayant subi aucune modification et surlequel ce compte ressort sous le libellé "Martinez Gil y Asociadios AVB SA";

Attendu en outre qu'au terme des investigations qu'il a fait diligenter dans ledossier de l'affaire des Frégates, le juge Renaud VAN RUYMBEKE a clôturé soninformation par une décision de non lieu en date du 1er octobre 2008 notamment
pour charges insuffisantes à l'encontre des consorts WANG, au premier rangdesquels se trouvait Chuan Pu WANG ; que le magistrat instructeur a rangé parmiles "pistes infructueuses" les investigations destinées à vérifier la réalité du
"réseau WANG" et menées notamment sur CLEARSTREAM à la suite, d'une part,
du témoignage d'un ancien cadre bancaire, anciennement installé à Taïpeh, selonlequel cette institution avait été utilisée pour le versement de rétro-commissionsen particulier dans l'affaire des Frégates, et, d'autre part, de la réception des lettres
des 3 mai et 14 juin 2004 adressées par "une personne désireuse de conserver
l'anonymat" faisant état de comptes utilisés chez CLEARSTREAM et imputés auxdénommés WANG et GOMEZ ouverts à la CITIBANK de Bogota ; que tel étaitégalement le cas des investigations relatives au train de vie d'Alain GOMEZ quiavait été par ailleurs dénoncé par lettre anonyme du 28 décembre 1995 (D4578) ;

€ le rôle attribué à Philippe DELMAS: le redéploiement du système :

Attendu que selon les éléments fournis dans la note remise au Général RONDOT,
Philippe DELMAS apparaît en 1999 dans la 3ème cooptation réalisée par AlainGOMEZ, qu'il est indiqué au sujet de Philippe DELMAS que "tout versement
d'Alain GOMEZ ou des oligarques au bénéfice des lieutenants initiés en 1999passe quasi-systématiquement par ses comptes à lui"; que c'est ainsi qu'il aurait

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ouvert trois comptes apparaissant dans le tableau n°3 , parmi lesquels le compte03778, ainsi que divers comptes aux noms d'Edin CAYBAN/CAYCARA, deFabien BOSSART, de Petar MANDJOUKOW (C0724) et de Serge de
KLEBNIKOFF (C0628) ;

qu'aux termes de la même note, le compte 03778 aurait reçu 225 millions d'euros(issus des 1,2 million de dollars versés par le compte 84601) qui auraient été"nantis via le compte 73067 à la Julius Baer" ; que ce même compte 03778apparaît en outre comme "compte-origine" dans les transactions figurant dans letableau 4bis annexé à cette même note et à destination des comptes 9DTVE et9DTVU ;

que c'est dans la lettre du 3 mai 2004 que l'on apprend qu'un transfert de 250millions d'euros avait préalablement transité par le compte 87032
Citibank/Cititrust d'Alain GOMEZ avant d'alimenter le compte 03778 de PhilippeDELMAS le 24 octobre 2003 ; qu'il est cependant affirmé dans cet écrit que deuxvirements ont été réalisés à partir de ce dernier compte, l'un de 35 millions dedollars au profit du compte 89492 du fonds CARLYLE via un trust, et l'autre à
hauteur de 200 millions de dollars au profit du compte 51179 détenu par le fonds"HIGHFIELDS Capital Ltd";

que la lettre du 3 mai 2004 mentionne dans son dernier paragraphe l'existence enoctobre 2003 d'un virement de 35 millions de dollars émanant du compte 03778de Philippe DELMAS au profit du compte 89492 au nom de CARLYLE détenu viale Pacific international Trust à Vanuatu dont la note du 23 novembre ne faisait pasétat alors que ce même compte apparaissait dans le tableau n°5 annexé ainsi quedans le listing de deux pages et l'annuaire catégoriel remis au général RONDOT; qu'il ne figurera sur aucun des documents postérieurs, y compris le superannuaire du 20 août, pourtant censé reprendre l'intégralité des comptes clients ;

que les vérifications réalisées ont cependant établi que le compte 87032 n'avaitconnu aucun mouvement pour la période du 1er au 31 octobre 2003 (D2959/3) etque le compte 03778 avait en réalité été ouvert le 8 août 1992 sous le libellé
"SOCIETE BANC JULIUS BAER PL. AC,"qui existait toujours et avait été reliéau sous-compte non publié 73067 également détenu par la Banque JULIUS BAERlequel a été clôturé le 14 décembre 1995 (D2845/52) ;

que l'ensemble de ces éléments privaient de toute crédibilité les affirmationscontenues dans les écrits en ce qu'ils impliquent Philippe DELMAS ;

€ l'identification des diverses personnes cooptées et destinataires de fonds:

Attendu que le listing de 97 comptes remis au Général RONDOT comporte uneliste exhaustive des comptes détenus par chacun des participants au systèmeocculte dénoncé ; qu'apparaissent, outre les noms des quatre personnes précitées,
les noms suivants :

Philippe DOURY, Karel SCHMITT, Gafur RAKHIMOV, Christian
GIACOMOTTO, Bernard DELAFAYE, Sergei MIKHAILOV, Viktor AVERIN,
Arkadi GAYDAMAK, Pierre FALCONE, la société EURO RSCG Trust & Co,

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Brunetta d'USSEAUX, Jean-Pierre CHEVENEMENT, Alain de WULF, GeorgesKIEJMAN, Jean-Charles MARCHIANI, Nadhmi AUCHI, Marc RICH, François
GONTIER, Alain MADELIN, Roman ABRAMOVITCH, Mikhail
KODORKHOVSKI, Oleg DERIPASKA, Pierre PASQUA, Jean-François HENIN,
la société Alain Minc Conseil, Dominique STRAUSS-KAHN,Edin
CAYBAN/CAYKARA, Fabien BOSSART, Petar MANDJOUKOV, la sociétéGLYNDALE Investment Ltd, Serge de KLEBNIKOFF, Bernard SQUARCINI,
Gilbert FLAM, Jean-Jacques MARTINI, Alain CHOUET, Edouard ULMO, lasociété PRETORY SA, Jean-Pierre JOULIN, Dov YOFFE, Gérald de
ROQUEMAUREL, Alain LEMARCHAND, Alimjan TOCHTAKHOUNOV,
Odile JACOB, Alain GENITEAU, Dominique BAUDIS, Laurence DORS, IreneSTOLLER, Jean-François DUBOS, Alexandre JEVAKHOFF, Thierry DANA,
Edwy PLENEL, Dominique AMBIEL, Bernard MAINFROY, Jean VEIL ;

Attendu que si la mention, parmi les personnes dénoncées dès novembre 2003, decertains noms de personnes déjà notoirement impliquées dans des affaires ayantdéfrayé la chronique judiciaire peut s'expliquer par le souci de crédibiliser dès cestade du processus l'ensemble de la construction, d'autres peuvent être répartiesen fonction d'autres critères personnels ;

qu'au-delà des hommes politiques cités, notamment les ministres de gauchecomme de droite, ayant eu des responsabilités dans le domaine économique, telsJean-Pierre CHEVENEMENT, Dominique STRAUSS KAHN, Laurent FABIUS,
Alain MADELIN, et pouvant avoir eu un rôle dans la conclusion de marchésinternationaux, certaines des autres victimes ont été choisies au sein du groupeEADS ;

que Philippe DOURY, collaborateur de Jean-Paul GUT, responsable dudéveloppement commercial stratégique et industriel international du groupe, quin'avait eu l'occasion de rencontrer Jean-Louis GERGORIN qu'à deux reprises,
tentait une explication: "Il est possible qu'il me considérait comme quelqu'un quine faisait pas partie de son environnement professionnel et donc en rentrant danssa logique , quelqu'un qui lui était opposé" (D2771) ;

qu'Edouard ULLMO, directeur exécutif des ventes notamment pour l'Asie etl'Afrique d'AIRBUS, connaissait Jean-Louis GERGORIN depuis 1998 et nel'avait rencontré qu'à 3 ou 4 reprises dans un cadre professionnel ;

qu'Alain de WULF était consultant du groupe (D2768) ;

qu'Alain LEMARCHAND directeur de la communication financière du groupeLAGARDERE de 1999 à septembre 2004, avait eu des contacts téléphoniquestrimestriels avec Jean-Louis GERGORIN qui s'inquiétait depuis 1999 del'évolution de l'actionnariat américain du groupe (D2769) ;

que Bernard DELAFAYE, avocat général honoraire, occupant les fonctions decontrôleur général du groupe LAGARDERE, avait noué des liens d'amitié
professionnelle avec Jean-Louis GERGORIN (D2765) ;

que Gérald de ROQUEMAUREL, président du conseil de surveillance du groupeHACHETTE FILIPACCHI MEDIA, ancien membre du comité exécutif de
LAGARDERE, ayant connu Jean-Louis GERGORIN à l'ENA, s'estimait victime

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collatérale des luttes de pouvoir au sein d'EADS (D2767) ;

que Bernard MAINFROY, secrétaire général et directeur général adjoint de lasociété HACHETTE FILIPACCHI MEDIA, a déclaré partager cette impression,
précisant qu'à plusieurs reprises, il avait entendu Jean-Louis GERGORIN parlerde vision du monde très particulière, avec une ambiance permanente deconspiration avec les services secrets ; qu'il avait pensé que tous les noms citésavaient été utilisés pour manipuler l'enquête (D2776) ;

que Jean-Pierre JOULIN, ancien conseiller spécial de Jean-Luc LAGARDEREpuis de son fils Arnaud, a confié aux enquêteurs que Jean-Louis GERGORIN avaitfait pression sur lui pour démontrer que Jean Luc LAGARDERE avait été victimed'un assassinat orchestré par les russes ; que des antagonismes étaientultérieurement apparus entre les deux hommes notamment en 2000 quand il avaitconseillé à Jean-Luc LAGARDERE d'envoyer Jean-Louis GERGORIN aux Etats-
Unis pour l'éloigner des décisions stratégiques du groupe, de même desdivergences étaient apparues dans la politique de communication du groupe; queselon lui, "Jean-Louis GERGORIN avait pour objectif de le déconsidérer auprès
des journalistes, tout comme auprès de Dominique de VILLEPIN, pour leneutraliser comme éventuel pare feu à ses malversations" (D1861/10) ;

que Christian GIACOMOTTO, créateur de la banque ARJIL en 1987, filiale deLAGARDERE, avait eu l'occasion de s'opposer à Jean-Louis GERGORIN au sujetde la mise en place d'un montage au sein d'une structure ad hoc devant regrouperles principaux dirigeants du groupe et lors de la privatisation de Thomson oùLAGARDERE était en concurrence avec ALCATEL (D3791) ;

que d'autres victimes ont été choisies parmi les relations amicales de Jean-LouisGERGORIN comme Thierry DANA, directeur de l'Asie et de l'Océanie auministère des Affaires Etrangères entre 2002 et 2005 qui entretenait avec Jean-
Louis GERGORIN des relations que l'intéressé qualifie d'amicales (D3782/2) oubien Jean-François DUBOS, secrétaire général de VIVENDI UNIVERSAL etmaître des requêtes au Conseil d'Etat, qui a indiqué qu'il connaissait Jean-LouisGERGORIN depuis 1978 et qu'il le rencontrait épisodiquement au club "Le
Siècle", comme il y rencontrait Odile JACOB, ou à l'association des anciens duConseil d'Etat (D3801/2) ; qu'il avait par ailleurs des relations avec Jean-PierreCHEVENEMENT, dans le cadre du parti socialiste et à titre personnel, avait croiséPhilippe DELMAS au parti socialiste, ami personnel de Laurent FABIUS,
connaissait également Alain GOMEZ entre 1981 et 1984 pour des raisonsprofessionnelles, ainsi que Dominique STRAUSS KAHN comme appartenant augroupe d'experts du parti socialiste ;

que d'autres encore ont eu maille à partir avec Jean-Louis GERGORIN dans unpassé plus ou moins proche, tel Alain GOMEZ, impliqué dans l'affaire "couperdes ailes de l'oiseau" dans laquelle ce dernier avait été prévenu puis relaxé par letribunal tandis que Jean-Louis GERGORIN était apparu comme témoin privilégiéde la partie civile LAGARDERE, tel Jean-Jacques MARTINI à la suite de ladéclassification dans cette même affaire d'une note DST qui contenait desindications suivant lesquelles Jean-Louis GERGORIN avait rémunéré à hauteur de

300.000 francs un contractuel dont le nom lui avait été fourni par la DST pourprotéger le groupe LAGARDERE des manoeuvres imputées à THOMSON(D1173), tels Georges KIEJMANN et Jean VEIL, avocats de la famille
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LAGARDERE, qui s'étaient rangés aux conclusions de l'enquête diligentée à lasuite du décès de Jean-Luc LAGARDERE en ce qu'elles tendaient à retenir unemort naturelle, contrairement aux affirmations de Jean-Louis GERGORIN, tel
Alain GENITEAU, qui avait été amené à déposer plainte en 1992 visant lesredevances que les sociétés MATRA et HACHETTE versaient à la banque ARJILayant abouti à la condamnation de Jean-Luc LAGARDERE pour abus de bienssociaux, tel François GONTIER qui pour sa part a indiqué avoir été amené à traitercertains dossiers pour EADS et à formuler quelques critiques sur la façon deraisonner de Jean-Louis GERGORIN, ce dont celui-ci lui aurait tenu rigueur ;

que la société EURO RSCG avait été mise en cause avec Philippe DELMAS en2002 dans la campagne de déstabilisation relative à un prétendu financementocculte de la campagne électorale de Lionel JOSPIN ;

que toutes ces personnes physiques ou morales étaient susceptibles d'êtreimpliquées dans le processus frauduleux initié par le trio WANG CHUAN POO,
Alain GOMEZ et Philippe DELMAS, au travers de la détention par chacun d'entreeux de comptes dans des paradis fiscaux ;

Attendu que dans l'envoi du 14 juin 2004 auquel le dénonciateur, pour étayer sesdires, se borne à joindre un listing de 19 feuillets contenant les 895 comptesclôturés mais laisse toutefois opportunément planer un doute savamment dosé,
"Tous ne sont pas des comptes crapuleux et tous les comptes crapuleux n'ont pasété fermés ce jour-là. Mais pour l'essentiel, le compte y est", précisant qu'il s'agit
autant de comptes individuels directs anormaux contraires aux statuts de
CLEARSTREAM que de comptes indirects dissimulés par des trusts (comme lecompte 82313), ou par des comptes jumeaux dans des banques (comme le compteC0825) ; qu'ainsi, le champs de la dénonciation n'a pas été fondamentalementbouleversé mais élargi à des comptes CLEARSTREAM qui n'avaient pas étéencore dénoncés ni attribués, à savoir, notamment, aux dénommés StéphaneBOCSA et Paul de NAGY, Charles EDELSTENNE, Patrick GAUBERT, HOMA
K ZAND, Issam KEIRALLAH ;

que ces libellés, auxquels ont été adjoints ceux de Laetitia CASTA et d'AlizéeJACOTET, ont été repris dans le CD-ROM reçu par le juge le 20 août 2004 ;

Attendu enfin que la lettre incluse dans le dernier CD-ROM du 4 octobre 2004 faitencore référence aux "crapules" qui ont réalisé les transactions dont la liste figuredans les fichiers joints; que dans les fichiers inclus dans ce CD-ROM, apparaissentparmi les bénéficiaires des transactions des noms encore nouveaux parmi lesquelsJacques FRANQUET, Hughes et Jean-Charles de LASTEYRIE du SAILLANT,
Dominic SIMPSON et Roger WILSON ; que ces noms n'apparaissent dans aucundes documents antérieurs, alors que les transactions dont il s'agit se situent pourles plus tardives en février 2004 ;

Attendu que si l'on peut noter une variation dans l'énumération des personnesdénoncées, celles-ci sont dans la quasi-totalité identifiées par leur nom et leurprénom, un surnom, voire avec une partie de leur état civil et parfois avec uneorthographe inexacte ou erronée ;

Attendu que c'est ainsi que Nicolas SARKOZY est aisément identifiable au traversdes noms de Stéphane BOCSA et de Paul de NAGY, ces deux noms et prénoms

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étant partie intégrante de son état civil; que le juge Renaud VAN RUYMBEKE aété rapidement informé des liens pouvant être faits avec le ministre de l'Economiede l'époque devenu l'actuel Président de la République, que les termes de lacommission rogatoire envoyée par le magistrat instructeur font expressément cerapprochement avec le patronyme de Nicolas SARKOZY ;

qu'en ce qui concerne le libellé "BPB HOR", les prévenus ont indiqué qu'ilcorrespondait au nom de Brice HORTEFEUX ; que si cette affirmation a étécorroborée par le contenu de la seconde clef USB remise par Jean-LouisGERGORIN aux juges d'instruction qui contient une liste de comptes incluant le
compte 80082 faussement attribué à Brice HORTEFEUX, force est de constaterque ce support informatique n'a été adressé à aucune des autorités destinataires desdénonciations ; qu'en dehors de ces déclarations et de cet unique document, aucunautre élément du dossier ne permet de faire au stade de la dénonciation un lien
entre le compte dont il s'agit et son titulaire prétendu ; que Renaud VANRUYMBEKE lui-même n'a procédé à aucune vérification sur ce nom, pasdavantage que les juges d'instruction saisis du présent dossier ;

- sur la fausseté intrinsèque des données figurant sur les documents et
prétendument extraites de CLEARSTREAM :
€ les constatations formelles

Attendu qu'il est apparu à la lecture des différents documents que ceux-ci étaientaffectés d'erreurs de plume, de variations orthographiques ou d'incohérences dansles énoncés peu compatibles avec la rigueur qui sied à la tenue de documentsbancaires surtout s'ils sont censés avoir la même origine et notamment :

• le nom de Dominique STRAUSS-KAHN est mal orthographié(STRAUSS-KHAN) dans les listings adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKEles 14 juin et 20 août 2004, contrairement à la mention portée dans l'annuaire denovembre 2003 (D859/31),
• le nom de Fabien BAUSSARD est mal orthographié (Fabien BOSSART)
dans les documents remis au Général RONDOT (D859/30 et 31) mais l'estcorrectement dans les listings adressés à Renaud VAN RUYMBEKE les 14 juin(D123/15) et 20 août 2004 (D1163/366),
• le nom de la société "ALAIN MINC CONSEIL" inscrit dans les
documents de 2003 (D859/31) et de 2004 (D123/15 et D1163/284) correspond enréalité à la société "A.M. CONSEIL" (D2778/6 et 825/3),
• le nom d' Edouard ULLMO (D2768/7) est mal orthographié (E.ULMO)
tant dans les documents de 2003 (D859/30 et 31) que dans ceux de 2004 (D123/20et 1163/432),
• le nom d'Alizee JACOTEY (D2780/5) est mal orthographié ("ElizeJACOTET") dans le super annuaire du 20 août 2004 (D1163/512),
• le nom de l'épouse de Jean-Pierre JOULIN , Azizeh KHAN ZAND, estdésigné dans le super annuaire reçu par Renaud VAN RUYMBEKE le 20 août(D1163/513) par un diminutif ("HOMA K ZAND") connu des seuls intimes et peususceptible d'être employé auprès de l'établissement bancaire (D2773),
• le nom de l'intermédiaire taïwanais de THOMSON CSF, Chuan Poo
WANG, apparaît toujours sous la dénomination "WANG CHUAN POO" avec lenom en premier suivi du prénom, alors que pour tous les autres titulaires, le nomest précédé du prénom ;
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Attendu qu'il a été également constaté les anomalies formelles suivantes:

• les comptes attribués à "JF HENIN" et "ALAIN MINC CONSEIL" à la
Bank MENATEP de Moscou portent le même numéro "81738" sur la liste des 895comptes bloqués et dans le super annuaire du 20 août (D123/15 et D1163/284)
mais portent des numéros différents, respectivement "81738" et "81739", dansl'annuaire de 2003 (D859/31),
• le compte attribué à Arcadi GAYDAMAK à la BANK HAPOALIM deTel-Aviv sous le n°3881 ne comporte que 4 chiffres au lieu de 5 chez
CLEARSTREAM ;
Attendu qu'au delà de ces constations formelles, le résultat des investigationsréalisées dans le cadre de l'affaire des Frégates sont venus renforcer les soupçonsde falsification ; qu'en effet, l'information a permis d'établir que les assertionscontenues dans les notes ou lettres remises ou adressées aux destinataires des
dénonciations, pour catégoriques qu'elles soient, reposent exclusivement sur laproduction de documents de provenance frauduleuse et dont le contenu a étépréalablement modifié ; que les investigations menées au Luxembourg et lesanalyses et expertises techniques réalisées au cours de l'information ont révélé queles documents joints aux dénonciations contenaient à l'origine des donnéesCLEARSTREAM authentiques que Florian BOURGES a détournées ; que lamodification a consisté à modifier certaines de ces données (libellés de comptes,
noms de titulaires, numéros de comptes, dates de clôture de compte, dates detransactions) ou d'en ajouter de nouvelles totalement fausses, privant ainsi lesaffirmations qu'ils sous-tendent de toute pertinence ;

€ l'incohérence des données :

Attendu que si les investigations menées le 27 juin 2007 auprès de la sociétéCLEARSTREAM BANKING pour les besoins de la commission rogatoireinternationale délivrée dans le cadre de la présente procédure aux autoritésluxembourgeoises ont confirmé l'existence de similitudes quant à leurs structuresentre les documents découverts chez le Général RONDOT et la base DATA
WAREHOUSE de CLEARSTREAM BANKING, il a été constaté que la baseDATA WAREHOUSE de CLEARSTREAM comportait seulement 111 des 165numéros de comptes inventoriés sur les documents découverts chez le généralRONDOT (D3590/26), et que 41 comptes avaient un libellé identique (D2962/2)
mais qu'aucun de ces derniers ne concerne les personnes dénoncées ;

Attendu qu'il a par ailleurs été établi par les multiples investigations réalisées auLuxembourg que les numéros de comptes CLEARSTREAM BANKING répondentà des règles déterminées, qu'ainsi :

• les numéros sont toujours composés de 5 caractères (chiffres ou lettres),
• les comptes débutant par 1,2,3,5,7 ou 8 sont des comptes de clients de lasociété sur lesquels des titres ou avoirs sont mouvementés,
• les comptes débutant par une lettre sont des comptes de contrepartiedomestique c'est-à-dire provenant de maisons de compensation telles queEURONEXT (France), NECIGEF (Pays-Bas), MONTE TITOLI (Italie), ces
données étant uniquement enregistrées dans le DATASERVER pour informationmais ne constituant pas des comptes valides de clearing et settlement ;
Attendu que les intitulés de comptes alphanumériques correspondent, selon Ernest

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BACKES, à des comptes de contreparties et ne peuvent correspondre à despersonnes physiques alors qu'il peut être constaté dans le listing du 14 juin 2004adressé à Renaud VAN RUYMBEKE que 19 comptes alphanumériques sontattribués à des personnes physiques ;

Attendu que selon Yves BAGUET, Managing Director informatique deCLEARSTREAM (D938), la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai 2004contient plusieurs invraisemblances, et notamment :

• le compte N0055 identifiant une contrepartie domestique hollandaise
devait par sa nature être publié et son identifiant commencer par la lettre "Y",
l'utilisation d'un chiffre "0" attribue à ce compte la nature de compte techniqueinterne incompatible avec l'affectation d'un nom (ex: 03638, 03637 et 03639),
• les comptes C0723 et C0724 correspondent à des contrepartiesdomestiques du dépositaire central italien alors qu'ils sont situés en Turquie,
• le compte 3881 a été référencé avec 4 caractères, ce qui est impossible,
• les comptes débutant par 0 contiennent des informations relatives à deslignes de crédit et ne constituent pas des comptes valides ;
que les comptes commençant par "9" sont des comptes de contrepartie
EUROCLEAR et ne servent pas au "clearing et settlement" et que les comptes9DTVE et 9 DTVU n'existaient pas chez CLEARSTREAM, l'emploi d'unevoyelle dans une structure de compte débutant par "9" étant impossible ;

qu'en Italie, les comptes 16439, R6439 et R6440 ne se rapportaient pas à la "BancaPopolare di Sondrio" et MONTE TITOLI ne disposait d'aucune trace des comptesC0043,C0044,C2059 et C2071 ;

qu'à Chypre, les comptes 83025 et 32516 présumés ouverts au nom de la RussianCom Bank à Limassol mais dont le titulaire aurait été Dominique STRAUSSKAHN,
ressortaient inconnus dans cet établissement qui au demeurant n'avaitsouscrit aucun contrat avec CLEARSTREAM ;

Attendu qu'il a par ailleurs été porté à la connaissance du procureur de laRépublique de Paris, dans le cadre de la demande d'entraide judiciaire pour lesbesoins de l'enquête préliminaire qu'il a ouverte au cours de l'été 2004, que lescomptes 03637 (JP CHEVENEMENT), 03639 (Philippe DOURY), 37034 (Géraldde ROQUEMAUREL), 37035 (Alain LEMARCHAND), 37067 (Jean PierreJOULIN) et 37070 (Mme HOMA K ZAND) n'avaient pas existé chezCLEARSTREAM au cours des 10 dernières années ;

-sur l'altération des données figurant sur les supports de la dénonciation:
€ sur les documents remis au Général RONDOT:

Attendu que les constatations effectuées par l'OCLCTIC a permis d'établir que surles 170 lignes totalisées par les documents remis au général RONDOT (D2330/24),
66 numéros de comptes et libellés ne se retrouvent pas dans la base "Db3.zip" des"données BOURGES" extraites du DATA SERVER de CLEARSTREAM le 3
septembre 2001 ; qu'il s'agit des comptes suivants :

• comptes numérotés:
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- 03637 JP CHEVENEMENT,
- 03638 Bernard DELAFAYE,
-03639 Philippe DOURY,
- 37034 Gérald de ROQUEMAUREL,
- 37035 Alain LEMARCHAND,
- 37067 Jean-Pierre JOULIN,
- 03775 Pierre MARTINEZ,
- 03778 Philippe DELMAS,
- 03881 Arkadi GAYDAMAK,
- 55287 Marc RICH,
- 55566 Nadhmi AUCHI,
- 66887 Marc RICH,
- 73071 Alain de WULF,
- 846647 Roman ABRAMOVITCH (compte Euroclear),
- 846690 Oleg DERIPASKA (compte Euroclear),
- 84601 Mikhail KHODORKOVSKI (compte Euroclear),
- 90764 Gafur RAKHIMOV,
- 90765 Serguei MIKHAILOV,
- 9DTVE Gilbert FLAM (compte Euroclear),
- 9DTVU Jean-Jacques MARTINI (compte Euroclear),
- 9DDVY Jean Pierre JOULIN,
- 9FNDO Philippe DEMAS,
- 9HDRT Alimjan TOCHTAKHOUNOV,
- C0022 GLYNDALE Invetsment Ltd,
-C0043 WANG CHUAN POO,
-C0044 WANG CHUAN POO,
- C0501 Bottaga Sergio ,
- C0521 Fabien BOSSART,
- C0603 Bartolini Dario,
- C0609 Christian GIACOMOTTO,
- C0621 Fabien BOSSART,
- C0622 Glyndale Investment Ltd,
- C0627 Edouard ULMO,
- C0674 Brunetta d'USSEAUX,
- C0723 Edin CAYBAN CAYKARA,
- C0724 Petar MANDJOUKOW,
-C0825 PRETORY SA,
- C0825 Serge KLEBNIKOFF,
- C0827 Edouard ULMO,
- C0828 Serge KLEBNIKOFF,
- C2059 Bernard SQUARCINI,
-C2071 Alain CHOUET,
- E3628 Pierre FALCONE,
• comptes "NA":
- Alain GENITEAU,
- Alexandre JEVAKHOFF,
- Bernard MAINFROY,
- Dan OHAD,
- Dominique AMBIEL,
- Dominique BAUDIS,
- Eduard IVANKOV,
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- Edwy PLENEL,
- Irene STOLLER,
- Jean VEIL
- Jean-François DUBOS,
- Laurence DORS,
- Odile JACOB,
- Thierry DANA;
que l'on retrouve dans cette même base "Db3.zip", 43 comptes ayant des numérosidentiques mais des libellés modifiés sur les documents découverts chez le GénéralRONDOT (D2328/13 et 14) parmi lesquels les comptes suivants :

-53337 WANG CHUAN POO,
- 55586 Nadhmi AUCHI,
- 70769 Jean-Charles MARCHIANI,
- 72031 SEG SECURIDAD,
- 73067 Pierre MARTINEZ,
- 80807 Alain MADELIN,
- 81409 Pierre PASQUA,
- 81738 Jean-François HENIN,
- 81739 Alain Minc Conseil,
-82313 WANG CHUAN POO,
-83025 Dominique STRAUSS-KAHN,
- 83656, 87032, 87127 Alain GOMEZ,
- 88286 Philippe DELMAS,
- 88287 Dov YOFFE,
- 88288 Djaloï KHAIDOROV,
- 88289 Lev TCHERNOI,
- 89402 Carlyle Ltd,
-90636 WANG CHUAN POO,
- 90706 Sergei MIKHAILKOV,
- 90760 Viktor AVERIN,
- 90762 Karel SCHMITT,
- 92159 ELEREL FAMILY FOUNDATION
- 92344 François GONTIER,
-99302 EURO-RSCG,
- 99839 Georges KIEJMAN (compte Euroclear),
- 9DSGX Philippe DELMAS (compte Euroclear),
- 9FNDQ Philippe DELMAS (compte Euroclear),
- C0509 Christian GIACOMOTTO,
- E3521 Pierre MARTINEZ,
- E3528 Pierre FALCONE,
- U0642 WANG CHUAN POO ;
€ sur le CD-ROM du 20 août 2004:

Attendu que, si le format du document du 20 août correspond au formatd'informations stockées dans le système DATASERVER de CLEARSTREAMBANKING, dont l'accès était restreint à un nombre limité d'employés, les listes ettableaux incriminés laissent apparaître plusieurs modifications externes entachantleur fiabilité, parmi lesquelles :

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• la modification des intitulés de cinq comptes (en zone "ACC T_NM"),
• l'indication pour certains comptes d'une lettre "N" ou "E" dans la colonneintitulée "ACCT_STATUS_ FLG" alors que les seuls paramètres possibles sont leschiffres "0" et "1",
• l'antériorité de la date de clôture de plusieurs comptes ("END_DATE")
par rapport aux dernières mises à jour (zone "LST_UPDATE") ;
Attendu que les comparaisons faites à partir du CD-ROM reçu par le juge VANRUYMBEKE le 20 août 2004 (scellé n°1 du 26 août 2004) ont établi :

• que la table "DS_PROD_ACCOUNT" contenue dans ce CD-ROM , dontle nom est identique à celui de la table unique de la base "Db3" contenue dans les"données BOURGES", totalise 33.382 enregistrements, soit 42 enregistrements enplus de la base DB3 (D2328/2),
• qu'ont été ajoutés à la base "Db3", outre les comptes précités, les comptessuivants:16439 BANCA POPULARE DI SONDRIO,80082 CRED VAR
BPB.HOR, 80085 PLEDGE ACC 87032, C0442 Dan OHAD ( D2328/3),
• que 8 comptes qui existaient auparavant dans la base "Db3", ont été
doublés dans le scellé n°1 (D2328/4), ce qui est le cas des comptes : 03668 BDELAFAYE, 81738 JF HENIN et ALAIN MINC CONSEIL, 82313 WANG
CHUAN POO, 83656 Alain GOMEZ, 88320 Elize JACOTET, 88332 Laetitia
CASTA et 90780 Vict AVERIN,
• que sur les 35 champs composant les fichiers (D541/7 et 8), les 36
comptes ajoutés ont dans leur champ "ACCT_STATUS_FLAG" non pas un
chiffre "0" ou "1" mais une lettre "E" ou "N", ce qui constitue une anomalie
(D2328/4),
• que seuls 23 des 30 comptes aux libellés modifiés se retrouvent dans lelisting du 14 juin 2004 parmi les 895 comptes clôturés (D2328/9) ;
€ sur le CD-ROM du 4 octobre 2004:

Attendu que l'examen du CD-ROM reçu le 4 octobre 2004 par le juge VANRUYMBEKE et les données BOURGES a permis de dégager des caractéristiques
communes:

• une dénomination de fichiers ("T_TRANSACTION") commune auxfichiers Excel de Florian BOURGES,
• la présence de quatre colonnes supplémentaires "BID PRICE", "OFFERPRICE", "SPREAD", "OVER/UNDER", commune avec les "données BOURGES"
mais inexistante dans le DATA WAREHOUSE de CLEARSTREAM ;
qu'il est néanmoins apparu des différences venant accréditer l'altération de la véritésur les documents d'origine :

• une datation des transactions dans les données BOURGES antérieure à
septembre 2001, alors que le CD ROM d'octobre 2004 contient des transactions quis'échelonnent de 2002 à 2004 (D2338/6),
• l'ajout de noms pour certains comptes,
• la modification des noms de certains "comptes origines" ( 03778 PhilippeDELMAS, 83656 Alain GOMEZ) ou l'ajout de certains autres (80082 BPB HORet 90762 KAR SCHMITT),
• la modification des libellés de 11 numéros de "comptes destinataires" qui
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se retrouvent dans les "données BOURGES" (03778, 72031 , 81409, 87032, 87127,88287, 90762, 92344, 99302,E3521, E3528),

• l'apparition de "comptes destinataires" nouveaux par rapport aux donnéesBOURGES et par rapport au CD-ROM du 20 août 2004: [compte sans numéro]
Edwy PLENEL (Banque Cantonale Vaudoise AC.127-A-61221), C0825 JacquesFRANQUET (Banque JULIUS BAER 89055), C0826 JC de LASTEYRIE duSAILLANT (Banque JULIUS BAER 89044), C0826 H de LASTEYRIE duSAILLANT ( Banque JULIUS BAER 89045),C0826 Dominic SIMPSON (BanqueJULIUS BAER 89049),
C0826 Roger WILSON (Banque JULIUS BAER 89050) ;
c-2) sur les conséquences juridiques de l'altération des supports des dénonciations

Attendu qu'il a été démontré que les documents placés sous cotes D859/30, /31 et/33 ainsi que les documents informatiques placés sous scellés 1 et unique par lejuge Renaud VAN RUYMBEKE , ainsi que le listing adressé à ce magistrat le 14juin 2004 ont été confectionnés sur la base des données recueillies par ImadLAHOUD auprès de Florian BOURGES et Denis ROBERT ; que ces documentsavaient une apparence d'authenticité, comme pouvant être issus d'un systèmeinformatique et contenant des éléments d'information précis sur le libellé et lefonctionnement de comptes au sein de la chambre de compensationCLEARSTREAM; qu'ils tendaient à démontrer, aux yeux des tiers, et en tous casdes autorités destinataires, l'existence de ces comptes, voire, pour certains d'entreeux, à établir la réalité d'opérations "cash" affectant plusieurs de ces comptes, cequi constitue à l'égard des tiers un fait ayant des conséquences juridiques ; qu'ilscomportaient néanmoins des altérations frauduleuses de la vérité affectant lenuméro et le libellé de certains comptes ajoutés ou bien uniquement les libellés decomptes existants ; que ces altérations étaient de nature à causer un préjudice tantà CLEARSTREAM qu'aux titulaires apparents des comptes, d'autant que, pour bonnombre d'entre eux, ceux-ci étaient censés être jumelés avec des comptes ouvertsdans des paradis fiscaux ; que dans ces conditions, de telles altérations de la véritésur ces documents suffisent à caractériser les faux matériels constitutifs du délit
défini par l'article 441 du code pénal ;

Attendu que ces documents ont été utilisés pour accréditer la thèse soutenue par lesauteurs des dénonciations faites auprès du Général RONDOT et du juge RenaudVAN RUYMBEKE; que le délit d'usage de faux, dont l'incrimination tend àpréserver la confiance accordée aux documents eux -mêmes et non les personnesvisées par les allégations que seule l'incrimination du délit de dénonciationcalomnieuse permet de protéger; que dès lors il ne saurait être retenu un quelconqueconcours idéal d'infractions entre ces deux qualifications ; que les deux délitspeuvent faire l'objet de poursuites concomitantes ;

c-3) sur la culpabilité de Jean-Louis GERGORIN

€ sur les délits de dénonciations calomnieuses

Attendu qu'il est établi que Jean-Louis GERGORIN a été l'auteur matériel desdénonciations qui lui sont reprochées et que ces dénonciations reposaient sur desfaits dont la fausseté a été démontrée et sur la production de données falsifiées ;
que, pour tenter d'échapper aux poursuites, Jean-Louis GERGORIN soutient avoir

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été convaincu de l'authenticité de ces données que sa source lui disait provenird'une pénétration du système informatique de CLEARSTREAM et avoir agi dansl'intérêt des groupes LAGARDERE et EADS sur lesquels, pensait-il, pesaient desmenaces d'attaques imminentes de la part du fonds HIGHFIELDS, associé
minoritaire ;

Attendu qu'au cours de l'information, Jean-Louis GERGORIN a décrit de la façonsuivante les différentes phases de transmission des informations par sa source : "Ma
source a commencé, fin mai- début juin 2003, à me fournir des informationsverbales mais précises sur un certain nombre de comptes ouverts par les banquessuisses ou colombiennes à CLEARSTREAM et sur des flux afférents, (...) à la findu mois de juillet, il avait des éléments permettant l'identification du compte 83656ouvert par CITITRUST BOGOTA et dont le bénéficiaire économique était AlainGOMEZ et du compte 73067 ouvert par la banque Julius Baer Genève en 1994dont le bénéficiaire économique était Pierre MARTINEZ; qu'à la fin du mois dejuillet, sa source lui avait remis des schémas manuscrits de transactions ; qu'enseptembre 2003, sa source lui a montré des éléments de transactions reprenantpour partie celles qui lui avait été précédemment décrites, cette fois-ci impriméssous forme de "target", et récapitulant l'ensemble des mouvements de cash entrant
ou sortant d'un compte spécifique sur une certaine période ; que c'est à la finoctobre 2003 qu'Imad LAHOUD lui a remis l'annuaire de deux pages ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN, tout en désignant Imad LAHOUD commel'auteur intellectuel et matériel de la note "WSP", s'est borné à reconnaître, une
contribution à sa réécriture finale en vue d'une meilleure compréhension historiquedu processus ; qu'il a maintenu ses déclarations lors de sa confrontation avec ImadLAHOUD devant les juges d'instruction (D3297) et à l'audience ( notes d'audiencepage 70 , 137 et 145) ;

qu'en effet, le texte de cette note découverte dans la messagerie de FlorianBOURGES contenait quelques différences avec la note du 23 novembre dont ilrésulte qu'au-delà d'une simple remise en forme du texte d'origine, des apports ontété réalisés complétant l'information du lecteur sur certains aspects des faitsdénoncés; qu'ainsi, au 2ème paragraphe, l'"excellent moyen pour rétribuer les
intermédiaires sans le moindre risque" devient, dans le texte détenu par le Général
RONDOT, "un excellent moyen de blanchir ses rétro-commissions" (§2 D1825/
7), tandis que disparaît la somme totale d'environ 125.000.000 USD censéeavoir crédité le compte Wang Chuan Poo C0043; que sur l'année 1996, le singulierde l'expression "banquier et financier" employé au 4ème paragraphe de la note
"WSP" transmise à Florian BOURGES, devient un pluriel dans la note détenue parPhilippe RONDOT ; que, dans le 7ème paragraphe de la note "WSP", la dernièrecooptation faite par Philippe DELMAS porte sur "plusieurs personnes d'horizonstrès diverses" tandis que la note remise au Général RONDOT précise que cespersonnes ont été choisies "dans l'administration, l'industrie et la presse" ;
qu'enfin, dans le dernier paragraphe de la note détenue par le Général RONDOT,
il a été ajouté au sujet du fonds off-shore "Highfields Capital Limited" qu'il "s'est
manifesté depuis deux ans par une montée régulière dans le capital de Lagardèredont il était le plus gros actionnaire avec 7% du capital au 30 août 2003" ; quecette "note WSP" a été créée le 6 décembre 2003 par un auteur identifié par la sérieXXXXXXXX et un nom de société "EADS Headquarters", le dernierenregistrement apparaissant au nom de "GERGORIN";

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qu'il se déduit de ces éléments d'une part que cette note a transité par l'ordinateurd'Imad LAHOUD et d'autre part qu'elle est le fruit sinon d'une réflexion commune,
au moins d'un double regard sur la cohérence des informations portées à laconnaissance du CROS ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a indiqué que c'est à la fin 2002 et début2003 qu'il avait eu, de deux sources humaines de la communauté française durenseignement, dont il ne souhaitait pas fournir les noms, des informations relativesà Karel SCHMIDT, vivant en Suisse, animant un réseau de sociétés de sécurité et
de trafic d'armes et "ayant organisé différentes missions de surveillance desgroupes LAGARDERE et EADS";

qu'il a par ailleurs déclaré au cours de l'instruction avoir eu des informations d'une
première source identifiée comme étant Gérard WILLING auquel il avait remis enjuin 2003 un document de deux feuillets, que ce dernier a présenté aux enquêteurs
(D2890) ;

qu'entendu comme témoin, Gérard WILLING a précisé que Jean-Louis
GERGORIN connaissait beaucoup des noms apparaissant dans les documents remis
au Général RONDOT, parmi lesquels ceux issus de la mafia russe (OlegDERIPASKA, Gafur RAKHIMOV), Petar MANDJOUKOV qui était en relationavec EADS pour des ventes d'armes à la Bulgarie (D2890/4), ou bien encoreNadhmi AUCHI, (gestionnaire privé de Saddam HUSSEIN au Luxembourg),
Fabien BAUSSARD (qualifié par le témoin d'agent d'influence du gouvernementrusse à Paris) sur lesquels Gérard WILLING a eu l'occasion de s'entretenir àplusieurs reprises avec Jean-Louis GERGORIN (D2890/5) ;

que le document présenté par Jean-Louis GERGORIN supportait alors un schémadécrivant un flux financier partant des "russes" vers "Judith" (en réalité AlainGOMEZ) puis allant au compte CLEARSTREAM n°03778, également alimentépar le compte n° 73067 de la JLUIUS BAER par "Léon" (en réalité PhilippeDELMAS), par ailleurs détenteur d'autres comptes à la JULIUS BAER, alimentantle fonds HIGHFIELD Ltd à Grand Cayman ; qu'y étaient également mentionnés unpremier versement de 350 millions de dollars daté d'octobre et un second
versement de 150 millions de dollars en date des 22 et 29 novembre (scelléWILLING 2 - D2891) ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a également a déclaré avoir été alerté de lamultiplication de contacts d'une personne réputée peu favorable à EADS, fin 2002,
début 2003, avec les dénommés Petar MANDJOUKOVen Bulgarie et EminCAYKARA en Turquie ;

que Jean-Louis GERGORIN a reconnu avoir posé quelques questions ponctuellesau cabinet HAKLUYT avec lequel EADS était en relation pour des recherchesd'ordre stratégique, "sur des personnes ou des structures dont il avait euconnaissance soit par Gérard WILLING, soit par Imad LAHOUD, soit par uneautre façon, et pouvant présenter un risque pour le groupe (...) notamment àIstanbul sur les différents alias mentionnés par M WILLING pour un responsabledes "loups gris"ainsi que sur un nom avoisinant figurant dans les listings fournispar Imad LAHOUD, celui d'Edin CAYBAN,, recherche ayant permis de confirmerl'authenticité du n° de téléphone initial au nom d'une certaine Emine CAYKARA,
qui s'est avérée être une égérie des "loups gris" (D3297/27) ;

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que Gérard WILLING a indiqué avoir fourni à Jean-Louis GERGORIN le nom d'undénommé "TCHAIBAN" orthographié à dessein "CAYBAN" quand soninterlocuteur s'inquiétait des circonstances du décès de Jean-Luc LAGARDERE,
évoquant derrière cette mort l'action de la mafia de l'Est, et lui demandait des nomsde personnes susceptibles d'exécuter des contrats, nom qui ressort sur les listingsdès novembre 2003 sous cette même orthographe ;

que ce nom de CAYBAN apparaît sur l'annuaire de 2003 avec la juxtaposition dunom de CAYKARA ; que Jean-Louis GERGORIN a indiqué que ce nom de"CAYBAN" lui avait été communiqué par Imad LAHOUD tandis que celui de"CAYKARA"l'avait été par WILLING ; que dans ces conditions, cette
juxtaposition de ces deux noms , fondée sur des éléments non concordants nepouvait conduire Jean-Louis GERGORIN qu'à douter de l'authenticité dudocument ; que ces doutes ne pouvaient qu'être renforcés par les erreursd'orthographe concernant notamment les noms de Dominique STRAUSS KAHN,
Fabien BOSSARD et Edouard ULLMO contenues dans le listing et les tableauxqu'il détenait à cette époque ;

Attendu qu'il est important de rappeler à ce stade du raisonnement que Jean-LouisGERGORIN a indiqué qu'il avait privilégié en 2003 l'idée de s'adresser au CROSplutôt qu'à l'autorité judiciaire en raison du caractère insuffisamment probant desdonnées pour être communiquées en l'état à un juge ; qu'au cours de sa garde à vue,
Jean-Louis GERGORIN a déclaré qu'il estimait les éléments "troublants mais
insuffisamment probants pour les communiquer à qui que ce soit à ce moment-là",
tout en ajoutant avoir dans le même temps rédigé un document sur la base desinformations verbales livrées par Imad LAHOUD, destiné à être transmis en cas dedécès au juge Renaud VAN RUYMBEKE et l'avoir détruit quand il a décidé des'adresser au général RONDOT (D944/5) ;

Attendu que plusieurs témoignages sont venus confirmer l'état d'esprit de Jean-
Louis GERGORIN à cette époque et sa conviction de la réalité de complots ourdiscontre le groupe LAGARDERE qui ne reposait sur aucune donnée objective et nes'est jamais traduite dans la réalité des faits ;

que cette idée du complot était ancienne dans l'esprit de Jean-Louis GERGORINainsi qu'en attestent les déclarations de Monique NEMER, directrice des éditionsSTOCK, filiale de HACHETTE, société du groupe LAGARDERE, qui a fait étatd'une enveloppe qu'il lui avait confiée en 1997, aux fins de la transmettre à RenaudVAN RUYMBEKE alors en poste à Rennes, cette enveloppe contenant deséléments relatifs à un complot professionnel visant Jean-Luc LAGARDERE danslequel Alain GOMEZ était partie prenante et qui, selon le témoin, était "le souci
constant et récurrent de Jean-Louis GERGORIN" (D1276/4) ;
qu' Edwy PLENEL a relaté qu'au cours de l'automne 2003, Jean-Louis
GERGORIN l'avait entretenu, alors qu'il dirigeait la rédaction du journal "Le
Monde", des circonstances du décès de Jean-Luc LAGARDERE selon lui assassiné
par la mafia ukrainienne ou biélorusse issue du KGB sur ordre d'Alain GOMEZ,
en lui remettant deux pages d'un ouvrage sur les armes secrètes utilisées par leKGB ; que le journaliste, ignorant alors que son interlocuteur était en possessionde l'annuaire falsifié sur lequel son nom apparaissait aux côtés notamment de celuid'Alain GOMEZ, avait eu le sentiment que "Jean-Louis GERGORIN , comme cela
arrive parfois dans la profession de journaliste, mélangeait la réalité et la fiction"
(D1058/3) ;

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qu'Alain JUILLET a expliqué que "la grande théorie de Jean-Louis GERGORINétait que Jean-Luc LAGARDERE avait été assassiné par la mafia russe agissantsous l'égide de M SCHMITT. Or comme on retrouvait M SCHMITT dans la liste,
cela était pour moi signé GERGORIN" (D1540/3) ;

que ce sentiment était partagé par le Général Dominique CHAMPTIAUX, directeurde cabinet du directeur de la DGSE de 2001 au 1er janvier 2004 qui a déclaré avoirrencontré deux fois Jean-Louis GERGORIN qui, en juin 2003, lui avait fait part deses inquiétudes concernant le décès de Jean-Luc LAGARDERE, défendant la thèsed'un assassinat par les services secrets de l'Est ; que le témoin ajoutait : "Il faut,
pour bien comprendre l'ambiance, savoir que JLGétait considéré à l'époquecomme obsédé par l'action des services de renseignement et avait la réputation demanipulateur. Pour cette raison, je n'ai pas pris au sérieux ses doutes et lui aiexprimé ma circonspection" (D3925/2) ;

qu'Arnaud LAGARDERE a exposé que Jean-Louis GERGORIN, qu'il présentecomme "un personnage très créatif mais avec un côté paranoïaque qui avait puparfois s'avérer utile dans certains dossiers", voyait dans le décès de Jean-LucLAGARDERE le résultat d'un complot ourdi par les services secrets russes quil'avaient empoisonné en lui inoculant un virus et que Jean-Louis GERGORIN étaitconvaincu de l'existence d'un autre complot au travers du fonds d'investissementHIGHFIELD, utilisé en l'espèce comme cheval de Troie par Alain GOMEZ etPhilippe DELMAS ainsi que par des mafieux russes et un cartel de trafiquants dedrogue colombiens ; que le témoin tentait d'expliquer qu'en effectuant lesdémarches qu'on lui reproche, "Jean-Louis GERGORIN a voulu en quelque sortedonner une crédibilité aux complots qu'il ne cessait de dénoncer à moi-même et àmes proches collaborateurs" (D1682/7) ;

que ces propos sont corroborés par les témoignages de Jean-Pierre JOULIN et deJean-Pierre PHILIPPE, ce dernier dénonçant "l'affabulation permanente" dans
laquelle était celui qu'il qualifie pourtant "d'homme clé de EADS" (D3466/4) ;

que Pierre LEROY, co-gérant du groupe LAGARDERE, a indiqué que Jean-LouisGERGORIN "entretenait sans s'en cacher des rapports avec un environnementplus secret, et manifestait un intérêt certain dans les domaines de la manipulation,
du complot et des coulisses du monde des affaires" (D3940/2), qu'en sa présence,
Jean-Louis GERGORIN n'avait pas hésité à soutenir qu'Alain LEMARCHAND,
alors responsable des relations avec les actionnaires du groupe, avait été "corrompupar le fonds HIGHFIELD en contrepartie de fourniture de renseignementsconfidentiels sur le groupe"(D3940/4), et qu'après l'assemblée générale du groupeLAGARDERE qui s'est tenue en mai 2004 tout à fait normalement, il en était venu,
devant Arnaud LAGARDERE, à qualifier de "gergorinades" les thèses
développées par l'intéressé (D3940/4) ;

que c'est pourtant cette obsession qui, selon Christophe BONAMY, directeur desopérations de la société AICS PROTECTION, a conduit Jean-Louis GERGORIN,
qui "se sentait menacé" et "craignait les agissements de la mafia russe", à
demander à partir d'avril ou mai 2004 une protection rapprochée (D3384/2) ; queBernard MEUNIER, salarié d'AICS, a précisé que les inquiétudes manifestées parJean-Louis GERGORIN provenaient de l'affaire des Frégates et des décèsconsécutifs à cette affaire mais que la menace lui paraissait floue (D3386/2) ; que

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cependant, selon Christophe BONAMY, cette protection, qui a débuté en juin 2004,
ne révélera rien d'inquiétant (D3384/4) ; que Gilles CARETTO, ancien directeur
de la sécurité d'EADS, a estimé que rien ne justifiait la mise à disposition d'uneéquipe de protection, cette décision ayant été prise par le président CAMUS(D3891/2) ;

Attendu que Philippe DELMAS est ciblé dès la note du 23 novembre 2003 quimentionne: "Philippe DELMAS prend une importance particulière dans cedispositif dans la mesure où tout versement d'Alain GOMEZ ou des oligarques aubénéfice des lieutenants initiés en 1999 passe quasi systématiquement par sescomptes à lui" (D859/30) ;

que Philippe DELMAS a déclaré au cours de l'information :"l'affaire
CLEARSTREAM est une manipulation de très grande ampleur et d'une très grandehabileté dont la fin principale était des rapports de force au sein du groupeindustriel EADS" (D2017/1) ; qu'il y voyait une nouvelle illustration de la lutted'influence menée à l'occasion de la désignation du co-président exécutif d'EADS,
poste que briguait Noël FORGEARD, dont il était le bras droit, et qu'occupait,
depuis 2000, Philippe CAMUS dont le mandat prenait fin en 2005 et dont Jean-
Louis GERGORIN était le collaborateur ;

que selon la partie civile, il ne s'agissait pas de la première tentative de
déstabilisation, faisant ainsi référence à sa mise en cause dans le financement de la
campagne électorale de Lionel JOSPIN en 2002 par le biais de fausse facturationdu cabinet EURO-RSCG, affaire depuis lors classée sans suite, alors que le nom decette société apparaît également dans l'annuaire précité ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN ne peut se targuer de bonne foi ou decrédulité alors que toute sa carrière professionnelle, tous les avis de ses proches,
bienveillants comme adversaires, convergent pour témoigner d'une ancienne,
permanente et redoutable défiance ;

que si le tribunal peut admettre que Jean-Louis GERGORIN ait été, dans les moisqui ont suivi le décès de Jean-Luc LAGARDERE en mars 2003, persuadé que cettemort était le fait d'un complot ourdi par la mafia russe, que Jean-Louis
GERGORIN ait également nourri, dès cette époque, des soupçons à l'endroit del'actionnaire du groupe LAGARDERE, le fonds "HIGHFIELD Capital Ltd", ce quipouvait le conduire à prêter une oreille attentive aux informations que lui révélaitcelui qui allait devenir sa source, c'est en octobre et novembre 2003 que sa bonnefoi doit s'apprécier, précisément à l'époque où ont eu lieu les premièresdivulgations de renseignements supposés issus de CLEARSTREAM et dont ilsavait alors le caractère au moins partiellement mensonger ;

que Jean-Louis GERGORIN a été bien en peine d'apporter une preuve certaine auxfaits qu'il portait à la connaissance du Général RONDOT de façon parfaitementspontanée, qu'il s'est trouvé dans l'incapacité d'apporter la moindre justification ausoutien des affirmations péremptoires contenues dans la note synthétique du 23novembre 2003, en ce qui concerne tant les données chiffrées que la description dusystème de corruption et de blanchiment dans son ensemble ;

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Attendu que l'expérience de Jean-Louis GERGORIN dans l'activité de
renseignement et ses responsabilités importantes au sein du groupe EADS devaientl'inciter sinon à prendre ses distances vis-à-vis d'Imad LAHOUD, du moins à
s'assurer d'emblée et par tous moyens de la pertinence des informations qu'il luifournissait ;

que Jean-Louis GERGORIN était au fait de la précarité de la situation judiciaired'Imad LAHOUD qui, après avoir été recruté puis délaissé par la DGSE, avait étépris en compte par le Général RONDOT, ce qui ne devait que l'inciter à faire encoredavantage preuve de prudence vis-à-vis de cette source afin de prévenir tout risquede manipulation ;

que cependant, pour recruter Imad LAHOUD en connaissance de sa situationjudiciaire et notamment du contrôle judiciaire auquel il était soumis après unepériode de détention dans le cadre d'une affaire d'escroquerie dans un contextefinancier, Jean-Louis GERGORIN s'est délibérément affranchi de toute règleélémentaire de prudence qu'il se devait de respecter dans l'intérêt de la société dontil était cadre dirigeant et eu égard à son type d'activité industrielle particulièrementsensible ; qu'il n'a pas estimé devoir tenir compte des avertissements de MarwanLAHOUD qui n'était pas favorable à l'embauche de son frère (D4006/5), positionqui était également connue du Général RONDOT et de Philippe CAMUS à l'insuduquel cette embauche était cependant intervenue ;

qu'au travers des différents contrats de consultant signés par Jean-LouisGERGORIN pour le compte d'EADS, l'activité d'Imad LAHOUD à l'origineconsacrée à la création d'un fonds d'investissement et l'analyse du titre EADS,
s'est ensuite orientée vers les nouvelles technologies d'information, et de
communication, pour finalement le conduire à diriger une équipe de chercheursspécialisés dans la sécurité de systèmes d'information ;

que Jean-Louis GERGORIN a fait bénéficier Imad LAHOUD à l'origine, d'unpremier contrat de consultant d'EADS en date du 1er mars 2003, souscrit dans
l'intérêt du département fusions-acquisitions rattaché à la direction de coordinationstratégique qu'il dirigeait, pour une durée initiale de 6 mois; que la durée de cecontrat a été prorogée à 3 reprises les 1er septembre 2003, 26 janvier 2004 (avec uneextension des travaux à la cybercriminalité), et 30 septembre 2004 ; que sarémunération est passée de 5.000 euros à 11.500 euros par mois hors taxe (outrele versement de 20.000 euros de rémunération complémentaire en vue de la remiseau 15 février 2005 d'un premier rapport) (D1334) ; qu'Imad LAHOUD a bénéficiéd'un second contrat de consultant dès le 1er août 2003 dans le domaine de la
coordination de la stratégie d'EADS et de la communication financière sur lesquestions liées à l'activité boursière et de l'actionnariat d'EADS, lui garantissantune rémunération de 5.000 euros hors taxe par mois portée à 7000 euros paravenant du 2 février 2004 ; qu'entre 2003 et 2005, il a facturé à EADS par le biaisde la société "Imad LAHOUD Conseil" un total de 342.860,93 euros ;

Attendu que l'officier traitant d'Imad LAHOUD à la DGSE a conclu son compterendu d'entretien du 26 février 2003 au sujet de l'activité de consultant d'ImadLAHOUD au service d'EADS en ces termes: "Il s'agit en fait, selon IL [ImadLAHOUD], d'une activité de couverture fournie par Jean-Louis GERGORIN à lademande du Général RONDOT" (D1305/15) ;

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Attendu que c'est à la demande de Jean-Louis GERGORIN qu'Imad LAHOUD aété installé dans les locaux de Suresnes à compter du 3 novembre 2003; que Jean-
Yves MATHONNET, responsable des ressources humaines d'EADS-France àSuresnes, a précisé qu'Imad LAHOUD était recommandé par Jean-LouisGERGORIN dont il était le consultant direct ; qu'Imad LAHOUD a néanmoinstravaillé au Centre Commun de Recherches à compter du mois de mai 2004, que
son contrat a pris effet au 1er juin 2004 à 70% de son temps, moyennant un salairede 5.250 euros bruts, pour passer à temps plein selon avenant du 1er janvier 2005avec un salaire de 7.500 euros bruts ;

que Jean-Marie PUEL, cadre au sein de l'équipe fusions-acquisitions qui, commeImad LAHOUD, était passé au sein d'EADS du statut de consultant à celui desalarié, a reconnu avoir bénéficié d'un cursus exceptionnel, tout en soulignant laparticularité de la situation d'Imad LAHOUD qui était parvenu à cumuler les deuxcontrats de consultant avec son contrat de travail (D3932/4) ;

qu'il a expliqué qu'Imad LAHOUD lui avait été présenté début 2003 par Jean-
Louis GERGORIN comme un spécialiste du fonds d'investissement et lui avait faitbénéficier de son expérience acquise dans des banques d'investissement deLondres, qu'au cours de l'été 2003, Jean-Louis GERGORIN lui avait demandé dele mettre en relation avec Gwenaëlle de la RAUDIERE, responsable dudépartement relations investisseurs d'EADS (D3932) ;

que Gwenaëlle de la RAUDIERE a indiqué qu'elle n'avait pas eu connaissance del'existence de ces contrats, qu'elle ne l'avait rencontré qu'à 3 ou 4 reprises et avaitreçu de sa part des mails très régulièrement entre septembre et octobre 2003, ce quipour autant ne constituait pas une prestation qu'elle aurait accepté de rémunérer,
pour ajouter : "globalement, Imad m'a fourni régulièrement des élémentscorrespondant au niveau d'information gratuites que je pouvais obtenir auprès debrokers (...) je ne l'ai plus revu au bout de 2 mois car le besoin ne s'en faisait passentir"(D3939/3) ;

qu'au printemps 2004, Jean-Louis GERGORIN a confié à Jean-Marie PUELqu'Imad LAHOUD avait plus le profil de chercheur scientifique qu'un réel profilde financier, celui-ci manifestant son intérêt pour les nouvelles technologies, ce quia justifié son embauche au CCR (D3932/3) ; qu'il a été placé dans un premiertemps dans le bâtiment SU2, non sécurisé ; qu'en mars 2004,Pierre-George SAVAlui ayant fait part de "missions particulières d'intérêt national qui auraient étéconfiées à Imad LAHOUD", il avait été transféré dans un local SU1 (D1350/4) ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a porté une attention toute particulière auxconditions de sécurité dans lesquelles évoluait Imad LAHOUD ; qu'il a prisl'initiative d'établir un "sauf-conduit" destiné à Pierre-Georges SAVA, spécifiantqu'Imad LAHOUD était amené à coopérer pendant sa présence dans les locauxd'EADS à une prétendue mission "secret défense" confiée par le GénéralRONDOT, document établi à l'insu du général et dont celui-ci a découvertl'existence le 25 mars 2004 à l'occasion de l'appel téléphonique du commissaireDYEVRE à la suite du placement en garde à vue d'Imad LAHOUD dans le cadred'une autre procédure d'enquête ;

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qu'il a par ailleurs oeuvré au cours de l'année 2004 avec Alain JUILLET pourobtenir une habilitation "confidentiel-défense" qui sera accordée le 23 juin 2005 àImad LAHOUD, malgré un avis défavorable de la DPSD, en sa qualité de "viceprésident"
au sein d'EADS FRANCE, pour une durée de trois ans et pour les seuls
besoins d'une mission d'étude sur la sécurité du Blackberry ;

Attendu que force est de constater par ailleurs que Jean-Louis GERGORIN n'a rienfait pour mettre un terme aux effets dévastateurs de la dénonciation dont il a étél'initiateur; qu'il a exprimé au contraire, au fil de ses contacts ultérieurs avec leGénéral RONDOT, sa conviction d'être en possession d' informations véritables etde disposer d'une source éminemment fiable, et cela malgré les conclusionsinverses du général ; que c'est cette même force de conviction et de persuasionqu'il a su mettre en oeuvre par la suite auprès de ses différents interlocuteurs ;

que Jean-Louis GERGORIN a décrit le flux d'informations passées entre ses mainsen indiquant que c'est au début du mois d'avril 2004 que sa source, toujours à sademande, a produit ce qu'il nomme le "super-annuaire" de plus de 33.000 comptesqu'il a fait parvenir à Renaud VAN RUYMBEKE le 20 août suivant, qu'à la mimai
2004, Imad LAHOUD les a informés de la clôture des 895 comptes, sous-
ensemble du "super-annuaire", clôturés simultanément le 12 mai et dont le listinglui avait été remis vers le 10 ou 11 juin suivants pour être envoyé à Renaud VANRUYMBEKE par courrier, qu'enfin, il avait obtenu d'Imad LAHOUD qu'ilconstitue un historique complet des transactions des principaux comptes sensibles,
que cet inventaire ayant été égaré, seuls des fragments ont pu être rassemblés dansle CD-ROM du 4 octobre (D958/5 et 6) ;

que Jean-Louis GERGORIN a cependant pris soin de préciser par ailleurs: "A partirdu moment où le Général RONDOT intervient, je suis un peu le facteur, c'est à direque je transmets au général les documents que me remet ma source mais consacretrès peu de temps à leur examen" (D1090/11) ;

que c'est en faisant état de cette masse impressionnante d'informations fournies parsa source dans les premiers mois de l'année 2004 que Jean-Louis GERGORIN tentede justifier son changement de stratégie opéré en quelques jours en décidant des'adresser à la justice, alors même que dans l'intervalle aucune vérificationsignificative, à l'exception de celle relative à un déplacement de Jean-PierreJOULIN au Luxembourg en 2003, n'avait été entreprise de son côté sur
l'authenticité et la fiabilité de ces données, au-delà de l'implication éventuelle desmafias de l'Est dans un projet criminel visant le groupe LAGARDERE ; que cesdonnées, dont il estime que le très grand nombre était en soi devenu une garantiede fiabilité, débordaient dès l'origine très largement ce cadre et mettait en causenotamment des industriels français, des responsables du groupe EADS, des
professionnels réputés, des hauts fonctionnaires et de responsables politiques ;

Attendu que le Général RONDOT a déclaré avoir averti Jean-Louis GERGORINde ses doutes, voire de ses certitudes inverses aux convictions affichées par soncontradicteur ; que dans son verbatim relatif à sa réunion avec PhilippeMARLAND en date du 10 février 2004, le Général RONDOT a mentionné ses
doutes en évoquant un "montage Jean-Louis GERGORIN ? Vérification le 11.02"
(D2574/17) ; qu'il y est fait référence à sa note "Opération Reflux"(1), en date du2 février 2004, dans laquelle il a mentionné que son premier souci avait été de"vérifier que la source "MADHI" a bien les accès informatiques qu'elle prétend

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et qui lui assurent de recueillir les données qui sont la base de la description dusystème de corruption. Sans, a priori, mettre en doute la capacité de "MADHI" qui
sur le dossier OBL notamment a fait ses preuves - mes recherches n'ont pas
abouti.", qu'il ajoutait: " Celles de Jean-Louis GERGORIN , de son côté, ne m'ont
pas convaincu" (D2701/5) ; qu'il indiquait également que ses interrogationsdemeuraient sur "le bien fondé de l'existence d'un vaste réseau politico-mafieux"
et, dans le point 7 de la note: "dans l'immédiat, et pour appliquer les instructionsdu Président de la République , je compte procéder aux vérifications suivantes:
crédibilité à accorder à la source MADHI et validation de quelques renseignementsde nature technique concernant les personnages de nos services";

que tel a en effet été l'objet des confidences que Jean-Louis GERGORIN a faites,

er

à l'occasion d'une rencontre qu'il a présentée comme fortuite, le 1 janvier 2004au Quai d'Orsay, avec le Ministre des Affaires Etrangères, Dominique deVILLEPIN, sur la foi des seuls éléments dont il disposait jusqu'alors et dont il a étéétabli qu'ils ne pouvaient l'avoir personnellement et objectivement convaincu ; quece sujet a été abordé lors de la réunion prévue du 9 janvier 2004, et dans la noted'information intitulée "note DDV" dont Jean-Louis GERGORIN a affirmé avoir
préalablement fait remettre un exemplaire au ministre ;

que Jean-Louis GERGORIN a prétendu avoir appelé de ses voeux depuis la finnovembre 2003 la mise en oeuvre par les services techniques de la DGSE deprocédures de vérification des données informatiques fournies par sa source, qu'ilavait sollicité l'intervention de Dominique de VILLEPIN en janvier 2004, comptantsur sa force de persuasion à l'égard du Général et de la DGSE qu'il s'agissait demettre à contribution ; que Jean-Louis GERGORIN ne pouvait ignorer que comptetenu des liens ayant existé entre ce service et certaines des personnes dénoncées,
voire le peu de résultat qu'avait produit la collaboration d'Imad LAHOUD avec laDGSE, un tel espoir était vain ;

que le Général RONDOT a mentionné dans le point 5 de sa note "OpérationReflux" (3) datée du 17 mars 2004, le refus qu'il avait essuyé de la part de PierreBROCHAND, directeur de la DGSE, le 11mars 2004, de l'assister au plantechnique ; qu'il a par la suite précisé qu'il s'agissait en réalité de demander lecriblage de quatre mafieux russes et des vérifications de comptes à l'étranger, ceque le directeur intéressé n'a pas confirmé (D2708/4 et 5) ; qu'il a tenté
d'expliquer son appréhension à impliquer la DGSE dans cette affaireCLEARSTREAM par le mauvais souvenir qu'avait laissé Imad LAHOUD(D3266/14) ;

que dans le point n°3 de cette note, le Général RONDOT, faisant référence à unentretien qu'il avait eu la veille, soit le 16 mars, avec Imad LAHOUD, a indiquéque celui-ci l'avait assuré que les renseignements qu'il recueillait étaient sûrs, maisque "l'interprétation qu'en fait Jean-Louis GERGORIN pourrait procéder d'unevision paranoïaque"; que pourtant, entendu par les juges d'instruction, il devaitpréciser en ce qui concerne Imad LAHOUD que "sa crédibilité était nulle"
(D2714/4) et que ses explications étaient "très confuses (...) sur la manière dont ilréalisait soit-disant ses pénétrations informatiques" (D2676/6) ; qu'une premièredémonstration opérée par Imad LAHOUD le 12 février 2004, en présence de Jean-
Louis GERGORIN qui lui avait proposé de se rendre dans le bureau d'ImadLAHOUD, n'avait pas permis d'établir une connexion avec le réseau, expériencedont il était ressorti "dubitatif"(D2676/5et 6); qu'une deuxième démonstration

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organisée le 6 avril suivant par Imad LAHOUD à l'Observatoire de Meudon puisdans les locaux EADS de Suresnes n'ont pas été plus concluantes ; que le 21 avril,
dans sa note adressée au ministre de la Défense, le Général RONDOT, qui dit avoirjusque-là poursuivi ses vérifications, continue de s'interroger sur la réalité et lafinalité de l'entreprise dénoncée (D2701/8) ;

que, confronté à Philippe MARLAND dans le bureau des juges d'instruction, leGénéral RONDOT a déclaré: "La conviction que j'ai eue qu'il s'agissait bien d'unemanipulation a été pour moi acquise au mois d'avril 2004, comme on peut leconstater à la lecture de ma note au ministre du mois d'avril 2004. La
confirmation ultime m'en a été apportée à l'occasion de vérifications opéréesauprès des services suisses début juillet 2004, qui ont véritablement conclu à lafausseté des listings CLEARSTREAM. J'avais désormais la preuve concrèteparvenant d'un service étranger que nous avions affaire à une manipulation"
(D3266/13) ;

qu'il a cependant relaté, dans ses comptes rendus d'entretiens des 13 et 20 avril, 4et 27 mai 2004, la "persistance de ses doutes", tout en ajoutant, le 20 avril : "mais
il y a sans doute quelque chose", et en faisant allusion à "la filière SARKOZY >
B.HORTEFEUX" et à un "trésor de guerre" qu'il mettra en lien avec l'affaireMIKSA évoquée par Philippe MARLAND au cours de cet entretien (D2676/14);
que le 27 mai, il notera " Il y a sans doute du vrai et du faux dans les infos
MADHI" (D2574/39) ;

que cette persistance des doutes du Général RONDOT tranche singulièrement avecla certitude affichée par ses interlocuteurs et principalement Jean-LouisGERGORIN qu'il rencontre le 14 avril pour une réunion de mise au point(D2574/29) ;

Attendu que les déclarations de Thibault de MONTBRIAL et de Jean-LouisGERGORIN concordent pour établir que Jean-Louis GERGORIN est l'auteurprincipal de la dénonciation matérialisée par la confection et la remise au jugeRenaud VAN RUYMBEKE de la lettre reçue le 3 mai 2004 des mains de l'avocat;
que Jean-Louis GERGORIN a reconnu en avoir été l'auteur intellectuel et s'êtreinspiré de la note remise au Général RONDOT cinq mois plus tôt ; que le ciblagedu destinataire de cette nouvelle dénonciation se manifeste par l'insertion d'éléments nouveaux en lien avec l'affaire des Frégates, notamment l'allusion aux"deux personnes" auxquelles le magistrat s'intéressait, au fait que Wang Chuan Poo
est "un des principaux intermédiaires pour les achats d'armes de l'Ile" et quel'ouverture d'un des comptes suspects (le compte 82313) se situait "en 1991, juste
après la signature du contrat de frégates avec la France";

que Jean-Louis GERGORIN y a intégré un extrait de l'annuaire de 2003 enmodifiant les libellés par la mention à la place des noms, de l'appartenance decertains titulaires à des réseaux de criminalité organisée (parrains russes, est-
allemand et ouzbek) ; que par ailleurs ont été modifiés les dates et montants desmouvements d'octobre 2003 ayant affecté les comptes 84601, 83656, 87032 et03778, en indiquant un transfert le 17 octobre 2003 (au lieu du 9 octobre) de 1.150millions de dollars (au lieu de 1.200 millions) du compte 84601 au compte 83656,
et d'un transfert de 250 millions d'euros (au lieu de 225 millions) du compte 83656au compte 87032 ;

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Attendu que de l'aveu même de Jean-Louis GERGORIN, conforté sur ce point parles explications du Général RONDOT, l'ensemble des informations ainsi
divulguées provenaient d'une même et unique source dont il a été établi qu'auxyeux de Jean-Louis GERGORIN celle-ci ne pouvait pas apparaître a priori fiable ;
qu'il a déclaré à l'audience : "Une source égale zéro source" (note d'audience page127); que les prétendues pénétrations dans le système CLEARSTREAM étaient del'avis unanime des témoins entendus dépourvues de toute vraisemblance et desurcroît ont été contestées par Imad LAHOUD lui-même ;

Attendu que devant les juges d'instruction, Renaud VAN RUYMBEKE a reconnudans la lettre du 3 mai les sujets abordés avec lui lors des deux ou trois entretiensprécédents ; que, selon le magistrat, si les comptes attribués dans la lettre àMessieurs WANG et GOMEZ s'étaient révélés exacts, il aurait eu la clef de la
solution de l'affaire des frégates de TAIWAN (D729/4) ; que Renaud VANRUYMBEKE a conclu sa déposition en ces termes: "toute cette mise en scène ,
incluant l'intervention d'un avocat de bonne foi, n'avait d'autre but que decrédibiliser des informations dont je démontrerai par la suite qu'elles étaientfausses" (D729/4) ;

que Jean-Louis GERGORIN a de surcroît indiqué de façon explicite au jugeRenaud VAN RUYMBEKE qu'il détenait ses informations sur "les comptes
occultes de Monsieur WANG" et sur les "bénéficiaires d'importantes rétro-
commissions" grâce à un informaticien, Imad LAHOUD, qu'il a qualifié
"d'informaticien de génie" qui "avait accès aux comptes CLEARSTREAM, ycompris aux informations secrètes" (D988/8) ;

Attendu que certains des comptes figurant dans la liste reçue le 14 juin 2004, parmilesquels les comptes attribués à Stéphane BOCSA, Charles EDELSTENNE, PatrickGAUBERT, HOMA K ZAND, Issam KEIRALLAH et Paul de NAGY,
n'apparaissaient pas dans les listings remis au Général RONDOT dont Jean-LouisGERGORIN s'est par ailleurs gardé de faire état auprès du magistrat, mais setrouvent dans le "super-annuaire" du 4 avril 2004 reçu par le juge d'instruction le20 août ; que d'autres apparaîtront dans l'envoi du 4 octobre mais ne figuraient pasdans le super annuaire (FRANQUET, de LASTEYRIE DU SAILLANT,
SIMSON) ; que curieusement, en revanche certains des noms qui avaient étémentionnés dans l'annuaire de novembre 2003 ont disparu dans le super-annuaireet dans la liste de 895 comptes (par exemple : Dominique AMBIEL, Jacques VEIL,
Georges KIEJMANN, Irène STOLLER, Odile JACOB, Alain GENITEAU,
Dominique BAUDIS) ; que ces multiples variations du champs des dénonciationset les incohérences qu'elles recèlent renforcent l'idée que Jean-Louis GERGORINne pouvait, contrairement à l'apparence qu'il pouvait afficher, être sincèrementconvaincu de l'exactitude des éléments à partir desquels il aurait forgé sa
conviction ;

Attendu que l'envoi du CD-ROM reçu le 20 août 2004 par le juge Renaud VANRUYMBEKE est la suite logique de la dénonciation du 14 juin, qui laissaitentendre que "tous les comptes crapuleux n'avaient pas été clôturés", ce quisignifiait que certains comptes non listés dans l'envoi du 14 juin étaientsusceptibles de se retrouver dans le super-annuaire d'avril 2004 ; que ce fut le casde Gilbert FLAM, d'Alizée JACOTEY et de Pierre MARTINEZ ; qu'en agissantainsi, Jean-Louis GERGORIN a remis au magistrat instructeur un annuaireprétendument complet en sachant que celui-ci avait été l'objet de falsifications

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coupables ;

Attendu que l'envoi du CD-ROM reçu le 4 octobre 2004 par le juge Renaud VANRUYMBEKE avait pour objet de dénoncer une participation nouvelle qui tout ens'inscrivant dans le prolongement de la précédente, par l'utilisation du vocable de"crapule" et l'identité de signature "DT", révèle un schéma de corruption dans
lequel les titulaires des "comptes origine" apparaissent comme corrupteurs et les
"comptes destinataires" comme les corrompus dont certains, FRANQUET, deLASTEYRIE du SAILLANT, SIMSON, apparaissent pour la première fois dans leslistings ;

Attendu que la démarche ainsi engagée auprès du magistrat reposait sur desfondements critiquables; que non seulement, à en croire les affirmations de Jean-
Louis GERGORIN et du Général RONDOT, la provenance supposée, mais jamaiseffectivement vérifiée, des données exploitées, en ce qu'elles auraient été le résultatd'une pénétration du système informatique de CLEARSTREAM, paraissait desplus douteuses; que de surcroît ces données, elles-mêmes issues d'un ensemble auxapparences crédibles, se sont révélées en grande partie inexactes et résulter defalsifications que Jean-Louis GERGORIN n'ignorait pas ; que le secret qui aentouré jusque là ces multiples démarches a permis de ne pas ébruiter l'affaire etde garantir à l'action entreprise sa pérennité, et, partant, sa nocivité ;

Attendu qu'ainsi Jean-Louis GERGORIN a pu mettre en oeuvre la deuxième phasede son processus en s'adressant à un juge d'instruction ; qu'il est à cet égardparticulièrement édifiant de constater que c'est Jean-Louis GERGORIN qui aimposé la confidentialité à ses interlocuteurs dans l'organisation des entretiens quise sont déroulés avec Renaud VAN RUYMBEKE, ainsi que cela ressort desdéclarations des trois protagonistes qui établissent leur caractère "strictement
confidentiel" et "absolument secret";

que Jean-Louis GERGORIN s'est attaché à dissocier les deux phases du processusde dénonciation en établissant un cloisonnement entre elles, notamment en ne
dévoilant pas, tant à l'avocat intermédiaire qu'au juge d'instruction destinataire,
l'existence d'investigations en cours menées par le Général RONDOT dont ilsavait que les conclusions n'étaient pas favorables à sa thèse ; qu'à chaque étapedu processus, il a opéré une sélection des noms des victimes visées, sachantégalement que les documents remis au Général RONDOT contenaient des noms quipar la suite ne réapparaîtront plus dans le super-annuaire, ni dans la liste des 895comptes clôturés, ni dans les tableaux de transactions, tout en faisant en sorte que,
de façon opportune, de nouveaux noms surgissent ;

que Jean-Louis GERGORIN n'a pas hésité à recourir à la manipulation de sesdifférents interlocuteurs; qu'ainsi Maître de MONTBRIAL a déclaré que, quelquessemaines après le dépôt de la 1ère lettre, Jean-Louis GERGORIN est revenu le voir
"très enthousiaste" avec des listings, qu'il lui a indiqué avoir "avancé dans ses
recherches et qu'il avait d'autres éléments à transmettre à notre ami" et en lui
disant en substance : "ça y est ça bouge , la première lettre a eu pour effet de lesaffoler et le même jour il y a eu plusieurs centaines de comptes qui ont été
clôturés. Il faut transmettre la liste à "notre ami", tout en ajoutant : "c'est encore
pire que ce que je pensais, il y a des industriels, des mafieux et aussi des hommespolitiques et des gens des services, qu'il a cité trois noms MADELIN, STRAUSSKAHN
et CHEVENEMENT (...)de toute façon, c'est le boulot du juge de vérifier

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tout ça" (D776/9), Jean-Louis GERGORIN s'étant gardant de préciser à l'avocatque les noms de MADELIN, STRAUSS KAHN et de CHEVENEMENT avaientdéjà été cités ;

Attendu que cette volonté de manipulation s'est également manifestée quand, pourtenter de se dédouaner, Jean-Louis GERGORIN a inversé les responsabilités enprétendant que le juge VAN RUYMBEKE avait d'une part donné son accord surles modalités de transmission des informations et le recours aux lettres anonymeset d'autre part lui avait fait savoir par son avocat qu'à la suite de l'envoi de lapremière lettre, celle du 3 mai, il "souhaitait avoir le maximum d'informations
techniques sur CLEARSTREAM" ce dont il n'apporte aucune preuve et qui a faitl'objet de contestations fermes de la part du magistrat entendu comme témoin ;

Attendu que, selon Laurence DORS, secrétaire générale de la société EADS, c'estJean-Louis GERGORIN qui a présenté Maître de MONTBRIAL au directeur desAffaires juridiques d'EADS pour conseiller le groupe dans le déroulement del'affaire des listings CLEARSTREAM, mission dont cet avocat s'est acquitté enrendant deux consultations pour lesquelles il a été rémunéré, jusqu'à ce que sonintervention dans le processus de la dénonciation soit finalement portée à laconnaissance des responsables du groupe à la suite des déclarations de RenaudVAN RUYMBEKE (D1807) ;

que Jean-Louis GERGORIN a procédé dans ces conditions , à la fin juillet, àl'envoi du CD-ROM reçu par le magistrat le 20 août, et, début septembre, à l'envoid'un CD-ROM qui devait contenir un historique complet des transactions desprincipaux comptes sensibles depuis leur ouverture, qu'à la suite de l'échec dupremier envoi postal de ce CD-ROM fait par Maître de MONTBRIAL, ImadLAHOUD s'est trouvé dans l'incapacité d'en délivrer une copie, que de dernier ena cependant livré des fragments sélectionnés par lui entre janvier et avril 2004 quiseront expédiés au juge le 4 octobre suivant ;

que Jean-Louis GERGORIN a su trouver les limites de la règle du secret qu'ils'était fixée et qu'il avait imposé aux autres, en révélant au juge d'instructionl'identité de sa source, au mépris des principes d'action au sein des services derenseignement, impliquant ouvertement aux yeux du magistrat Imad LAHOUDdans sa démarche ; que lui-même a obtenu de ne pas apparaître en procédure dansle dossier des Frégates de Taïwan ;

Attendu qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que Jean-Louis GERGORINa maîtrisé de bout en bout l'ensemble du processus de la dénonciation , par le choixdes destinataires, le choix des victimes, la rédaction et la production de documentsécrits, et par le recours dès octobre et novembre 2003 à des données qu'il adivulguées au Général RONDOT avec le concours d'Imad LAHOUD;

Attendu qu'en prenant l'initiative, plusieurs mois après, de révéler au premier juged'instruction Renaud VAN RUYMBEKE, "officier de justice" au sens de l'article226-10 du code pénal, par la remise ou l'envoi de courriers et d'une documentationinformatique reçus les 3 mai, 14 juin, 20 août et 4 octobre 2004, l'existence d'unréseau de corruption et de blanchiment internationaux et en désignant les acteurset bénéficiaires sur la base d'informations et de données qu'il savait inexactes,
Jean-Louis GERGORIN s'est livré, en connaissance de leur fausseté, à la
dénonciation de faits de nature à entraîner des sanctions judiciaires entrant dans le

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champ de la dénonciation calomnieuse et cela au préjudice de nombreusespersonnes qu'il a précisément identifiées ou rendues identifiables ;

Attendu qu'il est ainsi démontré que tout au long de son entreprise Jean-LouisGERGORIN a agi de mauvaise foi; qu'il n'est pas crédible lorsque il prétend quela seule fois où sa vigilance naturelle, sa puissance intellectuelle, sa visiongéostratégique et son expérience professionnelle auraient toutes failli, et ce pendantplusieurs mois, cela aurait été précisément alors qu'il était confronté à une situationexcessivement délicate et complexe, reposant sur des données relevant d'undomaine -informatique- qu'il connaissait peu et à l'approche d'une échéance majeure
pour son entreprise ;

qu'au lieu de se méfier d'un homme dont il connaissait le passé et d'informationsdont il ne maîtrisait pas la source mais concernant en revanche des personnes qu'ilfréquentait, dans une période de haute vigilance pour EADS, Jean-Louis
GERGORIN ne peut faire croire au tribunal que l'emballement, à défaut d'unenaïveté impensable, lui aurait fait perdre ses plus élémentaires et anciennes règlesde prudence ;

Attendu que les délits de dénonciations calomnieuses sont constitués à l'encontrede Jean-Louis GERGORIN qui sera déclaré coupable de ce chef ;

€ sur les délits de faux, usage de faux

Attendu qu'il a été constaté que la première clef USB remise par Jean-LouisGERGORIN aux juges d'instruction (scellé JLG.UNIQUE) contient un fichier detype "access" intitulé "Original Avril 2004" contenant lui-même deux tablesidentiques à la base "DS PROD ACCOUNT" sur laquelle ont été retrouvés les 36
enregistrements supplémentaires et les 30 enregistrements modifiés par rapport àla base Db3 de Florian BOURGES, et tels qu'ils apparaissent dans le "superannuaire" du 20 août 2004 ;

Attendu que cette même clef comporte également un fichier "RECENT.Mdb" quicontient une table de 8.236 transactions dont la structure est identique aux fichiersde transactions de Florian BOURGES ;

qu'on y retrouve :

• les comptes 9DTVE de Gilbert FLAM, A0016 de Patrick GAUBERT, C0621 deFAB BOSSART et C0723d' EDIN CAYBAN,
• neuf numéros de comptes communs avec les données BOURGES mais dont leslibellés ont été modifiés: 03778 P DELMAS, 70769 JC MARCHIANI, 81409 P
PASQUA, 83656, 87032, 87127 ALAIN GOMEZ , 90762 KAR SCHMITT, 99302
EURORSCG & CO, E3528 PIERRE FALCONE ;
que sur dix enregistrements ajoutés dans cette base "RECENT" par rapport auxdonnées BOURGES, les six comptes suivants se retrouvent dans le "superannuaire" mais avec un libellé différent :

• C0825 AC 89040 GEOS,
• C0826 JC DE LASTERIE DU SAILLANT,
• C0826 H DE LASTERIE DU SAILLANT,
• C026 JEAN HEINRICH,
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• CO826 BERNARD GUETTA ,
• C0826 PIERRE CHARON ;
qu'enfin, sur les neuf "comptes origines" figurant dans l'envoi du 4 octobre 2004,
seuls quatre d'entre eux se retrouvent à l'identique dans cette base, sans libelléassocié (7082,76087, 80309, 81321);

que 41 "comptes destinataires" sont identiques à ceux figurant dans le 5ème envoi,
parmi lesquels les comptes C0621 FAB BOSSART, C0723 EDIN CAYBAN,
C0825 GEOS, 99302 EURORSCG, 81409 P PASQUA, 87127 Alain GOMEZ,
90762 KAR SCHMITT ;

Attendu que la structure de la base "Transactions janvier février 2004" est identiqueà la base "RECENT", notamment avec les quatre colonnes supplémentaires quiattestent de leur provenance commune ; que les données présentes dans ce fichier"Transactions janvier février 2004" sont relatives à des opérations datées du 20septembre 2001 au 26 février 2004, ce qui n'est pas cohérent par rapport à lapériode précisée dans le nom du fichier; que les données reconstituées et retrouvéesdans les secteurs non alloués du disque dur d'Imad LAHOUD comportentégalement des opérations datées du 20 septembre 2001 au 2 février 2004; que cettebase comprend 360 enregistrements relatifs à 8 "comptes origines" et 45 "comptesdestinataires";

que comparée au 4ème envoi du 20 août 2004, il est ressorti :

• 16 numéros destinataires communs,
• 14 libellés différents,
• 15 numéros et libellés de comptes communs aux deux bases,
• 3 numéros de comptes communs aux deux bases ayant un libellé partiellementmodifié ;
que sa comparaison au 5ème envoi du 4 octobre 2004 fait ressortir :

• 29 enregistrements avec numéros identiques mais libellés modifiés,
• 26 enregistrements avec numéros de comptes et libellés identiques (D2330) ;
Attendu que cette même clef USB comporte dans le fichier
EM_TRANSACTION_DATA issu de cette base, des comptes CLEARSTREAMouverts aux noms d'une vingtaine de personnes qui jusque-là n'étaient pasapparues; qu'il s'agit d'Allain GUILLOUX, Benoît HABERT, Benoît TELLIER,
Bernard GUETTA, Bernard HEMERY, Bertrand DUFOURCQ, Christian SASSO,
Denis OLIVENNES, Guillaume HANNEZO, Jean ROSANVALLON, Jean-Renaud
FAYOL, Jean-Yves HABY, Michel BARAT, Michel CHARASSE, PhilippeGUGLIELMI, Pierre CABANES, René RICOL, Simon GIOVANNAI, Yves
BEAUMLIN et Yves GLEIZES (D2351) ;

Attendu que la clef USB biométrique remise dans un second temps par Jean-LouisGERGORIN aux juges d'instruction lors de son interrogatoire du 18 juillet 2007(D2732/28 - scellé JLG POLE FINANCIER UN) comprend des fichiers
"MARTINI.xls" et "GFLAM.xls" rassemblant les transactions des années 2001 et
2002 mettant en relation le compte origine "03778 Philippe DELMAS JuliusBaer/Switzerland" avec les comptes destinataires "9DTVU-AC 67098/JJMARTINI" et "9 DTVE- AC 56402/ Gilbert FLAM" (D3290/103 et 105) etreprenant pour partie les transactions incluses dans l'extrait précédemment remis

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au Général RONDOT en octobre-novembre 2003, intitulé "RESULT_EM_ unk_
transactions_data"; que force est de constater que cet extrait n'identifiait pas alorsles titulaires des comptes concernés ; que Florian BOURGES a expliqué que cetintitulé avait été emprunté à ses propres documents de travail (D1008/6), les termes"unk_account" (avec "unk" pour "unknown") correspondant selon lui à ce queDenis ROBERT a nommé des "comptes fantômes" (D972/6) ;

Attendu qu'il en est de même de l'intitulé "DS_PROD_ACCOUNT" apparu dansl'un des extraits figurant dans le même scellé RONDOT MEUDON 7, qui a étédirectement inspiré du titre de la base de comptes clients issue du DATA SERVERde CLEARSTREAM et repris dans les "données BOURGES" pour se retrouverdans la première clef USB de Jean-Louis GERGORIN sous la base "original avril2004.mdb"composée de deux tables identiques intitulées
"DS_PROD_ACCOUNT" et "Copy of DS_PROD_ACCOUNT";

Attendu qu'en ayant disposé de ces données que lui remettait Imad LAHOUD dontcertaines sont contradictoires, Jean-Louis GERGORIN ne saurait utilement
prétendre avoir cru en leur authenticité et à la réalité de la pénétration informatiquedont se vantait Imad LAHOUD et sur laquelle il s'est d'ailleurs abstenu de toutevérification ; qu'il a, au contraire, tenté de justifier son silence tant à l'égard de lajustice que du groupe LAGARDERE par le caractère peu probant de ces
informations, dont il s'est cependant attaché à conserver la trace par devers lui, pourn'en divulguer l'existence aux magistrats instructeurs que tardivement, de façonsélective et progressive, et au gré de la défense de ses propres intérêts ;

Attendu que, si la preuve n'est pas rapportée de la participation effective de Jean-
Louis GERGORIN, comme auteur principal ni comme complice de la confectiondes documents argués de faux, il apparaît néanmoins qu'il en connaissait lecaractère frauduleux lorsqu'il est entré en leur possession et qu'il en a fait usage enconnaissance de cause en les remettant au Général RONDOT en novembre 2003
puis à Renaud VAN RUYMBEKE courant 2004 ; que les excuses ou explicationd'aveuglement de Jean-Louis GERGORIN ne sont pas recevables tant l'instructionet les débats ont révélé sa particulière mauvaise foi et son exceptionnelle aptitudeà retourner les situations en sa faveur ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN ne pourra en conséquence qu'être relaxé duchef de faux mais déclaré en revanche coupable du délit d'usage de faux commisen 2003 et 2004 ;

€ sur les délits de recels :

Attendu que Jean-Louis GERGORIN soutient avoir été persuadé dès l'origine quesa source avait obtenu ces données dans le cadre d'une pénétration informatique,
ce qui exclurait sa connaissance de la provenance exacte de ces données ; que c'estprécisément de la conscience qu'il avait du caractère illégal d'une telle provenance,
qu'il a prétexté pour tenter de justifier d'avoir tardé à révéler les faits à l'autoritéjudiciaire ; que cette seule connaissance, faute d'avoir été informé par ImadLAHOUD du processus réel de circulation de ces données depuis FlorianBOURGES et jusqu'à lui, démontre que Jean-Louis GERGORIN a eu la volontéde s'inscrire dans un processus frauduleux, ce qui suffit à caractériser l'élémentintentionnel du délit de recel à son égard ;

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Attendu que la qualification de vol, retenue pour les faits commis au préjudice dela société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES, a été abandonnée à l'égard deFlorian BOURGES au bénéfice de celle d'abus de confiance, que les prévenus ontété mis en mesure au cours des débats de s'expliquer sur cette éventuellerequalification et sur celle qui en découle de recel d'abus de confiance notammentà l'égard d'Imad LAHOUD et de Jean-Louis GERGORIN, qui avait été requise dèsla phase de règlement de l'information par le procureur de la République dans sonréquisitoire définitif et reprise à l'audience dans ses réquisitions orales ;

Attendu que les investigations techniques réalisées à la diligence des magistratsinstructeurs ont établi que de nombreuses données figurant dans les documentsutilisés pour tenter d'asseoir les dénonciations ont été purement et simplementconservées dans les supports des dénonciations ; que cette démarche n'a pu quecrédibiliser davantage les propos du dénonciateur qui, mêlant le faux au vrai, avoulu égarer ses interlocuteurs ;
que Jean-Louis GERGORIN ne pouvait ignorer que ces données venues del'intérieur du système CLEARSTREAM à l'insu des responsables de cet
établissement avaient une provenance frauduleuse ;

Attendu qu'en ayant obtenu d'Imad LAHOUD et par la suite détenu, sur dessupports informatiques ou papiers, des données à l'origine détournées par FlorianBOURGES au préjudice de CLEARSTREAM BANKING, CLEARSTREAMINTERNATIONAL et de la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES, alors
qu'il les savait acquises selon un processus frauduleux, Jean-Louis GERGORIN
s'est également rendu coupable des délits qui seront requalifiés en recels d'abus deconfiance ;

c-4 ) sur la culpabilité de Imad LAHOUD

€ sur les délits de dénonciations calomnieuses

Attendu que malgré sa mise en cause constante par Jean-Louis GERGORIN et parle Général RONDOT comme étant la source de l'un comme de l'autre, Imad
LAHOUD a persisté dans ses dénégations ;

Attendu qu'après avoir affirmé tout au long de l'information que ces données luivenaient du Général RONDOT qui le manipulait, Imad LAHOUD a prétendu àl'audience que ces documents lui avaient été remis par Jean-Louis GERGORIN lui-
même, lui demandant de les conserver (note d'audience page 67) ;

Attendu qu'il a été cependant démontré qu'Imad LAHOUD est allé de sa propreinitiative, entre février et septembre 2003, au contact de Denis ROBERT puis deFlorian BOURGES auprès desquels il a récupéré les données CLEARSTREAMpour lesquelles il manifestait déjà un intérêt particulier, et notamment la base des
comptes clients et les transactions, à une époque où ses liens avec Jean-LouisGERGORIN ténus en février 2003, se sont renforcés au fil du temps jusqu'enseptembre suivant ;

Attendu qu'Imad LAHOUD a reconnu avoir récupéré les données
CLEARSTREAM auprès de Denis ROBERT en février 2003 mais s'en être défaitle lendemain de son retour de Metz, sans avoir réalisé, ni même demandé d'en

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conserver une copie ; que s'il a admis avoir rencontré Florian BOURGES en juillet2003, il a contesté avoir obtenu les fichiers directement de la part de ce dernier,
contrairement à ce qu'a toujours affirmé Florian BOURGES ; qu'il a nié touteimplication dans la confection de ces faux documents papiers ou informatiques ;

Attendu qu'au cours de l'information, Jean-Louis GERGORIN a indiqué qu'ImadLAHOUD a commencé à lui transmettre des informations en mai-juin 2003, qu'enseptembre 2003 il lui a montré des éléments de transactions, cette fois-ci imprimés,
sous forme de target reprenant pour partie celles qu'il lui avait précédemment
décrites, l'ensemble des mouvements cash entrant ou sortant d'un comptespécifique et qu'à la fin octobre 2003 Imad LAHOUD lui a remis l'annuaire dedeux pages ; qu'il a complété au cours des mois de janvier à avril 2004, avec untotal de 8.200 transactions qui ne concernaient pas uniquement les comptes del'annuaire de novembre 2003, que c'est au début du mois d'avril 2004 que sasource a produit le "super-annuaire" de plus de 33.000 comptes, que le listing des895 comptes clôturés simultanément le 12 mai, sous-ensemble du "superannuaire",
lui a été remis vers le 10 ou 11 juin suivants , qu'enfin Imad LAHOUDlui a confectionné un historique complet des transactions des principaux comptes
sensibles ;

que, d'une façon plus générale, Jean-Louis GERGORIN a affirmé: "Je ne suis
jamais intervenu pour influencer le contenu de ces listings qui pour moireprésentaient le résultat de sa pénétration informatique sans que je ne lui aijamais demandé la moindre modification sur ces listings" (D1214/12) ;

qu'il a dit avoir conservé la copie du "super-annuaire", des transactions
"spécifiques" de janvier-février 2004 et des 8.000 transactions "spécifiques" et "non
spécifiques" de mars et avril 2004, données qu'il a indiqué avoir conservées àcompter du début mai 2004 sur une clef USB "afin qu'elles puissent êtretransmises aux autorités judiciaires en cas de disparition physique"; qu'en mai2006, il avait pris l'initiative de déposer cette clef entre les mains des jugesd'instruction (D1090) alors qu'une mesure d'expertise était déjà en cours sur lesdonnées informatiques qui avaient été appréhendées jusque-là ;

Attendu que le Général RONDOT a pour sa part mis en cause tant Jean-LouisGERGORIN qu'Imad LAHOUD dans la fourniture de ces listings en ces termes :
" Soit Jean-Louis GERGORIN, soit Imad LAHOUD m'ont remis , en octobre et
novembre 2003, des documents papiers comportant des listes de transactions et unesorte d'annuaire avec la liste des personnes impliquées dans le système"
(D2666/8) ;

que Stéphane QUEROY, la nièce du général, qui a occupé le poste de chargée demission auprès du CROS à compter de mars 2003, a confirmé aux enquêteurs"qu'en 2003, Imad LAHOUD est venu au ministère de la Défense muni d'une clef
USB digitale, sur laquelle se trouvaient les fichiers informatiques deCLEARSTREAM, d'après lui. J'ai transféré ces données sur mon ordinateurportable professionnel en présence de LAHOUD et de mon oncle. Il s'agissait desupport excel mais je n'en suis pas sûre, sur lequel pouvait voir des noms debanque, des noms propres de bénéficiaires, des numéros de coptes bancaires , desdates et d'autres données dont je n'ai pas un souvenir précis. Ces fichiersprovenaient d'après LAHOUD d'une pénétration informatique de
CLEARSTREAM" (D1105/2) ;

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Attendu que Jean-Louis GERGORIN a déclaré que c'est en mars 2004 qu'ImadLAHOUD l'a informé de l'existence d'un circuit financier, distinct de celui initié
par WANG et GOMEZ, créé à partir de deux comptes de la Société Générale àMilan en relation avec différents comptes à la Banque Populaire de Sondrio, reliéspar des relations complexes de nantissement mutuel, les deux comptes "de NAGY"
et "BOCSA"; que ces informations ont été transmises directement par ImadLAHOUD au Général RONDOT (D1090/21) ; que lors de ces révélations, ImadLAHOUD lui a montré et commenté oralement "une page imprimée qui n'était pasun listing informatique mais une liste de comptes CLEARSTREAM avec leurintitulé", sans données transactionnelles (D1090/22) ;

Attendu que le Général RONDOT a également déclaré aux enquêteurs qu'ImadLAHOUD lui avait apporté entre la mi-février et le début mars 2004 "un listing detransactions CLEARSTREAM dans lequel figuraient entre autres noms, pour lapremière fois à mes yeux, les patronymes de NAGY et BOCSA sur deux lignesdifférentes qui se suivaient , concernant deux comptes différents ouverts dans unebanque italienne" (D2666/26) ;

Attendu qu'il ressort de l'information et des débats que, contrairement à sesaffirmations, Imad LAHOUD a pris l'initiative d'aller récupérer les documentsCLEARSTREAM auprès de Denis ROBERT en cherchant à impliquer dans cetteopération la DGSE avec laquelle il était en relation depuis tout juste un mois ; queson officier traitant à la DGSE a confirmé que cette démarche venait de l'initiativedu prévenu et ne lui avait en aucun cas été suggérée par le service (D2681) ; que cesdéclarations étaient confirmées par le directeur, Pierre BROCHAND ;

Attendu que s'il est établi qu'Imad LAHOUD a remis à la DGSE un exemplaire desCD-ROM ainsi gravés, il se déduit des témoignages d'Eric MERLEN et PascalLORENT qu'il a fait en sorte d'en conserver une reproduction sur son ordinateurpendant les semaines qui ont suivi ; que le journaliste Eric MERLEN, qui avaitmis le prévenu en relation avec Denis ROBERT en février 2003, a en effet indiquéqu'à l'occasion d'une visite effectuée en mai 2003 au domicile d'Imad LAHOUD,
ce dernier lui avait montré sur son ordinateur portable les fichiers de DenisROBERT, qu'il avait vu apparaître sur l'écran les noms, sans les prénoms, deGOMEZ et de MARTINEZ ; qu'Imad LAHOUD avait ouvert un autre fichier surlequel apparaissait une banque à BOGOTA, tout en affirmant que GOMEZ etMARTINEZ étaient associés à ce compte à BOGOTA, sans qu'aucune sommed'argent fût indiquée (D1681) ; que Pascal LORENT, qui avait été présentnotamment lors du premier contact entre Denis ROBERT et Imad LAHOUD, apour sa part indiqué qu'au cours de la matinée du 3 juillet 2003, alors qu'ils setrouvaient à l'hôtel Ibis de la gare du Nord à Paris, il avait vu sur l'ordinateurd'Imad LAHOUD des listes de comptes clients CLEARSTREAM, sous format"Excel", qui paraissaient identiques à celles qu'avec Denis ROBERT ils détenaient(D1270), déclarations confirmées à la barre du tribunal (notes d'audience pages 300et 301) ;

Attendu que dans son compte rendu en date du 3 juin 2003, l'officier traitant arelaté son entretien avec Imad LAHOUD, présenté sous le pseudonyme
"Thyphose", du 16 mai précédent en indiquant : "A l'occasion de ses recherches,
Typhose a découvert les références des comptes bancaires en Suisse de messieursAlain GOMEZ (ex-pdg de THOMSON) et Pierre MARTINEZ (ancien directeur de

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la sécurité de ce même groupe ). Pressé par Jean-Louis GERGORIN, Typhosedéclare s'être refusé à lui communiquer ces éléments" (D1304/1) ;

Attendu que l'analyse des données contenues dans la messagerie de FlorianBOURGES a permis d'établir que celui-ci avait été rendu destinataire d'envois defichiers de la part de Denis ROBERT qui lui-même les tenait d'Imad LAHOUD,
ce que ce dernier a reconnu à la barre (note d'audience page 62) ; que parmi cesfichiers figurait notamment une note "WSP", quasi-identique à la note du 23novembre 2003 avec ses annexes; qu'Imad LAHOUD s'est borné à reconnaîtreavoir rédigé les cinq paragraphes annexés à cette note ;

Attendu enfin que les supports de la dénonciation de 2003 ont été retrouvés dansles scellés RONDOT avec une mention "opération Madhi", cette expression étantcensée définir l'opération menée par le Général RONDOT avec sa source ImadLAHOUD à la suite de l'abandon de ce dernier par la DGSE, ce qui signifie bienque, dans l'esprit de son destinataire, cette note s'inscrivait dans le fluxd'informations communiquées par cette même source ;

Attendu que les propriétés des fichiers contenus dans le CD-ROM reçu par le jugeRenaud VAN RUYMBEKE le 4 octobre 2004 mentionnent "modifiés le
30/09/2004 (...) Matrix", que ce libellé "Matrix" correspond aux propriétés desfichiers adressés à Denis ROBERT par Imad LAHOUD et notamment les fichiers"DDV.doc" et "WSP.doc" ;

Attendu qu' Imad LAHOUD a fini par admettre à l'audience qu'il utilisait le nomde Matrix comme pseudonyme et qu'il avait procédé à ces envois ; que laconfiguration interne de ces fichiers a démontré qu'ils n'ont pas été extraitsdirectement de CLEARSTREAM mais sont issus des documents de travail de
Florian BOURGES, eux-mêmes élaborés, au sein de l'équipe d'ARTHURANDERSEN Luxembourg, à partir des données extraites du système
CLEARSTREAM ;

Attendu que, de surcroît, l'expertise du disque dur de l'ordinateur professionnelutilisé par Imad LAHOUD (scellé 3E) a permis de découvrir, malgré les écrasementde fichiers réalisés peu avant la perquisition d'avril 2005, la présence dans lesclusters non alloués de mentions suivantes: " BANQ CANTO VAUDOISE. AC
127-A-61222- D AMBIEL", " BANQ CANTO VAUDOISE. AC 127-A-61220-T
DANA" et " JULIUS BAER BANQ-AC.89057 Jean HEINRICH" (D2528/102),
alors que ces trois noms, apparus sur les documents remis au Général RONDOT neréapparaissent pas dans les documents remis au juge Renaud VAN RUYMBEKEen 2004 ; que d'autres noms, par ailleurs identifiés se retrouvent dans les envoisdestinés à Renaud VAN RUYMBEKE ;

Attendu qu'il a été relevé la présence dans le disque dur de l'ordinateurprofessionnel d'Imad LAHOUD, concernant le compte 03778 attribué faussementà Philippe DELMAS, non seulement de 21 opérations communes avec l'envoi du4 octobre 2004 (dates et heures, montants , numéros de comptes , bénéficiaires etpays identiques), mais également de 47 opérations qui ne sont pas comprises danscet envoi (D3435/2), ce qui démontre qu'Imad LAHOUD disposait de données bienplus nombreuses que celles qui ont été utilisées et que, comme l'a indiqué Jean-
Louis GERGORIN, un tri a effectivement été réalisé dans ses données par ImadLAHOUD ;

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Attendu qu'en dépit du fait que les traces ainsi retrouvées n'ont pas pu être datées,
Imad LAHOUD apparaît clairement non seulement comme le point de passageobligé des données CLEARSTREAM entre Denis ROBERT et Florian BOURGESd'une part et Jean-Louis GERGORIN, le Général RONDOT et le juge RenaudVAN RUYMBEKE d'autre part, mais également comme étant détenteur desdocuments et données falsifiés qu'il a lui même confectionnés ;

Attendu que, questionné à l'audience par le conseil d'une des parties civiles , ImadLAHOUD, qui jusque-là avait toujours fermement nié toute participation àl'élaboration des documents, a déclaré avoir été amené, courant mars 2004, à
insérer sur une feuille "Excel" les noms de NAGY et BOCSA , cela sur demande
de Jean-Louis GERGORIN et à partir d'un modèle présenté par ce dernier, que cesfaits se sont déroulés d'après lui dans le bureau d'Yves BERTRAND (notesd'audience pages 76, 77 et 361), ce que ce dernier, tout comme Jean-LouisGERGORIN (page 78), a fermement contesté lors de son audition comme témoin(page 361 et 362) ; que selon Jean-Louis GERGORIN il s'agit du fichier "comptesreliés à Sondrio avril 2004.xls" créé le 10 mars 2004 qui se trouve dans sa 2ème clef
USB (D3290/99) ; que force est de constater que le document unique dont il s'agitn'est pas inclus dans les poursuites ;

Attendu en conséquence qu'Imad LAHOUD quant à lui n'a pas été à l'initiative desdénonciations commises au cours des années 2003 et 2004 ;

que s'il doit être considéré comme l'auteur matériel des documents ayant accréditéla thèse soutenue par Jean-Louis GERGORIN auprès du général RONDOT, lapreuve n'est pas rapporté qu'il ait personnellement dénoncé des faits en rapportavec ce réseau de blanchiment et de corruption ; que le Général RONDOT a préciséle rôle secondaire d'Imad LAHOUD dans le processus de dénonciation en ce qu'il
avait été dirigé vers lui ; que cependant, en alimentant de façon récurrente Jean-
Louis GERGORIN et le Général RONDOT en documents ayant une apparenced'authenticité et en rédigeant une note de synthèse et des annexes dont il ne pouvaitméconnaître le caractère mensonger, ni qu'elle était destinée au Général RONDOT,
Imad LAHOUD a fourni à Jean-Louis GERGORIN une aide déterminante dans la
commission du délit de dénonciation et s'en est ainsi rendu complice au cours del'année 2003 ;

qu'en outre, en fournissant à Jean-Louis GERGORIN des données informatiquesqu'il a personnellement falsifiées, dont il connaissait l'origine et l'usage qu'allaiten faire Jean-Louis GERGORIN, en participant à la rédaction d'au moins deux deslettres adressées au juge Renaud VAN RUYMBEKE, en sélectionnant les fichiersde transactions finalement adressés à ce magistrat destinataire de la dénonciation,
qu'en ayant agi en connaissance du préjudice qui allait en résulter pour lespersonnes injustement dénoncées et avec l'intention manifeste de leur nuire, ImadLAHOUD a sciemment, par l'aide et l'assistance ainsi prodiguée à Jean-LouisGERGORIN, facilité la préparation et la commission par ce dernier des délits dedénonciation calomnieuse au cours de l'année 2004 ;

Attendu qu'il convient dès lors, suivant en cela les réquisitions du ministère publicà l'audience ayant donné lieu à un débat contradictoire offrant la possibilité auxprévenus de présenter leur défense sur ce point, de requalifier les faits initialementpoursuivis à l'encontre d'Imad LAHOUD sous la qualification de dénonciation

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calomnieuse en complicité de dénonciation calomnieuse par aide ou assistance, etde le déclarer coupable de ce chef ;

€ Sur les délits de faux et usage de faux:

Attendu que les éléments matériels recueillis à l'encontre d'Imad LAHOUD telsqu'ils ont été précédemment rappelés et l'incohérence de ses déclarations et desmensonges qu'il a multipliés dans cette procédure suffisent à considérer, en dépitde ses dénégations, qu'Imad LAHOUD a été l'auteur des altérations de la véritécontenues dans les documents remis à Jean-Louis GERGORIN qui les a par la suiteutilisés auprès du Général RONDOT et de Renaud VAN RUYMBEKE ;

qu'il a été démontré notamment par les déclarations des protagonistes etconstatations faites par les enquêteurs qu'au cours de l'année 2003, Imad
LAHOUD a fourni des extraits de faux listings autant à Jean-Louis GERGORINqu'au Général RONDOT sous la protection conjointe desquels il s'était placé,
cherchant ainsi à satisfaire les attentes du premier réclamant des preuves permettantde déjouer ses craintes "paranoïaques" et du second qui le considérait toujourscomme une source de qualité susceptible de l'aider de façon décisive dans la lutteanti-terroriste ;

qu'il n'apparaît pas qu'Imad LAHOUD ait fait usage de faux listings à l'endroit dujuge Renaud VAN RUYMBEKE qui ne connaissait son existence qu'au travers dece qu'avait pu lui en dire Jean-Louis GERGORIN qui lui avait divulgué son nom ;

Attendu qu'Imad LAHOUD sera en conséquence relaxé du chef d'usage de fauxcommis en 2004 auprès de Renaud VAN RUYMBEKE mais déclaré coupable del'ensemble de délits de faux et du délit d'usage de faux pour le surplus ;

€ sur les délits de recels

Attendu que l'information a permis de reconstituer le processus de transmission deces données de la base CLEARSTREAM par Florian BOURGES à Imad
LAHOUD soit directement, soit indirectement par l'intermédiaire de Denis
ROBERT ; qu'il a été montré comment Imad LAHOUD a pu obtenir de DenisROBERT des fichiers de comptes clients et des fichiers de transactions nommés"comptes fantômes" qu'il a gravés sur un CD-ROM à partir de l'ordinateur de celui-
ci, et comment il est, par la suite, entré en possession des bases de données deFlorian BOURGES et de ses documents de travail rassemblés par lui à l'occasionde sa participation, en qualité de stagiaire de la société BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES, à la mission d'audit CLEARSTREAM confiée à ARTHUR
ANDERSEN ;

Attendu que la qualification de vol, retenue pour les faits commis au préjudice dela société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES, a été abandonnée à l'égard deFlorian BOURGES au bénéfice de celle d'abus de confiance, que les prévenus ontété mis en mesure au cours des débats de s'expliquer sur cette éventuellerequalification et sur celle qui en découle de recel d'abus de confiance notammentà l'égard d'Imad LAHOUD et de Jean-Louis GERGORIN, qui avait été requise dèsla phase de règlement de l'information par le procureur de la République dans son

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réquisitoire définitif et reprise à l'audience dans ses réquisitions orales ;

Attendu qu'Imad LAHOUD a reconnu avoir été en possession dès février 2001 desdonnées remises par Denis ROBERT, qu'il a précisé à l'audience que DenisROBERT lui avait dit qu'il était receleur, ce qu'il avait répercuté à son officiertraitant (notes d'audience page 64) ; qu'à l'audience, il a finalement admis avoirrécupéré en septembre 2003 les données CLEARSTREAM auprès de FlorianBOURGES, sachant que celui-ci avait été auditeur de CLEARSTREAM ; qu'il aenfin affirmé avoir par la suite remis ces données à Jean-Louis GERGORIN (notesd'audience, page 63) ;

Attendu que l'analyse du contenu des deux clefs USB que Jean-Louis GERGORINa remises aux magistrats instructeurs en 2006 et 2007 a permis de constater unegrande similitude avec les données CLEARSTREAM extraites du systèmeinformatique et travaillées par Florian BOURGES puis transmises par celui-ci àImad LAHOUD qui les a falsifiées et remises à Jean-Louis GERGORIN et PhilippeRONDOT ;

Attendu qu'en obtenant de Denis ROBERT et de Florian BOURGES en 2003 et enconservant sur ses ordinateurs en 2003 et 2004 des données dont il savait qu'ellesrésultaient de détournements commis au préjudice tant de CLEARSTREAMBANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL que de la société BARBIERFRINAULT & ASSOCIES, Imad LAHOUD a commis les délits de recels d'abus
de confiance ; qu'il convient de requalifier le délit de recel de vol en recel d'abusde confiance et de retenir Imad LAHOUD dans les liens de la prévention de cechef ;

c-5) sur la culpabilité de Dominique de VILLEPIN

€ Sur la complicité de dénonciation calomnieuse par instruction

Attendu qu'aux termes de l'ordonnance de renvoi, il est reproché à Dominique deVILLEPIN de "s'être à Paris, en tout cas sur le territoire national, courant 2004,
en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, rendu complice du délitde dénonciation calomnieuse commis par M Jean-Louis GERGORIN et M ImadLAHOUD , en donnant instruction pour commettre l'infraction , en l'espèce endonnant instruction , courant avril 2004, à M Jean-Louis GERGORIN d'entrer en
relation avec M Renaud VAN RUYMBEKE , premier juge d'instruction au tribunalde grande instance de Paris, aux fins d'adresser à ce magistrat des courriers et desCD-ROM, par des envois anonymes reçus les 3 mai, 14 juin, 20 août et 4 octobre2004, contenant des listings de comptes et des fichiers de transactions de la sociétéCLEARSTREAM , ainsi que des lettres et notes , imputant à diverses personnes, etnotamment à : M DELMAS Philippe, M MARTINEZ Pierre, M GOMEZ Alain, MSARKOZY Nicolas, sous les identités de Paul de NAGY et Stéphane BOCSA, MSTRAUSS-KHAN Dominique, M CHEVENEMENT Jean-Pierre, M MADELINAlain, M BAUSSARD Fabien, M FLAM Gilbert, M MARTINI Jean-Jacques, MPASQUA Pierre, M GONTIER François, M PLENEL Edwy, M SQUARCINIBernard, une participation à des opérations de corruption, et de blanchiment defonds provenant de la perception de commissions illégales sur des marchésd'armement, du produit de la corruption , du narco-trafic et de l'activité de lamafia russe, par l'intermédiaire de la chambre de compensation luxembourgeoise

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CLEARSTREAM" ; alors qu'il savait que les faits ainsi dénoncés à M Renaud VANRUYMBEKE, de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives oudisciplinaires au préjudice des diverses personnes précitées, étaient totalement oupartiellement inexacts, la fausseté de ces faits résultant d'une ordonnance de non-
lieu rendue par Monsieur VAN RUYMBEKE le 1 er octobre 2008, dans le cadre
d'une information judiciaire ouverte à son cabinet sous les numéros parquet0117392051 et instruction 2069/01/63, des chefs de tentative d'escroquerie, abusde biens sociaux, recel, d'une enquête préliminaire diligentée par le parquet deParis sous le numéro parquet 0419592019, classée sans suite le 29 août 2005 auxmotifs d'absence d'infraction , et des investigations diligentées dans le cadre de laprésente information ;

Attendu que Dominique de VILLEPIN sollicite sa relaxe en contesant avoir donnéune quelconque instruction à Jean-Louis GERGORIN et avoir connu la fausseté deslistings qui sont les supports des dénonciations ;

Attendu qu'il ressort des éléments de la procédure et des débats que Dominique deVILLEPIN, alors ministre des Affaires Etrangères, a été informé dès le 1er janvier2004 de la dénonciation initialement faite au Philippe RONDOT courant novembre2003, que cette information a résulté d'une initiative prise unilatéralement par Jean-
Louis GERGORIN, auteur de la première dénonciation dont celui-ci n'ignorait pasle caractère calomnieux ; que cette entrevue impromptue entre Jean-Louis
GERGORIN et Dominique de VILLEPIN au Quai d'Orsay a été provoquée parJean-Louis GERGORIN qui, prétextant de la préparation d'une rencontre avecHenry KISSINGER, avait en réalité l'intention délibérée d'évoquer avec le Ministrele réseau de corruption international lié à CLEARSTREAM ainsi que lesinvestigations en cours du Général RONDOT, c'est-à-dire de l'entretenir de l'objetde sa dénonciation et des réactions qu'elle avait suscitées de la part du CROS,
mettant l'accent sur l'aspect international du système et citant les noms d'AlainGOMEZ, Dominique STRAUSS-KAHN, Laurent FABIUS, Jean-Pierre
CHEVENEMENT et de Jean-Pierre JOULIN, ou encore des noms évocateurs de
la mafia russe (notes d'audience page 177 et D1835/9) ;

que la suite a démontré que Dominique de VILLEPIN s'était montré réceptif et
particulièrement intéressé par la dimension internationale de l'affaire, prenant, poursa part, l'engagement d'organiser rapidement, pour le premier jour utile, uneréunion sur ce sujet ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a déclaré avoir rédigé une note explicativedestinée à informer le Président de la République et l'avoir fait parvenir au Ministrepar l'intermédiaire de son secrétariat (D2732) ; qu'il a été en mesure d'identifiercette note en cours d'information sur présentation du contenu d'un fichier intitulé"note DDV.doc" figurant parmi ceux qui avaient été transmis à Florian BOURGESpar Denis ROBERT, qui lui-même, les tenait d'Imad LAHOUD par mail du 14septembre 2004 ; que la date de création de ce document (4 janvier 2004) estprécisée dans les propriétés du fichier dont le dernier enregistrement ressort au nomde "GERGORIN"; que Dominique de VILLEPIN conteste cependant avoir demandéune telle note et l'avoir eue en mains, estimant au surplus que le style ne correspondpas à ce que l'on peut attendre d'une note destinée à informer un ministre et a
fortiori le Président de la République ;

que Jean-Louis GERGORIN a confirmé pour sa part que le ministre avait biensollicité la rédaction d'une telle note destinée au Président de la République et avait

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ajouté que la décision d'organiser la réunion serait prise selon la réaction du chefde l'Etat ; que l'existence de cette note est également évoquée dans le compte rendudu Général RONDOT relatif à la réunion du 9 janvier 2004 à 17h30, où il est faitétat de sa demande à l'égard de Jean-Louis GERGORIN d'obtenir un exemplaired'une note qui avait été remise à Dominique de VILLEPIN antérieurement à laréunion et où il s'étonne de ne pas en avoir été informé "alors qu'il avait été
convenu de ne rien écrire à ce sujet" (D610/15) ; que lors de sa première auditionen qualité de témoin, le Général RONDOT a indiqué, sous serment, que cette noteavait été remise par Jean-Louis GERGORIN à Dominique de VILLEPIN en débutde réunion (D610/17) ;

que si l'existence de cette note ne fait pas de doute et s'il est établi qu'elle a étéportée à la connaissance de Dominique de VILLEPIN, l'on ne peut que s'étonnertout à la fois de son caractère sommaire et superficiel quant au fond du documentdont le texte se borne, pour l'essentiel, à reprendre certains des paragraphesannexes de la note du 23 novembre 2003, ainsi qu'à livrer quelques explicationsrelatives aux documents intitulés "DS_PRO_ACCOUNT" et "RESULT_ EM_ unk_
transactions_ data" dont des extraits avaient été remis au général RONDOT ; quele lecteur ne peut qu'être frappé du peu de soin apporté à sa confection, laissantsubsister des fautes d'orthographe, déjà présentes dans la note du 23 novembre, ou
omettant une lettre dans la transcription du nom d'un des fichiers
"DS_PRO_ACCOUNT" au lieu de "DS_PROD_ACCOUNT";

que par ailleurs le choix des termes utilisés dans la conclusion traduit la convictionaffichée par le rédacteur sur la fiabilité de sa source, qui conclut ainsi : "Bien queces documents ne constituent pas des preuves au sens judiciaire, il s'agit depreuves absolues dans la mesure où elles ont été extraites du serveur d'archives dela chambre de compensation. Néanmoins, leur divulgation serait catastrophiquecar elle nous priverait d'un instrument de renseignement en temps réel d'unevaleur considérable"(D1825/12) ; que l' information délivrée dans ces lignes,
censée destinée au chef de l'Etat, apparaît fort éloignée de la réalité, connue de leurauteur, du processus frauduleux ayant présidé à l'acheminement, voire à laconfection, des données pourtant présentées au Ministre, sans vergogne, comme des"preuves absolues";

Attendu qu'il résulte des notes du Général RONDOT relatives à la réunion qui s'estfinalement tenue dans le bureau du ministre des Affaires Etrangères le 9 janvier2004, que Dominique de VILLEPIN a fait état "d'instructions" du Président de la
République "auquel D de V avait rendu compte" et résumées en ces termes :

"*traitement en direct avec le PR",
"prudence" - "cadre secret"
"tenir compte des manipulations politiques" ;


que la demande formulée expressément par Dominique de VILLEPIN s'adressant
tout à la fois au Général RONDOT et à Jean-Louis GERGORIN, tendait, ainsi quel'indique le rédacteur du verbatim, à "démonter le système" et "explorer la naturedes relations pour "comprendre les ops qui sont rémunérées" => "un travailhistorique" à faire" (D610/16) ;

que l'accent mis sur l'exigence de secret renforce l'idée que les propos deDominique de VILLEPIN s'inscrivaient dans la suite de ce qu'il présentait commeune instruction présidentielle qu'il a répercutée à ses interlocuteurs et dont lestermes ont été repris par le Général RONDOT dans la lettre adressée au ministredes Affaires Etrangères le 12 janvier 2004 ainsi rédigée : "Grâce au travail de

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recherche de notre source, nous avons semble-t-il, mis à jour une structureintéressante (...) Il convient bien d'agir "avec prudence dans un cadre secret, entenant compte d'éventuelles manipulations politiques" selon les propos duPrésident tels que tu les as rapportés" (D2701/4) ;

que cette invitation au secret, réitérée au cours de la réunion notamment à l'égardde Michèle ALLIOT-MARIE, pourtant ministre de la Défense, en ces termes: "*ne
rien communiquer au MD", alors que celle-ci est évoquée en lien avec la
"compromission de P.OL*", démontre à tout le moins que le périmètre de lamission ainsi confiée excédait largement celui qui avait été initialement imparti auCROS par ce même Ministre de la Défense en novembre 2003 ;

que force est cependant de constater que Philippe RONDOT n'a pas tardé às'écarter de ce "cadre secret" qui devait entourer la mission présidentielle confiéepar Dominique de VILLEPIN, en allant se confier dans les jours qui ont suivi audirecteur de cabinet du ministre de la Défense puis à la ministre elle-même;

que, sur l'existence d'une telle mission, les déclarations de Dominique deVILLEPIN ont été précisées ; qu'après avoir soutenu au cours de l'informationqu'il n'avait pas donné de mission d'enquête au Général RONDOT mais s'étaitborné à lui demander de le tenir informé des développements internationaux decette affaire et d'obtenir un éclaircissement sur la vraisemblance d'un tel dispositifdans son ensemble (D1835/27), il a reconnu à l'audience que la mission confiée augénéral était "d'explorer la crédibilité du système" (notes d'audience, pages 158 et163) ; qu'il a par ailleurs admis s'être entretenu avec le Président de la Républiquepréalablement à la réunion du 9 janvier de la menace annoncée (notes d'audience,
page 176) et situé ses demandes faites à ses interlocuteurs dans le droit fil desorientations générales posées par le chef de l'Etat ;

que néanmoins, par courrier adressé le 22 juin 2007 aux magistrats instructeurs, lePrésident de la République, Jacques CHIRAC, a confirmé les termes d'uncommuniqué diffusé le 28 avril 2006 dans lequel il rappelait qu' il avait "toujours
donné à ses gouvernements successifs" les "orientations" pour "agir pour lamoralisation des marchés internationaux et pour la lutte contre les réseauxmafieux" et, s'agissant de l'affaire CLEARSTREAM, "dément catégoriquementavoir demandé la moindre enquête visant des personnalités politiques dont le noma pu être mentionné" (D2690/2) ;

qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que, s'il n'est pas démontré de façonindubitable que le Président de la République ait effectivement donné desinstructions spécifiques à son ministre des Affaires Etrangères, il est en revancheétabli que ce dernier s'est à tout le moins prévalu devant Jean-Louis GERGORINet le Général RONDOT de "propos du Président" dans des termes qui ont étérapportés par ce dernier dans sa lettre du 12 janvier 2004 ;

Attendu qu'il ressort du verbatim du Général RONDOT relatif à cette même
réunion du 9 janvier 2004 que divers autres aspects de l'affaire ont été passés en
revue ;

qu'ainsi ont été évoqués successivement la mafia russe, le cas de PetarATANASOV MANDJOUKOV ( "connecté à Alain GOMEZ"), le nom de Jean-
Pierre JOULIN, le nom de Pierre MARTINEZ en lien avec le Crédit Lyonnais ausujet du compte de Jean-Jacques MARTINI que ces noms apparaissaient dans la

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dénonciation faite en 2003 ;


qu'ont été également abordés des sujets en marge comme le rôle de Patrick
MAUGEIN, "l'action trouble de Maître SPINER" et le cas de Michel ROUSSIN
("pro NS?") et d' Alexandre DJOURI, aucun de ces derniers noms n'étant apparu
dans les supports des dénonciations ;


que les noms d'hommes politiques ont été abondamment cités ; que Dominique de
VILLEPIN a fait état de possibles connexions mentionnant des "réseaux
tangentiels" à explorer", mêlant à ce sujet les noms de "FABIUS, DSK, PSQA
JCM et SQUARCINI"; qu'il a également insisté "sur le croisement des réseaux en
dehors des clivages politiques";


que le nom de Nicolas SARKOZY est revenu à plusieurs reprises au cours de la
réunion ainsi qu'en attestent les mentions suivantes sur ledit verbatim :
"l'enjeu politique=>N.SARKOZY",
"=> fixation N SARKOZY [réf: "conflit CHIRAC SARKO"]",
"rôle des américains => soutien apporté à Nicolas SARKOZY"
"les liens SARKOZY DASSAULT => le Figaro",
"un compte couplé (?) N.SARKOZY Stéphane BOKSA (op) à préciser"
ainsi que le sujet, abordé par Dominique de VILLEPIN, de son voyage en Chine,
"=> des intérêts financiers ?"; que le Général RONDOT et Jean-Louis
GERGORIN ont confirmé la réalité des thèmes abordés et les noms cités dans ses
notes ;


Attendu que Dominique de VILLEPIN a indiqué lors de son audition par les jugesd'instruction que la seule allusion à Nicolas SARKOZY au cours de cette réunionavait porté sur la question de savoir s'il fallait le tenir informé mais avec le risqued'entretenir des rivalités entre ministères ou services (D1835), tout en affirmant quele nom de Nicolas SARKOZY avait été évoqué non comme faisant partie dusystème occulte mais comme étant susceptible d'être informé en raison de saqualité de Ministre de l'Intérieur ce qu'il a confirmé à l'audience (note d'audience,
page 160) ; qu'il a , en tout cas, contesté l'évocation de comptes couplés ayant puconcerner son collègue du gouvernement ;

que Jean-Louis GERGORIN qui, dans un premier temps avait déclaré ne pas enavoir conservé le souvenir, a finalement admis avoir fait état de l'existence de
comptes couplés "de NAGY" - "BOCSA", dont Imad LAHOUD lui avait parlé peude temps auparavant (D2732) ; qu'il convient de mettre en parallèle cette évocationavec les mentions contenues dans les envois des 14 juin et 20 août 2004 quisemblent confirmer l'existence de tels comptes et avec le fait que, selon Jean-LouisGERGORIN, ces mêmes comptes sont apparus dans ce qui lui sera présenté enmars 2004 par Imad LAHOUD comme un réseau distinct en lien, parl'intermédiaire du compte 80082, avec le réseau mis en place par WANG etGOMEZ; que ces éléments accréditent le fait que le nom de Nicolas SARKOZYa été associé à l'existence de comptes couplés au cours de la réunion ;

que le Général RONDOT a conclu le verbatim en livrant son impression qui tient
en trois expressions :

-"doute persistant",
-"belle construction intellectuelle montée par Jean-Louis GERGORIN et quiaccroche D de V => la théorie du complot?"
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-"ne pas avancer sans preuves concrètes",
mentions que Dominique de VILLEPIN qualifiera d'anachroniques ;
Attendu que dans ses déclarations en qualité de témoin assisté, le GénéralRONDOT a affirmé que ses contacts avec Dominique de VILLEPIN à la suite dela réunion du 9 janvier et de la lettre du 12 janvier 2004 et jusqu'au 19 juilletsuivant, se sont résumés à une intervention du ministre à l'occasion de la garde àvue d'Imad LAHOUD à la fin du mois de mars et à un courrier personnel qu'il luia adressé en avril à la suite du remaniement ministériel ; qu'une telle affirmationcontredit le premier témoignage, livré sous la foi du serment dès le mois de mars2006, selon lequel le Général RONDOT avait fait part à Dominique de VILLEPINde ses doutes, corroborés par le verbatim du 13 avril 2004, dans des circonstancesdécrites de la façon suivante : "J'ai également fait part de mes doutes à Dominiquede VILLEPIN autour d'avril 2004 à l'occasion d'un retour de mission. Je lui ai dit
qu'il fallait être extrêmement prudent car j'avais le sentiment d'être
instrumentalisé et que lui-même risquait de l'être. Et là, sa réponse a été trèsnette: on ne sait pas si c'est bon ou pas mais si tout ça est un montage , nonseulement on arrête mais en plus on réagit, tels ont été les propos de M deVILLEPIN ce jour-là"(D610/10) ; qu'à les supposer conformes à la réalité, il
ressort de ces dernières indications que Dominique de VILLEPIN n'aurait
manifesté à cette occasion aucune certitude quant à la véracité ou la fausseté desinformations et aurait manifesté son intention, s'il devait s'avérer qu'il s'agît d'unmontage, non pas de poursuivre l'accumulation d'informations, qu'on lui avait dèsl'origine présentées comme "des preuves absolues", mais au contraire d'arrêter
et de réagir ;

que dans sa note n°447 du 21 avril 2004 adressée à la ministre de la Défense, sousle titre "OBJET : existence d'une vaste entreprise de corruption et de
déstabilisation ?" le Général RONDOT a affirmé n'avoir plus eu de contact avecDominique de VILLEPIN depuis le 12 janvier 2004 (D701/14), et que dans aucunedes notes "Opération REFLUX" qui suivront, pas plus que dans les notes auministre de la Défense du 19 octobre, il n'a été fait mention d'une rencontre dans
un tel contexte et ayant pu avoir cet objet (D 2701) ;

Attendu que les pièces du dossier ont néanmoins établi qu'un contact a bien eu lieule 25 mars 2004 entre les deux hommes lorsque Dominique de VILLEPIN, quioccupait encore le poste de Ministre des Affaires Etrangères, a donné l'instructionau CROS de faire libérer Imad LAHOUD qui venait d'être placé en garde à vue ;
que le Général RONDOT a confirmé à la barre du tribunal, notamment lors de laconfrontation avec les prévenus, avoir reçu cette instruction par téléphone le 25mars 2004 de la part de Dominique de VILLEPIN, précisant que Dominique deVILLEPIN lui semblait alors déjà informé de la garde à vue et qu'il avait comprisque l'objet principal de l'appel était de faire libérer la source dont le nom n'étaitpas cité (notes d'audience, pages 218, 315 et 317) ; que ces déclarations sont elles-
mêmes corroborées par les indications contenues dans la note n°440 en date du 29mars 2004 rédigée par le Général RONDOT à l'attention du directeur de cabinetcivil et militaire du Ministre de la Défense relatant les différentes étapes del'incident du 25 mars et notamment l'appel passé à Jean-Louis GERGORIN à15h40 et quelques instants après un appel reçu de Dominique de VILLEPIN le"priant de faire le nécessaire pour que Imad LAHOUD soit libéré" (scellé RondotMeudon 11 et D2570/30) ; que le Général RONDOT en a confirmé les termes lorsde son audition en qualité de témoin en ajoutant, sous la foi du serment :"Cette

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démarche peut paraître surprenante de la part d'un ministre mais elle s'explique
parce que Dominique de VILLEPIN suivait l'évolution de cette affaire
CLEARSTREAM et Imad LAHOUD était au "piano" si je peux dire. Dominiquede VILLEPIN craignait peut-être qu'Imad LAHOUD parle de cette affaire"
(D610/9) ; que lors d'une audition ultérieure, le témoin, cette fois-ci assisté de sonavocat, a précisé qu'au cours de cet appel le nom de LAHOUD n'avait pas été cité,
bien que le nom ne fût pas inconnu de Dominique de VILLEPIN à ce moment-là(D2676/10) ;

que si Dominique de VILLEPIN a reconnu avoir pris l'initiative d'appeler le CROSce jour-là, il a précisé que c'était préalablement à sa participation à un ConseilEuropéen sur le point de se tenir à Bruxelles et afin de recueillir son avis sur lesrécents attentats de Madrid, que c'est en fin de conversation qu'il avait étéinterpellé par son interlocuteur sur le comportement déplaisant de Jean-LouisGERGORIN à son égard à l'occasion de l'établissement d'un "sauf-conduit"
contraire à toutes les règles de sécurité et sur la garde à vue de son informateur, etqu'il avait dû se contenter de lui répondre, pour "couper court", de "voir ce qu'il
en est" (notes d'audience, pages 162, 178 et D1835) ;

que cependant le Général RONDOT a indiqué que Dominique de VILLEPIN l'avaitappelé peu de temps après que lui-même, ayant appris qu'Imad LAHOUD avait ététrouvé en possession du sauf-conduit révélant les liens entre Imad LAHOUD et luipour les besoins d'une mission "secret défense", avait réprimandé Jean-LouisGERGORIN au téléphone ; que Jean-Louis GERGORIN a pour sa part confirméavoir reçu cet appel et avoir immédiatement informé Dominique de VILLEPIN del'incident ;

que l'agenda du Général RONDOT porte trace de la chronologie des appels qu'audemeurant Dominique de VILLEPIN ne conteste pas dans son principe tout enniant avoir reçu peu avant un appel de Jean-Louis GERGORIN qui aurait déclenchéson intervention auprès du Général ;

Attendu qu'il apparaît ainsi démontré par la convergence des dépositions du témoinPhilippe RONDOT et du prévenu Jean-Louis GERGORIN telles qu'elles viennentd'être rappelées, que Dominique de VILLEPIN a bien été informé par Jean-LouisGERGORIN du placement en garde à vue d'Imad LAHOUD et a tenu les proposrapportés par le Général RONDOT tendant à faire en sorte que celui qui étaitprésenté comme leur source soit libéré ; que s'il n'est pas contestable que cetteinterpellation pouvait hypothéquer la suite des investigations secrètes menées parle Général RONDOT et Jean-Louis GERGORIN avec le concours indispensabled'Imad LAHOUD, c'est bien au premier chef la teneur du "sauf-conduit" détenu
par ce dernier qui a déclenché le courroux du Général RONDOT qui s'est empresséde répercuter à Jean-Louis GERGORIN, et non à Dominique de VILLEPIN, lanouvelle de la découverte du document litigieux et, du même coup, du placementde leur source en garde à vue; qu'enfin, le Général RONDOT a déclaré s'êtreabstenu de toute demande tendant à la libération d'Imad LAHOUD, et les
enquêteurs en charge de cette mesure de garde à vue n'ont pas indiqué avoir reçula moindre intervention à cette fin d'aucun des trois protagonistes ;

Attendu que dans son interrogatoire du 18 juillet 2007, Jean-Louis GERGORINs'est vu notifier le contenu des différentes notes "Opération Reflux" extraites del'ordinateur IPaq du Général RONDOT ; que dans sa note "Opération Reflux (3)"

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du 26 mai 2004 (D2701/9 et 10), celui-ci indiquait avoir appris, le 4 mai, de Jean-
Louis GERGORIN, "que, après avoir , selon lui, reçu des instructions de
Dominique de VILLEPIN, huit jours auparavant, il avait été décidé de "parler aujuge VAN RUYMBEKE" sans autre précision sur les circonstances dans lesquellesune telle instruction avait pu être donnée (D2701/9) ; que Jean-Louis GERGORINen est venu à révéler au cours de ce même interrogatoire qu'il avait eu des réunionssecrètes avec Dominique de VILLEPIN au cours des mois de février, mars et avril2004, dans son bureau du Quai d'Orsay puis, à compter du 1 er avril, dans son
bureau de la place Beauvau ; que le prévenu a expliqué que ces réunions avaientpour objet la poursuite de "l'investigation totalement secrète décidée par le
Président de la République" et de rendre compte des informations recueillies depuisle 9 janvier sur le même réseau de corruption et de blanchiment en lien avecCLEARSTREAM ; qu'il a précisé que, selon le ministre, le Président de laRépublique suivait cette affaire avec "la plus grande attention" tout en y attachant
"la plus grande importance" (D2732/18) ;

que selon Jean-Louis GERGORIN, la première de ces réunions s'était tenue dansla deuxième quinzaine de février; que le général RONDOT a indiqué que, s'étant"rétabli dans sa hiérarchie du ministère de la Défense" (D2965/13), il s'étaitabstenu d'y participer, tout en précisant qu'il avait été convoqué, non parl'entremise du secrétariat du ministre comme c'était ordinairement le cas, mais parJean-Louis GERGORIN en personne (D2965/12 et note d'audience, page 216) ; quelors de cette réunion Jean-Louis GERGORIN a , selon ses propres déclarationsfaites devant les magistrats instructeurs, "résumé les transactions observées par
Imad LAHOUD depuis janvier 2004" parmi lesquelles figuraient "celles impliquantle compte 80082 dont Imad LAHOUD indiquait que l'ayant droit économique étaitBrice HORTEFEUX, ce dont j'ai informé également Dominique de VILLEPIN.
Celui-ci a pris note en disant qu'il fallait poursuivre les investigations ", qu'il avaitpar ailleurs décidé de s'occuper à faire en sorte que l'instruction du Président de laRépublique sur la mise en oeuvre de la contribution de la DGSE soit suivie d'effet(D2732/19) ; que Jean-Louis GERGORIN a poursuivi en indiquant que deux autresréunions avaient eu lieu au mois de mars, qu'au cours de la première de cesréunions il avait présenté à Dominique de VILLEPIN les transactions nouvelles etlui avait remis, à sa demande, un CD-ROM regroupant "les données
CLEARSTREAM les plus spécifiques", qu'à cette occasion, Dominique deVILLEPIN avait commencé à exprimer "quelque scepticisme sur l'aide que lesservices en général pouvaient apporter car les services pouvaient être gênés ouparalysés ou neutralisés par l'existence de connexions politiques dans le réseauocculte faisant l'objet des investigations du général RONDOT "( D2732/19) , qu'aucours de la seconde de ces réunions, il avait porté à la connaissance du ministrel'information, que lui avait livrée Imad LAHOUD, relative à l'existence du réseaufinancier distinct de celui des Frégates incluant les comptes attribués à BriceHORTEFEUX , Patrick GAUBERT et les dénommés de NAGY et BOCSA, ce quiavait emporté la conviction de Dominique de VILLEPIN ; que, dans ces conditions,
"les investigations ne pourraient progresser qu'avec un juge d'instruction", alors
même qu'il demandait au Général RONDOT de poursuivre ses investigations(D2732/20) ;

que Jean-Louis GERGORIN a par ailleurs révélé dans ce même interrogatoire du18 juillet 2007, que lors d'une réunion qui avait eu lieu peu après la remise de sadécoration, qu'il situait de façon erronée le 6 avril, mais qui en réalité s'est tenuedans la soirée du 14 avril, Dominique de VILLEPIN lui avait dit : "maintenant

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c'est clair, il n'y a pas d'autre issue d'informer ou de saisir un juge", en ajoutant :
"c'est une instruction du Président de la République" (D2732/21) ;

que Jean-Louis GERGORIN a précisé qu'il n'avait pris la décision de voir le jugeRenaud VAN RUYMBEKE qu'après mûre réflexion, ayant été par ailleursimpressionné par les quelque 8.266 transactions qu'il avait reçues d'ImadLAHOUD au même moment, parmi lesquelles apparaissait une transaction du 11mars 2004, d'un montant de 30 millions de dollars, émanant d'un compte attribuéà Alain GOMEZ et au bénéfice du fonds Highfields qui avait concomitammentenvoyé à Arnaud LAGARDERE une lettre contestant la stratégie et le managementde la société (D2732/22) ;

que Jean-Louis GERGORIN a maintenu ces déclarations à l'audience en précisantque la résolution avait été adoptée par Dominique de VILLEPIN en deux temps :
ce qui en mars n'était qu'une "réflexion à voix haute" émise par l'intéressé, s'étaittransformé entre le 7 et le 14 avril suivants en une "instruction" donnée par lePrésident de la République et transmise par Dominique de VILLEPIN sur un tonsolennel (notes d'audience, page 170 et 171) ;

que cette instruction n'a pu intervenir qu'au plus tard le14 avril à 17h30, date àlaquelle a eu lieu la rencontre entre Jean-Louis GERGORIN et l'avocat Maître deMONTBRIAL en vue d'établir un contact avec le juge VAN RUYMBEKE aux finsde lui communiquer les informations qu'il détenait ;

que l'indication du délai de huit jours contenue dans le point 2 de la note"Opération REFLUX (3)" du 26 mai 2004 (D2701/9), ayant séparé l'instruction,
qui dans cette logique serait intervenue le 26 avril, en tout cas bien après le 14 avril,
de sa mise à exécution, antérieure au 4 mai, n'est pas conforme aux indicationsfournies par Jean-Louis GERGORIN dans la procédure ;

que le Général RONDOT a précisé, par ailleurs, dans cette même note avoir

"rendu compte au Ministre de la Défense de ce dernier développement, en luicommentant ma note générale n°447 du 21 avril 2004"(point 2) ; que si le générala affirmé avoir donné connaissance de cette note à Philippe MARLAND, ce que cedernier a formellement contesté (D3266/18), il n'a pas fait état dans ses notes desynthèse adressées au ministre de la Défense des entretiens entre Dominique deVILLEPIN et Jean-Louis GERGORIN, la raison étant qu'il redoutait une diffusionde ce type d'information au-delà du Ministre (D2965/14) et a finalement déclarédevant les juges d'instruction ne pas se souvenir avoir "fait référence à Dominiquede VILLEPIN comme ayant donné des instructions à Jean-Louis GERGORIN"
(D3266/21) ; que son verbatim relatif à l'entretien qu'il a eu avec la ministre de laDéfense le 11 mai 2004 n'en porte pas mention (D2574/35) ;

qu'il a cependant soutenu l'avoir tenue informée de la démarche de Jean-LouisGERGORIN auprès du juge d'instruction (D2714/14) ainsi que cela ressortd'ailleurs de sa note publiée par le nouvel-obs.com le 17 mai 2006 (D799/2) ;
qu'entendue une deuxième fois par les magistrats instructeurs, Michèle ALLIOTMARIE
contestera avoir été informée par le Général RONDOT dans cescirconstances (D3395/20), en précisant : "A chaque fois que nous avons parlé decette affaire, le général RONDOT m'a dit qu'il ne savait pas qui était le corbeauet que des rumeurs disaient que ce pouvait être Jean-Louis GERGORIN ou ImadLAHOUD" (D3395/21) ;

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que dans ces mêmes notes, le Général RONDOT a mentionné l'entretien du 4 mai2004 avec Jean-Louis GERGORIN et les contacts entre Jean-Louis GERGORIN
et " le juge VR (...) grâce à un ami commun (MONTBRIAL ?)", mais n'a nullement
fait état de l'instruction du Ministre (D799) ; que sur ce point, le Général RONDOTa pris soin de préciser aux juges d'instruction que "les seuls éléments que Jean-
Louis GERGORIN [lui] a rapportés s'agissant de sa relation avec le juge VANRUYMBEKE sont contenus dans la fiche mémo qui est sorti sur le site internetNouvel Obs .com"(D2965/19), étant précisé que ces notes ont été établie fin 2005à partir de son verbatim du 4 mai 2004 (D2714/11) ;

qu'enfin à aucun moment le Général RONDOT n'a indiqué que Dominique deVILLEPIN se serait référé au Président de la République ; qu'il a soutenu devantles juges d'instruction: "Si le Président de la République avait été cité comme étant
à l'initiative de cette démarche, je l'aurais bien évidemment noté" (D2965/22) ;

Attendu qu'à supposer que Dominique de VILLEPIN ait été l'initiateur de cettenouvelle stratégie, on ne voit pas les raisons pour lesquelles, comme l'a pourtantindiqué Jean-Louis GERGORIN lui-même, il l'aurait renvoyé vers le GénéralRONDOT quand, à l'occasion de la remise de la décoration d'officier de l'ordrenational du Mérite, Jean-Louis GERGORIN avait vainement souhaité, au cours
d'un bref aparté avec le ministre, l'entretenir de cette affaire ;

qu'il convient de rappeler que Jean-Louis GERGORIN avait eu un premier contactavec le même avocat dès le 7 avril et que, ce jour-là, il n'avait demandé qu'uneconsultation en vue de déterminer les moyens juridiques adéquats en vue d'assurerla défense du groupe face aux attaques de ses associés ; que le choix de cetintermédiaire, déterminé autant par la qualité des relations que Jean-Louis
GERGORIN avait tissées avec son père quelques années auparavant, que par le fait,
beaucoup plus actuel, que cet avocat était en liaison avec le juge Renaud VANRUYMBEKE dans le cadre de l'affaire des Frégates, constitue un des éléments dela nouvelle stratégie adoptée par Jean-Louis GERGORIN lui-même et dontl'objectif, par cet intermédiaire, était dès cet instant d'accéder au magistrat encharge de cette affaire ;

Attendu que Dominique de VILLEPIN conteste avoir rencontré Jean-Louis
GERGORIN pendant cette période, à l'exception de la cérémonie de remise de ladécoration de l'Ordre National du Mérite le 14 avril 2004 ; que Jean-LouisGERGORIN a cependant déclaré que pour se rendre auprès du ministre avec lequelil avait ces conversations secrètes, il était véhiculé par les agents chargés de sasurveillance ;

que la main courante de la société AICS établit certes l'existence de contacts maispostérieurs, en juillet et septembre; que selon les témoignages de ThierryDESPREZ, Marc DESMOUSSEAUX et Mickael BESSON, ces contacts avaient
lieu selon une procédure particulière de prise en charge du visiteur que ThierryDESPREZ a décrite en expliquant qu'un point de contact était préétabli avec lesfonctionnaires qui venaient le chercher à bord d'un véhicule de service et leramenaient au même endroit à l'issue de l'entretien, et cela à 3 ou 4 reprises, en juin

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et juillet, ce qui devait permettre à Jean-Louis GERGORIN de pénétrerdiscrètement dans le ministère; que les autres fois Jean-Louis GERGORIN
empruntait l'entrée normale des visiteurs (D3389/4 et 5, 3391/4 et 3665/5) ; que lecarnet de bord des agents de sécurité confirme la tenue de la réunion du 11 juilletau ministère de l'Intérieur ;

que les investigations diligentées auprès du personnel des ministères concernés etl'exploitation des agendas de chacun n'ont pas permis de confirmer l'existence detelles réunions entre la fin janvier et le mois de mai 2004 inclus ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a fait état devant les juges d'instruction de la"situation inédite et délicate" dans laquelle il s'était trouvé à la suite de ladéfaillance du Général RONDOT aux réunions organisées par Dominique deVILLEPIN, qu'il s'agissait pour lui "d'assurer la continuité de la relation établie
entre Dominique de VILLEPIN, le général RONDOT , seul officiellement chargéofficiellement de l'enquête, et [lui-même] le 09 janvier", que "ses comptes rendusau général RONDOT des rencontres avec Dominique de VILLEPIN consistaientessentiellement à l'informer premièrement, que telle rencontre allait avoir lieu ouavait eu lieu, et deuxièmement, de la nature des informations récentes [qu'il avait]
communiquées à M de VILLEPIN"; qu'il a ajouté qu' "il n'y avait aucune raisonqu'il ne fasse point part au général RONDOT de la remise du CD-ROM àDominique de VILLEPIN"(D2751/2) ;

que pour sa part, le Général RONDOT a estimé qu'en faisant de telles déclarations,
Jean-Louis GERGORIN "s'attribue un rôle qu'il a effectivement joué. C'est-à-dire,
sans entrer dans les détails, qu'il me faisait part des pressions de Dominique deVILLEPIN pour accélérer les investigations";

que par son témoignage, le Général RONDOT confirme qu'il se limitait à reporterdans ses notes "Opérations Reflux" les propos dont lui faisait retour Jean-LouisGERGORIN, ce dernier revendiquant avoir agi auprès de Dominique de VILLEPINpar simple "prétérition", aux lieu et place de Général RONDOT, comme simplesoutien logistique de la source (D3305), assurant ainsi une sorte de "go-beetween"
entre ces deux personnes, ce qui atténue considérablement la force probante des
dites notes ;

que la preuve n'a été rapportée de la réalité ni des réunions secrètes décrites parJean-Louis GERGORIN, ni de l'instruction que Dominique de VILLEPIN lui auraitdonné de saisir un juge d'instruction ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'intervention deDominique de VILLEPIN auprès du Général RONDOT le 25 mars 2004 a étémanifestement provoquée par l'appel préalablement reçu de Jean-Louis
GERGORIN, qui s'inscrivait dans le prolongement de l'instrumentalisation deDominique de VILLEPIN amorcée dès le mois de janvier 2004 au service de ses
propres desseins malveillants; que Jean-Louis GERGORIN, après avoir manipuléle conseiller du renseignement et des opérations spéciales, a utilisé les services d'unavocat de bonne foi qui a estimé pouvoir apporter son concours à ce qu'il croyaitêtre la manifestation de la vérité et pour finir, a instrumentalisé la justice ens'insinuant dans un dossier d'information particulièrement sensible et en
manipulant, cette-fois ci, le magistrat chargé de ce dossier ;

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Attendu qu'il n'est pas davantage démontré que Dominique de VILLEPIN ait euconnaissance de la fausseté même partielle des listings et des autres donnéesconfidentielles prétendument extraites de CLEARSTREAM, faute d'informationcomplémentaire reçue de la part du Général RONDOT, ce que ce dernier aconfirmé (D2965/17) alors que celui-ci aurait été seul, conscient du peu de fiabilitédes données communiquées, en mesure de l'éclairer sur ce point ; que le dossierd'information et les débats n'ont pas établi que Dominique de VILLEPIN ait su dès
avril 2004 que ces données, qui lui avaient été présentées d'abord comme étantissues "en temps réel" des "archives de CLEARSTREAM" et ayant servi de supportaux révélations de 2003, étaient devenues massives au cours des premiers mois de2004 et allaient permettre d'élargir la dénonciation portée cette fois-ci à laconnaissance d'un juge d'instruction ;

Attendu que la teneur de son intervention lors du placement en garde à vue d'ImadLAHOUD reflète l'état d'esprit de Dominique de VILLEPIN à cette époque, àsavoir son souci de ménager et de protéger une source susceptible de contribuer àla manifestation de la vérité relative à un réseau de corruption, pressentantl'avantage politique qu'il pourrait tirer de cette révélation, dans un contexte derivalité notoire au sein du gouvernement ;

que les dénégations de Dominique de VILLEPIN relatives à la connaissance de la"note DDV", à la portée de la mission impartie au Général RONDOT, à sonintervention lors de la garde à vue d'Imad LAHOUD ne suffisent pas à établir que,
pourtant informé à compter du 1er janvier 2004 de l'existence d'un réseau
international de corruption et de blanchiment,il ait pu être convaincu au cours du
mois d'avril que ce réseau avait été créé de toutes pièces par Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD, ni a fortiori qu'il ait été l'instigateur desdénonciations calomnieuses qui ont débuté en mai suivant ;

Attendu qu'en conséquence, la preuve de la complicité par instruction n'est pasrapportée à l'encontre de Dominique de VILLEPIN ;

€ sur la requalification en complicité par aide ou assistance par abstention

Attendu que le tribunal ne peut prononcer une décision de relaxe qu'autant qu'ila vérifié que les faits dont il est saisi ne sont constitutifs d'aucune infraction ; ques'il a le devoir de donner aux faits dont il est régulièrement saisi leur exactequalification, il ne peut le faire qu'à la condition de ne rien ajouter et que le
prévenu ait été mis en mesure de présenter sa défense sur l'éventuelle
requalification, conformément au principe d'équité qui doit présider au déroulementdu procès ;

Attendu que dans le cadre de ses réquisitions orales le ministère public a sollicitéla requalification des faits ci-dessus qualifiés en complicité par abstention,
reprenant ainsi les termes de son réquisitoire définitif du 6 octobre 2008(D4579/page 152), en retenant comme élément constitutif de la complicité sonabstention, alors qu'il connaissait, au moins depuis le mois de juillet 2004, lecaractère mensonger des pièces transmises à l'autorité judiciaire et alors qu'il avaitles moyens de faire cesser l'infraction, de toute action de nature à empêcher lapoursuite des infractions ;

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que la défense de Dominique de VILLEPIN estime que la saisine du tribunal eststrictement délimitée par les termes de l'ordonnance de renvoi à l'instruction qu'ilaurait donnée de commettre le délit de dénonciation calomnieuse, préalable à lacommission du délit, ce qui exclut que soient pris en compte des agissements oudes comportements imputables au prévenu mais différents par nature, s'agissant del'absence d'intervention du prévenu caractérisant l'acte de complicité par aide ouassistance ;

Attendu que la requalification, telle que sollicitée par le ministère public àl'audience, s'inscrit dans les limites de la saisine in rem de la juridiction, en ce que
celle-ci recouvre l'ensemble des faits commis "courant 2004", et pour lesquels dontDominique de VILLEPIN est poursuivi en qualité de complice par instructiondélivrée "courant avril 2004";

que si l'acte de complicité par abstention, à le supposer établi, est distinct de l'actede complicité par instruction, seul retenu dans l'ordonnance de renvoi, il se situe,
antérieurement ou concomitamment à la commission du délit et dans les limites de
temps posées par l'ordonnance de renvoi ; que les débats à l'audience ont couvertl'ensemble de la période considérée et le prévenu a été mis en mesure des'expliquer sur les initiatives qu'il a pu prendre ou ne pas prendre pendant tout cetemps, au-delà de la stricte période au cours de laquelle l'instruction présuméeaurait été donnée ; que les réquisitions orales de requalification sont conformes àcelles qui avaient été développées par écrit dans le réquisitoire définitif du 6octobre 2008, au demeurant rappelées lors de l'exposé de l'affaire aucommencement des débats ; qu'elles ont été prises avant les plaidoiries de ladéfense et alors que les prévenus ont eu chacun la parole en dernier ; que lesconclusions déposées à l'audience par la défense de Dominique de VILLEPINprennent en compte une éventuelle requalification en présentant des arguments surla possibilité juridique de retenir au cas d'espèce une abstention pénalementrépréhensible ; qu'il s'ensuit que le prévenu a été mis en mesure de présenter sadéfense sur cette éventuelle requalification ; que dès lors le tribunal est nonseulement en droit mais en devoir d'examiner les faits sous l'angle de cetteéventuelle requalification du délit de complicité par instruction en complicité parabstention ;

Attendu que, s'il est établi qu'après la remise de la lettre du 3 mai 2004,
Dominique de VILLEPIN n'est pas intervenu pour empêcher ni dissuader Jean-
Louis GERGORIN de réitérer cette dénonciation, encore faut-il, pour que cetteabstention puisse être considérée comme fautive et constitutive d'un acte decomplicité de dénonciation calomnieuse, démontrer qu'elle est intervenue enconnaissance par son auteur tout à la fois des intentions coupables de Jean-LouisGERGORIN et de la fausseté des faits qu'il était susceptible de dénoncer ; qu'ildoit en outre être précisé en quoi, il aurait été dans la capacité du compliced'empêcher la commission de l'infraction et comment il aurait pu le faire ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a indiqué avoir poursuivi ses rencontres avecle ministre de l'Intérieur, notamment le 19 mai quand il lui a rendu compte desconditions dans lesquelles il avait rencontré Renaud VAN RUYMBEKE,
Dominique de VILLEPIN s'étant alors montré satisfait de la saisine d'un juged'instruction dans cette affaire mais préoccupé du risque d'exposition qui résultaitdu fait que la rencontre avec le juge avait été "totalement transparente"
(D2732/25) ;

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qu'il a par ailleurs déclaré avoir informé Dominique de VILLEPIN de la clôture des895 comptes et de la présence dans cette liste de comptes de NAGY, BOCSA,
GOMEZ, DELMAS et HORTEFEUX (D2732/26), avoir de nouveau rencontréDominique de VILLEPIN à la fin du mois de juin, et l'avoir informé de latransmission de la deuxième lettre anonyme et de la liste de ces 895 comptes àRenaud VAN RUYMBEKE, sans présenter ni l'une ni l'autre, pensant que, dansla mesure où cette affaire prenait une dimension médiatique marquée, le ministreallait saisir la DST, ne serait-ce que pour compléter l'information du juge ; qu'il aégalement indiqué qu'une réunion s'était tenue le 11 juillet, le ministre lui avaitconfié avoir saisi depuis peu la DST et que l'affaire faisait grand bruit ; qu'à la findu mois de juillet, en marge d'un entretien avec Bruno LEMAIRE, il avait eu uneentrevue de quelques minutes avec Dominique de VILLEPIN auquel il avait donnéconnaissance des dernières informations relatives à Karel SCHMITT et obtenues
du cabinet HAKLUYT et l'avait informé de l'envoi du CD-ROM qui finalementn'est parvenu au juge que le 20 août, en lui précisant qu'il s'agissait de la listeintégrale des comptes référencés à CLEARSTREAM ;

que selon Jean-Louis GERGORIN, le ministre de l'Intérieur lui a conseillé d'enparler au Général RONDOT et d'être extrêmement prudent et d'attendre le résultatdes investigations du magistrat, mais sans lui dire explicitement de cesser lessiennes ;

qu'au cours de la dernière réunion du début septembre, Dominique de VILLEPINlui a indiqué que les services de renseignement n'avaient ni confirmé ni infirmé lesinformations sur les listings CLEARSTREAM et l'a incité de nouveau à laprudence en attendant le résultat des investigations du juge ;

que, Jean-Louis GERGORIN a déclaré : "la réaction de Dominique de VILLEPIN,
de façon constante à partir du 11 juillet, a été "laissons agir la justice et attendonsle résultat des investigations de Monsieur VAN RUYMBEKE" (D2732/32) ; que ses
déclarations ont été confirmées à l'audience ;

Attendu qu'il résulte des explications fournies par le Général RONDOT que celui-
ci a appris, le 4 mai, que l'affaire était désormais passée entre les mains de la justiceet constaté qu'il avait ainsi fait l'objet d'une mise à l'écart, imputant cette décisionde "cloisonnement" à Dominique de VILLEPIN; que le Général RONDOT aprécisé que Jean-Louis GERGORIN ne lui avait pas donné d'autres détails queceux rapportés dans ses notes internes (D2965/24) ; qu'il a indiqué au point 8 dela note Opération REFLUX (3), rédigée le 26 mai 2004, qu'il avait été informé parJean-Louis GERGORIN de l'entretien qu'il avait eu avec Dominique de VILLEPINle 19 mai précédent au cours duquel celui-ci se serait montré à la fois "jubilatoire
mais surtout soucieux de ne pas apparaître dans le scénario" et que le ministre
avait dit "qu'il ne pouvait rien faire car son environnement est pourri" (D2701/10)
; que, dans l'esprit du général, ce "scénario" correspondait à l'envoi des lettresanonymes au juge afin d'alimenter son enquête ; qu'il a également mentionné queJean-Louis GERGORIN lui avait fait part du souhait exprimé par Dominique deVILLEPIN qu'il veille à la sécurité de "MADHI", ce qui correspondait à un"discours rémanent chez Jean-Louis GERGORIN" (D2714/17), auquel il n'avait
été donné aucune suite ;

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Attendu que la mention portée au point 3 de la note Opération Reflux (4) rédigéele 30 juin 2004, dans laquelle le Général RONDOT relate les propos que lui avaittenus Imad LAHOUD le 8 mai, ayant informé que Jean-Louis GERGORIN avaitreçu les instructions de Dominique de VILLEPIN, elles-mêmes formulées par lePrésident de la République, de "balancer Nicolas SARKOZY" est contredite par lesdéclarations de Jean-Louis GERGORIN qui, tout comme Dominique deVILLEPIN, contestent la réalité de tels propos, chacun en ce qui le concerne ;

Attendu que dans son verbatim du 8 juin 2004, soit un mois après l'interpellationde Philippe DELMAS dans le cadre du dossier des Frégates dont la rumeurattribuait déjà la responsabilité à Jean-Louis GERGORIN, le Général RONDOT enest venu à s'interroger d'abord sur les liens éventuels entre Philippe DELMAS etNicolas SARKOZY, apparu dans le listings en mars, à l'occasion des marchésAIRBUS, et ensuite sur "la place et le rôle de Dominique de VILLEPIN dans lesrivalités au sein du gouvernement qui sont clairement exprimées notamment avecNicolas SARKOZY", en faisant "le rapprochement entre la rivalité entre lePrésident de la République, Dominique de VILLEPIN d'un côté et MonsieurNicolas SARKOZY de l'autre côté et l'exploitation médiatique qui en était faite, etl'opération REFLUX" (D2692/4) ; que l'on peut comprendre que dans cescirconstances le Général RONDOT, qui en était resté à la mission confiée enjanvier 2004 par Dominique de VILLEPIN, ait pu se sentir dépassé par lesévénements, ce qu'il a tenté d'expliquer par le fait que "s'il y avait eu un montageet que Dominique de VILLEPIN en aurait été à l'origine - ce que je ne peuximaginer - il ne m'aurait pas demandé de vérifier l'authenticité des listingsCLEARSTREAM" (D2692/5) ; que le 29 juin, lors d'un entretien avec PhilippeMARLAND, il a évoqué l'idée de demander à être reçu sur ce sujet par le Présidentde la République, ce qui n'a jamais eu lieu, mais auparavant de rencontrerDominique de VILLEPIN (D2574/60) ;

qu'il ressort du point 5 de la note "Opération Reflux" (4) que, le 29 juin 2004, legénéral RONDOT est entré en possession de la liste des 895 comptes clôturés le 12mai, dont il savait depuis le 17 juin par la presse qu'elle était parvenue au jugeVAN RUYMBEKE trois jours plus tôt avec la deuxième lettre anonyme de Jean-
Louis GERGORIN ; que pour sa part, Jean-Louis GERGORIN n'a pas hésité àsoutenir devant le général "que le juge Renaud VAN RUYMBEKE instrumentalise
ses correspondants" (point 10 de la note) ;

Attendu que le 30 juin 2004, le Général RONDOT, qui jusque-là avait fait desvérifications auprès du Crédit Lyonnais au sujet d'un compte attribué à Jean-
Jacques MARTINI qui était inexistant dans les livres de la banque, et rencontrécertaines des personnes visées, Jean-Jacques MARTINI lui-même, Serge deKLEBNIKOFF, le Général HEINRICH et Philippe DELMAS (D610/7),a noté queses recherches et ses contacts ne lui ont pas permis de "valider la thèse exportéepar Jean-Louis GERGORIN, laquelle est cependant étayée par l'existence dedocuments bancaires troublants, s'ils sont authentiques" (point 11 de la note
Opération Reflux (4) - D2701/11) ; qu'il était "convaincu (..) qu'il s'agissait de
faux listings" et avait vu se confirmer ses doutes sur la véracité des listings et laréalité d'une manipulation à des fins sur lesquelles il disait s'être interrogé(D2666/27) ;

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que le point 12 de la note est éloquent sur la façon dont le Général RONDOT aperçu dès la fin du mois de juin 2004 la tournure que prenait alors cette affaire : "Je
constate que cette affaire prend un tour politique qui risque de devenir dangereux :
en effet, nous ne savons pas s'il n'existe pas une opération de désinformation àl'origine et pour des motifs indéterminés, que pourrait exploiter un juged'instruction et qui viendrait "toucher" le chef de l'Etat. S'il venait à être établique cette vaste affaire de corruption est réelle, les conséquences politiques, tant àdroite qu'à gauche, seraient calamiteuses. Dans le cas contraire, le chef de l'Etatse trouverait mis en cause pour avoir laissé se développer, sinon encouragé àtravers Dominique de VILLEPIN, une campagne visant de possibles concurrents,
à droite comme à gauche." (D2701/12) ;

que pourtant, face à cet enjeu et à ce que, six mois plus tôt, il qualifiait de "belle
construction" de Jean-Louis GERGORIN qui "accroche DDV," le Général
RONDOT était conscient des zones d'ombres qui demeuraient dans
une"architecture" dont il considérait que "les "fondements pourraient se révéler
solides"; qu'il y mettait toutefois une condition :"que les documents bancaires
produits par la source "MADHI" sont authentiques", se voyant contraint
d'ajouter : "ce qui selon moi reste à prouver de manière irréfutable"; qu'il lui était
alors apparu urgent d'en informer le Président de la République, dont il estimaittenir sa mission depuis le 9 janvier et qu'il n'avait pourtant pas encore eu l'occasiond'informer de l'état de cette affaire ;

Attendu qu'il ressort également des pièces du dossier que, le 5 juillet, Dominiquede VILLEPIN, ayant appris la publication imminente d'un article sur cette affaireCLEARSTREAM pour le 8 juillet 2004 par "Le Point", et prenant en comptel'existence d'un questionnement public sur l'existence ou non d'un réseau decorruption, et surtout sur l'identification du corbeau, a saisi la DST d'une demanded'investigations ;que, le 6 juillet, au cours d'un entretien, Michèle ALLIOTMARIE
a fait part au Général RONDOT des échanges qu'elle avait eu avecDominique de VILLEPIN "qui lui a exprimé des doutes quant à la véracité deslistings CLEARSTREAM fournis par Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD"
(D2692/13) ; qu'à cette occasion le Général RONDOT a informé la Ministre de lamise en cause de Nicolas SARKOZY ;

Attendu que Dominique de VILLEPIN a indiqué que cette affaire avait été abordéeavec la ministre de la Défense en marge du conseil des ministres du 7 juillet 2004,
qu'il avait parlé à cette occasion de ce qu'allait sortir "le Point" sur les lettresanonymes reçues par Renaud VAN RUYMBEKE qu'il s'en était égalemententretenu à l'occasion d'un petit déjeuner à la mi-juillet au cours duquel MichèleALLIOT-MARIE avait évoqué la mission confiée au Général RONDOT par leministère de la Défense et ses doutes sur ce dossier que lui-même partageaitcompte tenu des informations dont il disposait en provenance de la DST quiémettait alors l'hypothèse d'une éventuelle manipulation ;

que Michèle ALLIOT-MARIE a confirmé avoir entretenu Dominique deVILLEPIN de cette affaire de fichiers dans laquelle on avait essayé de mettre encause deux de ses collaborateurs et des vérifications en cours faisant apparaîtrecette mise en cause comme peu crédible mais qu'il y avait encore des vérificationsqui devaient le confirmer dans les semaines suivantes (D1671/27 et 31) ; qu'ellesituait l'échange en marge de l'entretien sur la gendarmerie le 19 juillet (D1671)
ou le 17 juillet (D3395/28) ;

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que le premier échange est cependant confirmé par la mention du verbatim en datedu 6 juillet 2004 ou le Général RONDOT mentionne que la ministre " a vu D de
Villepin qui a -aussi- des doutes (SAP)" (D2574/65) ;

Attendu qu'après la parution de l'article du "Point" du 8 juillet, le GénéralRONDOT s'est rendu à Berne pour faire procéder par ses collègues des servicessecrets suisses à des vérifications sur trois comptes auprès de banques suisses, dontceux attribués à Jean-Charles MARCHIANI et à Bernard SQUARCINI, ainsi qu'àun ressortissant suisse, ce qui lui avait permis de savoir dans les 48 heures que cesdonnées étaient inexactes ;

que le 12 juillet, le Général RONDOT a été convoqué pour un entretien qui s'esttenu le 19 juillet dans le bureau de Dominique de VILLEPIN, place Beauvau ;
qu'au cours de cet entretien, qui a duré une heure, le général a fait part à Dominiquede VILLEPIN du résultat de ses propres vérifications qui "ne sont pas venuesétayer la thèse de Jean-Louis GERGORIN";

qu'à cette date, plusieurs notes DST avaient déjà été rédigées qui serontdéclassifiées le 8 avril 2005 pour les besoins du présent dossier ; qu'il en estressorti que le point de départ des investigations a effectivement été la parutionimminente de l'article du Point le 8 juillet 2004, que dès les premiers jours dejuillet, des rumeurs circulaient dans le "Tout-Paris" et orientaient les soupçons versle groupe EADS en proie à des rivalités de pouvoir internes, que la DST étaitinformée de la succession des dénonciations auprès du juge Renaud VANRUYMBEKE et de l'existence d'investigations en cours au niveau de l'instructionjudiciaire des Frégates et du Parquet de Paris, que le nom de Jean-Louis
GERGORIN revenait dans pratiquement toutes les notes avec, à chaque fois, denouveaux soupçons à son endroit, que néanmoins l'existence d'un montage n'étaitpas avérée et son ou ses auteurs n'étaient pas identifiés, qu'enfin des fuitespouvaient avoir été organisées dans la presse ;

qu'ainsi, une note n°39 du 9 juillet 2004 relatait la parution de l'article du Point du8 juillet et les rumeurs mettant en cause un "proche de Camus , il est vrai habituédes coups tordus, suspecté par le Tout-Paris d'être le corbeau", mais ajoutant: "A
la première lecture, il est impossible de dégager une hypothèse. Nous retiendronspour l'essentiel que le lien avec l'affaire des Frégates renvoie sur l'affaire "couperles ailes" impliquant directement les principaux protagonistes dénoncés par lecorbeau";

qu'une note n°41 du 13 juillet 2004, intitulée "Dossier CLEARSTREAM informations
fournies par la source", mentionnait que plusieurs quotidienss'intéressaient au dossier, que les magistrats seraient persuadés que les courriers ontété envoyés par un seul et même corbeau, que, sur l'origine des documents, lasource du service évoquait le nom de Denis ROBERT, qu'un CD-ROM aurait étéadressé de manière anonyme au "Point" en même temps qu'au juge, contenant lesréférences de 16.0000 comptes et un autre support contenant les références de33000 comptes de 2001 que le juge aurait également reçu ;

qu'une note n°43 du 16 juillet 2004 avait pour objet la récupération d'une copie dela lettre reçue en juin 2004 par le juge Renaud VAN RUYMBEKE ;

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Attendu que, selon les propos prêtés à Dominique de VILLEPIN dans le verbatimdu Général RONDOT relatif à l'entretien du 19 juillet 2004, celui-ci a considéréqu'il y avait "sans doute une part de vérité" et a donné instruction de "demander
à Jean-Louis GERGORIN de ne plus bouger: se reposer: le prévenir"(D2571/27) ;

qu'à l'audience, Dominique de VILLEPIN a reconnu qu'à cette occasion le GénéralRONDOT lui avait fait part de ses doutes (note d'audience page 164) ; qu'enrevanche il a contesté avoir dit "Si nous apparaissons, le PR et moi, nous sautons",
expliquant qu'il s'agirait en réalité de paroles prononcées le 15 octobre suivant parNicolas SARKOZY à son sujet et à celui du Président de la République, JacquesCHIRAC, ce qu'il avait déjà soutenu lors de l'instruction (D1835),que cette version
de Dominique de VILLEPIN a été démentie par Nicolas SARKOSY dans la presseet contredites par le Général RONDOT tant à l'instruction qu'à l'audience ;

qu'au cours de cette même entrevue du 19 juillet , après avoir manifesté son
intention de faire disparaître ses "notes mémo", le Général RONDOT a recueilli surce point l'accord du Ministre ; qu'il a déclaré cependant les avoir effectivementdétruites un peu plus tard, après avoir rendu compte de son entretien au préfetMARLAND (D3266/40) ;

Attendu que, curieusement, une note n°59 du 21 juillet 2004 sous la signature dePierre de BOUSQUET ne figurant pas dans les notes déclassifiées en avril 2005malgré son objet :"Affaire CLEARSTREAM - implication éventuelle d'un cadre de
la DST", est réapparue en mars 2007 lors d'une nouvelle vague de déclassification,
alors que Dominique de VILLEPIN avait quitté la place Beauvau ; que, loin d'êtredépourvue d'intérêt, cette note relatait l'entretien qu'avait eu Pierre deBOUSQUET avec Jean-Jacques MARTINI et "l'intuition" dont ce dernier avait fait
part concernant le fond de l'affaire, privilégiant davantage "un montage destiné à
régler quelques comptes personnels qu'une manipulation de déstabilisation
économique ou politique", et hasardait "avec beaucoup de précautions que Jean-
Louis GERGORIN , vice-président d'EADS, pourrait en être l'initiateur";

que, dans cette note, Pierre de BOUSQUET considérait, pour sa part, que"la
présence du nom de JJ MARTINI sur la liste relève de l'intention de lui nuire"; quetout en exprimant son intention de poursuivre ses investigations, l'auteur concluaiten ces termes : "Peut-être en présence d'un "montage", complet ou partiel, dontil serait alors nécessaire de connaître les commanditaires et les opérateurs, jerecommande pour l'heure la plus grande prudence dans les conclusions que l'onpeut en tirer, en attendant le retour des coopérations judiciaires sollicitées par lejuge VAN RUYMBEKE et le Parquet de Paris auprès des autoritésluxembourgeoises et suisses" (D2508) ;

que Dominique de VILLEPIN a soutenu, contre toute vraisemblance, ne pas avoireu connaissance de cette note alors qu'il était personnellement à l'origine de lamission confiée à la DST, et que la note concernant Jean-Jacques MARTINI, signéedu chef de service, était adressée à son directeur de cabinet qui ne pouvait manquerde le tenir informé de la mise hors de cause qui en résultait au bénéfice de Jean-
Jacques MARTINI, ce qui pouvait accréditer l'idée d'un montage ;

que, selon les propos rapportés par le Général RONDOT, Dominique de
VILLEPIN, ayant pris connaissance des termes de cette note, ou à tout le moins desa teneur, a conservé des doutes sur l'existence d'un montage, de même que sur la

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réalité du réseau de corruption ; que dès lors la coexistence de ses doutes et laprudence recommandée par ses services quant à l'existence d'un montage l'ontlogiquement conduit, à cette date, à ne pas se manifester auprès de l'autoritéjudiciaire qui était déjà saisie ainsi qu'il ressortait de la conclusion de la note du 21juillet et des articles de presse ; que le 27 juillet, au cours d'une communicationtéléphonique avec le Général RONDOT, il a persisté en faisant état de ses "doutes
sur le montage" et en évoquant un "questionnement" (D2571/29) ; que le 2septembre, le général RONDOT a noté que Dominique de VILLEPIN a estimé que"malgré les vérifications négatives il ya quelque chose car tout ce beau mondes'agite et s'inquiète" (D2571/31) ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la conviction deDominique de VILLEPIN quant à l'identité du corbeau et à l'existence d'unmontage a pu se forger au fil du temps au cours de ces mois de juillet à octobre2004, à partir des premières indications prudentes contenues dans la note du 21juillet, mais renforcées par les notes et les informations qui lui sont parvenuesultérieurement ; que cette évolution transparaît au travers de ses échanges avec leGénéral RONDOT le 27 juillet 2004 quand Dominique de VILLEPIN lui demande"d'explorer -demain-avec J-LG" qui a des éléments", le 2 septembre 2004 quand
le nom de Jean-Louis GERGORIN est évoqué pour "explorer avec JLG." ou "voir"
avec lui pour la "liste de 5.000 numéros de comptes reçus par le juge";

qu'une note du 20 septembre 2004, bâtie autour des soupçons nourris par la sourceà l'endroit de Jean-Louis GERGORIN (D3247) a conduit Pierre de BOUSQUETà lui conseiller le 22 septembre d'avertir Arnaud LAGARDERE que Jean-LouisGERGORIN était le corbeau, ce qu'il s'est finalement abstenu de faire, estimantque cette identification n'était pas certaine et afin de limiter, a-t-il soutenu de façonquelque peu paradoxale, les éventuelles utilisations à des fins "politiciennes" decette information livrée par la DST ;

Attendu que la volonté de dissimulation pouvant résulter de la non transmission àla commission consultative de déclassification, des notes des 21 juillet et 20septembre 2004 doit s'apprécier par rapport à la teneur de l'ensemble des notesissues du même service; que, de fait, diverses autres notes se sont faites plusprécises sans pour autant parvenir à des certitudes ;

qu'ainsi, une note du 5 août 2004 dont l'objet est "l'étude du listing de compteadressé au juge VR", mettant l'accent sur le cas de PET MANDJOUKOV et deKarl Erik SCHMITZ, mentionnait que le second "avait été cité auprès dedifférents interlocuteurs par Jean-Louis GERGORIN directeur de la stratégie du
groupe EADS comme étant susceptible de participer à une entreprise dedéstabilisation ou de prise de contrôle par des intérêts financiers douteux dugroupe de défense, que "certains noms sont ceux de protagonistes de l'ancienneaffaire ayant opposé Alain GOMEZ et Jean-Luc LAGARDERE dite "couper lesailes de l'oiseau" dont WANG CHUAN POO qui pourrait s'identifier à AndrewWANG , l'intermédiaire mis en cause" et enfin que le ou les auteurs du document
"disposent d'une connaissance directe ou indirecte de l'organigramme et dufonctionnement de ces entreprises et tout particulièrement du groupe EADS";
que de la même façon, une note n°389 du 1er septembre 2004 relatant les
déclarations spontanées d'une source sur les rivalités depuis 2 ans au sein dugroupe EADS "entre le pôle CAMUS/GERGORIN et FORGEARD/DELMAS", quise double d'une "terrible querelle personnelle entre Jean-Louis GERGORIN et

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Philippe DELMAS qui d'amis sont devenus de véritables ennemis", et soulignant
par ailleurs "combien Jean-Louis GERGORIN est proche de Jean GUISNEL, lejournaliste du magazine Le Point"; que cette source n'avait pas exprimé de doutesur la responsabilité de Jean-Louis GERGORIN dans la rédaction et l'envoi de lapremière lettre au juge mais pour les autres envois pensait qu'il y avait d'autresauteurs ; que le commentaire fait à la fin du document paraît plus prudent : "La
source n'a pu (et surtout n'a pas voulu) étayer ses propos d'éléments concrets etprobants. La plus grande prudence s'impose donc";

Attendu qu'une note n°51 du 4 octobre 2004 relate un entretien avec MauriceBOTBOL qui s'apprête à publier un article dans la revue "Intelligence-On-Line"
sur l'affaire du corbeau, au cours duquel le nom de Jean-Louis GERGORIN a étélargement cité par ses différents interlocuteurs ; qu' une note n°52 du 6 octobre2004indique qu'une source avait constaté que le nom de Jean-Louis GERGORINétait abondamment cité comme étant le corbeau de l'affaire et décrivait Jean-Louis
GERGORIN comme un être brillant , mais qui "pète les plombs", qui aurait fait
une "dépression nerveuse", et se disait convaincue que Jean-Louis GERGORIN
voulait éliminer Philippe DELMAS ;

Attendu que ce n'est que le 15 octobre, soit postérieurement au dernier envoi du4 octobre, que les doutes exprimés par Dominique de VILLEPIN ont cédé la placeà une certitude de la fausseté des faits dans leur globalité ainsi qu'en atteste leverbatim de l'entrevue avec le Général RONDOT de ce jour qui comporte lamention : "il est maintenant, presque établi qu'il y a eu un montage et que JLGenest à l'origine avec MADHI", et dans lequel il est mentionné la "folie de Jean-
Louis GERGORIN", ou bien encore "JLG qu'il se soigne ! le voir ?"(D2571/35),
ce qu'a confirmé le Général RONDOT à l'audience (note d'audience page 217) ;

que dans une note n°87 du 23 octobre 2004 sous la signature de Pierre deBOUSQUET, celui-ci fait l'historique de la saisine de son service notamment, àla suite de l'article paru dans "Le Point"du 8 juillet, des instructions du ministrede "rechercher des éclairages sur cette affaire présentée comme "d'Etat", de
renseignements qui laissaient "immédiatement" supposer une "manipulation"
opérée à partir d'un listing ancien de la société CLEARSTREAM, et de
l'impossibilité d'identifier de manière probante l'origine de cette manipulationmalgré tout le travail réalisé depuis lors ;

que dans une note n°105 du 9 décembre 2004, sous la même signature, au sujetd'un article à venir de Jean-Marie PONTAULT à paraître dans "l'Express" etévoquant les suspicions de l'auteur à l'égard de Monsieur SARKOZY qui pourrait"avoir tenté une récupération politique de cette affaire qui le gêne, en préemptantle dégât d'image qu'il redoute de cette dénonciation , par la désignation de la"Chiraquie" comme en étant à l'origine", Pierre de BOUSQUET indiquait en
conclusion : "A ce stade, nous avons donc toujours plus de questions que deréponses. Seule une enquête approfondie et conduite avec les moyens de rechercheadéquats permettrait de vérifier les hypothèses avancées et de progresser de façonsûre et judiciairement exploitable";

Attendu que la réalité de rencontres entre Dominique de VILLEPIN et Jean-LouisGERGORIN telles qu'elles ont été révélées par Jean-Louis GERGORIN, est pourpartie confirmée par les propres déclarations de Dominique de VILLEPIN qui n'apas contesté avoir rencontré Jean-Louis GERGORIN à 2 ou 3 reprises dans le

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bureau de Bruno LEMAIRE (notes d'audience, pages 166 et 326), et celles deJean-Louis GERGORIN qui affirme avoir eu deux entretiens avec le ministre les26 juillet et 27 août ; que les mains courantes de la société AICS établissent queJean-Louis GERGORIN s'est rendu au ministère de l'intérieur les 29 juin, 6 et 11juillet 2004, 27 août 2004 et 16 septembre , que si, à en croire le verbatim établile 2 septembre, Dominique de VILLEPIN est à cette date informé de l'envoi d'une"liste de 5000 comptes" à Renaud VAN RUYMBEKE, rien n'indique qu'il ait euconnaissance de l'intention de Jean-Louis GERGORIN de poursuivre dans leprocessus calomnieux ; que pour sa part, Jean-Louis GERGORIN a toujoursaffirmé qu'il avait déterminé seul les modalités de la dénonciation ;

Attendu au demeurant que Dominique de VILLEPIN n'ayant eu aucune certitudejusqu'au 4 octobre 2004, quant à la fausseté des faits dénoncés par le corbeau, iln'est pas démontré qu'une intervention de sa part tant auprès du juge VANRUYMBEKE que du procureur de la République de Paris aurait pu faire obstacleà la poursuite des dites dénonciations ;

Attendu que, de surcroît, il ne résulte pas de la persistance de relations étroites etanciennes entre Jean-Louis GERGORIN et Dominique de VILLEPIN que celui-ci,
fût-il ministre de la République, ait pu avoir un quelconque ascendant sur Jean-
Louis GERGORIN le mettant en situation d'intervenir auprès de lui avec succèset prévenir ainsi la réitération par ce dernier du délit de dénonciation calomnieuse ;

Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède que la preuve n'est pas rapportée àl'encontre de Dominique de VILLEPIN de l'existence tant d'une instruction,
donnée en connaissance de cause, de commettre le délit de dénonciation
calomnieuse dont il aurait été l'instigateur, que d'une abstention d'empêcher laréitération de la dénonciation qu'il aurait su calomnieuse, susceptible de constituerun acte de complicité ;

Attendu que dès lors, Dominique de VILLEPIN ne pourra qu'être relaxé du chefde complicité de dénonciation calomnieuse ;

€ sur les délits de complicité d'usage de faux et de recel de vol et d'abus deconfiance

Attendu que la preuve n'est pas davantage rapportée que Dominique de VILLEPINait donné instruction à Jean-Louis GERGORIN d'utiliser les documents incriminés
en connaissance de leur fausseté, en tout cas avant le 4 octobre 2004, date du
dernier usage qui en a été fait ; que le délit de complicité d'usage de fauxn'apparaît pas constitué à son encontre ;

Attendu qu'il résulte de l'information et les débats que Dominique de VILLEPINignorait jusqu'au 15 octobre la provenance exacte des documents ; que la preuven'est pas rapportée qu'il les ait eus matériellement en sa possession ; qu'il n'estpas établi que Dominique de VILLEPIN ait concouru par l'instruction de saisir lejuge Renaud VAN RUYMBEKE, à la remise à ce magistrat des documents deprovenance frauduleuse au travers des envois des 3 mai, 14 juin, 20 août et 4octobre 2004 ;
qu'il s'ensuit que le délit de recel n'est pas constitué à son encontre ;

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Attendu qu'il convient en conséquence de renvoyer Dominique de VILLEPIN desfins de la poursuite engagées à son encontre du chef d'une part de complicitéd'usage de faux et d'autre part de recel de vol et d'abus de confiance ;

2 - Sur les peines :

a) Florian BOURGES

Attendu que Florian BOURGES, né le 14 juillet 1978, marié, père d'un enfant, aété placé sous contrôle judiciaire le 8 décembre 2006, mesure qu'il a respectée ;
qu'il exerce actuellement la profession de consultant ; que ses revenus s'élèventà 1.200 euros mensuels ;

Attendu que, dès la fin de sa scolarité, à l'âge de 23 ans, Florian BOURGES s'esttrouvé immergé dans un milieu professionnel le mettant au contact de la réalitéfinancière internationale ; qu'il a collaboré, malgré son jeune âge et son absenced'expérience professionnelle, à une mission dont l'objet, pris dans sa globalité,
dépassait manifestement ses capacités personnelles d'analyse ; qu'au cours de sonstage, il a été cependant mis en situation d'accéder à des données permettant defaire ressortir des anomalies susceptibles, à ses yeux, de masquer des pratiquessuspectes ; que, déçu du peu d'intérêt porté par sa hiérarchie à son travail, il a pudécider, en désespoir de cause, de se retourner vers celui qui, ayant lancé le débatpublic sur les pratiques illicites abritées par la chambre de compensation, l'a misen relation avec Imad LAHOUD auquel il a permis d'avoir accès aux données etarchives qu'il avait conservées sans en méconnaître pour autant le caractèreconfidentiel ;

Attendu que la peine prononcée doit prendre en compte la nature particulière etl'importance relativement modérée des préjudices causés par de tels agissementsréitérés, constitutifs des délits d'abus de confiance, tant aux sociétés
CLEARSTREAM BANKING, dont les données ont été détournées, et
CLEARSTREAM INTERNATIONAL, holding du groupe dont les intérêts ont étéatteints, qu'à l'employeur, la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES quiavait placé sa confiance en Florian BOURGES en le recrutant, en octobre 2001,
en fin de stage, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ;

Attendu que l'absence de toute condamnation à son casier judiciaire permet àFlorian BOURGES de bénéficier du sursis simple ; que le recours à une peined'emprisonnement apparaît se justifier pleinement compte tenu de la nature et dela portée des faits ; que le quantum en sera fixé à quatre mois, pour tenir comptede la personnalité du prévenu à l'époque des faits et de son évolution satisfaisantedepuis lors ; que cette peine sera intégralement assortie du sursis simple ;

Attendu qu'il convient de prononcer à titre de peine complémentaire la
confiscation des scellés ;

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b) Jean-Louis GERGORIN

Attendu que Jean-Louis GERGORIN, chevalier de la Légion d'Honneur et officierdans l'ordre national du Mérite, marié, père de quatre enfants, Maître des requêteshonoraire au Conseil d'Etat, il exerce actuellement en qualité de consultant, queses revenus s'établissent à 130.000 euros annuels ; que, diplômé de l'EcolePolytechnique et de l'ENA (promotion Charles de Gaulle- 1972), il a occupécomme dernier emploi, le poste de vice-président exécutif , directeur de lacoordination stratégique du groupe EADS ; qu'il est propriétaire de son
appartement à Paris rue d'Assas et dispose d'un portefeuille d'actions EADS etLAGARDERE évalué au cours de la procédure à 2 millions d'euros ; que lebulletin n°1 de son casier judiciaire ne porte trace d'aucune condamnation ; que,
placé sous contrôle judiciaire le 2 juin 2006, il s'est acquitté du versement d'uncautionnement de 80.000 euros et a respecté ses autres obligations ;

Attendu que le dossier et les débats ont établi que Jean-Louis GERGORIN a étél'initiateur et l'auteur principal des délits de dénonciations calomnieuses ; qu'il autilisé à cette fin des documents dont il savait la provenance frauduleuse et qu'ilsavait altérés ; qu'il a agi pour satisfaire des intérêts personnels sous couvert de ladéfense de ceux d'EADS et du groupe LAGARDERE et des impératifs de sécuriténationale ; qu'il a été rapidement habité par une intention de nuire en partie sousl'influence pernicieuse et néfaste d'Imad LAHOUD ;

Attendu que la dynamique de la dénonciation telle qu'elle ressort des éléments dudossier et des débats est révélatrice d'une véritable stratégie définie par le prévenudont l'objectif central, le trio Alain GOMEZ, Pierre MARTINEZ, PhilippeDELMAS, a été atteint sans qu'il se soucie des effets collatéraux innombrables detelles actions en termes de manipulation des services de l'Etat, le GénéralRONDOT et la Justice, et des atteintes à l'honneur des personnes visées ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a particulièrement visé dans ses propresécrits, et de façon réitérée, des victimes devenues des cibles, par ailleurs
adversaires dans des rivalités industrielles ; que ses dénonciations ont
considérablement accru l'effet dévastateur, voire destructeur, de l'intention de
nuire qui l'habitait, en impliquant dans les faits dénoncés des personnes qu'ilsavait étrangères à ces rivalités industrielles et dont le choix ne répondait qu'à unelogique : celle de crédibiliser son combat contre un ennemi chimérique parl'utilisation de données dont il connaissait le caractère mensonger ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN a su instrumentaliser les autorités ; qu'il amis en scène ses démarches, leur donnant une apparence de crédibilité et delégitimité ; qu'il s'est aussi ménagé, dans l'hypothèse d'une mise en causeultérieure, le moyen d'étayer sa prétendue bonne foi ; que le recours à des autoritésemblématiques ou facilement accessibles, tout en sachant que le Général
RONDOT, comme le juge d'instruction agissaient dans le secret et le
cloisonnement, a permis à Jean-Louis GERGORIN, seul à maîtriser le processuslabyrinthique de la calomnie, de poursuivre son oeuvre malfaisante, et en casd'impasse d'une voie, d' emprunter la seconde en toute impunité ;

Attendu que cette stratégie mûrement réfléchie a cependant failli ; que dèsl'apparition des premières fuites médiatiques et des premiers remous dans lapresse, Jean-Louis GERGORIN a fui ses responsabilités en abandonnant le

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"bateau ivre" de la calomnie, se disant lui-même victime de cette déferlante
médiatique ; que ses dénégations ont pris un tour officiel et public au traversd'interviews accordées aux journaux, et d'un dépôt de plainte pour faux etviolation du secret professionnel donnant à ses propos un écho considérable ; qu'ils'est également attaché à distiller à ses proches et certaines des personnesinjustement dénoncées, des propos feignant tout à la fois la compassion à leurendroit et l'indignation pour ce qui le concernait ; que submergé par le flot desprotestations d'innocence des victimes et des rumeurs lui imputant laresponsabilité de ces dénonciations, et débordé par les conséquences judiciairesde ses actes, Jean-Louis GERGORIN s'est résolu à reconnaître selon une
progression méticuleusement programmée, par étapes successives, la matérialitédes faits mais en s'agrippant à la seule planche de salut qui lui restait : saprétendue bonne foi ; que les données recueillies au cours de l'information ontdéjoué toutes ses manoeuvres, notamment la désignation de sa source, la
fourniture des deux clefs USB contenant les données transmises, la révélation des
réunions secrètes au Quai d'Orsay et Place Beauvau, et l'instruction prétendumentdonnée par Dominique de VILLEPIN de saisir un juge ;

Attendu que Jean-Louis GERGORIN doit être considéré comme pleinementresponsable de ses actes qui sont révélateurs d'une personnalité particulièrementnuisible et inquiétante en raison d'une duplicité exceptionnelle qu'il a manifestéedès les prémices des dénonciations jusqu'au terme des débats ; qu'il s'estmaintenu dans son aveuglement malgré les opportunités qui se sontsuccessivement présentées à lui ;

que l'exceptionnelle ampleur de la machination n'a d'égal que la déterminationimplacable grâce à laquelle Jean-Louis GERGORIN , avec la collaboration d'madLAHOUD, a construit son piège, le profond mépris dans lequel ils ont, tous lesdeux, tenu les autorités ministérielles et judiciaires auxquelles ils ont choisi dedénoncer leurs mensonges, et leur haute indifférence à l'égard des si nombreusespersonnes, physiques ou morales, injustement dénoncées dont ils n'ont pas hésitéà salir voire détruire les probité personnelle et réputation professionnelle ;

que le recours à une peine d'emprisonnement apparaît dès lors justifié, au regardde la réitération des faits et du grand nombre et de la qualité des victimes ; que lequantum de la peine sera fixé à 3 ans ; qu'il convient cependant d'assortir la peine,
dans la limite de 21 mois, d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant 3 ans afin defavoriser l'indemnisation des victimes ;

qu'il convient par ailleurs de lui infliger une peine à caractère financier sous formed'amende, dont le montant sera fixé, eu égard à l'impact des faits et au niveau deses ressources, à la somme de 40.000 euros;

qu'il convient de prononcer à titre de peine complémentaire la confiscation desscellés ;

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c) Imad LAHOUD

Attendu qu'Imad LAHOUD, né le 7 octobre 1967 à Beyrouth (Liban), denationalité française et libanaise, marié et père de quatre enfants, exerce
actuellement la profession d'enseignant ; qu'il a été placé sous contrôle judiciairedans le cadre de la présente information à compter du 9 juin 2006 ; qu'il aintégralement acquitté le cautionnement de 80.000 euros mis à sa charge ; que lesautres obligations ont été respectées ;

Attendu qu'Imad LAHOUD avait été placé sous contrôle judiciaire depuis le moisd'octobre 2002 à la suite de quatre mois de détention provisoire, du 22 juin au 22octobre 2002, dans le cadre d'une autre information toujours en cours actuellementdes chefs de faux, escroquerie, abus de biens sociaux et recel relatif à ladéconfiture du fonds VOLTER ;

Attendu que les innombrables déclarations contradictoires d'Imad LAHOUD aucours de l'information font de lui un menteur invétéré, un metteur en scène
insatiable et un comploteur infatigable ;

qu'en effet, l'instruction comme les débats, qu'Imad LAHOUD a choisi d'émaillerde révélations mais aussitôt contredites par les éléments ou les témoins, ont établique, l'ont animé tout au long des faits reprochés, une entière conscience desconséquences de ses falsifications et des dénonciations calomnieuses, et unevolonté de demeurer insaisissable ;

qu'Imad LAHOUD s'est rapidement intéressé au fonctionnement de la chambrede compensation CLEARSTREAM, ce qui l'a conduit, à la faveur de sonélargissement de la maison d'arrêt de la Santé en octobre 2002, à entrer en relationavec Denis ROBERT et plus tard avec Florian BOURGES, recourant à desstratagèmes destinés à endormir leur vigilance et gagner leur confiance ens'abritant derrière l'autorité de la DGSE ;

qu'il s'est révélé un redoutable "escroc aux renseignements", ayant su manipulerle général RONDOT en lui laissant croire tout du long des opérations "MADHI"
et "REFLUX", avec le précieux concours de Jean-Louis GERGORIN, qu'ilparvenait à accéder aux archives de CLEARSTREAM et à pénétrer le systèmeinformatique de la chambre de compensation, ce qui en réalité n'était pas le cas ;

Attendu qu'Imad LAHOUD a su mettre son indéniable intelligence et sescompétences professionnelles indiscutables au service d'un arrivisme certain ;

qu'il a délibérément choisi le terrain susceptible de lui permettre d'une partd'exploiter au mieux ses connaissances relatives notamment, aux techniquesinformatiques, aux milieux financiers, industriels et politiques, comme durenseignement et d'autre part de circonvenir ses divers interlocuteurs ;

qu'il a su attirer la convoitise de Jean-Louis GERGORIN dont il a rapidement saisiles inquiétudes voire les obsessions qu'il a interprétées comme des "besoins"
d'informations qu'il s'est empressé de satisfaire en lui transmettant selon unprocessus subtilement mis en oeuvre des données qu'il lui a présentées commeissues directement de l'informatique de CLEARSTREAM, ce qui n'a pas trompéson interlocuteur ;

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qu'il a pu, ensuite, grâce à sa position stratégique, nimbée du secret, entre Jean-
Louis GERGORIN et le général certes, mais aussi entre Denis ROBERT et Jean-
Louis GERGORIN ainsi qu' entre Jean-Louis GERGORIN et Renaud VANRUYMBEKE, anticiper les éventuels risques de dévoilement de la manipulationen cours et imaginer, à chaque étape, les manoeuvres utiles au succès de l'entreprisemenée avec Jean-Louis GERGORIN ; qu'il n'a eu de cesse de conquérir uneposition stratégique lui assurant une liberté de mouvement totale en obtenant unedouble protection, l'une auprès du général, l'autre auprès de Jean-Louis
GERGORIN, et auprès desquels il était parvenu à se rendre indispensable etinsoupçonnable, voire intouchable ;

Attendu qu'Imad LAHOUD paraît s'être installé dès 2002 dans une activité defaussaire, comme l'a révélé la condamnation par la 12ème chambre de ce Tribunal
en 2006 à 6 mois d'emprisonnement avec sursis mise à l'épreuve pour faux, abusde confiance et escroquerie ;

que malgré cette situation judiciaire précaire il a su obtenir de Jean-LouisGERGORIN une protection au sein d'EADS, sur le plan tant de sa sécuritépersonnelle que de sa situation matérielle, en obtenant fin février 2003,
concomitamment à ses premières interventions auprès de Denis ROBERT, unpremier contrat de consultant ; qu'un second contrat a été octroyé courant 2003,
alors qu'il est devenu par ailleurs salarié à 70% puis à 100% d'EADS, émargeantà hauteur de 7.500 euros à la fin de la période ; qu'il a bénéficié, pour les besoinsde son activité de consultant au service d'EADS, d'un local dans une zone
protégée secret défense au sein de l'établissement pour lequel il travaillait ; qu'ilest ainsi parvenu à se forger une protection et se reconstituer un statut social dansle principal souci d'obtenir une issue judiciaire favorable ;

que le recours à une peine d'emprisonnement de 3 ans apparaît justifié à sonencontre ; qu'il convient d'assortir la peine dans la limite de 18 mois le sursisassorti d'une mise à l'épreuve pendant une durée de 3 ans, cela afin de favoriserl'indemnisation des victimes ;

qu'une peine d'amende lui sera également infligée, à titre de sanction financière,
à hauteur de 40.000 euros eu égard notamment à sa situation de ressources ;

qu'il convient de prononcer à titre de peine complémentaire la confiscation desscellés.

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II- Sur l'action civile :

A) sur les conclusions in limine litis d'irrecevabilité de constitution de partie
civile

1 - sur les conclusions déposées par la défense de Florian BOURGES

Attendu que la défense de Florian BOURGES a déposé des conclusions tendantà voir déclarer irrecevables les constitutions des sociétés CLEARSTREAM
BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL ainsi que la société
BARBIER FRINAULT & ASSOCIES ; qu'elle se fonde sur les éléments
suivants :

- l'existence d'une précédente indemnisation de CLEARSTREAM dumême préjudice ainsi qu'en attesteraient les termes de la note DST en date du 21juillet 2004 ayant pour objet l'affaire CLEARSTREAM relatant que "la liste des
clients CLEARSTREAM, possiblement celle dérobée voici deux ans par d'ancienscollaborateurs indélicats et depuis judiciairement condamnés, aurait été
récupérée et enrichie par une manipulation bureautique aisée, de noms variésdont les plus repérables seraient destinés à appeler l'attention sur les autres" ;
- l'existence d'un protocole transactionnel signé entre Florian BOURGESet la société ERNST & YOUNG en date du 3 mai 2004 aux termes duquel "les
parties renoncent réciproquement , irrévocablement et définitivement à toutecontestation née ou à naître, à toute action à caractère judiciaire ou trouvantdirectement ou indirectement son origine dans la conclusion , l'exécution ou la find es on contrat de travail susvisé" , ledit protocole visant les dispositions del'article 2044 et suivant du code civil et notamment l'article 2052 du même code
qui confère à la transaction l'autorité de chose jugée en dernier ressort ;
- l'absence de préjudice direct au sens d'article 2 du code de procédurepénale dans la mesure où il est reproché à Florian BOURGES d'avoir soustrait desfichiers à CLEARSTREAM, société qui n'a jamais eu de lien contractuel avecBARBIER FRINAULT & ASSOCIES ;
Attendu que les termes de la note du 21 juillet 2004, établie par Pierre deBOUSQUET de FLORIAN, en qualité de Directeur de la Sécurité du Territoire,
ont été confirmés par ce dernier à l'audience où il s'est contenté d'indiquer queson collègue luxembourgeois lui avait dit que "cette affaire avait fait l'objet d'unprocès et 2 noms avaient été évoqués : Monsieur BACKES et Monsieur ROBERT"
(notes d'audience p.285) ; que, pour sa part, la défense de Florian BOURGESn'est pas en mesure de fournir la moindre précision permettant de définir plusprécisément l'étendue de la saisine de la juridiction ayant pu statuer sur cetteaffaire ; que force est cependant de constater, à la lecture attentive du dossier, queles données obtenues d'Ernest BACKES ont été utilisées par Denis ROBERT dansson livre "REVELATION$" paru dès février 2001 et que les donnéesinformatiques issues de CLEARSTREAM portaient alors, pour les plus récentes,
sur l'année 2000 tandis que les faits dont le tribunal est présentement saisi, etauxquels Ernest BACKES est étranger, portent sur les données de septembre 2001; que faute d'être étayée par des justifications autres que la seule production dela note DST du 21 juillet 2004, l'exception d'irrecevabilité tirée de la réparationdéjà réalisée du préjudice ne pourra qu'être rejetée ;

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Attendu que le protocole transactionnel du 3 mai 2004 lie la sociétéERNST&YOUNG, en qualité d'employeur, à Florian BOURGES, ce dernier enqualité de salarié, et inclut de la part de chacune des parties l'engagement derenoncer "réciproquement, irrévocablement et définitivement à toute contestationnée ou à naître à toute action à caractère judiciaire ou trouvant directement ouindirectement son origine dans la conclusion, l'exécution ou la fin du contrat detravail susvisé"; qu'une telle transaction, serait-elle recouverte de l'autorité dechose jugée en application des articles 2044 et 2052 du code civil, ne saurait faireobstacle à l'exercice par la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES, ancienemployeur de Florian BOURGES, étrangère à la convention précitée, de ses droitsde partie civile résultant de faits requalifiés à son égard d'abus de confiance,
survenus courant 2001 à 2004 et dont elle aurait été personnellement victime ; quedès lors l'exception d'irrecevabilité ne pourra qu'être rejetée ;

Attendu enfin que l'absence de lien contractuel direct entre
CLEARSTREAM BANKING et la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES
ne saurait davantage faire obstacle à l'exercice par cette dernière de l'action civilefondée sur un préjudice qui lui est personnel, dès lors que le préjudice allégué parBARBIER FRINAULT & ASSOCIES résulte directement du fait de son proprestagiaire, devenu par la suite pendant un temps son salarié, commis à l'occasionde sa participation à la mission d'audit confiée à la société ARTHURANDERSEN Luxembourg seule missionnée par CLEARSTREAM, et portant surdes documents sur lesquels la partie civile invoque un droit qui lui est propre ;

Attendu qu'en conséquence, les exceptions d'irrecevabilité invoquées parla défense de Florian BOURGES à l'endroit des sociétés CLEARSTREAM
BANKING, CLEARSTREAM INTERNATIONAL et la société BARBIER
FRINAULT & ASSOCIES, parties civiles, ne pourront qu'être rejetées dans leurtotalité ;

2 - sur les conclusions déposées par la défense de Dominique de VILLEPIN

Attendu que la défense de Dominique de VILLEPIN a déposé in limine litis des
conclusions tendant à voir déclarer irrecevable en l'état la constitution de partiecivile de Nicolas SARKOZY sur le fondement du principe d'équité etd'impartialité énoncés dans l'article 6-1 de la Convention Européenne des Droitsde l'Homme et repris dans l'article préliminaire du code de procédure pénale, etcelui d'égalité des armes tiré de ces mêmes dispositions par la jurisprudence de laCour Européenne des Droits de l'Homme ;

qu'elle fait valoir que, dans le cadre de la présente procédure, l'actuel Présidentde la République, est constitué partie civile, qu'il tient de l'article 13 de laConstitution un pouvoir réglementaire lié à la nomination des magistrats, que,
selon l'article 67 de cette Constitution, il bénéficie par ailleurs d'une immunitépendant toute la durée de son mandat, qu'il a néanmoins manifesté publiquementun vif intérêt pour cette affaire; que des éléments nouveaux sont apparus au traversd'articles de presse qui lui ont été consacrés, parmi lesquels une interview donnéepar Imad LAHOUD, co-prévenu dans cette affaire, mettant en cause Dominiquede VILLEPIN et Jean-Louis GERGORIN ("le Point" du 6 novembre 2008) et lareproduction des déclarations faites par le même prévenu le 9 décembre 2008 dansle cadre d'une autre information et relative aux faits présentement qualifiés dont

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jusqu'alors la défense du prévenu ignorait l'existence ("Journal du Dimanche" du6 septembre 2009) ; que de telles circonstances sont de nature à faire naître desappréhensions objectivement justifiées de la part du prévenu quant au respect desprincipes précités et que seule une déclaration d'irrecevabilité de la constitutionde partie civile de Monsieur Nicolas SARKOZY permettrait de garantir ;

Attendu que, dans ses écritures en réponse, le conseil de Nicolas SARKOZY,
partie civile, a conclu au rejet de cette exception au visa de l'article préliminaireet de l'article 2 du Code de procédure pénale, de l'article 6-1 de la CEDH, et del'article 67 de la Constitution ;

qu'il fait valoir que Dominique de VILLEPIN a été considéré comme un mis enexamen ordinaire, qu'au cours de la procédure d'information il a renoncé àsoulever l'incompétence de la juridiction de droit commun au profit de la Cour deJustice de la République, ou l'irrégularité de sa mise en examen, qu'il n'a pasdavantage contesté au cours de l'information la recevabilité de la constitution departie civile de Nicolas SARKOZY et qu'aucune de ses demandes d'actes s'estheurtée au statut de Président de la République de l'une des parties civiles ;

qu'il rappelle que, par arrêt du 5 juin 2009, le Conseil d'Etat a rejeté le recoursformé par Dominique de VILLEPIN à l'encontre du décret du 27 août 2008 portantnomination de magistrats en tant qu'il avait fixé au 20 novembre 2008 lanomination de Monsieur PONS en qualité de président de chambre à la courd'appel de Montpellier, et ayant co-signé l'ordonnance de règlement, aucunélément du dossier ne permettant d'étayer le moyen selon lequel le décret attaquéaurait pour objet la mise en place d'une instruction partiale ; que la positionadoptée par le prévenu dans ses conclusions in limine litis sont en contradiction
avec les propos qu'il a tenu lors d'une interview diffusée sur "Canal +" le 13septembre 2009, où Dominique de VILLEPIN avait admis la présence de NicolasSARKOZY en qualité de partie civile ;

qu'il soutient que son client s'est toujours comporté dans cette procédure commeune partie civile comme les autres, qu'il s'est constitué par voie incidenteantérieurement à son accession à la Présidence de la République dans le cadre del'information ouverte depuis le 3 septembre 2004, qu'il a été entendu par lesmagistrats instructeurs, qu'il n'a formulé aucune demande d'acte et ne leur aadressé aucune note à l'exception de la correspondance de son conseil datée du 1er
décembre 2006 destinée à démentir certaines affirmations contenues dans
l'interrogatoire d'Imad LAHOUD diligenté le 28 novembre 2006 par les jugesd'instruction ;

Attendu qu'il appartient au tribunal de garantir aux parties à l'instance le respectdes principes d'indépendance, d'impartialité de la juridiction saisie et du principejurisprudentiels d'égalité des armes tels qu'issus et énoncés par l'article 6-1 de laCEDH et repris par l'article préliminaire du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il est établi que la présente procédure d'information a été ouverte duchef de dénonciation calomnieuse le 1er septembre 2004, sur plainte avec
constitution de partie civile de Philippe DELMAS entre les mains du doyen desjuges d'instruction de ce tribunal , qu'une jonction est intervenue le 14 juin 2005avec l'information ouverte à la suite de la constitution d'Alain GOMEZ en date
du 19 novembre 2004 et visant les mêmes faits, que Nicolas SARKOZY s'est

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constitué partie civile par voie incidente le 31 janvier 2006, alors qu'il exerçait lesfonctions de ministre de l'Intérieur auxquelles il a succédé à Dominique deVILLEPIN, devenu Premier Ministre ; que Nicolas SARKOZY invoquait alors laqualité de victime des dénonciations calomnieuses dont il avait fait l'objet auprèsdu juge VAN RUYMBEKE au cours de l'année 2004 ; que Dominique deVILLEPIN a été mis en examen le 27 juillet 2007 ; que l'information s'estdéroulée jusqu'à l'ordonnance de renvoi rendue le 17 novembre 2008,
postérieurement à l'accession de Nicolas SARKOZY à la Présidence de laRépublique ; qu'il n'est pas contesté qu'au cours de la présente information tant
les mis en examen que les parties civiles ont été mis en mesure d'exercer leursdroits ainsi que cela ressort de la lecture des pièces du dossier ; que NicolasSARKOZY a maintenu sa constitution de partie civile devant le tribunal ;

Attendu que, si le chef de l'Etat tient des dispositions de l'article 13 de laConstitution un pouvoir de nomination sur l'ensemble des magistrats, un telpouvoir ne saurait priver la personne qui le détient de la possibilité, offerte à toutcitoyen qui estime avoir personnellement souffert du dommage causé par uneinfraction d'en demander réparation et de faire valoir ses droits en justice,
notamment en se constituant régulièrement par voie incidente en qualité de partiecivile au cours d'une information judiciaire et jusqu'à la saisine de la juridictionpénale, sans qu'il puisse s'ensuivre une quelconque atteinte portée aux principesprécités, et cela en dépit des déclarations qui auraient pu être faites publiquementpar cette même partie civile ou son entourage dans les semaines précédantl'ouverture du procès ;

Attendu que si l'immunité dont bénéficie le chef de l'Etat en vertu des dispositionsde l'article 67 de la Constitution, peut être de nature à créer un déséquilibre entreles parties à un procès pénal, en ce que son statut le protège de toute attaquejudiciaire sans pour autant lui interdire d'agir comme un justiciable ordinaire, lerespect du principe d'égalité des armes doit s'apprécier in concreto dans une
instance en cours ; que le déroulement des débats a démontré l'effectivité de ceprincipe en ce que chacune des parties a été en mesure librement de présenter sespropres arguments et de combattre ceux qui lui étaient opposés, que de surcroît,
il n'appartient pas au tribunal d'apprécier l'inconventionnalité d'une normeconstitutionnelle ;

Attendu qu'il conviendra en conséquence de déclarer recevable la constitution departie civile de Nicolas SARKOZY.

B) Sur les désistements de parties civiles

Attendu que Dominique STRAUSS-KAHN, ainsi que de Jean-François
HENIN, régulièrement constitués au cours de l'information et bien quevalablement cités aux audiences, n'y ont pas comparu, ne se sont pas faitreprésenter et n'ont pas fait connaître au tribunal leurs éventuelles demandes ;
qu'il conviendra en conséquence de constater leur désistement présumé enapplication des dispositions de l'article 425 du code de procédure pénale ;

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Attendu que Patrick OLLIER a déclaré se désister de sa constitution de partiecivile par lettre adressée au tribunal le 3 juin 2009, qu'il convient de lui en donner
acte ;

Attendu que par lettre transmise au greffe par télécopie le 17 septembre 2009Laurent FABIUS a également déclaré se désister de sa constitution de partiecivile ; qu'il convient de lui en donner acte ;

Attendu que, par conclusion parvenues au greffe le 16 octobre 2009, Philippe
GUGLIELMI s'est désisté de sa constitution de partie civile en invoquantnotamment le fait que, si son nom avait été porté sur un des documents
informatiques remis par Jean-Louis GERGORIN aux magistrats instructeurs, il nefigurait sur aucun des listings, supports des dénonciations dont le tribunal estsaisi ; qu'il convient de lui donner acte de son désistement ;

Attendu que, par conclusions visées à l'audience du 13 octobre 2009, Allain
GUILLOUX fait valoir que, malgré des demandes réitérées auprès des magistratsinstructeurs mais que ceux-ci ont rejetées, les éléments issus des carnets saisis audomicile d'Yves BERTRAND n'ont pas été exploités comme ils auraient pu l'êtreau cours de l'information, et cela en dépit de la similitude existant entre lesdonnées figurant sur ces carnets et les noms cités faussement dans les listings,
parmi lesquels ceux de personnalités impliquées dans l'affaire dite de
"l'Angolagate", et des relations ayant existé entre Imad LAHOUD et la directiondes Renseignements Généraux ; qu'il constate que son propre nom ne figure passur aucun des listings adressés au juge VAN RUYMBEKE, supports desdénonciations calomnieuses, mais seulement sur un support informatique remisaux juges d'instruction par Jean-Louis GERGORIN ; qu'il déclare en conséquencese désister de sa constitution de partie civile ; qu'il convient de lui en donner acte ;

C) Sur les demandes des autres parties civiles

Attendu que Joël BOUARD, l'association HCCDA et Gérard PRELORENZO
se sont constitués par déclaration au greffe du tribunal le 21 septembre 2009 ;

qu'à l'audience du 14 octobre 2009 Joël BOUARD et l'association HCCDA ontdemandé la relaxe des prévenus, l'ouverture d'une information du chef deblanchiment; ils ont demandé que soit déclarée irrecevable la constitution d'ArcadiGAYDAMAK et réclame 50 millions d'euros contre Messieurs SARKOZY et de
VILLEPIN, ajoutant, pour faire bonne mesure, qu'ils avaient l'intention de porterplainte contre le président de ce tribunal ; qu'à la même audience GérardPRELORENZO a demandé la relaxe de Florian BOURGES et de Denis ROBERT
et que leurs frais soient remboursés ; qu'il a demandé pour sa part uneindemnisation à hauteur de 1 million d'euros ;

Attendu qu'il n'apparaît pas que Joël BOUARD, l'association HCCDA, GérardPRELORENZO aient été victimes d'une dénonciation calomnieuse et que leursnoms aient été ajoutés ni mentionnés dans les listings et documents incriminésdans le cadre de la présente affaire ; que faute pour eux de justifier d'un préjudicepersonnellement subi et directement lié aux seuls faits visés dans l'ordonnance

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saisissant le tribunal sous les qualifications d'abus de confiance, vol, recel de cesdélits, faux et usage de faux, et dénonciation calomnieuse, ils seront déclarésirrecevables ;

Attendu que Cécilia DECATOIRE agissant pour son compte et celui de la société
BARMONT, de droit suisse et dont elle se déclare gérante, s'est régulièrementconstituée partie civile par lettre reçue au greffe le 18 septembre 2009 ; qu'àl'audience du 19 octobre elle a demandé par l'intermédiaire de l'avocat MaîtreOUARTI la somme de un euro de dommages-intérêts; qu'au cours de cette mêmeaudience Madame DECATOIRE a personnellement déposé 88 pages deconclusions aux termes desquelles elle sollicite la condamnation des prévenus àpayer à chacune d'elles la somme de 2.575.000 euros à titre de dommages-intérêtsen réparation de leur préjudice moral et une somme de 5.000 euros en applicationdes dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale;

Attendu qu'il n'apparaît pas que Cécilia DECATOIRE et la société BARMONTaient été victimes d'une dénonciation calomnieuse ou que leurs noms aient étéajoutés ni mentionnés dans les listings et documents incriminés dans le cadre dela présente affaire ; que faute pour ces parties civiles de justifier d'un préjudicepersonnellement subi et directement lié aux seuls faits visés dans l'ordonnancesaisissant le tribunal sous les qualifications de abus de confiance, vol, recel de cesdélits, faux et usage de faux, et dénonciation calomnieuse ; qu'elles seront enconséquence déclarées irrecevables ;

Attendu que Jean GALLI-DOUANI a fait parvenir au greffe une lettre reçue le10 septembre 2009 aux termes de laquelle il demandait à être cité comme témoin,
que par fax reçu le 18 septembre il faisait connaître la désignation de MaîtreCANOY pour l'assister en qualité de partie civile, que par courrier reçu le 30septembre 2009,cet avocat faisait savoir qu'il n'intervenait plus dans cette affaire ;
qu'à l'audience du 19 octobre Jean GALLI DOUANI a réclamé une réparation
symbolique à hauteur d'un euro ;

Attendu que si l'information a établi que son nom a été mentionné sur le verbatimdu Général RONDOT relatif à la réunion du 9 janvier 2004, il n'apparaît pas qu'ilait été victime d'une dénonciation calomnieuse et que son nom figure parmi ceuxayant été ajoutés dans les listings et documents incriminés dans le cadre de laprésente affaire; que faute par lui de justifier d'un préjudice personnellement subiet directement lié aux seuls faits visés dans l'ordonnance saisissant le tribunal sous
les qualifications de abus de confiance, vol, recel de ces délits, faux et usage defaux, et dénonciation calomnieuse, il sera déclaré irrecevable ;

Attendu que Jacques BIDALOU s'est constitué à titre personnel par courrier
adressé au tribunal le 11 septembre 2009 et dans lequel il sollicitait la
condamnation solidaire de Dominique de VILLEPIN et de Jean-Louis
GERGORIN à lui payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
que par "conclusions définitives"déposées à l'audience du 19 octobre, il ademandé au tribunal de surseoir à statuer jusqu'à la mise à disposition de laprocédure disciplinaire actuellement pendante devant le Conseil Supérieure de laMagistrature à l'endroit de Renaud VAN RUYMBEKE ; qu'à l'audience du 23

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octobre, en reprenant à son compte les conclusions portant exception de nullitéprésentées par la défense de Jean-Louis GERGORIN, il a sollicité qu'un jugementimmédiat soit rendu sur l'impartialité du tribunal ;

Attendu qu'il n'apparaît pas que Jacques BIDALOU ait été victime d'unedénonciation calomnieuse et que son nom ait été ajouté dans les listings etdocuments incriminés dans le cadre de la présente affaire; que faute par lui dejustifier d'un préjudice personnellement subi et directement lié aux seuls faitsvisés dans l'ordonnance saisissant le tribunal sous les qualifications de abus deconfiance, vol, recel de ces délits, faux et usage de faux, et dénonciationcalomnieuse, il sera déclaré irrecevable ;

Attendu que Pierre CHARON s'est régulièrement constitué partie civile par voieincidente au cours de l'information le 20 septembre 2007 ; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre il sollicite la
condamnation conjointe et solidaire de Imad LAHOUD, Jean-Louis GERGORINet Dominique de VILLEPIN à lui payer la somme d'un euro en réparation de sonpréjudice moral ainsi que la somme de 2.000 euros en application des dispositionsde l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'aux termes de l'ordonnance derenvoi, le nom de Pierre CHARON n'apparaît pas expressément dansl'énumération des victimes ; que si cette liste n'est pas exhaustive et si ce nom esteffectivement apparu sur les listings contenus dans l'une des clefs USB de Jean-
Louis GERGORIN remise par lui aux juges d'instruction en 2006, il ne ressort pasdu dossier que ce nom ait été mentionné dans l'un des documents falsifiés inclusdans les qualifications de faux, d'usage de faux et de dénonciation calomnieusedélimitant la saisine du tribunal ; qu'il s'ensuit que Pierre CHARON ne justifiepas d'avoir personnellement subi un préjudice directement lié aux faits visés dansles poursuites ; qu'il sera en conséquence déclaré irrecevable ;

Attendu que Brice HORTEFEUX s'est régulièrement constitué partie civile parvoie incidente au cours de l'information le 25 juillet 2007 ; qu'à l'audience du 14octobre 2009 il a demandé, par l'intermédiaire de son conseil, la condamnationsolidaire de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique de VILLEPINà lui payer un euro de dommages-intérêts et 4.000 euros en application de l'article475-1 du code de procédure pénale ; qu'il a fait soutenir que le compte 80082 quilui est faussement attribué était identifiable, qu'il ne s'agit pas d'un compte isolé; que son existence était, au contraire, destinée à valider la mise en cause deNicolas SARKOZY ; que son nom a été évoqué à 7 reprises au cours de la réuniondu 9 janvier 2004 notamment au sujet des "connexions" et des "réseaux
tangentiels"; que le faux, l'usage de faux et la dénonciation calomnieuse sont à sesyeux caractérisés ;

Attendu que la constitution de partie civile apparaît régulière en la forme ; qu'ilconvient de la déclarer recevable ;

Attendu cependant que la partie civile ne justifie pas de l'existence d'un préjudicerésultant du seul fait dont le tribunal est saisi en ce qui la concerne, à savoir lamention d'un libellé "BPB HOR" désignant le compte 80082 , tel qu'apparaissantdans le listing joint à la lettre reçue par le juge Renaud VAN RUYMBEKE le 14juin 2004 et le "super annuaire" reçu par ce magistrat le 20 août suivant ; que si

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de telles mentions devaient orienter le juge d'instruction, autorité destinataire dela dénonciation, à tenter d'identifier la personne susceptible d'être ainsi désignée,
force est de constater que tel n'est pas été le cas et que le lien entre cette mentionet la personne de Brice HORTEFEUX n'est finalement apparu qu'à la faveur desexplications fournies par la suite par les prévenus au cours de l'instruction duprésent dossier ; qu'au surplus le nom de Brice HORTEFEUX, pourtant partiecivile, n'a pas été mentionné dans la liste des victimes reprise dans l'ordonnancede renvoi ; que dès lors Brice HORTEFEUX sera débouté de ses demandes ;

Attendu que par conclusions régulièrement déposées et visées à l'audience du 13octobre, les sociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM
INTERNATIONAL se constituent partie civile et sollicitent la condamnationsolidaire de Florian BOURGES et "tous autres prévenus que le tribunal retiendradans les liens de la prévention" à payer à CLEARSTREAM BANKING la sommede 100.000 euros et à CLEARSTREAM INTERNATIONAL la somme d'un euro
en réparation de leur préjudice respectif et la condamnation solidaire des mêmesà payer à CLEARSTREAM BANKING la somme de 10.000 euros en applicationde l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que l'information a établi que les documents falsifiés, utilisés commesupports des dénonciations, contenaient des données provenant du systèmeinformatique de CLEARSTREAM et appartenant à la société CLEARSTREAMBANKING ; que les dénonciations consistaient à imputer aux victimes lacommission d'opérations illicites réalisées par le biais de comptes qui leur étaientfaussement attribués auprès de cette chambre de compensation ; que cesdénonciations calomnieuses n'ont été rendues possibles que par le détournementdes données appartenant à CLEARSTREAM BANKING, fait constitutif du délitd'abus de confiance commis par Florian BOURGES relayé par les receleurs en lapersonne d'Imad LAHOUD et de Jean-Louis GERGORIN, auteurs des faux et deleur usage ;

que le retentissement médiatique de ces agissements a été accentué par l'existencedu débat public déjà largement engagé par Denis ROBERT et mettant en cause lesmodes de fonctionnement de cette chambre de compensation, suspectée, aux diresdu journaliste, de tolérer des pratiques favorisant la mise en place de réseaux decorruption et de blanchiment ; que le traitement judiciaire de cette affaire, demême que le grand nombre et la notoriété des personnes victimes de la calomnie,
ont concouru de façon certaine à l'aggravation du préjudice d'imageincontestablement subi par CLEARSTREAM BANKING et la holding du groupe,
CLEARSTREAM INTERNATIONAL ; que celles-ci souffrent désormais, au delàdu préjudice de confiance dans leurs relations avec leur clientèle et strictementrelatif aux données détournées, d'un préjudice de notoriété lié, depuis lors, àl'utilisation systématique du nom de CLEARSTREAM dans le débat publiclorsqu'il s'agit d'évoquer cette affaire ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir CLEARSTREAM BANKINGet CLEARSTREAM INTERNATIONAL en leurs constitutions et de condamner
solidairement Florian BOURGES, Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN à
verser à titre de dommages -intérêts à CLEARSTREAM BANKING une sommede 50.000 euros, et à CLEARSTREAM INTERNATIONAL une somme d'un
euro, et de condamner chacun d'eux à payer à CLEARSTREAM BANKING une

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somme de 2.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ;

Attendu que la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES s'est constituée
partie civile auprès du doyen des juges d'instruction le 28 juin 2006 ; que, parconclusions déposées et régulièrement visées à l'audience du 13 octobre 2009, elledemande la condamnation solidaire de Florian BOURGES, Imad LAHOUD, Denis
ROBERT et Jean-Louis GERGORIN à lui verser la somme de 50.000 euros en
réparation de son préjudice et chacun une somme de 3.000 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que l'information et les débats ont établi qu'en recrutant FlorianBOURGES comme stagiaire, la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES
s'est engagée dans une action de formation à son égard; que par la suite, satisfaitedes services rendus par Florian BOURGES, cette même société l'a embauché enqualité d'assistant expérimenté selon un contrat à durée indéterminée à compterdu 1er octobre 2001 ; que Florian BOURGES a détourné des documents de travailqu'il avait confectionnés pour les besoins de la mission d'audit confiée à
ARTHUR ANDERSEN Luxembourg pour laquelle BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES a mis son personnel à disposition ; que le détournement commis parFlorian BOURGES n'a pas porté sur le support lui-même, mais sur les donnéescontenues sur ces supports qui ont été reproduites et transmises à des tiers ; quec'est au mépris de ses obligations contractuelles notamment de confidentialité queFlorian BOURGES a fait un usage répréhensible des informations qu'il détenaitau travers de ses documents de travail, constitutif du délit d'abus de confiance ;
que cet usage a causé un préjudice à la société BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES dont la confiance a été trahie par son salarié, ce qui n'a pas manquéd'engendrer un perte de confiance dans la société BARBIER FRINAULT &
ASSOCIES de la part de sa clientèle ; qu'il en résulte un préjudice certain pour lapartie civile dont sont responsables tant l'auteur de l'abus de confiance que lesreceleurs ;

Attendu qu'il s'ensuit que la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES seradéclarée recevable, que Florian BOURGES sera condamné solidairement avecImad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN, à lui payer la somme de 8.000 eurosen réparation de son préjudice moral, et que chacun de ces trois prévenus seracondamné à verser à la partie civile une somme de 1.000 euros en application desdispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale; qu'il conviendra dedébouter cette même partie civile de ses demandes à l'encontre de Denis
ROBERT, en raison de la relaxe intervenue au bénéfice de ce dernier ;

Attendu que Nicolas SARKOZY s'est régulièrement constitué partie civile parvoie incidente au cours de l'information le 31 janvier 2006 ; qu'à l'audience du 19octobre 2009 il a demandé, par l'intermédiaire de son conseil, la condamnationsolidaire de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique de VILLEPINà lui payer un euro de dommages-intérêts ;

Attendu que les noms de Paul de NAGY et Stéphane BOCSA sont apparus commetitulaires de comptes CLEARSTREAM sur le listing des 895 comptes clôturés le12 mai 2004,joint à la lettre reçue par le juge Renaud VAN RUYMBEKE le 14

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juin 2004dénonçant "l'exode des crapules", ainsi que sur le "super annuaire"
contenu dans le CD-ROM parvenu à ce magistrat le 20 août suivant ; que le jugedestinataire de ces informations a pu aisément déterminer que ces deux nomsvisaient en réalité Nicolas SARKOZY qui de ce fait était présenté comme titulairede deux comptes en Italie auprès de la Banque Populaire de Sondrio et en lien avecle système de corruption et de blanchiment ; que cette mise en cause parfaitementinfondée a été de nature à porter atteinte à l'honneur et à la probité de NicolasSARKOZY, alors membre du gouvernement ; que la partie civile est endroit d'enobtenir réparation ; qu'il convient de faire droit à sa demande en condamnant Jean-
Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer un euro de dommages-intérêts ;
qu'il convient par ailleurs de le débouter de ses demandes en ce qu'elles sontdirigées à l'encontre de Dominique de VILLEPIN du fait de la relaxe à intervenirle concernant ;

Attendu que la société EADS FRANCE s'est constituée par voie d'interventionauprès des juges d'instruction le 13 avril 2006 ; que par conclusions régulièrementdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre 2009, la partie civiledemande de condamner respectivement Jean-Louis GERGORIN et ImadLAHOUD à lui payer une somme d'un euro en réparation du préjudice subi parelle du fait de leurs agissements ; qu'elle fait notamment valoir que Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD ont contribué à fragiliser son organisation et sonimage vis-à-vis de ses partenaires commerciaux, aux yeux de l'opinion publiqueet des marchés financiers ;

Attendu qu'il résulte de l'information et des débats que parmi les personnesvictimes directes des calomnies fomentées par Jean-Louis GERGORIN et ImadLAHOUD figurent des cadres dirigeants d'EADS ; que Jean-Louis GERGORINa lui-même exercé des responsabilités de premier plan au sein de ce groupe et s'estd'ailleurs abrité derrière les intérêts de celui-ci pour rendre crédibles sesdénonciations auprès de ses différents interlocuteurs ; qu'il a été à l'origine durecrutement d'Imad LAHOUD par EADS et à la progression de ce dernier parvenuà un poste de responsabilité, en lui assurant une situation tout à la fois stable etconfortable au plan financier, alors que , pendant ce temps, ils s'activaientensemble à la mise en cause totalement infondée de certains responsables de lasociété et d'autres personnes ; que par leur action conjointe les prévenus ontincontestablement nui à l'image d'EADS dont le nom a été, de leur propre fait,
associé à cette affaire au travers de son traitement judiciaire et des innombrablesinvestigations notamment dans les locaux d'EADS, rendues nécessaires par unecomplexité qu'ils avaient savamment entretenue ; qu'ils ont eux-mêmes participé,
par leurs multiples déclarations, aux soubresauts médiatiques au cours desquelsétait évoqué le nom d'EADS en rapport avec ce qui est devenu un scandaled'envergure ; qu'il en est résulté un préjudice certain pour EADS ;

Attendu qu'il convient en conséquence de faire droit aux demandes de la partiecivile et de condamner solidairement Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN
à payer un euro de dommages-intérêts à la société EADS FRANCE en réparationde son préjudice moral ;

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Attendu qu'Odile JACOB et la société SAS Editions Odile JACOB se sont
constituées partie civile auprès des juges d'instruction le 15 mai 2006; que parconclusions déposées et régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009,
elles sollicitent la condamnation solidaire des prévenus Jean-Louis GERGORIN,
Imad LAHOUD, Florian BOURGES et Denis ROBERT à verser à Odile JACOB
un euro symbolique et une somme de 150.000 euros à la SAS Editions OdileJACOB ainsi qu' une somme de 10.000 euros en application de l'article475-1 ducode de procédure pénale ;

Attendu que le nom d'Odile JACOB apparaît sur le listing de deux pagesrécapitulant 97 comptes prétendument ouverts auprès de CLEARSTREAM, ainsique sur l'annuaire catégoriel, écrit de la main de Jean-Louis GERGORIN, avecsous la rubrique "initiateur" : "Alain GOMEZ", sous la rubrique "éléments
biographiques", la mention "président Editions Odile Jacob", et sous la rubrique
"catégorie", la mention "éditrice" (D2567/9 et D2567/13), documents remis augénéral RONDOT en novembre 2003; que son conseil a transmis au tribunal àl'audience du 8 octobre une lettre d'Odile JACOB explicitant l'étendue dupréjudice qu'elle allègue pour elle-même et sa société d'édition ;

Attendu qu'au cours de son audition par les juges d'instruction, elle avait indiquéque la société des Editions Odile JACOB avait publié deux ouvrages écrits parPhilipppe DELMAS et un livre d'Alain MINC, ces deux noms figurant égalementsur les listings ; que si elle-même ne connaissait pas Imad LAHOUD et le GénéralRONDOT, son mari avait eu l'occasion, alors qu'il était au Quai d'Orsay aucabinet du ministre Jean-François PONCET, de travailler avec Jean-Louis
GERGORIN avant 1981 ; qu'à la fin de l'année 2003 les Editions Odile JACOBétaient candidates au rachat de certains actifs de la société d'Edition EDITIS ;
qu'elle met l'accent sur le préjudice moral subi par elle-même et la société dès lorsqu'il a été démontré que les documents et listes falsifiés ont circulé dans tous lesmilieux politiques, économiques et administratifs, répandant des "accusations
ignominieuses" ;

Attendu que le fait de se voir faussement attribuer un compte au Luxembourgauprès de CLEARSTREAM, censé avoir permis de bénéficier du versement desommes d'argent de provenance illicite au sein d'une organisation criminelled'envergure internationale, la diffusion de cette fausse information notamment parvoie de presse et le fait de ne découvrir cette situation que trois ans après ladénonciation, sont de nature à causer un préjudice moral certain aux parties civileset singulièrement à Odile JACOB et à la société des Editions Odile JACOB ;

Attendu qu'il convient en conséquence de déclarer les parties civiles recevables ;
que, Denis ROBERT bénéficiant d'une relaxe et Florian BOURGES n'étant paspoursuivi comme auteur ni complice des faux, usage de faux et dénonciationscalomnieuses qui fondent les demandes des parties civiles, celles-ci serontdéboutées de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de ces deuxprévenus ; qu'il convient en revanche de condamner solidairement ImadLAHOUD et Jean-Louis GERGORIN à payer à Odile JACOB la somme d'un eurosymbolique, et à la société Editions Odile JACOB la somme de 10.000 euros ;
qu'il convient également de condamner chacun d'eux à payer aux parties civilesla somme de 1.000 euros ;

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Attendu que Philippe DELMAS a fait déposer et régulièrement viser à l'audiencedu 13 octobre 2009 des conclusions aux termes desquelles il est demandé autribunal de condamner solidairement Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et
Dominique de VILLEPIN à lui payer une somme de 920.000 euros à titre dedommages-intérêts en réparation du préjudice que lui ont causé les dénonciationsdont il a fait l'objet, ainsi qu'une somme de 150.000 euros en application desdispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'au soutien de ses prétentions, Philippe DELMAS fait valoir qu'il a vusa carrière au sein du groupe EADS brutalement interrompue du fait des
manoeuvres des prévenus, alors qu'il occupait au sein d'Airbus le poste dedirecteur de développement et des affaires extérieures , membre du comitéexécutif, et pressenti pour rejoindre le comité exécutif d'EADS et percevoir unsalaire annuel de 400.008 euros auquel serait venu s'ajouter une part variablepouvant atteindre 400.000 euros, qu'il a été mis à l'écart jusqu'à son licenciementd'EADS le 27 mars 2006 et que l'opposition manifestée à son endroit au seind'EADS pendant cette période a été attisée par la réitération des dénonciations etles protestations d'innocence de Jean-Louis GERGORIN ; qu'il a subi unpréjudice moral considérable lié aux circonstances de son interpellation, à ses 30heures de garde à vue et aux perquisitions et saisies opérées ; qu'il évalue sonpréjudice sur la base de deux années de perte du salaire qu'il aurait du percevoird'EADS (800.000 euros) par comparaison avec le salaire effectivement perçu en2008 (340.000 euros) ;

Attendu qu'il est incontestable que l'action conjointe de Jean-Louis GERGORINet Imad LAHOUD avait pour objectif de nuire notamment et principalement àPhilippe DELMAS qui était présenté comme ayant eu un rôle déterminant dans lamise en place du système de corruption et de blanchiment dénoncé ; quel'information a démontré que ces dénonciations se sont accompagnées detentatives de renversement en mettant en cause Philippe DELMAS lui-mêmecomme auteur de la calomnie et se positionnant comme victime des divulgationset des mises en cause dans la presse comme étant le "corbeau" ; qu'il est établi quecette campagne de déstabilisation, s'inscrivant dans un conflit industriel très tenduau sein même du groupe EADS, a eu l'effet recherché dans la mesure où PhilippeDELMAS a été finalement évincé des responsabilités auxquelles il est démontréqu'il pouvait légitimement prétendre et que son licenciement a été l'aboutissementlogique de cette situation ;

Attendu que compte tenu de ces éléments et des pièces justificatives versées parla partie civile, le tribunal est en mesure de liquider l'ensemble du préjudice subipar Philippe DELMAS à la somme de 350.000 euros, somme qui sera mise à lacharge solidaire des seuls Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, à
l'exception de Dominique de VILLEPIN du fait de la relaxe à intervenir leconcernant ; qu'il convient également de condamner Jean-Louis GERGORIN etImad LAHOUD à payer chacun à Philippe DELMAS une somme de 7.500 eurosen application des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

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Attendu que par conclusions régulièrement déposées et visées à l'audience du 13octobre 2009, Alain GOMEZ sollicite la condamnation conjointe et solidaire deJean-Louis GERGORIN , Imad LAHOUD et Dominique de VILLEPIN à lui payer

150.000 euros en réparation de son préjudice moral et 30.000 euros au titre del'article 475-1 du code de procédure pénale ;
qu'il fait valoir que Jean-Louis GERGORIN avait déjà obtenu dès 1995 qu'une deses connaissances, Madame NEMER, transmette à Renaud VAN RUYMBEKE
une note l'impliquant, que Jean-Louis GERGORIN a dénoncé Alain GOMEZauprès d'Edwy PLENEL courant 2003, comme commanditaire de l'assassinat deJean-Luc LAGARDERE par la mafia ukrainienne ou biélorusse ; que le nom deJean-Louis GERGORIN était sorti dans l'instruction de l'affaire dite "couper les
ailes de l'oiseau", dès le mois de mai 2003, au travers d'une note DST classée
secret défense et finalement déclassifiée, comme étant intervenu auprès de la DSTet pour assurer le financement en espèces d'une opération visant la sociétéThomson et ses dirigeants ; que Jean-Louis GERGORIN a attendu le 30 mai 2006,
soit quatre mois après la relaxe intervenue dans cette procédure, pour se dénoncercomme étant l'auteur des dénonciations de 2003 et 2004, alors que des soupçonspesaient sur lui depuis 2004 ;

Attendu que la preuve a été rapportée qu'Alain GOMEZ occupait une placeessentielle dans l'organisation criminelle dénoncée par Jean-Louis GERGORINet Imad LAHOUD auprès du Général RONDOT mais également en 2004 auprèsdu juge d'instruction Renaud VAN RUYMBEKE, que c'est précisément cetteprééminence qui a permis le lien avec l'affaire des Frégates instruite par cemagistrat ; que cet acharnement à mettre en cause le même homme pendantplusieurs années afin de l'impliquer dans des faits d'une telle gravité dont ledénonciateur n'ignorait pas la fausseté n'a pas d'autre explication que de vouloirnuire à cette victime en réglant de cette façon des comptes singuliers ; qu'il en estrésulté à titre personnel pour Alain GOMEZ un préjudice moral incontestable quele tribunal est en mesure de liquider, au regard de circonstances de l'affaire et desjustifications apportées, à la somme de 80.000 euros ;

Attendu qu'il convient de déclarer Alain GOMEZ recevable en sa constitution;
que, du fait de la relaxe à intervenir au bénéfice de Dominique de VILLEPIN, lesdemandes formées à son encontre seront rejetées ; qu'il convient en conséquencede condamner les seuls Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN à payer à AlainGOMEZ d'une part, solidairement, la somme de 80.000 euros en réparation dupréjudice résultant de leurs agissements conjoints, et d'autre part, chacun, unesomme de 5.000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que par conclusions régulièrement visées à l'audience du 13 octobre 2009,
Pierre MARTINEZ a sollicité la condamnation de l'ensemble des prévenus à luipayer la somme de 100.000 euros en réparation de son préjudice et 30.000 eurosen application des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

qu'au soutien de ses prétentions Pierre MARTINEZ fait valoir que son nom estapparu à tous les niveaux, de la note au Général RONDOT en novembre 2003jusqu'au dernier courrier adressé au juge d'instruction Renaud VAN RUYMBEKEen octobre 2004, que les faits dénoncés étaient gravissimes au regard des termesemployés, révélateurs de la part des auteurs d'une absence totale de prudence dans

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l'expression, d'autant que lui-même, étant haut fonctionnaire de part ses fonctionsde directeur de la Brigade Financière, était supposé agir entouré de quatre"parrains" des mafias de l'Est ; que cette dénonciation a été reprise dans la presseoù il apparaissait en relation avec la mafia russe et le narco-trafic ; que cette affairea considérablement nui au développement de sa société de consultant créée en2002 à son départ de THALES ;

Attendu que les agissements de Jean-Louis GERGORIN et d'Imad LAHOUD ontincontestablement causé un préjudice important à Pierre MARTINEZ, eu égard àla réitération des dénonciations le visant aux côtés de WANG CHUAN POO,
Alain GOMEZ et Philippe DELMAS, et des qualités professionnelles qu'il avaitsu manifester jusque-là et en totale contradiction avec une quelconqueparticipation aux faits ; que la révélation de cette dénonciation dans la presse aaccentué l'écho donné à cette dénonciation ; que dès lors le préjudice moral qui enest personnellement résulté pour la partie civile apparaît certain ; que le tribunalest en mesure au regard des circonstances de l'affaire et des justificationsproduites, de liquider ce préjudice à la somme de 50.000 euros ;

Attendu qu'il convient de déclarer Pierre MARTINEZ recevable en sa
constitution ;

qu'il convient en conséquence de condamner les seuls Imad LAHOUD et Jean-
Louis GERGORIN à payer à Pierre MARTINEZ d'une part, solidairement, lasomme de 50.000 euros en réparation du préjudice résultant de leurs agissementsconjoints, et d'autre part, chacun, une somme de 5.000 euros au titre de l'article475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Christian GIACOMOTTO, régulièrement constitué partie civile parlettre recommandée avec avis de réception en date du 14 septembre 2009, sollicitedans ce courrier la condamnation à l'euro symbolique des prévenus coupables dela machination dont il a été victime ;

Attendu que la constitution de Christian GIACOMOTTO apparaît régulière en laforme ; qu'au fond, il a été démontré par l'information que son nom a été porté surle listing remis au Général RONDOT courant novembre 2003, lié à la
dénonciation; qu'il figure également dans le CD-ROM du 20 août 2004 et la listedes 895 comptes prétendument clôturés le 12 mai 2004 adressés au juge VANRUYMBEKE ; que Jean-Louis GERGORIN connaissait cette partie civile pouravoir été à ses côtés membre du comité exécutif du groupe LAGARDERE, etadministrateur de la Banque ARJIL dont la partie civile assurait la présidence ; quelors de ses déclarations à la police, Christian GIACOMOTTO a expliqué qu'ilavait été en opposition sur la réalisation d'un montage fiscal regroupant lesprincipaux dirigeants du groupe avec la Banque ARJIL et soutenu par Jean-LouisGERGORIN, ainsi qu'à l'occasion de la privatisation de Thomson (D3792) ;

Attendu que le préjudice moral résultant de sa mise en cause réitérée et sansfondement apparaît certain ; qu'il convient de recevoir Christian GIACOMOTTOen sa constitution et de faire droit à sa demande en limitant la condamnation de
Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD au versement d'un euro symbolique ;

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Attendu qu' Alain CHOUET s'est régulièrement constitué en cours d'informationle 12 décembre 2006 ; que son conseil a indiqué à l'audience du 14 octobre 2009qu'il maintenait sa constitution mais ne formulait pas de demande decondamnation ; que le tribunal se bornera donc à le recevoir en sa constitution;

Attendu qu' Alain GENITEAU s'est régulièrement constitué partie civile par voie
d'intervention en cours d'instruction le 5 mars 2008; que par conclusionsrégulièrement déposées et visées à l'audience du 19 octobre 2009, il sollicite lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN et d'Imad LAHOUD à lui payer l'eurosymbolique à titre de dommages-intérêts et 15.000 euros en application de l'article475-1 du code de procédure pénale ; qu'il fait notamment valoir qu'étant avocatspécialisé dans la défense des actionnaires minoritaires, il jouissait d'unerespectabilité dans le milieu des avocats et des administrateurs judiciaires ainsique, plus largement, dans le secteur du droit des affaires ; que c'est
paradoxalement parce que la présence dans les listings de son nom, ainsi que ceuxde Maître VEIL ou de Maître KIEJMAN, aurait pu insinuer un doute dans l'espritdu juge VAN RUYMBEKE, que les auteurs de la dénonciation ont pu décider deles retirer quand ils'est agi d'envoyer les listings à ce magistrat qui les connaissaitprofessionnellement ; que le préjudice subi consiste dans le prix de la rumeurclandestine qui a couru sur lui selon un circuit dont il ignorait tout ;

Attendu que le nom d'Alain GENITEAU apparaît dans le listing de novembre2003 comportant l'énoncé de 97 comptes CLEARSTREAM, et dans l'un destableaux joints à la note du 23 novembre 2003 ; que le fait de se voir faussementattribuer un compte bancaire en Suisse auprès de la Banque JULIUS BAER,
cliente de CLEARSTREAM, censé lui avoir permis de bénéficier de sommesd'argent de provenance illicite au sein d'une organisation criminelle d'envergureinternationale, la diffusion de cette fausse information notamment par voie depresse et le fait de ne découvrir cette situation que plusieurs années après ladénonciation, sont de nature à causer un préjudice moral certain aux parties civileset singulièrement à Alain GENITEAU ; que le préjudice moral résultant de sa miseen cause réitérée et sans fondement apparaît certain ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Alain GENITEAU en saconstitution, régulière en la forme ; qu'il convient également de faire droit à lademande de cette partie civile et de limiter la condamnation de Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD au versement d'un euro symbolique et decondamner chacun d'eux à payer à cette même partie civile une somme de 1.000euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu' Arcadi GAYDAMAK s'est constitué partie civile par l'intermédiairede son avocat, à l'audience du 21 septembre 2009 ; qu'aux termes des conclusionsrégulièrement visées à cette même audience, Arcadi GAYDAMAK sollicite lacondamnation solidaire de Florian BOURGES, Denis ROBERT, Jean-Louis
GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique de VILLEPIN à lui payer la sommede 100.000 euros en réparation de son préjudice moral et 10.000 euros au titre del'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il fait valoir que de toute évidencel'adjonction dépourvue de tout fondement de son nom n'a été réalisée que pour luinuire et porter atteinte tant à son honneur qu'à sa réputation en tentant de le mêlerà de graves et importantes opérations illicites et qu'il a subi de ce fait un préjudice

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certain dans cette affaire puisque certains journaux ont indiqué qu'il figurait parmiles bénéficiaires d'un compte occulte ;

Attendu que le nom d'Arcadi GAYDAMAK est mentionné dans le listing de 97comptes, dans le tableau n°1 figurant en annexe de la note du 23 novembre 2003,
celui-ci récapitulant les comptes clients CLEARSTREAM attribués, selon la note,
à l'initiative d'Alain GOMEZ, à des "parrains du milieu" dans le cadre de la
"grande cooptation à la fois mafieuse et affairiste" à laquelle il s'était livré en
1994, et dans l'annuaire catégoriel comme "intermédiaire milliardaire armes" et
"parrain politico-mafieux"; que ces documents ont été remis au GénéralRONDOT ; que ce nom apparaît également dans le super annuaire du 20 août 2004et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent, documents adressésau juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que la partie civile a subi un préjudicecertain du fait de l'utilisation de son nom dans ces dénonciations alors même qu'àcette époque il ne résidait pas en France mais en Israël ; que le tribunal est enmesure d'évaluer ce préjudice à la somme de 5.000 euros ;

Attendu qu'Arcadi GAYDAMAK sera déclaré recevable en sa constitution quiapparaît régulière en la forme ; que Denis ROBERT et Dominique de VILLEPINdevant bénéficié d'une relaxe, les demandes dirigées à leur encontre serontrejetées; que de la même façon, devront être rejetées les demandes dirigées àl'encontre de Florian BOURGES qui n'est pas poursuivi pour les faits de faux,
usage de faux et dénonciation calomnieuse fondant les prétentions de la partiecivile ; qu'il convient de condamner solidairement Jean-Louis GERGORIN etImad LAHOUD à payer à Arcadi GAYDAMAK la somme de 5.000 euros à titrede dommages-intérêts et chacun une somme de 500 euros en application desdispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Nadhmi AUCHI s'est constitué au cours de l'information le 7
décembre 2006, que son conseil a sollicité la condamnation des prévenus à luipayer la somme de 10.000 euros et s'en est remis à la sagesse du tribunal pourl'application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que le nom de Nadhmi AUCHI est mentionné dans le listing de 97comptes où il apparaît faussement comme utilisateur d'un compte chezCLEARSTREAM, dans le tableau n°1 figurant en annexe de la note du 23novembre 2003, celui-ci récapitulant les comptes clients CLEARSTREAM
attribués, selon cette note, à l'initiative d'Alain GOMEZ à des "parrains dumilieu" dans le cadre de la"grande cooptation à la fois mafieuse et affairiste " à
laquelle il s'était livré en 1994, ainsi que dans l'annuaire catégoriel où il apparaîtcomme "financier/blanchisseur"; que ces documents ont été remis au GénéralRONDOT ; que ce compte apparaît également dans le super annuaire du 20 août2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent, documentsadressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que la partie civile a subi unpréjudice certain du fait de l'utilisation de son nom dans ces dénonciations ; qu'auvu des éléments du dossier et des indications fournies par la partie civile entendueen personne à l'audience du 29 septembre, le tribunal est en mesure d'évaluer lepréjudice subi à la somme de 6.000 euros ;

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Attendu que Nadmi AUCHI sera déclaré recevable en sa constitution qui apparaîtrégulière en la forme ; qu'il convient de condamner solidairement Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD à payer à Nadhmi AUCHI la somme de 6.000euros à titre de dommages-intérêts et, chacun, une somme de 500 euros enapplication des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale";

Attendu que Dominique AMBIEL s'est régulièrement constitué partie civile encours d'instruction, par lettre adressée aux juges d'instruction le 27 juin 2006 ; quepar conclusions régulièrement déposées et visées à l'audience du 13 octobre 2009,
il sollicite la condamnation de Jean-Louis GERGORIN et d'Imad LAHOUD à lui
payer 50.000 euros à titre de dommages-intérêts et 15.000 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il fait valoir qu'il a appris le 8 juin2006, à l'occasion d'une émission de télévision, que son nom était cité dans leslistings CLEARSTREAM falsifiés et divulgués dans l'ouvrage de Denis ROBERT"CLEARSTREAM l'enquête", le présentant faussement comme titulaire d'uncompte à la Banque Cantonale Vaudoise à Lausanne ; qu'il s'étonne qu'aucun desministres censés avoir été informés de ce fait n'ait informé le Premier ministre de
l'époque que l'un de ses conseillers était en cause dans cette affaire ; qu'il a subiun préjudice direct du fait des agissements de Jean-Louis GERGORIN et ImadLAHOUD ;

Attendu que l'information a établi que le nom de Dominique AMBIEL apparaîtdans le listing des 97 comptes, dans le tableau n°5 figurant en annexe de la notedu 23 novembre 2003, celui-ci récapitulant les comptes clients CLEARSTREAMattribués, selon la note, après cooptation par Philippe DELMAS, à des "personnesd'horizons très divers dans l'administration, l'industrie et la presse" dont il
rémunérait certaines "de manière périodique ou par des primes dans le cadred'opérations sur commandes", ainsi que dans l'annuaire catégoriel où il apparaît
comme "haut fonctionnaire"; que ces documents ont été remis au GénéralRONDOT; qu'il résulte de la teneur de ces informations divulguées au général àla suite d'un concert frauduleux associant Jean-Louis GERGORIN et Imad
LAHOUD, puis diffusées dans la presse, que cette calomnie a occasionné àDominique AMBIEL un préjudice moral indéniable notamment eu égard auxresponsabilités qui étaient les siennes au sein de la haute administration ; que letribunal est en mesure d'évaluer le préjudice en résultant à la somme de 8.000
euros ;

Attendu que Dominique AMBIEL sera déclaré recevable en sa constitution quiapparaît régulière en la forme ; qu'il convient de condamner Jean-Louis
GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer solidairement la somme de 8.000 eurosà titre de dommages-intérêts et, chacun, une somme de 1.000 euros en applicationdes dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Dominique BAUDIS s'est régulièrement constitué au cours del'information par lettre adressée aux juges d'instruction le 6 juillet 2006 ; que parconclusions déposées et visées à l'audience le 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation conjointe et solidaire de Jean-Louis GERGORIN et d'ImadLAHOUD à lui payer la somme d'un euro à titre de dommages-intérêts et lasomme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ;

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Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de DominiqueBAUDIS a été mentionné dans le listing des 97 comptes, dans le tableau n°5figurant en annexe de la note du 23 novembre 2003, celui-ci récapitulant lescomptes clients CLEARSTREAM attribués, selon la note, après cooptation parPhilippe DELMAS, à des "personnes d'horizons très divers dans l'administration,
l'industrie et la presse" dont il rémunérait certaines "de manière périodique ou
par des primes dans le cadre d'opérations sur commandes", ainsi que dans
l'annuaire catégoriel où il apparaît comme "homme politique";

que cette dénonciation calomnieuse, reposant sur l'allégation de faits que sesauteurs, Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux, notamment la
détention d'un compte à la Banque Cantonale Vaudoise à Lausanne, et surl'utilisation en connaissance de cause de documents falsifiés a causé un préjudicecertain à la partie civile qui s'est trouvée impliquée à son insu dans un réseau decorruption international imaginaire ; que Dominique BAUDIS est en droit d'enobtenir réparation ;

Attendu qu'il convient de recevoir Dominique BAUDIS en sa constitution quiapparaît régulière en la forme ; qu'il convient de faire droit à sa demande et decondamner solidairement Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payerla somme d'un euro à titre de dommages-intérêts et, chacun, la somme de 600euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Fabien BAUSSARD s'est régulièrement constitué au cours del'information, par lettre adressée aux juges d'instruction le 25 avril 2006 ; que parconclusions déposées et régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, ila sollicité la condamnation des prévenus à lui payer un euro symbolique et lasomme de 5.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ; qu'il fait valoir que les documents et listes falsifiés de comptesimaginaires ont circulé dans tous les milieux politiques, économiques etadministratifs, répandant des accusations graves à son encontre, ce dont il a étéinformé par un journaliste, et qu'il a subi un préjudice moral incontestable ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de FabienBAUSSARD a été mentionné dans le listing des 97 comptes, dans le tableau n°3figurant en annexe de la note du 23 novembre 2003, celui-ci récapitulant lescomptes clients CLEARSTREAM attribués, selon la note, à l'initiative d'AlainGOMEZ, dans le cadre de la "grande entreprise de corruption à dérive mafieuse"
à laquelle il s'était livré avec Philippe DELMAS en 1999, et dans l'annuairecatégoriel comme faisant l'objet d'une "fiche DGSE"; que ces documents ont étéremis au Général RONDOT ; que ce compte apparaît également dans le superannuaire du 20 août 2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 maiprécédent, documents adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que cesdénonciations, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs savaient faux, ontcausé un préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir réparation ;

Attendu qu'il convient de faire droit à la demande de Fabien BAUSSARD et delimiter la condamnation de Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD au
versement à cette partie civile d'un euro symbolique et de condamner chacund'eux à payer à cette même partie civile une somme de 600 euros au titre del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

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Attendu que Jean-Pierre CHEVENEMENT s'est régulièrement constitué aucours de l'information par lettre adressée aux juges d'instruction le 21 avril 2006 ;
que par conclusions déposées et visées à l'audience du 19 octobre 2009, il asollicité la condamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et
Dominique de VILLEPIN à lui payer la somme de 100.000 euros à titre dedommages-intérêts et la somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1du code de procédure pénale ; qu'il fait notamment valoir que rien ne le relie àcette affaire ni aux enjeux poursuivis par ses instigateurs ; qu'il souligne que leseul capital d'un homme politique, c'est sa réputation, que lui-même s'est toujoursdistingué par sa rigueur et sa probité, et que le préjudice subi a perduré pendanttoute la période où les médias se sont emparé de cette affaire ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de Jean-PierreCHEVENEMENT a été mentionné dans le listing de 97 comptes et dans l'annuairecatégoriel comme "homme politique" dont l'initiateur était Alain GOMEZ ; queces documents ont été remis au Général RONDOT ; que le compte qui a étéfaussement attribué à la partie civile apparaît également dans le "super annuaire"
du 20 août 2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent,
documents adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que ces dénonciationscalomnieuses, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs savaient faux ets'inscrivant dans un réseau de corruption qu'ils ont eux-même imaginé,
notamment la détention et le fonctionnement d'un compte à la Banque CantonaleVaudoise, et sur l'utilisation en connaissance de cause de documents falsifiés, a
causé un préjudice moral certain à la partie civile qui est en droit d'en solliciterréparation ; qu'au vu des faits et des éléments d'appréciation soumis à l'examendu tribunal, le préjudice moral subi par Jean-Pierre CHEVENEMENT sera évalué,
en considération de la multiplicité des dénonciations et de la situation personnellede la partie civile, homme politique ayant exercé des fonctions gouvernementaleset exerçant des mandats parlementaires successifs, à la somme de 20.000 euros ;

Attendu en conséquence que Jean-Pierre CHEVENEMENT sera reçu en saconstitution qui est régulière en la forme ; qu'il sera débouté de ses demandesdirigées à l'encontre de Dominique de VILLEPIN du fait de la relaxe à intervenirle concernant ; qu'en revanche il convient de condamner solidairement Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD, auteurs des dénonciations, à payer à la partiecivile une somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, et de condamnerchacun d'eux à verser à cette même partie civile, en application de l'article 475-1du code de procédure pénale, une somme de 1.500 euros ;

Attendu qu'Alain de WULF s'est régulièrement constitué au cours del'information par lettre adressée aux juges d'instruction le 22 juin 2007 ; que, parconclusions déposées et régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, ila sollicité la condamnation des prévenus déclarés coupables, à lui payer la sommed'un euro, à titre de dommages-intérêts, toutes causes de préjudices confondues,
et la somme de 3.500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ;

qu'il fait valoir que la dénonciation dont il a fait l'objet l'a déstabilisé dans sa vieprofessionnelle et l'a écarté de deux affaires qu'il tentait de mettre sur pied, et luia fait perdre brutalement les positions de conseiller du président et de président de

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la filiale AERO RE qu'il occupait au sein du groupe EADS ; qu'il a souffert de lasuspicion entretenue à son endroit, également dans sa vie personnelle ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom d'Alain deWULF a été mentionné dans le listing des 97 comptes et dans le tableau n°1figurant en annexe de la note du 23 novembre 2003, ce dernier récapitulant lescomptes clients CLEARSTREAM attribués, selon la note, à l'initiative d'AlainGOMEZ à des "parrains du milieu" dans le cadre de la "grande cooptation à la
fois mafieuse et affairiste" à laquelle il s'était livré en 1994 ; que ces documentsont été remis au Général RONDOT ; que ce compte apparaît également dans lesuper annuaire du 20 août 2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 maiprécédent, documents adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que cesdénonciations calomnieuses, reposant sur l'allégation d'un fait inexact, ladétention d'un compte RMBA chez CLEARSTREAM, que ses auteurs Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD savaient faux et sur l'utilisation par eux dedocuments falsifiés, a causé un préjudice certain à la partie civile qui est en droitd'en solliciter réparation ; qu'il sera fait droit à la demande la partie civile selimitant à l'octroi d'un euro symbolique ;

Attendu qu'il convient de recevoir Alain de WULF en sa constitution qui estrégulière en la forme; qu'il convient de condamner Jean-Louis GERGORIN etImad LAHOUD solidairement à lui payer un euro symbolique à titre dedommages-intérêts et de condamner chacun d'eux à payer à la partie civile unesomme de 1.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ;

Attendu que Gilbert FLAM s'est constitué au cours de l'information, par lettreadressée aux juges d'instruction le 26 avril 2006 ; que par conclusions déposéeset régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, il a sollicité la
condamnation de Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer la sommede 50.000 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 5.000 euros enapplication de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il fait notammentvaloir que ce n'est que le 31 mai 2006 que la saisine des juges d'instruction seraétendue aux faits de faux et usage de faux alors que le Parquet avait classé sanssuite les investigations diligentées en enquête préliminaire sur la base desdocuments communiqués par le juge Renaud VAN RUYMBEKE le 13 juillet2004, et alors que l'infraction avait été portée officiellement à la connaissance deplusieurs membres du gouvernement, directeurs de cabinet de ministre etdirecteurs des services de renseignements ; que la partie civile rappelle qu'elles'est constituée dès le 14 février 2005 dans le dossier de l'affaire des Frégates,
plainte rejetée par le magistrat, qu'il a été entendu en qualité de témoin le 9septembre 2004 par le même magistrat, qu'il avait personnellement obtenu de laBanque Cantonale Vaudoise la confirmation qu'aucun compte n'existait dans cetétablissement à son nom ; que selon la partie civile, la présence de son nom a servid'appât, au moins d'alibi, à l'égard des protagonistes de la présente affaire et plusparticulièrement du Général RONDOT ; qu'il était le premier concerné par lesvérifications et criblages faits en Suisse par le Général RONDOT, quimanifestement éprouvait à son endroit un soupçon persistant ; que ses demandesd'affectation pendant cette procédure ont été considérées comme inopportunes tantque cette affaire durait, lui causant un préjudice professionnel et économiquecertain ; que ces faits ont porté atteinte à son honneur de citoyen et de magistrat ;

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Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de GilbertFLAM a été mentionné dans le listing des 97 comptes notamment un compte à sonnom auprès de la Banque Cantonale Vaudoise, dans le tableau n°4 figurant enannexe de la note du 23 novembre 2003, celui-ci récapitulant les comptes clientsCLEARSTREAM attribués, selon la note, à des "personnes travaillant pour le
compte de la nation" et de "hauts fonctionnaires de l'administration française
dont une partie jouera un rôle crucial dans la tentative de déstabilisation du chefde l'Etat, Jacques Chirac", personnes cooptées par Philippe DELMAS en 2000 ;
que le nom de Gilbert FLAM figure également dans l'annuaire catégoriel enqualité de "responsable contre-ingérence DGSE" et dans la catégorie"haut
fonctionnaire" avec Philippe DELMAS comme "initiateur"; que le compte luiayant été faussement attribué (9DTVE) apparaît également dans les tableaux detransactions n°4 bis et 5 bis et dans les extraits de la base
"RESULT_EM_unk_transactions_data" et "DS_PROD_ACCOUNT"; quel'ensemble de ces documents a été remis au Général RONDOT; que le mêmecompte apparaît également avec le même libellé dans le "super-annuaire" du 20août 2004 adressé au juge Renaud VAN RUYMBEKE ;

Attendu que ces dénonciations calomnieuses, reposant notamment sur desallégations que leurs auteurs, Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, savaientfausses, à savoir la détention d'un compte à la Banque Cantonale Vaudoise et d'uncompte 9DTVE de type RMBA chez CLEARSTREAM et la perception de fondspar le biais du dit compte, ont causé un préjudice certain à la partie civile dontl'honneur et la probité d'homme, de citoyen et de magistrat ont été gravementatteintes ; que la partie civile est en droit d'en obtenir réparation ; qu'enconsidération des faits et des éléments d'appréciation soumis à l'examen dutribunal, le préjudice moral subi par Gilbert FLAM sera évalué à la somme de

30.000 euros ;
Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Gilbert FLAM en sa
constitution qui est régulière en la forme ; qu'il convient de condamnersolidairement Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer 30.000 eurosà titre de dommages-intérêts et de condamner chacun d'eux à lui payer une sommede 1.500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'Edwy PLENEL s'est constitué au cours de l'information par lettreadressée aux juges d'instruction le 19 mai 2006; que par conclusions déposées etrégulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, il a sollicité la
condamnation des prévenus à lui payer la somme de 25.000 euros à titre dedommages-intérêts et la somme de 5.000 euros en application de l'article 475-1du code de procédure pénale ; qu'il fait valoir qu'il n'a appris qu'en 2006 sa miseen cause dans les listings et cela au travers d'un article de presse, qu'en 2003, ilétait concerné par la crise ouverte que traversait le journal "Le Monde", que lesfaits ont porté atteinte à son honneur de citoyen et de journaliste professionnel,
fonction essentielle dans une démocratie ; que, comme Gilbert FLAM, il a lancépar ailleurs une procédure administrative le 2 octobre 2009 tendant à la mise enjeu de la responsabilité de l'Etat à raison de ses dysfonctionnements ayant laisséperdurer les effets des infractions dont ils ont été victimes ;

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Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom d'EdwyPLENEL a été mentionné dans le listing des 97 comptes clients CLEARSTREAM,
comme titulaire d'un compte à la Banque Cantonale Vaudoise à Lausanne, ainsique dans le tableau n°5 joint à la note du 23 novembre 2003, regroupant les"personnes d'horizons très divers" rémunérées par Philippe DELMAS, ainsi quesur l'annuaire catégoriel ; qu'il se retrouve également dans les fichiers detransactions contenus dans le CD-ROM du 4 octobre 2004 qui tendaient àdémontrer que Edwy PLENEL avait perçu des sommes importantes, déterminéeset de provenance illicite, opération qui s'inscrivaient dans le montage frauduleuximaginaire dénoncé par Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD ; que cettedénonciation, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs savaient faux, et surl'utilisation de documents falsifiés, a causé un préjudice certain à la partie civilequi est en droit d'en solliciter réparation ; qu'au vu des faits et des élémentsd'appréciation soumis à l'examen du tribunal, le préjudice moral subi par EdwyPLENEL sera évalué à la somme de 15.000 euros ;

Attendu qu'il convient de recevoir Edwy PLENEL en sa constitution qui estrégulière en la forme ; qu'il convient de condamner solidairement Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer à titre de dommages-intérêts unesomme de 15.000 euros et de condamner chacun d'eux à lui payer une somme de

1.500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que Jacques FRANQUET s'est constitué au cours de l'information, parlettre adressée aux juges d'instruction le 6 août 2007 ; que, par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique deVILLEPIN à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts etla somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ; que Jacques FRANQUET souligne que c'est par une simple rumeur qu'ilavait appris qu'un livre écrit sur l'affaire CLEARSTREAM mentionnait le fait queson nom figurait sur les listings, selon lesquels il était détenteur d'un compte chezCLEARSTREAM ; que le préjudice qui est résulté pour lui de cette dénonciationcalomnieuse doit être apprécié au regard du haut niveau des fonctions qu'il aexercées au sein des services de l'Etat, et de la gravité de l'atteinte portée à sonhonneur et à sa réputation, préjudice accentué par l'écho médiatique donné auxfaits dénoncés ; qu'il en est également résulté un préjudice personnel et familial ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de JacquesFRANQUET a été mentionné dans le CD-ROM reçu le 4 octobre 2004 par le jugeVAN RUYMBEKE, comme étant titulaire d'un compte ayant accueilli des fondsissus du compte DELMAS 03778, que ces documents ont été détournés, récupéréspuis falsifiés notamment par l'ajout du nom de la partie civile et finalementtransmis au magistrat ; que cette dénonciation repose sur l'allégation de faits queses auteurs savaient faux, la détention d'un compte à la Banque JULIUS BAERet la perception d'une somme de 100.000 euros de provenance illicite, et surl'existence d'un réseau de corruption et de blanchiment international ; qu'elle acausé un préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir réparation ;
qu'au vu des faits et des éléments d'appréciation soumis à l'examen du tribunal,
le préjudice moral subi par Jacques FRANQUET sera évalué à la somme de

10.000 euros ;
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Attendu qu'il convient de recevoir Jacques FRANQUET en sa constitution qui estrégulière en la forme ; que les demandes de la partie civile formées à l'endroit deDominique de VILLEPIN seront rejetées du fait de la relaxe le concernant ; qu'ilconvient en revanche de condamner solidairement Jean-Louis GERGORIN et
Imad LAHOUD à payer à la partie civile une somme de 10.000 euros à titre dedommages-intérêts, et de condamner chacun d'eux à payer à cette même partiecivile une somme de 1.500 euros en application de l'article 475-1 du code deprocédure pénale ;

Attendu que Patrick GAUBERT s'est constitué au cours de l'information, parlettre adressée aux juges d'instruction le 5 mai 2006 ; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 13 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique deVILLEPIN à lui payer la somme d'un euro en réparation de son préjudicepersonnel et la somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du codede procédure pénale ; que dans ses écritures, Patrick GAUBERT fait part de sonincompréhension de se voir cité dans cette affaire alors qu'il est issu du milieuassociatif, défenseur des droits de l'homme, et u'il a fait acte de candidature aux
élections européennes de 2004, en qualité de chef de file UMP Ile-de-France,
dépourvu de tout antagonisme personnel avec les auteurs de la calomnie dont il aété victime ; qu'il manifeste également son indignation face au comportement desauteurs de ces dénonciations calomnieuses qui ont eu pour effet de ternir laréputation de nombreuses victimes et détruire leur carrière ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de PatrickGAUBERT a été mentionné dans le tableau des 895 comptes clôturés le 12 mai2004 et dans le "super-annuaire" reçu par le juge VAN RUYMBEKE le 20 août2004 ; que cette dénonciation, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurssavaient faux, à savoir la détention d'un compte en Argentine à Buenos Aires, acausé un préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir réparation ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Patrick GAUBERT en saconstitution qui est régulière en la forme; que les demandes de la partie civileformées à l'endroit de Dominique de VILLEPIN seront rejetées, du fait de larelaxe le concernant ; qu'il convient en revanche de condamner solidairementJean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à payer à la partie civile un euro enréparation de son préjudice personnel et, chacun, 1.000 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que François GONTIER s'est constitué au cours de l'information parlettre adressée aux juges d'instruction le 11 mai 2006 ; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer la sommede 100.000 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 20.000 euros enapplication de l'article 475-1 du code de procédure pénale; qu'il fait valoir que laprésence de son nom dans les listings falsifiés a nourri discrédit et suspicion quiont rejailli sur ses activités professionnelles au sein des sociétés qu'il préside(EEM et DUC) ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de François

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GONTIER a été mentionné dans le listing des 97 comptes notamment un compteà son nom auprès de la banque Alfa Bank à Moscou, et dans l'annuaire catégoriel
comme "financier parisien de mauvaise réputation"; que ce même nom apparaîtégalement dans le super-annuaire du 20 août 2004 et dans la liste des 895 comptesclôturés le 12 mai précédent, documents adressés au juge Renaud VANRUYMBEKE ;

Attendu que cette dénonciation, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurssavaient faux, a causé un préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'ensolliciter la réparation ; qu'au vu des faits et des éléments d'appréciation soumisà l'examen du tribunal, le préjudice moral subi par François GONTIER sera évaluéà la somme de 10.000 euros ;

Attendu qu'il convient de recevoir François GONTIER en sa constitution,
régulière en la forme ; qu'il convient de condamner solidairement Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer 10.000 euros à titre de dommages-
intérêts et, chacun, une somme de 1.000 euros en application de l'article 475-1 ducode de procédure pénale ;

Attendu qu' Alexandre JEVAKHOFF s'est constitué au cours de l'information
par lettre adressée aux juges d'instruction le 7 juin 2006; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 14 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation d'Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN à lui payer la sommede 30.000 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 15.000 euros enapplication de l'article 475-1 du code de procédure pénale; qu'il fait valoir qu'ilexerce comme haut fonctionnaire, depuis plus de 20 ans au service de l'Etat auquelil a consacré sans compter son énergie, sa rigueur et son sens du service public,
que c'est toute sa réputation personnelle qui a été délibérément discréditée par laprésence de son nom sur des listes qui ont laissé entendre qu'il avait participé àune entreprise de corruption ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom d'AlexandreJEVAKHOFF a été mentionné dans le listing des 97 comptes, notamment au sujetd'un compte à son nom auprès de la banque JULIUS BAER à Zurich, et dansl'annuaire catégoriel comme "haut fonctionnaire, conseiller budget cabinet
défense", ainsi que dans le tableau n°5 annexé à la note du 23 novembre 2003,
regroupant les "personnes d'horizons très divers" rémunérées par PhilippeDELMAS ; que ces documents ont été remis au Général RONDOT ; que ce mêmenom apparaît également dans le super-annuaire du 20 août 2004 et dans la liste des895 comptes clôturés le 12 mai précédent, documents adressés au juge RenaudVAN RUYMBEKE ; que cette dénonciation calomnieuse, reposant sur l'allégationde faits que ses auteurs, Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient fauxet sur l'utilisation en connaissance de cause de documents falsifiés, a causé un
préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir réparation ; qu'auvu des faits et des éléments d'appréciation soumis à l'examen du tribunal,
notamment la réitération des dénonciations et la situation professionnelle de lapartie civile exerçant, à l'époque des faits, de hautes fonctions au sein du ministèrede la Défense, le préjudice moral subi par celle-ci sera évalué à la somme de

10.000 euros ;
Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Alexandre JEVAKHOFF en

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sa constitution, régulière en la forme; qu'il convient de condamner solidairementJean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer à titre de dommages-
intérêts la somme de 10.000 euros et, chacun, une somme de 1.500 euros en
application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Georges KIEJMAN s'est constitué au cours de l'information, parlettre adressée aux juges d'instruction le 28 juin 2006 ; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer la sommed'un euro à titre de dommages-intérêts et la somme de 5.000 euros en applicationde l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il fait valoir dans ses écrituresqu'il a découvert dans le livre de Denis ROBERT, "CLEARSTREAM,
L'ENQUETE" que son nom avait été mentionné comme étant associé à un compteEUROCLEAR dans les documents remis au Général RONDOT ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de GeorgesKIEJMAN a été mentionné dans le listing des 97 comptes notamment un compteà son nom auprès de la Banque JULIUS BAER à Zurich ; que cette dénonciationcalomnieuse, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs, Jean-Louis
GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux et à l'aide de documents falsifiés,
a causé un préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir laréparation ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Georges KIEJMAN en saconstitution, régulière en la forme ; qu'il convient de condamner solidairementJean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer un euro symbolique à titrede dommages-intérêts et, chacun, une somme de 1.000 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'Alain MADELIN s'est constitué au cours de l'information, par lettreadressée aux juges d'instruction le 21 avril 2004 ; que par conclusions déposéeset régulièrement visées à l'audience du 13 octobre 2009, il a sollicité la
condamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique deVILLEPIN à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts etla somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ; qu'il fait notamment valoir que les faits dont il a été victime témoignentd'un mépris indicible de la part de leurs auteurs à l'égard de la réputation d'AlainMADELIN dont le nom a été porté sur la place publique dès le 8 juillet 2004 etdésigné ensuite nommément, et lui ont occasionné un préjudice considérableaccentué par le fait qu'il s'est vu nommé dans les actes d'investigations ultérieurset notamment dans une commission rogatoire internationale ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom d'AlainMADELIN a été mentionné dans le listing des 97 comptes, notamment au sujetd'un compte à son nom auprès de la Citibank International - Terra Nova, dansl'annuaire catégoriel comme "homme politique", ainsi que dans le tableau n°1
annexé à la note du 23 novembre 2003, regroupant les comptes clientsCLEARSTREAM attribués, selon la note, à l'initiative d'Alain GOMEZ à des
"parrains du milieu" dans le cadre de la "grande cooptation à la fois mafieuse et
affairiste" à laquelle il s'était livré en 1994 ; que ces documents ont été remis au

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Général RONDOT ; ce même nom apparaît dans le "super-annuaire" du 20 août2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent, documents
adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que cette dénonciation
calomnieuse, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs, Jean-Louis
GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux, et réalisée en connaissance de
cause sur la base de documents falsifiés, a causé un préjudice certain à la partiecivile qui est en droit d'en obtenir réparation ; qu'au vu des faits, de la réitérationdes dénonciations, et des éléments d'appréciation soumis à l'examen du tribunal,
le préjudice moral subi par Alain MADELIN sera évalué à la somme de 20.000
euros ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Alain MADELIN en saconstitution, régulière en la forme; qu'il convient de le débouter de ses demandesdirigées à l'encontre de Dominique de VILLEPIN en raison de la relaxe àintervenir, et de condamner solidairement Jean-Louis GERGORIN et Imad
LAHOUD à payer à la partie civile la somme de 20.000 euros à titre de
dommages-intérêts et, chacun, une somme de 1.500 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Jean-Charles MARCHIANI s'est régulièrement constitué au coursde l'information, par lettre adressée aux juges d'instruction le 3 août 2006; qu'àl'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité par l'intermédiaire de son conseil lacondamnation des prévenus à lui payer un euro symbolique à titre de dommages-
intérêts ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que son nom a étémentionné dans le listing des 97 comptes, notamment un compte à son nom à laChase Manhattan de Nassau à New-York, dans "l'annuaire catégoriel" et dans le
tableau n°1 annexé à la note du 23 novembre 2003, regroupant les comptes clientsCLEARSTREAM attribués, selon la note, à l'initiative d'Alain GOMEZ à des
"parrains du milieu" dans le cadre de la "grande cooptation à la fois mafieuse et
affairiste" à laquelle celui-ci s'était livré en 1994 ; que ce même nom apparaît dansle "super-annuaire" du 20 août 2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12mai précédent, ocuments adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que cesdénonciations calomnieuses, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs,
Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux, et commis à l'aide de
documents falsifiés, ont causé un préjudice certain à la partie civile qui est en droitd'en obtenir réparation ;

Attendu qu'il convient de recevoir Jean-Charles MARCHIANI en sa constitution,
régulière en la forme; qu'il convient également de faire droit à ses demandes et decondamner solidairement Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payerun euro symbolique à titre de dommages-intérêts ;

Attendu que Jean-Jacques MARTINI s'est constitué au cours de l'information,
par lettre adressée aux juges d'instruction le 3 août 2006; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique deVILLEPIN à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts etla somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure

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pénale; qu'il a fait valoir qu'à la suite de ces dénonciations il a été convoqué parson supérieur hiérarchique, Pierre de BOUSQUET, Directeur de la DST, que desmesures administratives avaient été envisagées à son encontre, qu'il a fait l'objetd'une enquête particulière du Général RONDOT allant jusqu'à contacter sescollègues suisses ; qu'il a par ailleurs subi un préjudice personnel et familial ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de Jean-
Jacques MARTINI a été mentionné dans le listing de 97 comptes, notamment ausujet d'un compte à son nom auprès de la Banque JULIUS BAER à Genève lié aucompte 9DTVU Euroclear, et dans l'annuaire catégoriel comme "chef service
patrimoine DST" , ainsi que dans le tableau n°4 annexé à la note du 23 novembre2003, récapitulant les comptes clients CLEARSTREAM attribués, selon la note,
à des "personnes travaillant pour le compte de la nation" et de "hauts
fonctionnaires de l'administration française dont une partie jouera un rôle crucialdans la tentative de déstabilisation du chef de l'Etat, Jacques Chirac", personnescooptées par Philippe DELMAS en 2000 ; que le compte lui ayant été faussementattribué (9DTVU) apparaît également dans les tableaux de transactions n°4 bis et5 bis et dans les extraits de la base "RESULT_EM_unk_trabsactions _data" et
"DS_PROD_ACCOUNT"; que ces documents ont été remis au Général
RONDOT ; que ce même nom apparaît dans le "super-annuaire" du 20 août 2004et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent, documents adressésau juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que ces dénonciations calomnieuses,
reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs, Jean-Louis GERGORIN et ImadLAHOUD, savaient faux, a causé un préjudice certain à la partie civile qui est endroit d'en solliciter la réparation ; qu'au vu des faits et des éléments d'appréciationsoumis à l'examen du tribunal, compte tenu de la multiplicité des dénonciationset des documents falsifiés portant son nom, des conséquences professionnellesimmédiates de cette mise en cause totalement infondée, le préjudice moral subi parJean-Jacques MARTINI sera évalué à la somme de 30.000 euros ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Jean-Jacques MARTINI en saconstitution, régulière en la forme; qu'il convient de rejeter les demandes forméesà l'encontre de Dominique de VILLEPIN en raison de la relaxe à intervenir à sonendroit, de condamner Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD solidairement
à lui payer 30.000 euros à titre de dommages-intérêts et, chacun, une somme de
1500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Bernard SQUARCINI s'est constitué au cours de l'information, parlettre adressée aux juges d'instruction le 22 mai 2006 ; que par conclusionsdéposées et régulièrement visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et Dominique deVILLEPIN à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts etla somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ; qu'il a fait valoir qu'à l'époque des faits il était Inspecteur Général de laPolice Nationale et n°2 de la Direction Centrale des Renseignements Généraux,
qu'il s'est avéré qu'à la suite de sa dénonciation, des enquêtes ont été menées sursa vie privée à son insu au sein de la fonction publique, qu'il en est résulté uneatteinte grave à son honneur, à sa considération et à sa réputation, accentuée parl'impact médiatique qu'a connu cette affaire ; qu'il a subi également un préjudicepersonnel et familial ;

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Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de BernardSQUARCINI a été mentionné dans le listing de 97 comptes, notamment uncompte de type RMBA C2059 à son nom, et dans l'annuaire catégoriel comme"directeur adjoint des RG" ainsi que dans le tableau n°4 annexé à la note du 23novembre 2003, récapitulant les comptes clients CLEARSTREAM attribués, selonla note, à des "personnes travaillant pour le compte de la nation" et de "hauts
fonctionnaires de l'administration française dont une partie jouera un rôle crucialdans la tentative de déstabilisation du chef de l'Etat, Jacques Chirac", personnescooptées par Philippe DELMAS en 2000 ; que ces documents ont été remis auGénéral RONDOT ; que ce même nom apparaît dans le "super-annuaire" du 20août 2004 et dans la liste des 895 comptes clôturés le 12 mai précédent,
documents adressés au juge Renaud VAN RUYMBEKE ; que ces dénonciationscalomnieuses, reposant sur l'allégation de faits que ses auteurs, Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux et rendues possibles par l'usage enconnaissance de cause de documents falsifiés, a causé un préjudice certain, tout àla fois professionnel, familial et personnel, à la partie civile qui est, dès lors, endroit d'en obtenir réparation ; qu'au vu des éléments d'appréciation soumis àl'examen du tribunal, compte tenu de la multiplicité des dénonciations et desdocuments qui en sont le support, ainsi que de la situation personnelle de lavictime, le préjudice moral subi par Bernard SQUARCINI sera évalué à la sommede 15.000 euros ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Bernard SQUARCINI en saconstitution, régulière en la forme ; qu'il convient de débouter la partie civile deses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de Dominique de
VILLEPIN du fait de la relaxe à intervenir, de condamner solidairement Jean-
Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer 15.000 euros à titre dedommages-intérêts et, chacun, une somme de 1.500 euros en application del'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que Pierre PASQUA s'est régulièrement constitué au cours del'information, par lettre adressée aux juges d'instruction le 18 mai 2006 ; que parconclusions déposées et visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité la
condamnation solidaire des prévenus à lui payer un euro symbolique et la sommede 15.000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de PierrePASQUA a été mentionné dans le listing des 97 comptes, comme disposant d'uncompte 81409 chez CLEARSTREAM en relation avec un autre compte à labanque BERMUDA TRUST à St Hellier (Jersey), qu'il apparaît également dansl'annuaire catégoriel comme "fils d'un homme politique", que ces documents ontété remis au général RONDOT ; que ce même nom apparaît faussement dans laliste des 895 comptes CLEARSTREAM clôturés le 12 mai 2004 , dans le "superannuaire"
du 20 août 2004 et dans le CD-ROM du 4 octobre 2004 comme ayantbénéficié d'un versement de 100.000 euros en provenance du compte de PhilippeDELMAS ; que ces dénonciations calomnieuses, reposant sur l'allégation de faitsque ses auteurs, Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD, savaient faux, a causéun préjudice certain à la partie civile qui est en droit d'en obtenir réparation ;

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Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Pierre PASQUA en saconstitution, régulière en la forme, et de condamner solidairement Jean-LouisGERGORIN et Imad LAHOUD à lui payer un euro symbolique et , chacun, unesomme de 1.500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédurepénale ;

Attendu que Charles PASQUA s'est régulièrement constitué au cours del'information, par lettre adressée aux juges d'instruction le 10 mai 2006 ; que parconclusions déposées et visées à l'audience du 19 octobre 2009, il a sollicité lacondamnation solidaire de Jean-Louis GERGORIN, Imad LAHOUD et
Dominique de VILLEPIN à lui payer un euro symbolique et la somme de 15.000euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'il soutientqu'à travers son fils, Pierre PASQUA, c'est lui que l'on voulait atteindre, que sonnom a été cité à de multiples reprises au cours des entretiens entre les différentsprotagonistes de cette affaire et notamment lors de la réunion du 9 janvier 2004 ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de CharlesPASQUA n'est apparu sur aucun des supports des dénonciations et que seul celuide son fils y figure ; qu'il s'ensuit que les délits de faux, usage de faux etdénonciations calomnieuses dont le tribunal est saisi ne l'ont pas visé directement ;
qu'en dépit de son lien de parenté avec Pierre PASQUA, par ailleurs précisé dansl'annuaire catégoriel, il ne saurait être considéré comme victime des agissementsd'Imad LAHOUD et Jean-Louis GERGORIN ; que de surcroît, il ne justifie pasde l'atteinte morale à sa personne qui pourrait fonder ses demandes ; que, faute dedémontrer un préjudice personnel directement lié aux faits reprochés auxprévenus, Charles PASQUA devra être débouté de l'ensemble de ses demandes ;

Attendu que Valentine de LASTEYRIE du SAILLANT, Laure de
LASTEYRIE du SAILLANT épouse BAUBIGEAT et Etienne de
LASTEYRIE du SAILLANT se sont constitués , venant aux droits en qualitéd'héritiers de leur père décédé Hughes de LASTEYRIE du SAILLANT, lui-mêmerégulièrement constitué au cours de l'information, par lettre adressée aux jugesd'instruction le 13 janvier 2007 ; que par conclusions déposées et régulièrementvisées à l'audience du 19 octobre 2009, ils ont sollicité la condamnation de Jean-
Louis GERGORIN, Imad LAHOUD, Denis ROBERT, Florian BOURGES et
Dominique de VILLEPIN à leur payer la somme totale de 75.000 euros à titre dedommages-intérêts et la somme de 15.000 euros en application de l'article 475-1du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il est ressorti de l'information et des débats que le nom de Hughes deLASTEYRIE du SAILLANT a été mentionné sur les tableaux de transactions
extraits du CD-ROM reçu par le juge Renaud VAN RUYMBEKE le 4 octobre2004 ; qu'il y apparaît comme étant titulaire d'un compte ayant bénéficié deversements de la part du compte 03778 de Philippe DELMAS à hauteur de

150.000 euros ; que ces mouvements ont été mis en lien avec l'ensemble dusystème en place, selon les dénonciateurs, aux fin de blanchiment de l'argent sale ;
que cette dénonciation calomnieuse, reposant sur l'allégation de faits que sesauteurs savaient faux et réalisée en connaissance de cause à partir de documentsfalsifiés, a causé un préjudice certain à Hughes de LASTEYRIE du SAILLANT ;
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qu'en considération des faits et des éléments d'appréciation soumis à l'examen dutribunal, notamment l'impact que ces agissements ont eu, du vivant de la victime,
sur son état psychologique déjà fragilisé, le tribunal est en mesure d'évaluer lepréjudice, dont les héritiers d'Hughes de LASTEYRIE du SAILLANT sontaujourd'hui en droit de demander réparation, à la somme globale de 8.000 euros ;

Attendu qu'il convient en conséquence de recevoir Valentine de LASTEYRIE duSAILLANT, Laure de LASTEYRIE du SAILLANT épouse BAUBIGEAT etEtienne de LASTEYRIE du SAILLANT en leur constitution, régulière en laforme ; qu'il convient de les débouter de leurs demande dirigées à l'encontre deFlorian BOURGES qui s'est rendu coupable des seuls faits d'abus de confiancedistincts de ceux qui sont à l'origine du préjudice allégué, ainsi que de DenisROBERT et Dominique de VILLEPIN du fait de leur relaxe, et de condamnersolidairement Jean-Louis GERGORIN et Imad LAHOUD à leur payer une sommeglobale de 8.000 euros à titre de dommages-intérêts et, chacun, à l'ensemble desparties civiles, une somme de 1.000 euros en application de l'article 475-1 du codede procédure pénale ;

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PAR CES MOTIFS


Le tribunal statuant publiquement, en matière correctionnelle, en premier ressort
et
par jugement contradictoire à l' encontre de Monsieur Jean Louis GERGORIN,
Monsieur Imad LAHOUD, Monsieur Florian BOURGES, Monsieur Denis
ROBERT, Monsieur Dominique GALOUZEAU de VILLEPIN, prévenus ;
par jugement contradictoire à l' égard deMonsieur Dominique AMBIEL, Monsieur Nadhmi AUCHI, Société BARBIERFRINAULT & ASSOCIES, Monsieur Dominique BAUDIS, Monsieur FabienBAUSSARD, Monsieur Pierre CHARON, Monsieur Jean Pierre
CHEVENEMENT, Monsieur Alain CHOUET, Société CLEARSTREAM
BANKING, Société CLEARSTREAM INTERNATIONAL, Monsieur Etienne
de LASTEYRIE du SAILLANT, Madame Laure de LASTEYRIE du
SAILLANT épouse BAUBIGEAT, Mademoiselle Valentine de LASTEYRIE duSAILLANT, Monsieur Alain DE WULF, Monsieur Philippe DELMAS, SociétéEADS FRANCE, Société EDITIONS ODILE JACOB, Monsieur Gilbert
FLAM, Monsieur Jacques FRANQUET, Monsieur Patrick GAUBERT,
Monsieur Alain GENITEAU, Monsieur Alain GOMEZ, Monsieur François
GONTIER, Monsieur Brice HORTEFEUX, Madame Odile JACOB, Monsieur
Alexandre JEVAKHOFF, Monsieur Georges KIEJMAN, Monsieur Alain
MADELIN, Monsieur Jean-Charles MARCHIANI, Monsieur Pierre
MARTINEZ, Monsieur Jean-Jacques MARTINI, Monsieur Charles PASQUA,
Monsieur Pierre PASQUA, Monsieur Edwy PLENEL, Monsieur Nicolas
SARKOZY, Monsieur Bernard SQUARCINI,
Monsieur Jacques BIDALOU, Madame Cécilia DECATOIRE, Société
BARMONT, Monsieur Jean GALLI-DOUANI, Monsieur Gérard
PRELORENZO, Monsieur Joël BOUARD, l'Association HCCDA (Halte à laCensure, à la Corruption, Au Despostisme et à l' Autoritarisme), MonsieurArcadi GAYDAMAK, parties civiles ;

par jugement contradictoire à signifier article 410 du CPP à l' égard de
Christian GIACOMOTTO, partie civile ;

par jugement défaut en application de l'article 425 du CPP à l' égard deMonsieur Laurent FABIUS, Monsieur Philippe GUGLIELMI, Monsieur AlainGUILLOUX, Monsieur Jean-François HENIN, Monsieur Patrick OLLIER,
Monsieur Dominique STRAUSS-KAHN, parties civiles ;

SUR L'ACTION PUBLIQUE :


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REJETTE les exceptions de nullité et d' incompétence du tribunal soulevées parla défense de Florian BOURGES.

DONNE ACTE à la défense de Denis ROBERT de son désistement de ses
exceptions de nullité.

REJETTE partiellement les exceptions de nullité soulevées par la défense deDominique GALOUZEAU de VILLEPIN et écarte des débats les pièces cotéesD153 et 157 issues du dossier d'information ouvert sous le n°071296013.

REJETTE les exceptions de nullité soulevées par la défense de Jean-LouisGERGORIN

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DECLARE Florian, Mikael, Cédric BOURGES COUPABLE pour les faits
qualifiés de :

TABUS DE CONFIANCE, au préjudice des sociétés de droit luxembourgeois
CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL.
faits commis courant 2001 à 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Luxembourg, Neuilly sur Seine, Courbevoie et Paris, en tout
cas sur le territoire national.

REQUALIFIE les faits de VOL reprochés à Monsieur Florian BOURGES enABUS DE CONFIANCE, ainsi qu'il est dit dans les motifs.

DECLARE Florian, Mikael, Cédric BOURGES COUPABLE pour les faits
qualifiés de :

TABUS DE CONFIANCE, au préjudice de la société BARBIER FRINAULT ET
ASSOCIES.
faits commis courant 2001 à 2004, et depuis temps non couvert par la
prescription, à Neuilly sur Seine et Paris, en tout cas sur le territoire national.

Vu les articles susvisés :

CONDAMNE Florian, Mikael, Cédric BOURGES à 4 mois
d'emprisonnement.

Vu les articles 132-29 à 132-34 du Code pénal :

DIT qu' il sera sursis totalement à l' exécution de cette peine dans les conditions
prévues par ces articles.

Et aussitôt, le président, suite à cette condamnation assortie du sursis simple, adonné l' avertissement, prévu à l' article 132-29 du Code pénal, au condamné que

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s' il commet une nouvelle infraction, il pourra faire l' objet d' une condamnationqui sera susceptible d' entraîner l' exécution de la première peine sans confusionavec la seconde et qu' il encourra les peines de la récidive dans les termes desarticles 132-9 et 132-10 du Code pénal.

Le prévenu présent à l' audience est informé de la possibilité pour la partiecivile, non éligible à la CIVI, de saisir le SARVI s' il ne procède pas aupaiement des dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans le délai de 2mois courant à compter du jour où la décision est devenue définitive.

A titre de peine complémentaire :

ORDONNE la confiscation des scellés.

*****

DECLARE Denis, Roger, Yvon ROBERT NON COUPABLE et le
RENVOIE des fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :

TRECEL DE BIEN OBTENU A L' AIDE D' UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice des sociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL.
faits commis courant 2001 à 2006, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Châtel Saint Germain et Metz (57), en tout cas sur le territoirenational.

TRECEL DE VOL, au préjudice de la société BARBIER FRINAULT ET ASSOCIES.
faits commis courant 2001 à 2006, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Châtel Saint Germain et Metz (57), en tout cas sur le territoirenational.

*****

DÉCLARE Jean Louis GERGORIN COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TDÉNONCIATION CALOMNIEUSE, pour les faits dénoncés à M. Renaud VAN
RUYMBEKE
faits commis entre mai et octobre 2004, en tout cas depuis temps non couvert
par la prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

TDÉNONCIATION CALOMNIEUSE, pour les faits dénoncés au Général Philippe
RONDOT
faits commis courant octobre et novembre 2003, en tout cas depuis temps non
couvert par la prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

o

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Jugement n•
1

DÉCLARE Jean-Louis GERGORIN NON COUPABLE et le RENVOIE des
fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :

TFAUX: ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN
ECRIT, pour les envois à M. Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2003 et 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Jean-Louis GERGORIN COUPABLE des faits qualifiés de :

TUSAGE DE FAUX EN ECRITURE, pour les envois à M. Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2003 et 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Jean-Louis GERGORIN NON COUPABLE et le RENVOIE des
fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :

TFAUX: ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN
ECRIT, pour les envois au Général Philippe RONDOT
faits commis courant 2003, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Jean-Louis GERGORIN COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TUSAGE DE FAUX EN ECRITURE, pour les envois au Général Philippe RONDOT
faits commis courant 2003, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Jean-Louis GERGORIN COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TRECEL DE BIEN OBTENU A L' AIDE D' UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice des sociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL
faits commis courant 2003 à 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

REQUALIFIE les faits de RECEL DE BIEN PROVENANT D'UN VOL
reprochés à Jean-Louis GERGORIN en RECEL DE BIEN OBTENU A L'AIDED'UN ABUS DE CONFIANCE, ainsi qu'il est dit dans les motifs.

DECLARE Jean-Louis GERGORIN COUPABLE des faits de :

o

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Jugement n•
1

TRECEL DE BIEN OBTENU A L'AIDE D'UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice de la société BARBIER FRINAULT ET ASSOCIES
faits commis courant 2003 à 2004, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

Vu les articles susvisés :

CONDAMNE Jean Louis GERGORIN à 3 ANS D'EMPRISONNEMENT.

Vu les articles 132-40, 132-41 et 132-42 du Code pénal :

DIT QU'IL SERA SURSIS POUR UNE DURÉE DE 21 MOIS, ÀL'EXÉCUTION DE CETTE PEINE, AVEC MISE A L'EPREUVE, dans
les conditions prévues par les articles 132-43 et 132-44 de ce même code.

FIXE LE DÉLAI D'ÉPREUVE À 3 ANS.

YVu l' article 132-45 5•
du Code pénal :

OBLIGE Jean Louis GERGORIN à justifier de l'acquittement des sommes dues
aux victimes.

Et aussitôt, le président, suite à cette condamnation assortie du sursis avec miseà l' épreuve, a donné l' avertissement, prévu par l' article 132-40 du Code pénalà savoir :

-s' il n' a pas satisfait aux mesures de contrôle et aux obligations particulières,
il encourt la révocation du sursis accordé ce jour en application de l' article 13247
du Code pénal;
- s' il commet une nouvelle infraction pendant le délai lié au sursis mise àl' épreuve, il pourra faire l' objet d' une nouvelle condamnation qui sera
susceptible d' entraîner la révocation du sursis accordé ce jour en application del' article 132-48 du Code pénal;
- à l' inverse, en application des articles 132-47 et 132-53, il a la possibilité devoir déclarer sa condamnation non avenue en observant une parfaite conduite.
Vu les articles susvisés :

CONDAMNE JEAN-LOUIS GERGORIN À UNE AMENDE
DÉLICTUELLE DE QUARANTE MILLE EUROS (40 000 EUROS).

Le prévenu présent à l' audience est informé de la possibilité pour la partie

o

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civile, non éligible à la CIVI, de saisir le SARVI s' il ne procède pas aupaiement des dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans le délai de 2mois courant à compter du jour où la décision est devenue définitive.

A titre de peine complémentaire :

ORDONNE la confiscation des scellés.

*****

REQUALIFIE les faits de DÉNONCIATION CALOMNIEUSE reprochés àImad LAHOUD en COMPLICITÉ par aide ou assistance DE DÉNONCIATIONCALOMNIEUSE, ainsi qu'il est dit dans les motifs.

DÉCLARE Imad LAHOUD COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TComplicité par aide ou assistance de DÉNONCIATION CALOMNIEUSE,
pour les faits dénoncés à M. Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis entre mai et octobre 2004, en tout cas depuis temps non couvert
par la prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

TComplicité par aide ou assistance de DÉNONCIATION CALOMNIEUSE,
pour les faits dénoncés au Général RONDOT
faits commis courant octobre et novembre 2003, en tout cas depuis temps non
couvert par la prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Imad LAHOUD COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TFAUX : ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN
ECRIT, pour les envois à M. Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2003 et 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Imad LAHOUD NON COUPABLE et le RENVOIE des fins de
la poursuite pour les faits qualifiés de :

TUSAGE DE FAUX EN ECRITURE, pour les envois à M. Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2003 et 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

Jugement n•
1

o

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Jugement n•
1

DECLARE Imad LAHOUD COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TFAUX: ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN
ECRIT, pour les envois au Général Philippe RONDOT
faits commis courant 2003, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

TUSAGE DE FAUX EN ECRITURE, pour les envois au Général Philippe RONDOT
faits commis courant 2003, et depuis temps non couvert par la prescription, à
Paris, en tout cas sur le territoire national.

DECLARE Imad LAHOUD COUPABLE pour les faits qualifiés de :

TRECEL DE BIEN OBTENU A L' AIDE D' UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice des sociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL
faits commis courant 2003 à 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, Courbevoie (92), Metz (57), en tout cas sur le territoire
national.

REQUALIFIE les faits de RECEL DE VOL reprochés à Imad LAHOUD enRECEL DE BIEN OBTENU A L'AIDE D'UN ABUS DE CONFIANCE, ainsi
qu'il est dit dans les motifs.

DECLARE Imad LAHOUD COUPABLE des faits de :

TRECEL DE BIEN OBTENU A L'AIDE D'UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice de la société BARBIER FRINAULT ET ASSOCIES
faits commis courant 2003 à 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la
prescription, à Paris, Courbevoie (92), Metz (57), en tout cas sur le territoire
national.

Vu les articles susvisés :

CONDAMNE IMAD LAHOUD À 3 ANS D'EMPRISONNEMENT.

Vu les articles 132-40, 132-41 et 132-42 du Code pénal :

DIT QU'IL SERA SURSIS POUR UNE DURÉE DE 18 MOIS, À
L'EXÉCUTION DE CETTE PEINE, AVEC MISE A L'EPREUVE, dans
les conditions prévues par les articles 132-43 et 132-44 de ce même code.

o

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Jugement n•
1

FIXE LE DÉLAI D'ÉPREUVE À 3 ANS.

YVu l' article 132-45 5•
du Code pénal :

OBLIGE Imad LAHOUD à justifier de l'acquittement des sommes dues aux
victimes.

Et aussitôt, le président, suite à cette condamnation assortie du sursis avec miseà l' épreuve, a donné l' avertissement, prévu par l' article 132-40 du Code pénalà savoir :

-s' il n' a pas satisfait aux mesures de contrôle et aux obligations particulières,
il encourt la révocation du sursis accordé ce jour en application de l' article 13247
du Code pénal;
- s' il commet une nouvelle infraction pendant le délai lié au sursis mise àl' épreuve, il pourra faire l' objet d' une nouvelle condamnation qui sera
susceptible d' entraîner la révocation du sursis accordé ce jour en application del' article 132-48 du Code pénal;
- à l' inverse, en application des articles 132-47 et 132-53, il a la possibilité devoir déclarer sa condamnation non avenue en observant une parfaite conduite.
Vu les articles susvisés :

CONDAMNE IMAD LAHOUD À UNE AMENDE DÉLICTUELLE DE
QUARANTE MILLE EUROS (40.000 EUROS).

Le prévenu présent à l' audience est informé de la possibilité pour la partiecivile, non éligible à la CIVI, de saisir le SARVI s' il ne procède pas aupaiement des dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans le délai de 2mois courant à compter du jour où la décision est devenue définitive.

A titre de peine complémentaire :

ORDONNE la confiscation des scellés.

*****

DECLARE Dominique GALOUZEAU de VILLEPIN NON COUPABLE et
le RENVOIE des fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :

Tcomplicité de DENONCIATION CALOMNIEUSE, pour les faits dénoncés à M.
Renaud VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2004, en tout cas depuis temps non couvert par la

o

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Jugement n•
1

prescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

Tcomplicité de USAGE DE FAUX EN ECRITURE, pour les envois à M. Renaud
VAN RUYMBEKE
faits commis courant 2004, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

TRECEL DE BIEN OBTENU A L' AIDE D' UN ABUS DE CONFIANCE, au
préjudice des sociétés CLEARSTREAM BANKING et CLEARSTREAM INTERNATIONAL
faits commis courant 2004, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

TRECEL DE VOL, au préjudice de la société BARBIER FRINAULT ET ASSOCIES
faits commis courant 2004, en tout cas depuis temps non couvert par laprescription, à Paris, en tout cas sur le territoire national.

*****

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de90 euros dont sont redevables les condamnés.

Le président avise Monsieur Florian BOURGES, Monsieur Imad LAHOUD etMonsieur Jean-Louis GERGORIN que s'ils s'acquittent du montant du droit fixede procédure et/ou du montant de l'amende dans un délai d'un mois à compterde la date à laquelle cette décision a été prononcée, ce montant sera minoré de20% sans que cette diminution puisse excéder 1.500 euros conformément auxarticles 707-2 et 707-3 du code de procédure pénale. Le président les informeen outre que le paiement de l'amende et du droit fixe de procédure ne fait pasobstacle à l'exercice des voies de recours.

Dans le cas d'une voie de recours contre les dispositions pénales, il appartientaux intéressés de demander la restitution des sommes versées.

*****

SUR L'ACTION CIVILE :

CONSTATE LE DÉSISTEMENT PRÉSUMÉ de la constitution de partie
civile de Monsieur Dominique STRAUSS-KAHN.

***

CONSTATE LE DÉSISTEMENT PRÉSUMÉ de la constitution de partie
civile de Monsieur Jean-François HENIN.

o

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Jugement n•
1

***


CONSTATE LE DÉSISTEMENT EXPRÈS de la constitution de partie civile
de Monsieur Patrick OLLIER.

***

CONSTATE LE DESISTEMENT EXPRÈS de la constitution de partie civile
de M. Laurent FABIUS.

***

CONSTATE LE DÉSISTEMENT EXPRÈS de la constitution de partie civile
de M Philippe GUGLIELMI.

***

CONSTATE LE DÉSISTEMENT EXPRÈS de la constitution de partie civile
de Monsieur Alain GUILLOUX.

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur Gérard
PRELORENZO.

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur Joël
BOUARD.

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de l'association HCCDA
(Halte à la Censure, à la Corruption, Au Despostisme et à l' Autoritarisme).

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Madame Cécilia
DECATOIRE.

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de la société
BARMONT.

***
DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur Jean
GALLI-DOUANI.

***

DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur Jacques

o

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1

BIDALOU.


***


DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur Pierre
CHARON.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Brice HORTEFEUX.

DÉBOUTE Monsieur Brice HORTEFEUX de ses demandes.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de la société
CLEARSTREAM BANKING.


CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN, Monsieur
Imad LAHOUD et Monsieur Florian BOURGES, à payer à CLEARSTREAM
BANKING, partie civile, la somme de CINQUANTE MILLE EUROS (50.
000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 euros) chacun au titre
de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.


***

DÉCLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de la société
CLEARSTREAM INTERNATIONAL.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN, Monsieur
Imad LAHOUD et Monsieur Florian BOURGES, à payer à CLEARSTREAMINTERNATIONAL, partie civile, la somme de UN EURO (1 euro) à titre de
dommages-intérêts.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de la société
BARBIER FRINAULT & ASSOCIES.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD et Monsieur Florian BOURGES, à payer à la société
BARBIER FRINAULT & ASSOCIES, partie civile, la somme de HUIT
MILLE EUROS (8.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE la société BARBIER FRINAULT & ASSOCIES de ses demande à
l'encontre de Monsieur Denis ROBERT.

***

o

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1

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Nicolas SARKOZY.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Nicolas SARKOZY, partie civile, la
somme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts.

DEBOUTE Monsieur Niclas SARKOZY de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de la société
SOCIÉTÉ EADS FRANCE.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à la SOCIÉTÉ EADS FRANCE, partie civile, lasomme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Madame
Odile JACOB.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Madame Odile JACOB, partie civile, la somme deUN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,

DEBOUTE la SOCIÉTÉ EDITIONS ODILE JACOB de ses demandes à
l'encontre de Monsieur Denis ROBERT et de Monsieur Florian BOURGES.

***
DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de SOCIÉTÉ
EDITIONS ODILE JACOB.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à la SOCIÉTÉ EDITIONS ODILE JACOB, partiecivile, la somme de DIX MILLE EUROS (10.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE la SOCIÉTÉ EDITIONS ODILE JACOB de ses demandes à
l'encontre de Monsieur Denis ROBERT et de Monsieur Florian BOURGES.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Philippe DELMAS.

o

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1

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Philippe DELMAS, partie civile, la
somme de TROIS CENT CINQUANTE MILLE EUROS (350.000 euros) à
titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de SEPT MILLE CINQ CENTS EUROS (7.500 euros)
chacun au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.


DEBOUTE Monsieur Philippe DELMAS de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN.


***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Alain GOMEZ.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Alain GOMEZ, partie civile, la somme deQUATRE VINGT MILLE EUROS (80.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de CINQ MILLE EUROS (5.000 euros) chacun au titre
de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Alain GOMEZ de ses demandes à l'encontre de Monsieur
Dominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Pierre MARTINEZ.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Pierre MARTINEZ, partie civile, la
somme de CINQUANTE MILLE EUROS (50.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de CINQ MILLE EUROS (5.000 euros) chacun au titre
de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Pierre MARTINEZ de ses demandes à l'encontre de
Dominique De VILLEPIN, Florian BOURGES et Monsieur Denis ROBERT.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Christian GIACOMOTTO.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Christian GIACOMOTTO, partie civile,
la somme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts.

***

o

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1

DONNE acte à Monsieur Alain CHOUET de sa constitution de partie civile
qui est recevable.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Alain GENITEAU.


CONDAMNE solidairement M Jean Louis GERGORIN, M Imad LAHOUD,
à payer à M Alain GENITEAU, partie civile, la somme de UN EURO (1 euro)
à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.


***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Arcadi GAYDAMAK.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Arcadi GAYDAMAK, partie civile, la
somme de CINQ MILLE EUROS (5.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de CINQ CENTS EUROS (500 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Arcadi GAYDAMAK de ses demandes à l'encontre de
Dominique De VILLEPIN, Monsieur Florian BOURGES et Monsieur DenisROBERT.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Nadhmi AUCHI.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Nadhmi AUCHI, partie civile, la sommede SIX MILLE EUROS (6.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de CINQ CENTS EUROS (500 euros) chacun au titre de
l'article 475-1 du code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Nadhmi AUCHI de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN, Monsieur Florian BOURGES et MonsieurDenis ROBERT.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Dominique AMBIEL.

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CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Dominique AMBIEL, partie civile, lasomme de HUIT MILLE EUROS (8.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Dominique BAUDIS.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Dominique BAUDIS, partie civile, lasomme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de SIX CENTS EUROS (600 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Fabien BAUSSARD.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Fabien BAUSSARD, partie civile, lasomme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de SIX CENTS EUROS (600 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Fabien BAUSSARD de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN, Monsieur Florian BOURGES et MonsieurDenis ROBERT.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Jean-Pierre CHEVENEMENT.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Jean Pierre CHEVENEMENT, partiecivile, la somme de VINGT MILLE EUROS (20.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENT EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Jean-Pierre CHEVENEMENT de ses demandes à
l'encontre de Monsieur Dominique De VILLEPIN.

***

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Jugement n•
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DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Alain DE WULF.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Alain DE WULF, partie civile, la sommede UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Alain DE WULF de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Florian BOURGES.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Gilbert FLAM.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Gilbert FLAM, partie civile, la somme deTRENTE MILLE EUROS (30.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENT EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Edwy PLENEL.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Edwy PLENEL, partie civile, la sommede QUINZE MILLE EUROS (15.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Jacques FRANQUET.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Jacques FRANQUET, partie civile, lasomme de DIX MILLE EUROS (10.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Jacques FRANQUET de ses demandes à l'encontre deDominique De VILLEPIN.

***

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1

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Patrick GAUBERT.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Patrick GAUBERT, partie civile, la
somme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Patrick GAUBERT de ses demandes à l'encontre de
Dominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
François GONTIER.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur François GONTIER, partie civile, la
somme de DIX MILLE EUROS (10.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Alexandre JEVAKHOFF.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Alexandre JEVAKHOFF, partie civile, lasomme de DIX MILLE EUROS (10.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Georges KIEJMAN.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Georges KIEJMAN, partie civile, la
somme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

***

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Jugement n•
1

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Alain MADELIN.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Alain MADELIN, partie civile, la sommede VINGT MILLE EUROS (20.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Alain MADELIN de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Jean-Charles MARCHIANI.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Jean-Charles MARCHIANI, partie civile,
la somme de UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts.

DEBOUTE Monsieur Jean-Charles MARCHIANI de ses demandes à l'encontre
de Monsieur Dominique De VILLEPIN, Monsieur Florian BOURGES et
Monsieur Denis ROBERT.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Jean-Jacques MARTINI.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Jean-Jacques MARTINI, partie civile, la
somme de TRENTE MILLE EUROS (30.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Jean-Jacques MARTINI de ses demandes à l'encontre deDominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Bernard SQUARCINI.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Bernard SQUARCINI, partie civile, la
somme de QUINZE MILLE EUROS (15.000 euros) à titre de
dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

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Jugement n•
1

DEBOUTE Monsieur Bernard SQUARCINI de ses demandes à l'encontre de
Dominique De VILLEPIN.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Pierre PASQUA.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Monsieur Pierre PASQUA, partie civile, la sommede UN EURO (1 euro) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) chacun
au titre de l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Monsieur Pierre PASQUA de ses demandes à l'encontre de
Monsieur Dominique De VILLEPIN, Monsieur Florian BOURGES et de
Monsieur Denis ROBERT.

***

DÉCLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de Monsieur
Charles PASQUA.

DÉBOUTE Monsieur Charles PASQUA de ses demandes.

***

DECLARE recevable, en la forme, la constitution de partie civile de

Mademoiselle Valentine de LASTEYRIE du SAILLANT, Monsieur Etienne
de LASTEYRIE du SAILLANT et Madame Laure de LASTEYRIE du
SAILLANT épouse BAUBIGEAT.

CONDAMNE solidairement Monsieur Jean-Louis GERGORIN et Monsieur
Imad LAHOUD, à payer à Mademoiselle Valentine de LASTEYRIE du
SAILLANT, Monsieur Etienne de LASTEYRIE du SAILLANT et Madame
Laure de LASTEYRIE du SAILLANT épouse BAUBIGEAT, parties civiles, lasomme de HUIT MILLE EUROS (8.000 euros) à titre de dommages-intérêts,
et en outre la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) chacun au titre de
l' article 475-1 du Code de procédure pénale.

DEBOUTE Mademoiselle Valentine de LASTEYRIE du SAILLANT, Monsieur
Etienne de LASTEYRIE du SAILLANT et Madame Laure de LASTEYRIE du
SAILLANT épouse BAUBIGEAT de leurs demandes à l'encontre de MonsieurDominique De VILLEPIN, de Monsieur Florian BOURGES et Monsieur DenisROBERT.

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Jugement n•
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A l'audience les 21, 22, 23, 28, 29 et 30 septembre 2009, 5, 6, 7, 12, 13, 14,19, 20, 21, 22 et 23 octobre 2009, 11ème chambre 3ème section, le tribunal était
composé de :

Président :
Monsieur Dominique PAUTHE, vice-président

Assesseurs :
Madame Cécile LOUIS-LOYANT vice-présidentMadame Virginie TILMONT juge

Assesseur supplémentaire :
Monsieur Serge TOURNAIRE, vice-président chargédes fonctions de l'instruction, conformément à
l'Ordonnance de Monsieur le Président du tribunal de
grande instance de Paris, Monsieur Jacques
DEGRANDI, en date du 21 septembre 2009.

Ministère Public :
Monsieur Jean-Claude MARIN, procureur de laRépublique près le Tribunal de Grande Instance de ParisMonsieur Romain VICTOR, vice-procureur de la
République

Greffier : Mademoiselle Sandrine LAVAUD greffier
Greffier supplémentaire : Madame Gaëlle BOURGEOIS, greffier supplémentaire

Fait, jugé et délibéré par :

Président : Monsieur Dominique PAUTHE, vice-président
Assesseurs : Madame Cécile LOUIS-LOYANT vice-présidentMadame Virginie TILMONT juge

et prononcé à l'audience du 28 janvier 2010, de la 11ème chambre 3ème section
du tribunal, de grande instance de Paris, par Monsieur Dominique PAUTHEvice-président, en présence de Madame Cécile LOUIS-LOYANT, vice-présidentet de Madame Marina INGELMAN, juge et de Monsieur Jean-Claude MARIN,
Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris et deMonsieur Romain VICTOR, vice-procureur de la République, et assisté deMademoiselle Sandrine LAVAUD greffier.

LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT

CE DOCUMENT N'EST PAS LA COPIE CERTIFIÉE
CONFORME DU JUGEMENT


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